🅇. 𝐿𝑎 𝑐𝑜𝑙è𝑟𝑒 𝑛'𝑎𝑝𝑝𝑜𝑟𝑡𝑒 𝑟𝑖𝑒𝑛 𝑑𝑒 𝑏𝑜𝑛

Je suis épuisé. Voilà tout ce que je peux dire en ce moment. Mes yeux peinent à s'ouvrir alors que je prends conscience que la lumière du jour pénètre dans ma chambre. C'est mardi aujourd'hui et je suis rentré de Busan tard dans la nuit d'hier. La pièce de théâtre s'est finalement bien passée, les awards aussi, suivis du défilé au Japon. Mon manager m'a accordé deux jours de repos, et je compte bien profiter de ces deux jours pour ne rien faire d'autre que traîner et végéter.

Alors que je m'étire dans mon lit, je réalise que je m'essuie la bouche ; j'ai visiblement bavé dans mon sommeil. Je quitte le lit avec difficulté, mes membres pataugeant dans une fatigue persistante. En arrivant en plein milieu de la chambre, je m'arrête un instant, perdu dans mes pensées. C'est à ce moment-là que des coups résonnent à la porte.

Je traîne des pieds pour m’y diriger et ouvre la porte, les yeux encore à moitié fermés. Je mets un moment à reconnaître Jungkook, qui se tient là, une expression neutre sur le visage.

"Je suis venu faire le ménage dans la chambre," dit-il d'une voix calme.

"Pourquoi faire ? Il est encore tôt. Reviens plus tard," rétorqué-je, prêt à refermer la porte.

"Il est 15h. J'ai attendu toute la matinée et le début de l'après-midi afin de te laisser le temps de dormir. Tu avais l'air fatigué hier soir en rentrant," me répond-il avec une précision ennuyeuse.

Mes yeux s'écarquillent alors que je jette un regard vers l'horloge. Bon sang, j'étais si épuisé que ça ? Je soupire, sachant que je ne vais pas lui échapper si facilement. Je me retourne et jette un œil sur l'état de ma chambre. Des vêtements traînent par terre, témoignages de mes frénésies nocturnes.

"Ok, fais ce que tu veux," dis-je finalement, me rendant compte que je n'ai pas d'autre choix que de le supporter.

Alors qu’il commence à ramasser mes vêtements, je m'élance vers le coin de la pièce, essayant de trouver un semblant d'énergie pour me préparer. Puis, soudain, un mouvement attire mon attention. Mon cœur s’arrête. Un cafard, tout noir, se faufile le long du mur.

Mon cri retentit dans la pièce. "Ahhh ! Un cafard !" Je cours en hurlant dans l'autre sens, les sens en alerte, le ton de ma voix empreint de terreur.

Jungkook lève la tête, visiblement surpris. Mais alors, contre toute attente, un rire sincère s’échappe de sa bouche. Je me fige sur place, le regardant, totalement déconcerté. C’est la première fois que je l’entends rire, et je ne sais pas comment réagir. Son sourire, son visage détendu, tout cela me désarme.

Il est... beau. Comme un coup de foudre qui me déstabilise. Mon cœur rate un battement, assailli par une colère sourde contre moi-même. Pourquoi est-ce que je réagis de cette façon ? Je ressens une chaleur monter sur mes joues et je commence à bégayer, tenté de trouver les mots, mais rien ne sort.

"Pourquoi—pourquoi tu... rigoles ? Ce n'est pas… amusant !"

Mais je sens que je m'enlise, la confusion m’envahissant. "C'est un insecte, Jungkook ! Un insecte !" Je réalise que je dis des conneries alors que je rougis comme une tomate, incapable de comprendre ce qui m'arrive.

Jungkook essaie de contenir son rire, incapable de dissimuler le sourire moqueur sur son visage. Ce moment, simple en apparence, me rend fou. "Détends-toi, il ne va pas te manger," dit-il, mais sa voix douce ne fait qu'aggraver ma gêne.

