𝐒𝐄𝐈𝐙𝐈È𝐌𝐄 𝐏𝐀𝐑𝐓𝐈𝐄
Malgré l'agitation dans les coins des rues, la nuit, gardait de sa douceur imprégnée d'une légère humidité due à une petite averse.
Le disque de lune illuminait désormais le ciel sombre de Royal Blood comme de pierres précieuses. La nouvelle s'est répandue comme une traînée de poussière à travers le Continent. Ce qui semblait être une légende s'est avéré être la vérité à ces jours, un Noble venait d'apparaître, aussi étrange et dangereux cette découverte pouvait-elle être, cependant la curiosité chassait en un souffle toute frayeur...
Le Continent a donc été agité dans une frénésie constante durant les dernières journées qui ont précédé la venue du Noble. Jungkook.
La porte de la chambre de Jungkook s'ouvrit alors que ce dernier somnolait encore silencieusement dans son lit. Un vieil homme s'approcha du chevet, se baissant légèrement. Ses traits, déformés par la vieillesse, se tirèrent en une grimace, il avait des cheveux longs lui arrivant au-dessus de la taille, blancs comme neige. Il tenait fermement son bâton dans sa main.
Le vieil homme distinguait à peine le visage d'un Jungkook immobile grâce à la faible lueur de la lampe suspendu au coin de la pièce, à quelques pas de la porte.
— Il est beaucoup trop jeune pour son âge. Sa voix était dure, ferme, témoignant de son sérieux.
La netteté de son ton frappa la conscience de Jimin qui luttait afin de ne pas douter de sa décision.
— S'il lui a été accordé un tel destin, c'est qu'il doit valoir qu'on en prenne soin.
Le vieil homme se redressa puis grogna, dans son ton Jimin pu y déceler un mécontentement absolu.
— Ceux de son espèce sont créés dans un seul but. J'espère que vous avez conscience de ce que vous faites.
— Je vous ai fait appeler pour voir s'il se porte bien, le reste ne vous concerne pas.
— Il n'y a rien de très sérieux qui doit vous alarmer, laissez-le simplement se reposer. Et soyez prudent de la lune rouge, on dit qu'elle les possède afin qu'ils cèdent à leur pulsion les plus enfouie.
Dans la pénombre voûtée de la pièce, gardant ses bras croisés, Jimin plissa des yeux à l'entente de ces mots les réduisant à une simple feinte mi-clos, son dos reposait contre le mur en briques, froid et réel. Tout l'était, et il se demandait à quel point le futur le serait aussi.
L'expert en médecine retroussa son nez, cette situation ne lui plaisait guère et il pouvait sentir le début des problèmes pour ce royaume qui avait enfin réussi à installer sa suprématie après tant de guerres qui a coûté la vie à de nombreux membres de la monarchie.
Jimin connaissait Zakar depuis des années, ou plutôt depuis la mort de ses parents, il était un conseiller, il ne sortait de sa bouche que des dires vrai et Jimin savait donc quand prendre en toute considération les paroles du médecin royal surtout lorsqu'il n'était pas le seul qui lui prévenait que ce choix finirait par lui brûler les aigles un jour. Zakar a toujours été comme le remplaçant de ses parents. En leur absence, le Médecin royal avait tout fait afin qu'il ne pense jamais à la douleur qui s'était incrustée dans son cœur dormant un énorme trou béant. Même si la tâche s'avérait ardue quelques fois, néanmoins, il se sentait fier d'avoir légèrement adouci le caractère du jeune homme et en l'aidant à bâtir un empire digne de ce nom sur ses épaules.
Aujourd'hui encore les problèmes revenaient à pas de courses alors que les bouleversements des anciens s'effaçaient à peine. Il avait essayé d'étouffer sa crainte, mais impossible, les mots se sont d'eux-mêmes échappés de sa bouche, glissant sur ses lèvres comme s'il était destiné d'être ainsi.
En laissant ce garçon vivre, c'était voir le sang des leur prendre forme d'une mer sans fin.
— Tenez ceci.
Jimin fronça les sourcils à la vue du flacon que lui proposait Zakar, il leva les yeux sur le vieil homme.
— Pour les vampires ordinaires comme nous, la lune rouge a un effet différent et si les lignes des parchemins disent vrai et que ses pouvoirs se déclenchent, vous aurez besoin ceci pour l'arrêter.
— Quand est-ce que vous l'avez préparé ?
— J'ai senti sa présence avant même qu'on ne parlait pas de lui, il dégage une forte odeur.
