ᴄʜᴀᴘɪᴛʀᴇ 7

Pourquoi est-ce que tu agis comme ça, avec Midorikawa ?

Je détournai immédiatement le regard vers la rivière, en face de moi, une boule se forma dans ma gorge. Pourquoi est-ce que j'agissais comme ça ? Ça me semblait pourtant tellement évident. Il m'avait complètement gâché la vie, je ne faisais que de me défendre face à lui.

Je baissai la tête vers le sol, je m'attendais à ce qu'il me pose une question délicate, vu comment il a hésité, mais je ne m'attendais pas à ça. En même temps, je ne faisais pas non plus l'effort de me contrôler quand il était proche de moi, mais rien que sa simple présence m'énervait.

— Pardon, oublies, j'aurai pas dû te demander ça, soupira-t-il avec un rire gêné, fait comme si je n'avais rien dit.

Je ne tournai pas mon regard versblui, et je ne répondis pas non plus. Un long silence s'installa de nouveau entre nous deux. Durant une dizaine de minutes, je m'étais remis à contempler le mouvement hypnotisant de l'eau sous mon regard.

— C'est juste que je m'inquiète un peu, souffla soudainement le blanc, pour lui et pour toi, je ne veux pas qu'il y ai de problème entre vous. Et je ne veux surtout pas que ça tourne mal.

Que ça tourne mal ? Ça avait mal tourné dès le moment où nos regards s'étaient croisés pour la première fois, il y a six mois. Dès le moment où il a complètement détruit. Je ne faisais rien de mal. C'était lui, le problème.

Le vent se mit d'un coup à souffler plus fort, me faisant frissonner. Il devint rapidement beaucoup plus fort, alors avec Fubuki, nous nous décidâmes à retourner au camp d'entraînement, au cas où il se mettrait à pleuvoir. Au bout d'une trentaine de minutes, nous arrivâmes enfin dans le bâtiment, qui était tout aussi silencieux que le matin. Je remontai dans ma chambre, suivi de Fubuki, qui me laissa pour entrer dans celle en face de moi, celle de Reize.

Pendant un moment, je restais dos à ma porte, regardant celle de Reize. Mes jambes étaient comme bloquées, je n'arrivais pas à bouger. Je réussi enfin difficilement à me détourner et à entrer dans ma chambre. Je m'assis dans mon lit, le regard dans le vide.

Passer toute la journée avec Fubuki était bien ça m'avait changé un peu, ça m'avait fait prendre l'air, mais ce n'était peut-être pas une bonne idée. Maintenant j'étais de nouveau seul, je ne devrais pas trop m'habituer à être avec des gens.

Je récupérai mon casque avant de laisser ma tête tomber contre mon oreiller, et restai allongé pendant un très long moment. Tellement longtemps que je cru presque m'être endormi, quand je vis l'heure sur mon téléphone, deux heures plus tard. Il allait bientôt être l'heure de manger, mais je n'avais pas faim du tout. Je voulais juste dormir. J'étais épuisé, je n'avais pas dormi du tout la nuit dernière, en pensant que je pourrais me reposer durant la journée.

Dans mon esprit, s'insinuèrent des images de ce jour-là, de l'accident. Et même augmenter le volume de ma musique n'y fit rien. J'y voyais ses yeux, qui m'étaient désormais si familiers. Puisque qu'ils n'appartenaient à nul autre que Reize. Je m'en souvenais comme si c'était hier, quand il avait posé son regard noir sur moi, et que ses lèvres s'étaient étirés en un sourire malveillant, avant qu'il ne détruise mon collège, et tout le reste. Je me souvenais de son rire, qui résonnait encore dans la tête si je laissais trop mes pensées divaguer. En fait, mis à part ça, le reste était très flou. J'avais la sensation du bâtiment qui s'écroulait sur moi, mais je n'étais même pas sûr que c'était vraiment ça, plutôt l'impression que ça me faisait en imaginant mes cicatrices. Je me souvenais peut-être des cris autour de moi, ou peut-être étais-ce les miens ? C'était vraiment lui dont je me souvenais. Malheureusement, ce sera toujours lui qui viendra me hanter.