Je me tourne rapidement et m'éloigne dans la salle de bain, claquant la porte derrière moi. Les battements de mon cœur résonnent à mes oreilles, et je m’appuie contre la porte, réalisant combien cette réaction était absurde. Qu'est-ce qui ne va pas avec moi ?

J'essaie de reprendre mon souffle, me noyant dans mes pensées contradictoires. Je ne sais plus où me mettre. Pourquoi est-ce que Jungkook, de tous les gens, me fait ressentir cela ? Sa voix résonne dans ma tête, son rire comme une mélodie troublante.

Je ferme les yeux, essayant d'oublier le moment, mais le souvenir du regard de Jungkook, de sa réaction, reste gravé. Tant de frustrations, tant de secrets, un passé que je ne peux pas partager et qui m'oppresse. Et maintenant, je suis ici, acculé par une simple peur d’un cafard, m’enfermant dans la salle de bain comme un enfant terrifié.

Il faut que je me ressaisisse, que je sorte et que je ne laisse pas cette faiblesse prendre le dessus. Mais alors que je me regarde dans le miroir, je ne peux pas m’empêcher de penser à la façon dont il a ri, à ce moment d'humanité partagée, même si je ne comprends toujours pas ce qu'il représente pour moi.


Au bout d’un moment, alors que je m’accroupis à côté du lavabo, tentant de reprendre contenance, j’entends des coups résonner à la porte de la salle de bain.

"Taehyung, ouvre, s’il te plaît. J'ai attrapé le cafard et je l’ai jeté!" dit Jungkook, sa voix effaçant un peu de la tension qui m’oppresse.

Je prends une profonde inspiration, la honte me brûlant encore les joues. Je m'approche doucement de la porte et l’ouvre lentement. Mes yeux croisent le regard de Jungkook, un sourire moqueur étirant ses lèvres.

"Alors comme ça, le grand Taehyung arrogant a peur des cafards ? Tu sais, tu es plus susceptible de mourir dans un accident de la route que tu ne le serais tué par ce minuscule insecte," me lance-t-il, un amusement visible dans sa voix.

Je sens mes poils se hérisser à la simple mention du cafard. "Ouais, bah je suis aussi humain que n’importe qui. J’ai aussi des peurs, figure-toi," je marmonne, évitant de croiser son regard. Je scrute la chambre comme si elle était plus intéressante que la conversation.


"T’as quel âge pour te moquer ainsi de moi ? Si je suis plus âgé que toi, tu me devras des excuses, avec un "Hyung" en plus," je rétorque, tentant de reprendre un peu de dignité.

Jungkook croise les bras sur son torse, un air de défi sur le visage. "Cherche pas, j'suis plus vieux que toi. J'ai 23 ans. Tu viens de fêter tes 22 ans. C’est à toi de m’appeler Hyung."

"Je suis le fils de ton patron, tu me dois le respect," dis-je, essayant de chasser l’image de lui en train de rire. C’était tellement beau, ce moment-là, et ça ne devrait pas être quelque chose que je désire.

Jungkook lève les yeux au ciel. "Je travaille ici temporairement de toute façon. Quand j'aurai ce que je cherche, je partirai."

Je le foudroie du regard, intrigué. "Dis-moi ce que tu veux, qu'on en finisse. Comme ça, je te le donne et tu pars. Je suis prêt à tout te donner si ça peut te permettre de partir. Voir ta tronche tous les jours, ce n'est pas facile." J'ajoute cette dernière phrase avec un détachement qui n’est là que pour masquer l'interrogation qui commence à germer en moi.

Il me lance son fameux sourire sérieux. "Si je te dis que c'est toi que je veux, tu dirais quoi ?" La bombe de sa déclaration me prend par surprise, et je m’étouffe avec ma salive.

Mais lorsqu’il éclate de rire, je ne peux m'empêcher de ressentir une vague de soulagement. Il n’était pas sérieux, apparemment. "Tu es impossible," lui dis-je en rendant son sourire un peu hésitant.

"Plus franchement," il reprend, redevenant sérieux, "ce que je désire le plus, tu ne peux pas me l'apporter."

Cette phrase me laisse perplexe, et je reste là, silencieux alors qu'il quitte la pièce, ma curiosité piquée.