Jimin prit le flacon et observa le contenu en poussière noir à l'intérieur, les minuscules scintillaient comme de précieuses pierres lumineuses.
— C'est.
— De la verveine ou encore les balles d'argent n'auront sûrement aucun effet sur lui s'il est réellement ce que nous pensons qu'il est.
— La cime d'Élyonara.
Zakar hocha de la tête.
La cime d'Élyonara était connue dans les temps anciens comme une arme capable de décimer un Noble, elle poussait uniquement sur une île interdite d'accès de par sa dangerosité, mais se vendait comme des petits pains sur le marché grâce à sa capacité incroyable de guérison pour les vampires ordinaires, bien s'agissant comme une drogue plongeant le blesser dans une phase de pure divagation. On disait même que pour tuer un Noble, il fallait gratter les écorces de la cime lors de la Lune Rouge afin que les effets soient immédiats. Mais en apprenant son existence, les Nobles l'ont pris pour cible et l'ont détruit. Le sort des autres vampires reposait alors sur des êtres entraînés comme des assassins professionnels afin d'accomplir la mission de libérer Royal Blood de ces monstres.
— Je la croyais disparue.
— Tout ne dépend pas sur la fiabilité des parchemins.
— Imprudence ! Me demandez-vous de le tuer !?
— Je n'oserai pas votre majesté. Si la cime est mélangée avec n'importe quelles autres plantes, elle perd instantanément de sa puissance et n'agit que comme un ralentisseur, j'ai donc ajouté un aphrodisiaque assez puissant afin qu'elle dépasse légèrement la dose de la cime et ne le tue pas.
— Que dois-je dire du fait que cette cime était interdite sur le marché il y a des années ? demanda Jimin d'un ton menaçant et réprobateur.
Même s'il le considérait comme son père, il ne se devait pas de fermer les yeux sur ses erreurs, et celle-ci fût la plus grosse jamais commise depuis qu'il le connaissait. Jimin a toujours crû à l'égalité des castes, s'il devait punir un citoyen de son peuple pour ses actions, cela ne devait pas changer de son entourage proche sinon cela ne ferait de lui qu'un menteur.
— Personne n'en vend de nos jours, mais cela ne veut pas dire qu'elle a complètement disparu, affirma Zakar, sa voix vibrait dans la pièce.
— Je ferme les yeux cette fois-ci, ça sera la dernière fois, le prévint Jimin.
— Mais...
— D'ici là, ça me donne largement le temps de trouver un autre moyen pour les prochaines Lune Rouge.
Zakar lui fit une dernière révérence avant de disparaître dans le couloir. Jimin souffla, pendant un instant, il contempla le flacon dans sa main ensuite la silhouette de Jungkook, c'était bien la première fois qu'il doutait de ses propres décisions, jusqu'à présent aucunes situations ne lui a échappé des mains. Il n'était pas habitué à cela, c'était vraiment frustrant. Il cacha le flacon en tube en plastique dans la poche de sa veste, décollant son dos du mur froid et marcha jusque dans le couloir, il fit appel à un servant, lorsque ce dernier le rejoignit, il lui indiqua de demander à Seokjin, son majordome de préparer un festin culinaire pour le réveil de ce dernier. Et s'il refusait de se nourrir, il allait lui-même s'en charger, de force et de peur.
𝑈𝑛 𝑁𝑜𝑏𝑙𝑒.
𝑇𝑢 𝑒𝑠 𝑢𝑛 𝑁𝑜𝑏𝑙𝑒, 𝑢𝑛 𝑑𝑒𝑠 𝑁𝑜𝑡𝑟𝑒𝑠. 𝑇𝑢 𝑣𝑎𝑠 𝑛𝑜𝑢𝑠 𝑟𝑒𝑛𝑑𝑟𝑒 𝑓𝑖𝑒𝑟𝑒. 𝐼𝑙𝑠 𝑡'𝑜𝑛𝑡 𝑡𝑜𝑢𝑠 𝑝𝑟𝑖𝑠 𝑎 𝑡𝑜𝑛 𝑡𝑜𝑢𝑟 𝑑𝑒 𝑓𝑎𝑖𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑚𝑒𝑚𝑒.
𝐶'𝑒𝑠𝑡 𝑙'ℎ𝑒𝑢𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑣𝑒𝑛𝑔𝑒𝑎𝑛𝑐𝑒.