Ma main agrippa mon bras, pile ou ma cicatrice était, j'avais presque l'impression qu'elle me faisait de nouveau mal, comme la première fois, je savais bien que ce n'était pas le cas, et pourtant, j'avais cette impression désagréable qu'elle me faisait mal.

En plus de ça, j'avais de plus en plus de mal à respirer, comme si ma gorge s'était bloquée, comme si ma chambre était remplie d'une fumée toxique. Difficilement j'avalais ma salive, je devais faire un effort et prendre un médicament, sinon j'avais l'impression que je n'allais pas survivre. Ce n'était pourtant pas la première fois, au bout d'un moment, j'allais peut-être finir par m'y habituer.

Je tâtai ma table de nuit de ma main quelque seconde avant d'attraper mes pilules, j'en avalai deux : une pour le stress et un somnifère. C'était mon dilemme depuis quelque temps ; dormir, ou ne pas dormir, si je dormais, je m'exposais au risque de faire des cauchemars, mais si je ne dormais pas dans ce genre de situation, j'avais peur que ce soi pire, normalement, une simple pilule contre le stress avait déjà un léger effet de somnifère, mais ce n'était pas rapide, pas assez. Mais grâce à ce somnifère supplémentaire, je sentis rapidement mon corps s'engourdir avant que je ne m'endorme complètement. J'avais tellement sommeil.

✩ˎˊ˗

Aujourd'hui, nous allions enfin savoir contre qui nous allions jouer. Le coach Kudou était déjà parti au rassemblement comme représentant du Japon, tandis que le reste dont l'équipe — dont moi — étions restés au centre, devant la télé pour savoir contre qui nous allions jouer.

Les résultats étaient tombés : nous allions jouer notre premier match contre l'équipe d'Australie, les big waves. Je tournai la tête vers Fubuki, je doutais qu'il se souvienne, mais nous avions parié contre qui nous allions jouer, et j'avais justement dit l'Australie. Étonnement, mon regard croisa le sien, il me fit un grand sourire, me félicitant de loin, un léger sourire étira mes lèvres à mon tour, avant que je ne me détourne. Dans trois jours, nous aurions donc le premier match des éliminatoires asiatique. J'étais impatient, mais en même temps, j'apréhendait un peu comment ça allait se passer.

– Aller les garçons, au lit, demain vous avez une longue journée d'entraînement qui s'annonce ! s'exclama Otonashi.

Tout le monde s'exécuta, cette journée avait été épuisante, tout le monde s'était surpassé à l'entraînement, sûrement à cause du coach, qui avait été particulièrement exigeant. Je n'arrivais pas à me concentrer correctement, ça devenait compliqué de me concentrer sur l'entraînement et en même temps éviter Reize un maximum. Kazemaru et Fubuki m'en avaient tout les deux parlés, hier. « On ne sait pas pourquoi tu agis comme ça, mais tu devrais laisser cette histoire derrière toi, Midorikawa regrette, vous pourriez être amis. » Amis. C'était ridicule, je ne pourrai jamais être ami avec lui, même l'apprécier serait une tâche compliquée.

Je remontais dans ma chambre, l'esprit tellement distrait que je failli bousculer quelqu'un. La pire personne possible, pourquoi c'était toujours sur lui que je devais tomber ? J'étais presque certain qu'une force surnaturelle s'acharnait sur moi.

Il n'y avait plus personne dans le couloir, à part nous deux. Il était juste devant la porte de ma chambre, j'étais devant la sienne. Je sentais son regard sûr moi, mais j'étais incapable de faire de même, j'étais déjà assez de mauvaise humeur rien que par sa simple présence.

– Sato, est-ce qu'on pourrait parler sérieusement ? soupira-t-il finalement au bout d'un moment.

Encore ?

– Non, refusai-je immédiatement. Laisse moi passer.