La vérité est que je n’ai aucune idée de ce qu’il désire. Il est difficile de lire Jungkook. Il y a quelque chose de caché en lui, une chose que je ne comprends pas, mais je n'ose pas poser les questions. Au fond de moi, il y a une vague de curiosité et une émotion inexplicable que je ne peux pas nommer.

Je me retrouve maintenant seul dans la chambre, assis sur le lit, écrasé par le poids des émotions contradictoires qui me heurtent. Jungkook, pour toute son impassibilité apparente, a réussi à toucher quelque chose en moi aujourd'hui. Son rire, son attitude, tout cela a brisé quelque chose dans mes défenses.

Je me rappelle de son visage souriant, de la façon dont il a pris la situation à la légère, et je me demande si peut-être, juste peut-être, nous pourrions trouver un terrain d'entente. Mais en même temps, cela me fait peur. Pourquoi est-ce que cela me fait peur ? Peut-être que je me rends compte que sous cette façade de je ne t'aime pas se cache quelque chose de bien plus complexe.

Je chasse ces pensées de mon esprit, me levant lentement pour prendre une douche. Les gouttes d'eau chaude me réconfortent et me rassemblent un peu. Mes pensées s'accélèrent alors que je ne peux pas m'empêcher de me demander ce qui se passe réellement dans la tête de Jungkook. Qu'est-ce qu’il veut vraiment ? Pourquoi m’a-t-il dit cela si sérieusement ?

Lorsque je sais que mon corps est propre et que je ressors, je jette un dernier regard à la chambre. Les vêtements traînent toujours par terre, mais à un moment, je réalise que peut-être, cela ne me dérange plus tant. Parce que Jungkook y a laissé une de ses empreintes, et pour une raison que je ne comprends pas entièrement, j'ai l'impression qu'il y a un chemin à explorer entre nous.



°



Je ne sais pas quelle heure il est lorsque je suis tiré de mon sommeil par une vibration incessante de mon téléphone. Mes paupières sont lourdes, comme si des poids invisibles les maintenaient fermées, mais, finalement, je parviens à le saisir. Sur l’écran, un message clignote : « Numéro inconnu ». Une vague de lassitude m’envahit. Je n'ai aucune envie de répondre à cet appel mystérieux. Je le dépose sur ma table de chevet, espérant me rendre à nouveau dans l’obscurité apaisante du sommeil.

Mais une nouvelle vibration me surprend, puis une autre. Je finis par le saisir à nouveau, l’anxiété réalisant une danse macabre dans mon ventre. Je raccroche rapidement, mais le téléphone ne tarde pas à vibrer de nouveau, une urgence presque insupportable. Lorsque je glisse mon doigt sur l’écran pour ouvrir le message, l’apathie que je ressens se transforme rapidement en agitation.

« Rendez-vous au Moon Palace. Nous devons parler de quelque chose de très important. Viens et tu sauras. C’est à propos de la Daehyun Private School. »

À la lecture de ces mots, mon cœur s’arrête, tout comme ma respiration. Je lâche le téléphone, mes mains tremblantes lâchant prise. Mes yeux vont vers l’horloge qui affiche 22h47, et une irrésistible sensation de malaise m'envahit. L'inconfort double de volume. La Daehyun Private School, ce nom résonne comme une cloche lugubre dans ma tête, et les souvenirs qui l’accompagnent désavouent toute forme de paix. Qui se cache derrière ce numéro inconnu ?

Les questions jaillissent dans mon esprit comme une tempête, et je ne peux pas laisser ce numéro inconnu dominer ma réaction. En tant que célébrité, c’est presque un impératif de ne pas répondre à ces appels. La peur grippe mon cœur, le rendant lourd, alors que je songe à ce que ce message pourrait sous-entendre. Je suis partagé entre la curiosité irrésistible et une terreur rampante. Finalement, je me résous à répondre.

« Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? Qu’est-ce que mon ancienne école a à voir avec moi maintenant ? » Je l’envoie, anxieux, mordant ma lèvre avec force. Chaque seconde qui passe ne fait qu'accroître l'angoisse qui rôde autour de moi. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, comme un oiseau cherchant une issue.