𝑣𝑒𝑛𝑔𝑒𝑎𝑛𝑐𝑒... 𝑇𝑢 𝑎𝑠 𝑏𝑒𝑎𝑢𝑐𝑜𝑢𝑝 𝑎 𝑎𝑝𝑝𝑟𝑒𝑛𝑑𝑟𝑒... 𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑛𝑜𝑢𝑠 𝑠𝑒𝑟𝑜𝑛𝑠 𝑎𝑣𝑒𝑐 𝑡𝑜𝑖, 𝑙𝑒 𝑠𝑎𝑛𝑔 𝑑𝑜𝑖𝑡 𝑐𝑜𝑛𝑡𝑖𝑛𝑢𝑒𝑟 𝑎 𝑐𝑜𝑢𝑙𝑒𝑟... 𝑙𝑒 𝑡𝑟𝑜𝑛𝑒 𝑠𝑒𝑟𝑎 𝑎 𝑛𝑜𝑢𝑣𝑒𝑎𝑢 𝑙𝑒 𝑛𝑜𝑡𝑟𝑒... 𝑣𝑎𝑠-𝑦... 𝑣𝑎𝑠 !
Jungkook se réveilla en sursaut dans son lit, poussant un énorme soupir, il n'était pas parvenu à sortir un seul son du fond de sa gorge à présent déshydraté. Son corps était pris de convulsions incontrôlées, il tremblait et transpirait de toute part comme si l'on l'avait jeté dans une source froide, il plia ses genoux contre son torse et les entoura de ses bras. Ce fut un soulagement pour lui que de constater que ce n'était qu'un rêve, et pourtant durant un court instant, il crût avoir été dans cet endroit ; froid comme un mois de décembre, empestant la solitude et le sang à plein nez alors qu'une peur sourde le secouait, mais à la place, il retrouvait de la chaleur, un lit doux en dessous de son fessier et une doucereuse odeur chatouillant ses narines, c'était la réalité. Elle était vraie et absolue.
Il se tira les cheveux en sentant les larmes lui monter aux yeux.
Sa maison lui manquait. Même si ces regards étranges le scandaient comme s'il n'était pas le bienvenu dans cette partie, ça lui manquait de se réveiller aux heures inimaginables pour aller cambrioler des maisons avec sa bande de voleurs. Ça lui manquait de faire des combats de boullettes de neige avec son petit frère Yeonjun, de goûter à la soupe aux légumes de bon marché de sa mère. Et même si au fond, il détestait, entendre les cris de son père lui dire que ce qu'il faisait était mal et que ça leur apporterait que des ennuis, ça aussi ça lui manquait.
Et dans une révélation complète de sa conscience, cette vie d'esclave lui convenait mieux que celle-ci.
On toqua soudainement à la porte, il releva la tête en panique, passant le dos de sa main sur ses joues avant d'essuyer ses larmes.
— Qui.. Qui est-ce ?
— Bonsoir Monsieur... C'est le Majordome Kim, sa majesté m'a demandé de venir, vous cherchez, le dîner est servi.
— Dîtes-lui que j-je n'ai pas faim.
Mais les grognements insistants de son ventre affirmèrent le contraire.
— En êtes-vous sûr ? insista le Majorme qui l'attendait encore de l'autre côté de la porte.
La minute d'après, Jungkook ouvrit la porte et fut frappé par la beauté de l'homme qui se tenait face à lui : il était grand, avec de larges épaules saillantes, un visage aussi pâle qu'un mort, mais qui ne déroutait pas de la douceur de ses traits, ses pupilles rouges brûlaient comme des flammes, et ses lèvres pulpeuses luisaient aux éclats de la lune.
C'était la deuxième personne la plus belle qu'il rencontrait après ce roi fou. À cette pensée, il se donna une gifle mentale.
— Bonsoir jeune maître, je m'appelle Kim Seokjin, je suis le Majordome attitré de cette demeure.
— Enchanté. Je suis... Attendez pourquoi vous m'appelez jeune maître ? C'est Jungkook.
— Je ne fais que suivre les consignes de sa majesté.
— Il a toujours cette tendance à agir sans demander l'avis des concernée ?
Seokjin ne lui répondit que par un sourire amusé qui le rendit potelant.
— Je vois.
— Après vous ? concéda Seokjin en lui indiquant le chemin.
Jungkook opina du chef, talonnant Seokjin à travers les couloirs de la tour, c'était bien la première fois qu'il les voyait puisqu'à chaque fois, il tombait dans l'inconscience. Il se demanda alors comment il est revenu en ces lieux alors qu'il était parfaitement en bonne santé.
Ce vampire fou m'a sûrement fait quelque chose. se dit-il.