Il se recula légèrement, me bloquant encore plus l'accès à ma chambre. Je relevai mon regard, mais quand ses yeux noirs se plantèrent dans les miens, je le baissait de nouveau, j'étais faible face à lui, je le serai toujours. Je serrai les poings, qu'il pouvait être agaçant.

– S'il te plaît, je voudrais juste comprendre, dis moi ce que je t'ai fait, j'ai l'impression que c'est plus que cette histoire de collège.

Plus que cette histoire de collège. Bien sûr que c'était bien plus que ça, croyait-il vraiment que c'était le fait qu'il ai détruit mon collège qui me dérangeait ? Si c'était le cas, il avait tout faux.

– J'ai l'impression que tu ne te rends pas compte de l'ampleur de tes actes, Reize.

– Arrête de m'appeler Reize bon sang ! Et si, je me rend compte de ce que j'ai fait mais-

– Non, tu ne te rends pas compte, le coupai-je, on dirait que pour toi, c'est logique que je te pardonne, que tout le monde te pardonne, mais non, ce n'est pas logique. Personne ne devrait pardonner les monstruosités que tu as fait.

– Ce n'était pas-

Je le coupai de nouveau, la colère montant lentement, mais toujours trop vite à mon goût.

– Arrête d'essayer de te justifier ! Tu sais ce que tu as fait.

– Putain, oui je sais très bien ce que j'ai fait ! s'exclama Reize, mais écoute, je voulais te dire que-

– Je ne veux vraiment pas entendre ce que tu as à dire, je t'assure. Ça ne réparera pas ce que tu m'as fait.

Son regard glissa de nouveau sur mes cicatrices, comme quelques jours plus tôt.

– Mais explique moi, murmura-t-il, impuissant, dis moi ce que je t'ai fait, je veux me faire pardonner.

– Tu veux juste te soulager la conscience. Tu me fais pitié, Reize. Avec ta petite vie parfaite, tu veux juste qu'on t'excuse pour pouvoir être soulagé de ce que t'as fait.

– C'est pas ça...

– C'est exactement ça ! explosai-je, c'est exactement ça. Maintenant laisse moi passer, et ne me parle plus.

Je sentais que si cette conversation continuait, j'allais encore me mettre à pleurer devant lui, et je détestait ça, je détestait pleurer, surtout devant les mauvaise personne, comme lui.

Il se décala, je lui lançai un regard mauvais avant d'entrer dans ma chambre. Mon cœur se serra douloureusement sans que je sache pourquoi quand la porte se referma derrière moi. Respire, tout va bien se passer Takeshi. Je m'assis sur mon lit en fermant les yeux, je pris une profonde inspiration pour me calmer, mais ça ne marchait pas, je fondis en larmes. Pourquoi n'étais-je pas capable de me contrôler, pourquoi je devais toujours finir en larmes, et pourquoi je pleurais pour ça, au lieu de pleurer pour des choses normales ? Normalement, les gens pleurent quand ils sont tristes, alors pourquoi moi c'était quand j'étais en colère ? Pourquoi je me mettais toujours dans tout mes états pour rien ? J'en avais tellement marre. Tellement marre.

Un frisson me parcourut, je devais me calmer, respirer profondément, ne pas me mettre plus en colère contre Reize, où contre moi même.

J'attrapai de nouveau ma plaquette de médicaments, combien de fois en avais-je pris, cette semaine ? Fumiko ne serait très certainement pas d'accord, pas du tout. Et je savais pourquoi, il m'arrivait parfois d'en prendre pendant la journée, à cause de ça j'avais parfois de la nausée, ou du mal à marcher, ça perturbait mon sommeil, parfois, me forçant aussi à prendre un somnifère en plus. J'entendais la voix de Fumiko qui me réprimandait chaque fois que j'en avalais, mais j'étais obligé d'en prendre.

Je pris de nouveau une profonde inspiration, demain serait une meilleure journée, j'en étais certain. L'entraînement se passera très bien, et l'ambiance sera génial aussi.