La réponse arrive presque instantanément, aiguisant ma peur. « Tu sais de quoi je parle. Il s'agit de Madame Seo. »

À la mention de son nom, un frisson de dégoût parcourt mon échine. C’est comme si le monde autour de moi venait de se figer, et mon estomac se tord brutalement sous le poids de souvenirs sombres et chargés. L'image de Madame Seo, ses mots, ses jargons cruels, tout refait surface, une vague de dégoût m’envahit instantanément.

Je me sens pâlir tandis qu'une nausée insupportable remonte le long de ma gorge. Je m'effondre presque, vomissant dans le lavabo, l'écoeurement me submergeant. Je ne cherche même pas à me rhabiller correctement, enfilant au hasard mes chaussures avant de quitter la villa dans une précipitation désordonnée. L’urgence brûle en moi, le besoin d’échapper à cette réalité immergée dans les horreurs du passé.

Alors que je prends le volant, mon esprit est en ébullition, débordant de pensées chaotiques. J’opère un démarrage brutal, les pneus crissent à l’extrémité de l’allée, et je quitte la villa à une vitesse vertigineuse. Les lumières de la ville filent devant mes yeux, une série d'illuminations floues et angoissantes. Je suis emporté par l’angoisse et la panique à chaque virage, chaque étoile filante sur la route me rappelle que la Daehyun Private School ne me laissera jamais tranquille.

Les souvenirs jaillissent, plus violents que jamais, comme des spectres cherchant à me happer. Mon cœur bat la chamade, et la sensation d’étouffer se renforce à chaque pensée qui jaillit. Je suis piégé, englouti par un faussé d’angoisse et de dégoût, incapable d'échapper aux ombres de mon passé. J'accélère encore, espérant que la vitesse puisse temporairement étouffer cette peur lugubre qui me hante. Mais au fond, je sais que ces souvenirs ne cesseront jamais de revenir.

Lorsque j’arrive enfin dans le parking souterrain du Moon Palace, une pression sourde s'installe dans ma poitrine. Je sors de ma voiture en courant, mon cœur battant la chamade tandis que je suis la localisation envoyée par le numéro inconnu. Les murs de béton résonnent avec mes pas précipités, et l'adrénaline pulse dans mes veines, me donnant l'impression de chercher à échapper à quelque chose d'insaisissable.

Au bout d’un instant, une silhouette obscure attire mon attention. Une voiture sombre se découpe dans l’ombre. Lorsque la portière s’ouvre, je reconnais instantanément les visages familiers de Yoongi, Jo Somi, Park Selena et Kang Joon-Woo. Ils sont tous là, des fragments de mon passé qui reviennent hanter le présent. Je les connais, mais seuls Yoongi et Selena comptent vraiment pour moi. Les autres? Nous nous sommes perdus de vue après le lycée, mais un secret sourd nous lie encore, un poids que nous n’avons jamais osé partager.

"Taehyung ! Tu es enfin arrivé !" s’exclame Joon-Woo, son ton tranchant l'accompagnant d'une impatience perceptible. À l'intérieur de la voiture, l'atmosphère est tendue, pimentée par une colère sourde qui émane de lui. Je me retourne, balayant du regard tous ces visages gravés dans ma mémoire.

"Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi est-on ici ?" je demande, ma voix trahissant l’anxiété qui monte en moi. Je grimpe dans le véhicule, Joon-Woo prenant place au volant. Je m’installe à l’arrière, juste à côté de Selena et Somi. Yoongi s'assoit à l'avant, son regard inquiet rivé sur le tableau de bord.

"Je vous ai contactés pour quelque chose de sérieux. C’est à propos de Madame Seo," déclare Joon-Woo, des éclairs de rage dans les yeux. Ce n’est pas la première fois que je vois cette intensité chez lui. Je me souviens de ses bagarres à l'école, où la passion semblait l’enflammer à chaque injustice.

Comment a-t-il obtenu nos numéros ? Je ne parviens même pas à le déterminer.

