🅅.𝑃𝑎𝑡ℎé𝑡𝑖𝑞𝑢𝑒
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La nuit dernière, je n'ai pas réussi à trouver le sommeil. L'idée que Taehyung était juste dans la chambre à côté m'empêchait de fermer les yeux. J'ai passé la nuit à somnoler, attendant qu'il se réveille, en vain. Quand j'ai finalement réussi à m'endormir, le soleil éclairait déjà le ciel. Ma mère m'a informé que Taehyung était parti vingt minutes plus tôt, après s'être excusé pour ce qui s'était passé la nuit précédente.
Frustré, j'ai traversé ma matinée au lycée sans vraiment être présent. Les cours des professeurs m'échappaient totalement.
Les jeudis sont mes jours préférés. Les cours se terminent plus tôt, ce qui me met toujours de bonne humeur. Je rassemble mes affaires doucement avant de quitter la salle de classe.
Les jeudis sont toujours empreints d'une atmosphère particulière, où le temps semble s'étirer pour me laisser savourer chaque instant. Après avoir quitté la salle de classe, je déambule dans les couloirs presque déserts, les autres élèves étant encore occupés en classe. Les paroles de Taehyung résonnent inlassablement dans mon esprit, créant un tourbillon d'émotions et de questionnements. Jamais je n'aurais soupçonné qu'il puisse ressentir une attirance pour les hommes.
Pourtant, j'ai déjà rêvé plus d'une fois d'une relation plus intime avec lui, malgré ma conscience lucide des barrières qui nous séparent. Je suis pris dans un tourbillon d'incertitudes, me demandant ce qu'il pense réellement de moi. Pourtant, je suis conscient que nos chemins pourraient difficilement se rejoindre, que nos destins sont peut-être tracés sur des voies différentes.
Alors que je m'approche enfin de la porte de sortie du lycée, un bras se glisse soudainement par dessus mes épaules. Un frisson parcourt mon corps en réalisant que c'est Jaehyun, accompagné de Jennie. Son sourire en coin me glace le sang. Une sucette pend à sa bouche, un détail familier qui me perturbe. Sans prononcer un mot, il m'entraîne à sa suite, son bras toujours fermement enroulé autour de moi. Sa poigne est si serrée que la douleur me fait grimacer.
Un sentiment d'impuissance m'envahit. Je voudrais trouver les mots pour lui dire d'arrêter, pour me défendre, mais je reste muet, me laissant guider sans opposer la moindre résistance. La tête baissée, je me sens pathétique, une marionnette entre ses mains.
Mes cheveux voilent mes yeux tandis que nous montons les escaliers qui mènent au toit du lycée. Une sensation de vertige m'envahit, mêlée à une profonde tristesse. Ce dédale d'émotions me submerge alors que je me demande ce qui m'attend à présent.
Il est formellement interdit aux élèves d'accéder au toit depuis le tragique incident qui s'est produit lors de notre année de seconde il y a deux ans. Une jeune fille s'y est donné la mort en se jetant du haut du bâtiment...
Jennie referme la porte derrière nous, scellant notre destin sur ce lieu chargé d'émotions contradictoires. Les grilles nous entourent, comme pour nous rappeler que la seule issue désormais est de les escalader pour sauter dans le vide.
Mon cœur palpite violemment lorsque je lève les yeux et aperçois Soyeon, SeokJin et Lisa debout près du mur du bâtiment supérieur. Leurs regards semblent me narguer. Soyeon arbore un sourire moqueur en me voyant, alors que Jaehyun me pousse brutalement vers elle, me faisant vaciller au bord du précipice de mon esprit.
"Le voilà", j'entends Jaehyun dire, me désignant comme si j'étais une victime sacrificielle. Soyeon porte une cigarette aux lèvres, une image surprenante pour moi qui ignorais sa consommation de tabac.
SeokJin croise les bras, l'agressivité perce dans son regard. Soyeon, quant à elle, semble indifférente, mais je sens une pointe de cruauté dans son regard.
"Pourquoi t'as demandé à le voir déjà ?" Demande SeokJin d'une voix lourde de sous-entendus. Je sens mon cœur battre plus fort dans ma poitrine.
Je lutte pour garder mon calme, ma respiration se fait plus haletante.
"Je m'ennuyais, j'avais besoin de divertissement. Je hais cet endroit." Les mots sortent de la bouche de sa copine. "Mais c'est le seul lieu où on peut fumer tranquille sans avoir les profs sur le dos."
Une boule d'angoisse se forme dans ma gorge.
SeokJin me regarde avec un mélange d'incompréhension et de méfiance, puis se détourne pour parler à Lisa. Soyeon, quant à elle, me fixe intensément, ses yeux brillant d'un éclat qui me fige d'anxiété.