Si seulement c'était vrai. Si seulement ce que je disais pouvait réellement arriver.

✩ˎˊ˗

C'était l'entraînement du matin, aujourd'hui, il était bientôt l'heure du repas de midi, et le temps devenait doucement de plus en plus gris. L'ambiance était étrange, tout le monde était motivé à se dépasser pour réussir le match qui aurait lieu dans trois jours, mais avec la pluie qui menaçait de tomber, c'était bizarre.

Je sentais la température se rafraichir peu à peu, malgré l'entraînement qui me réchauffai tout de même, il allait définitivement bientôt pleuvoir.

Et en effet, il se mit à pleuvoir bien plus vite que ce que je ne le pensais, au début, c'était léger, l'entraînement continua sans que le rythme ne change, mais quand la pluie a commencé à s'intensifier, nous fûmes obligé d'arrêter l'entraînement. Tous rassemblés dans la cantine, l'ambiance était morose, à l'extérieur, on pouvait entendre la pluie qui battait violement, avec la possible menace d'un orage. Un long soupir m'échappa, j'appréciais la pluie, mais pas vraiment l'orage. Je n'en étais pas effrayé, je trouvais simplement cela dérangeant.

J'appuyai ma joue contre ma main, c'était déprimant, je voulais m'entraîner, et demain, les conditions ne seraient pas agréables pour jouer, si la pluie s'arrêtait d'ici là. Mon regard balaya la salle, des petits groupes s'étaient réunis pour discuter doucement en attendant le repas, moi, j'avais décidé de rester seul à ma table. Quand le repas commença enfin, l'ambiance s'améliora légèrement, comme quoi, rien que de la nourriture pouvait satisfaire ces adolescents, je n'avais personnellement pas vraiment l'appétit.

Un moment plus tard, je remarquai Kazemaru, qui posa son plateau sur ma table. Il me sourit, je lui rendai légèrement. Il venait souvent me voir, pour me parler ne serait-ce qu'un petit moment. En fait, tout le monde dans l'équipe le faisait un peu – ou presque –, mais lui, plus que les autres. Je ne savais pas pourquoi. C'était vrai qu'il était sympathique avec moi, il me parlait toujours avec douceur et chaque conversation avec lui était plutôt agréable, mais chaque fois qu'il était près de moi, j'avais une sensation désagréable, comme s'il allait disparaître d'un coup.

Il passa le reste du repas avec moi, déprimant de la météo et du fait que nous ne pourrions sans doute pas continuer l'entraînement de la journée. Alors que la fin du repas approchait lentement, un coup de tonnerre retentit violement, ce n'était pas vraiment étonnant. Kazemaru se tourna soudainement vers une autre table. Derrière, nous, à la table de Endou, Fubuki n'avait pas l'air vraiment content de ça, il avait même l'air paniqué, mais ce n'était pas le seul.

Au fond de la salle, Gran venait de se lever pour s'assoir à côté de Reize, passer son bras autour de ses épaules et lui murmurer à l'oreille pour le rassurer. Je haussai des sourcils. Alors comme ça Reize à peur de l'orage ? Intéressant.

De toute façon, ce n'était pas comme si cette information allait vraiment me servir dans la vie, mais au moins, je le savais désormais.

Comme la pluie ne s'arrêtait pas, le coach annonça que l'entraînement de l'après-midi était annulé, sans surprise. Je décidai alors de retourner à ma chambre sans plus attendre. Étonnement, je pus entrer dans la chambre sans Fudou pour me faire des remarques, sans Endou qui voulait que je reste avec eux, et sans Reize qui... était simplement là. Non, rien du tout.

Comme d'habitude, j'enfilai mon casque avant de m'asseoir à mon bureau, sortant mon carnet pour écrire, mais après une dizaine de minutes à faire des spirales à l'intérieur, sans réussir à écrire, je le refermai en soupirant.

Sans entraînement, l'après midi allait être longue. J'avais presque hâte d'être demain.

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