"Je ne veux pas en parler," murmure Somi, d’une voix à peine audible. Elle détourne le regard, ses mains tremblant légèrement, trahissant une nervosité palpable. J'observe avec une curiosité mêlée d’inquiétude.

Somi a toujours été la personne discrète du groupe, l’intellectuelle à lunettes, celle qui passait ses journées dans les livres sans prendre part aux tumultes des autres. Je me demande si elle est même toujours celle que je connaissais.

Selena, la plus extravertie d’entre nous, pousse un soupir exaspéré. "Ça ne sert à rien de rester en silence. Il faut en finir avec cette histoire." Sa détermination me frappe de plein fouet, presque déstabilisante.

En finir avec quoi, exactement ? Un frisson d’angoisse traverse mon corps. Nous savons tous ce qui s’est passé à la Daehyun Private School, mais nous avons esquivé le sujet pendant des années. Je ne compte pas briser ce silence ni aujourd’hui ni jamais. Pour moi, c'est trop tard ; je suis dévoré par ma notoriété et je ne peux me permettre de plonger dans mon passé.

Les yeux de Yoongi se posent sur le groupe, la tension dans l’habitacle est palpable, presque électrique. "Joon-Woo, qu'est-ce que tu veux vraiment ? Ce qui s'est passé ou ce qui ne s'est pas passé dans cette école, doit rester là-bas. Au cas où tu l’aurais oublié, je suis connu aux quatre coins du monde, tout comme Taehyung. Selena est mannequin et célèbre. Somi, je ne sais même pas ce qu’elle devient, et toi, qu’en est-il de toi ? Ton père est en politique, non ? Nous sommes tous connus d’une manière ou d’une autre. Je ne pense pas que ce soit le bon moment pour que l’on nous voit traîner ensemble."

Sa voix est ferme, mais je peux lire en filigrane l'inquiétude qui perle sur son front. Une certitude s’impose : nous ne pouvons pas nous permettre de fouiller dans ces vieux souvenirs. Mais alors, que voulons-nous vraiment ? Peut-être que ce mystère, menaçant, pourrait nous rattraper.




Joon-Woo soupire, son impatience désormais palpable sur son visage. "Je veux vous montrer un truc," dit-il en jetant un regard à chacun d’entre nous. "Chacun d’entre nous a été victime d’elle. Nous le savons très bien même si nous nous sommes toujours voilé la face. Je suis entré par effraction chez elle. J’ai volé des photos chez elle." Sa voix descend presque à un murmure. "Des photos de nous tous."

Un choc stupéfait m’envahit, une vague de dégoût me remontant le long de la gorge. "Des photos ? Quelles photos ?" Ma voix tremble légèrement, mais je m'efforce de rester ferme.

Joon-Woo se radoucit, mais l’énervement demeure dans sa voix. "Des photos où elle nous prend... en photo. Triple idiot... tu sais..." Sa voix se brise presque, la colère affleurant. "Celles où nous sommes en position vulnérable."

Le monde autour de moi tourne, mes yeux s'écarquillent alors que je réalise ce qu’il insinue. Je ne comprends pas. Pourquoi diable aurait-elle gardé ces photos ? Comment a-t-elle pu laisser des traces de ses actes ignobles, choses que nous avions été si déterminés à oublier ?

Nous n’avons jamais été dans son bureau en même temps. C’était toujours chacun son tour, chacun son jour. Personne ne sait exactement ce que l’autre a vécu, et je n'ai aucune envie de le savoir.

"Je ne veux pas les voir. Détruis-les," murmure Yoongi, serrant les dents, son regard se durcissant.

L’atmosphère dans la voiture devient électrique, pesante. Je sens le poids de l’horreur se poser sur nous. Nous étions tous là, réunis par une douleur invisible mais si réelle. Pourquoi n’avons-nous jamais parlé de cela avant ? Pourquoi n’avons-nous jamais partagé notre souffrance ?

"Mais bordel ! Qu'est-ce que tu foutais chez elle ? Et comment as-tu trouvé ces putains de photos ?" Les mots sortent de ma bouche sans que je puisse les censurer. Mon cœur bat à tout rompre, l’inquiétude et la colère se mêlant en un tourbillon dévastateur.