"J'ai trouvé." Sa voix résonne comme un coup de tonnerre dans mon esprit déjà tourmenté. Mon corps se raidit à l'évocation des ciseaux, une terreur sourde m'envahit. Je sens mes mains devenir moites, mes muscles se tendre. "Jaehyun, immobilise-le. Ses cheveux sont trop longs à mon goût." Les mots résonnent comme une sentence, et je sens un frisson glacé parcourir mon échine.
Dans une angoisse croissante, je sens l'emprise de la panique m'enlacer lentement, m'oppressant de sa sombre présence. Chaque mouvement semble se dérouler dans une lenteur lugubre, accentuant mon malaise. Un pas hésitant vers la porte, un espoir fragile de fuite, mais soudainement stoppé par la brutale poigne de Jaehyun qui m'entraîne violemment vers le sol froid et humide.
Il me maintient contre le sol, bloquant mes mains dans mon dos, avant de s'asseoir lourdement sur moi, m'empêchant de bouger. Je lutte au début, mais lorsque je vois mes cheveux tomber au sol un à un, je sens une résignation s'emparer de moi.
Les cheveux se répandent autour de moi, comme des ombres dansant sur le sol. La cruelle mélodie de rires résonne tandis que Soyeon s'amuse à esquisser des coupes hasardeuses à travers ma chevelure, chaque bruit de ciseaux venant marquer un morceau de ma dignité volée.
Les larmes me montent aux yeux tandis que je sens chaque mèche de cheveux tomber au sol, comme des morceaux de moi-même disparaissant peu à peu. La douleur et la peur se mêlent dans mon ventre, faisant monter une nausée amère à mes lèvres. Je sens la lame des ciseaux effleurer ma peau et la froideur du métal contre ma nuque me glace le sang.
Après s'être bien "amusée", Soyeon se relève, me laissant étendu sur le sol froid en béton. Jaehyun me lâche enfin et rejoint Soyeon, SeokJin et Lisa. Je regarde mes cheveux éparpillés au sol, me demandant à quoi je ressemble désormais. Je suppose que je dois être affreux, bien pire que d'habitude. Pourquoi a-t-elle décidé de me les couper ? En quoi cela la dérangeait-il autant ? Je les aimais pourtant, mes cheveux... Mon frère adore les caresser et j'aimais ça aussi...
Alors que j'essaie de me relever, Jennie s'approche de moi avec un regard méprisant.
Je crois qu'elle me de hait encore plus depuis que je lui ai donné un coup, sans le faire exprès la dernière fois.
Elle ramasse les mèches de mes cheveux et me les tend. Puis, ses mains se rapprochent de mon visage. Je ferme les yeux en m'attendant à recevoir un coup, mais doucement, je sens qu'elle retire mon appareil auditif. Quand j'ouvre les yeux, je la vois les jeter par-dessus la grille du toit.
Le silence m'envahit...
Je reste là, immobile, les cheveux coupés à la va-vite, l'appareil auditif jeté, et la sensation de dégoût de moi-même qui m'envahit. Pourquoi fallait-il toujours que je sois la cible de leurs moqueries et de leurs violences verbales et physiques ? Pourquoi devais-je toujours être la risée de tous ?
Les larmes me montent encore aux yeux, mais je les retiens avec force. Je ne veux pas leur montrer ma faiblesse, ma vulnérabilité. Je n'ai pas le droit de pleurer, pas devant eux. Pas encore. Mais c'est un échec total.
Je me redresse enfin, laissant mes émotions se mélanger en moi. La tristesse de me sentir si petit, si insignifiant, mais aussi la résilience qui me pousse à me relever encore et toujours.
Les larmes coulent le long de mes joues, je les essuie d'un geste brusque. Mon cœur bat fort dans ma poitrine alors que je relève la tête pour plonger mon regard dans celui de Jennie. Ses yeux brillent de malice mais aussi de peur. Comme si elle avait peur de ce qu'elle venait de faire. Puis, je tourne la tête et croise le regard peiné de SeokJin, fixé sur la grille par laquelle Jennie a jeté mon appareil auditif.
Un silence oppressant m'entoure, je suis seule avec mes pensées tourmentées. SeokJin semble réprimander Jennie mais je ne perçois rien, juste le vide. Jennie se tourne vers moi, ses lèvres bougent lentement pour former des mots silencieux mais limpides : "Tu-ne-diras-rien." Je parviens lire.
Sans un mot, je me détourne et quitte le toit du lycée en empruntant les escaliers. Mes doigts serrent fort mes cheveux fraîchement coupés, je me sens vidé de toute émotion. Dans la cour, je cherche partout du regard, mais mon appareil auditif reste introuvable.