Ils arrivèrent ensuite dans ce qui semblait être la salle à manger, une table d'une longueur surprenante était dressée au centre de la pièce, rempli à rebords de plats différents, mais aussi de fruits et de boissons le tout capable de nourrir un peuple entier.
La pièce s'élevait d'une hauteur presque étourdissante, soutenue par des piliers dorés entourés de rideaux en soie rouge, plus loin, au fond de la pénombre se dressait le trône impérial. C'était la première que Jungkook voyait ce légendaire trône battu d'épées en argent massifs qui pointait dans toutes les directions. Chaque empereur avait un destin différent, mais s'étaient tous assis sur ce trône.
Les servant(e)s courraient partout, chacun occupés par une quelconque corvée.
— Bien dormis.
Ses yeux se posèrent sur Jimin, confortablement assis de l'autre côté de la place. Il n'était pas seul d'ailleurs, sa fiancée dont il se fichait du nom - s'accrochait à son bras tel une sangsue, il repéra un autre homme étranger qui lui souriait généreusement, dévoilant ses fossettes.
— Comment est-ce que je suis arrivé là ?
Il clignant plusieurs des yeux en reculant d'un pas en arrière, son cœur bondit sur le coup de la surprise, Jimin se tenait désormais à quelques sentiments de lui, il pouvait sentir son souffle s'échouer contre son visage.
— À ton avis ?
Ses lèvres s'étirèrent en un sourire espiègle, ses iris luisaient d'une lueur étrange sous la lune.
— Si je demande, c'est parce que je n'en ai aucune idée.
— Est-ce que ça a vraiment de l'importance ?
De sa main baguée, Jimin saisi une cerise qu'il déposa délicatement sur ses lèvres pulpeuses avant de l'englober entièrement dans sa bouche, Jungkook ne tint pas un mot quant à la sensualité dont il avait allure dans chacune de ses actions.
— Ça en représente à mes yeux.
— Pourquoi ? Tu veux t'échapper ?
Jungkook souffle.
— Même si j'allais en enfer, tu me trouverais sûrement, murmura Jungkook en fuyant son regard écarlate.
— Je ne suis pas gentil à ce point.
Le noiraud roula des yeux au ciel en faisant claquer sa langue contre son palais. Son ventre grogna à nouveau, il dut baisser la tête en entourant sa silhouette dans ses bras, les joues rougies par l'embarras. Le rire moqueur de Jimin fit écho dans la salle et durant un instant, Jungkook crû que son cœur allait partir en courant.
Certaines choses sont incontrôlables. Et avant d'être vampire, il était aussi un humain qui avait gardé certains de ses émotions.
Il perçut la clarté de la lune réfléchir sur Jimin, lui donnant l'allure d'un spectre de la nuit, le plus enchantait d'entrer tous.
Mais la réalité le frappa.
Je suis un Animus. Non un Noble... Je...
— Tu vas rester là jusqu'à ce que la mort par famine te rattrape ? Bien que pour les vampires, ce soit impossible.
— C'est toi qui barres le chemin.
Jimin osa le prendre par la taille avant de le coller fermement contre lui. Il le crut presque possessif pour le coup, mais ne voyait aucune raison qui le poussait à agir ainsi devant tout le monde, et surtout sa fiancée. Il n'a pas le temps de se remettre de sa surprise que quelque chose de doux et sucrée se pose sur ses lèvres. Sa respiration se coupa aussitôt, ses yeux regardaient un point centré dans le vide, écarquiller au maximum. Jimin tint alors son monton, le tirant vers le bas ce qui le poussa à ouvrir ses lèvres. Une chaleur agréable descendit dans sa cologne vertébrale avant de prendre en otage son bas ventre. Il sentit ensuite un liquide âcre glisser dans son œsophage, la pulpe de ses doigts effleurant le coin de ses lèvres, puis tout s'évapora en un seul instant, Jimin se tenait à présent dans la chaise où il l'avait trouvé en pénétrant dans cette pièce.
Khelani souffla de jalousie, sur le point de réduire la moitié de la bâtisse en poussière.
Namjoon se racla la gorge, la gêne qui s'était installée dans la pièce devenue étouffante.
Seokjin de son côté restait neutre, gardant la tête aussi basse que possible.
Jungkook clignant des yeux et se déplaçant tel un automate sur une chaise, aussi loin possible de Jimin.
Le visage de ce dernier était toujours orné de son sourire en coin. Il risquait de prendre un vrai plaisir à jouer à ce petit jeu.
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