Somi continue à ronger ses ongles, et je remarque Selena qui sort une cigarette de sa poche, la fumée formant des volutes nerveuses au-dessus de sa tête.

"Fume pas dans ma caisse !" grogne Joon-Woo en lançant un regard dans son rétroviseur, une irritation manifeste sur son visage.

"Va te faire foutre ! Je fume si je veux. T'as gâché ma soirée si tu ne l'as pas remarqué," lui rétorque Selena.

Les tensions palpables s'intensifient, le malaise est devenu une flamme.

"Savez-vous ce qu'elle est devenue, cette pute ?" demande Joon-Woo, le ton acerbe. Il démarre la voiture et nous quittons le parking souterrain. Je ne sais même pas où il nous emmène, mais il semble préférable d’être en mouvement plutôt que de rester figés ici, risquant d'attirer des oreilles indiscrètes. "Elle a créé plein d’associations d'aide aux plus démunis. Et même des associations d'aide aux victimes de violence." Sa voix se teinte d’un rire amer, une haine palpable derrière ses mots.


Je ne peux m’empêcher de sentir un frisson d’écœurement parcourir mon échine. Elle, la monstrueuse, prétendant être une sauveuse ? "C'est une blague, n'est-ce pas ?" répliqué-je, ma voix si basse qu’elle semble se perdre dans le bruit du moteur. Je sens mes mains se crisper sur mes jambes.

"Non, ça ne l'est pas," dit Yoongi, ses yeux se fixant sur le chemin devant lui. "C'est exactement le genre de manipulation qu'elle ferait. Elle a toujours su comment tromper les gens."

Selena se tourne vers Joon-Woo. "On devrait aller lui parler," dit-elle, la colère dans sa voix bouillonnant. "Je lui ferais payer toute la douleur qu’elle a causée. Je lui mettrais une balle entre les yeux si je le pouvais."

"Sélène, calme-toi," répond Yoongi d’un ton piquant, mais elle ne l’écoute pas. Son indignation est palpable, chaque mot qu’elle prononce est chargé de ressentiment.

La tension dans la voiture est insupportable, pesante comme une tempête qui gronde au loin. Chacun de nous semble porter la même colère sourde, mais nous savons parfaitement que rien ne sortira de cette réunion. Nous devons affronter nos démons, mais est-il vraiment bien de le faire maintenant ?

Somi, silencieuse, continue de fixer le paysage qui défile, son visage impassible trahissant des émotions qu’elle ne semble pas prête à partager. Je remarque ses mains tremblantes, nerveuses, et cela me déclenche une vague de sympathie. Pourquoi nous est-il si difficile d’en parler ?

"Joon-Woo," je dis finalement, la voix serrée. "Je ne veux pas voir ces photos. Cela ne nous apportera rien de bon. Et si on essayait d'oublier ? C'est ce que nous avons toujours fait."

Il me lance un regard noir. "Mais on ne peut pas continuer à fuir, Taehyung. Regarde où cela nous a menés."

Il a raison, à bien des égards. Mais affronter le passé, c'est une autre histoire, un chemin parsemé d’obstacles que je ne suis pas sûr de vouloir arpenter.



L’air conditionné de la voiture ne parvient pas à apaiser la tension montante dans l’habitacle. Joon-Woo, serrant le volant, fait rugir le moteur dans une symphonie de rage contenue. "J’en ai marre de la voir se pavaner, cette sorcière ! Elle se présente comme une défenseure des victimes alors qu’elle a détruit ma vie !" Sa voix explose, vibrant d’une colère dévorante.

Je détourne le regard, mal à l’aise. Comment avons-nous pu en arriver là ? Les souvenirs de notre passé commun s’entrechoquent avec la réalité de notre présent, une dissonance insoutenable. Je sens l’angoisse m’agripper le cœur. "Joon-Woo, il faut garder notre calme," je murmure, même si je sais que ce n’est pas la bonne chose à dire dans un moment aussi chargé.