Face à l'absence de solution, je décide de rentrer chez moi, laissant derrière moi cette atmosphère lourde.
°
Face au miroir de la salle de bain, je me sens submergé par une vague de dégoût. Mon reflet me rend malade, me donnant l'impression d'être un monstre rejeté par la société. Les regards que les gens me lançaient dans le bus prennent alors tout leur sens. Soyeon a massacré mes cheveux, les laissant en lambeaux, parsemés de trous. Pourquoi m'a-t-elle infligé ça ?
Je suis tellement lamentable, si pitoyable. Mon propre visage me répugne et je suis envahi par une tristesse infinie. Si seulement je pouvais hurler ma douleur, je le ferais. Les moqueries au lycée prennent soudain tout leur sens. Je suis là, à me détruire encore plus, désespérément seul dans ma misère.
Je me traîne jusqu'à l'armoire à pharmacie et attrape les ciseaux avec fébrilité. D'un geste brusque, je saisis mes cheveux en une poigne douloureuse, déterminé à achever ce que Soyeon a commencé. Autant aller jusqu'au bout, autant assumer ma laideur jusqu'au bout. Je fais pitié. C'est écœurant.
Les larmes coulent le long de mes joues alors que je coupe sauvagement les mèches de mes cheveux. Chaque brin qui tombe au sol me rappelle à quel point je suis pathétique, comment j'ai laissé Soyeon me transformer en une créature monstrueuse.
Je me regarde de nouveau dans le miroir, maintenant défiguré par ma propre main. La tristesse m'envahit alors que je réalise à quel point je me suis laissé aller, à quel point je me déteste. Je suis un monstre, une caricature de ce que je suis supposé être. Et pourtant, je ne peux m'arrêter, incapable de faire face à la vérité brutale de ce que je suis devenu.
Les ciseaux tombent de mes mains. Je m'effondre par terre, les larmes inondant mon visage déformé par la douleur et la honte. Je suis seul, abandonné de tous, même de moi-même. Je ne mérite que le dégoût, la tristesse, la solitude infinie qui m'attendent au bout de ce voyage insensé que j'ai entrepris en venant au monde. Je ne suis rien, juste un amas de chair et d'os, condamné à errer dans les ténèbres de ma propre misère. Le pire, c'est que je réalise que ce n'est la faute de personne d'autre que moi.
°
Assis face à mes parents, les larmes aux yeux, je me sens submergé par la culpabilité. Ma mère relève doucement ma tête pour que je puisse lire ses paroles dans le langage des signes. Privé de mon appareil auditif, je suis totalement isolé dans un silence oppressant. Elle me questionne sur ce qui s'est passé, en désignant mes cheveux.
Mon regard fuyant passe de sa figure inquiète à celle de mon père, avant de se poser sur la photo de famille qui trône au-dessus de la cheminée. Nous y sommes, souriants et unis, et je refuse de briser cette image de bonheur. Comment pourrais-je leur avouer que je suis moqué à l'école, que l'on m'a volé mon appareil auditif et mutilé mes cheveux ?
"J'ai perdu mon appareil auditif, ça m'a bouleversé... alors j'ai pris les ciseaux. Je suis désolé." Ce mensonge me brûle les lèvres alors que je signe avec maladresse.
Je mens pour les protéger, pour ne pas les inquiéter davantage. Car la vérité leur ferait bien plus de mal que ce mensonge.
Le soupir de ma mère résonne certainement dans la pièce. Elle me demande doucement où j'ai égaré mon appareil auditif. Je reste figé, la honte me submerge. Par ma faute, mes parents vont devoir contacter un audioprothésiste et dépenser une somme considérable. C'est cher, un appareil auditif, notamment celui sur mesure qui ajuste le son pour me permettre d'entendre. Il faudra surement que je refasse des tests à l'hôpital pour en obtenir un nouveau, et je redoute de manquer les cours. A quoi bon y aller si je ne peux pas entendre ce qui se dit ?
Je regrette d'avoir voulu intégrer un lycée "normal", comme tout le monde. De la maternelle à la fin du collège, j'étais dans une école pour sourds-muets. A présent, je me retrouve dans un établissement où personne n'est comme moi. Je me sens comme une bête de foire.
Je suis pathétique.
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Ce chapitre est assez lourd de propos et scènes sensibles.
S'il vous plaît, si vous vous retrouvez face à une situation de harcèlement, il faut en parler. Ne faites pas comme Jungkook en refoulant tout pensant protéger ainsi ses proches.
Si vous faites cela, qui vous protégera vous?
Le harcèlement est un fléau qui a pris la vie de plus d'un.
Il faut dire non à ce fléau. Regarder sans aider, fermer les yeux... C'est être complice. Il faut que ça cesse.
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