"Calme ? CALME ?!" Il rigole avec une amertume qui me fend le cœur. "Elle a profité de nous, Taehyung ! Elle a pris des morceaux de moi que je ne pourrais jamais retrouver. Et maintenant, elle se croit intouchable !" Chaque mot sort de sa bouche comme une balle, tirée avec une précision à m’en faire mal.

Ses yeux, plongés dans une obscurité troublante, montrent à quel point il est proche de la rupture. "Je suis fatigué de voir cette... cette... cette perverse se jouer du monde. Chaque fois que je la vois, ça rouvre des blessures qui ne se refermeront jamais." Son ton brut est un cri du cœur, et je suis tout à fait conscient du pouvoir de ses mots.

Je suis paralysé, mes pensées se heurtent les unes aux autres. Comment pouvons-nous régler ça ? Peut-on vraiment effacer le passé avec une vengeance, ou cela ne ferait-il qu'empirer les choses ?

"Joon-Woo, arrête," fait Yoongi, en voyant Joon-Woo accélérer de plus en plus le véhicule. "On ne devrait pas faire ça. Pense à ce que tu es sur le point de faire. Cette violence ne te soulagera pas."

"Saisissons notre chance !" rugit Joon-Woo comme s'il n'entendait rien. Son regard est foudroyant, incandescent. Il se gare à proximité d'un bâtiment, son souffle haletant se mélangeant à la colère qui bouillonne. "Regardez là ! Je savais qu'elle sortirait d'ici à cette heure-là. Elle vient tous les mardis soir."

D'un coup, le reste du monde s'éteint autour de moi. Mon cœur se met à battre la chamade, une alarme stridente à l'intérieur de ma tête. La figure de Madame Seo apparaît, silhouette gracieuse, sans un soupçon de culpabilité, marchant avec l’arrogance de ceux qui se croient supérieurs. Je suis figé, mais je ne sais pas quoi faire. Chaque partie de moi crie de rester en dehors de cette situation, de quitter l’horreur avant qu’elle ne dégénère davantage.

"Joon, attends—" crie Selena, mais son mot se perd dans l'accélération du moteur.

Et tout se passe si vite. Aucune chance de réfléchir. Joon-Woo appuie sur l’accélérateur comme si un sort était jeté sur lui, la voiture bruyante s’élançant en avant. Il percute Madame Seo de plein fouet dans un fracas terrifiant, et en un instant, tout s’éclaire en une scène apocalyptique.

Les cris résonnent. "Joon-Woo, NON ! Arrête, STOP !" hurle Yoongi, sa voix résonnant comme un plaidoyer désespéré alors que le pare-brise se fissure et que des traces de sang ne se répandent dessus.

Mais il est trop tard. Le choc est brutal, dévastateur, et dans cet instant figé, je ressens une bouffée d'adrénaline mélangée à l'horreur. La réalité s'effondre autour de moi, chaque seconde semblant s'étirer à l'infini.

Les pleurs de Somi percent l’air silencieux, un chuchotement fragile devenu un cri strident alors qu'elle couvre ses yeux, impuissante face à la scène qui se déploie. "Non, non, non… c’est horrible !" Sa voix se brise, et je la vois se recroqueviller sur elle-même.

"Tu es fou, Joon-Woo ! Qu’as-tu fait ?" s'écrie Selena, sa voix brisée, la colère se mêlant à la peur. L'accusation dans son ton est tranchante, mais elle ne sait pas comment gérer l’ampleur de ce que Joon-Woo vient de faire.

La voiture continue de filer à toute allure, et je sens des émotions se heurter dans ma poitrine. Un profond désarroi. Une terreur sourde. Je ne peux pas croire ce qui vient de se passer. Comment ai-je pu assister à cela ? Je suis un complice involontaire, et chaque battement de mon cœur semble crier à tort.

"Peut-être qu'elle le mérite, après tout," Joon-Woo murmure, sa voix éraillée, comme si un profond désespoir l’étreignait. Plongé dans ses pensées sombres, il ne se rend même pas compte de l’ampleur de la catastrophe qu’il vient de provoquer.

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