𝘊𝘏𝘈𝘗𝘐𝘛𝘙𝘌 𝘛𝘙𝘌𝘕𝘛𝘌-𝘚𝘐𝘟 - la ferme des animaux

Elizabeth était en train de manger des gaufres.

Ce fut la première chose qui attira le regard de James lorsqu'il arriva, ce matin là, alors que Colin Jordan avait un bras dans le plâtre (il faisait ça tous les ans et James tombait dans la panneau à chaque fois) et qu'il lançait de lourds regards à Elizabeth, n'hésitant pas à accentuer sa douleur en faisant des grimaces plus douloureuses que la blessure en elle-même ne l'aurait été et en grognant de douleur toutes les cinq minutes depuis qu'elle était là;

que Severus Rogue cherchait Lily du regard à la table des Gryffondors, sans savoir qu'elle évitait cette table depuis l'accident pour ne pas le voir (ce qui forçait les filles à, à tour de rôle, lui rapporter à manger et manger avec elle dans le dortoir : ce jour-ci, Marlène était de garde);

que les yeux d'Erwin Shadows étaient presque cachés par les immenses cernes qui les soutenaient, épuisé par la lecture du livre qu'Elizabeth avait trouvé, L'encyclopédie des messages cachés et des langues oubliées (le livre avait d'ores et déjà été couvert de post-it d'Elizabeth, mais, ayant peur d'avoir raté quelque chose, elle avait proposé à Erwin d'effectuer une relecture, ce que le garçon, devenant peu à peu impatient de résoudre le secret qui les entourait, lui et Elizabeth);

et que, finalement, voici une semaine que les fantômes ne se présentaient qu'à un repas par jour, probablement bien trop occupés à tenter de retrouver l'être dont ils se plaignaient continuellement.

Pour James, cependant, la chose la plus étrange était qu'Elizabeth mangeait des gaufres. Et il sentait bien que ce n'était pas la seule chose qui clochait, ce matin-là, dans ce tableau assez restreint qui se dressait dans son esprit.

Enfin, "manger" était un bien grand mot pour décrire les petites bouchées qu'Elizabeth prenait, souriant de plaisir à chaque fois qu'un petit bout descendait le long de sa gorge, et cette simple vision fit sourire James. Non, Elizabeth dégustait sa gaufre, et James trouvait dans cet acte quelque chose d'à la fois drôle et attendrissant.

"Qu'est-ce qu'on fête, aujourd'hui?", interrogea-t-il en se glissant à côté d'elle, forçant un cinquième année, déjà plongé dans ses révisions de BUSE's qui avaient lieu des mois plus tard, à se décaler. Les yeux de James se tournèrent vers l'assiette d'Elizabeth, où l'un des quarts de la gaufre qu'elle avait soigneusement découpée sévissait, le priant presque de le manger. Il hésita un instant, apeuré de la réaction de son amie, avant de se rassurer lui-même en se disant -à bon escient- qu'elle l'appréciait trop pour le tuer si tôt dans la journée (et que se faire tuer par Elizabeth Lila Luck plus tard, en début d'après-midi, ce n'était pas la pire mort au monde).

"Potter...", soupira-t-elle, habituée. Elle fit un geste pour tenter de voler la fourchette qui avait si habilement volé sa propriété, mais James fut plus vif qu'elle, et il fourra le quart de gaufre dans sa bouche, la regardant droit dans les yeux. "Je vais commencer à penser que tu me fais passer un message, à toujours voler ma nourriture."

James leva les yeux au ciel, frappant délicatement l'arrière du crâne d'Elizabeth, la faisant pouffer (et ce même si elle aurait préféré réussir à garder une expression impassible, voir énervée, mais c'était au-dessus de ses compétences).

"Ce n'est pas ma faute si la nourriture a meilleur goût quand elle vient de ton assiette!

-C'est parce que je crache dessus.

-Pourquoi est-ce qu'on fêterait quelque chose?", les interrompit Remus avant que leur pseudo-dispute n'escalade et que l'un (probablement Elizabeth) étrangle l'autre (probablement James). James, pour la première fois depuis son arrivée, se concentra sur Remus, et c'est alors qu'il comprit enfin ce qu'il clochait. Elizabeth et Remus étaient collés.

Il n'était pas rare que ces deux-là soient collés, au contraire : il semblait parfois qu'ils étaient accrochés par les hanches. Mais pas le matin, jamais le matin. 'Les matins, c'est pour le café et le recueillement', avait-il un jour entendu dire Elizabeth, et qui était d'ailleurs une phrase qu'il ressortait quand bon lui semblait, changeant simplement "matins" par "après-midis" ou "soirées". Et dans ces rares moments où Remus et Elizabeth étaient proches dès le matin, c'était pour deux raisons : première raison, pour bénéficier du calme l'un de l'autre pendant quelques minutes (mais cela ne durait jamais bien longtemps, et, bien vite, les deux se séparaient de nouveau), ou bien, seconde raison, parce que quelque chose de grave s'était passé, dans quel cas ils pouvaient rester coller des matinées -journées, même- entières.

James analysa alors plus profondément le comportement corporel des deux, y cherchant des réponses claires. Il arrivait que James parvienne à avoir juste dans ses déductions, ne faisant qu'alourdir son égo déjà lourd comme un sombral mort, le "forçant" à s'en vanter auprès de ses amis.

Si Elizabeth arrivait de mieux en mieux à établir un contact physique avec ses amis (et avec davantage de personnes en général), il suffisait qu'un contact dure trop longtemps pour qu'elle se souvienne de sa condition et se retire, faisant revenir la chaleur corporelle mais partir une chaleur différente, au coeur, sûrement. Cependant, elle semblait être collée à Remus depuis assez longtemps et, spasmes qu'elle tentait visiblement de contrôler, elle ne lâchait pas prise.

Remus, pour sa part, semblait paniquer. Il était cependant évident pour James que ce stresse était bien plus une réaction due à "l'habitude" qu'à un stresse véritablement. Et pour cause: le pied de Remus tapait au sol dans un rythme proche de celui de Torrent de Chopin, mais le reste de son corps était des plus habituels, et il lui arrivait même de lâcher quelques sourires, ce malgré ses récurrentes mauvaises humeurs matin.

Néanmoins, ils étaient là l'un pour l'autre, "l'amitié parfaite", comme il avait entendu un élève plus jeune chuchoter à son ami, dégageant un brin de fraternité qui rappelait à James celui qu'il avait découvert bien trop tard à son goût, après si longtemps à avoir été fils unique, avec Sirius.

"Fêter quelque chose? Qui a parlé de fêter quelque chose? Tu perds la boule, Remi'." répondit-il nonchalamment, souriant de toute ses dents. Remus, un grand habitué des bêtises "à la James" laissa très vite tomber, préférant se concentrer sur ce qui le perturbait malgré lui, les yeux baissés sur la pyramide de gaufres qu'Elizabeth lui avait confectionnée. Elizabeth, elle, toujours intéressée par ses bêtises, ne quitta pas James du regard, ce qui tombait à pic pour James : il allait pouvoir enquêter davantage!

Alors, James se pencha vers l'oreille d'Elizabeth dont elle libéra le chemin en plaçant une mèche de cheveux derrière son oreille, par réflexe. James baissa la main qu'il avait levée malgré lui, ce geste qui avait été volé par la concernée, et lui chuchota, enfin :

"Qu'est-ce qu'il a, notre petit loup solitaire?

-Votre 'petit loup solitaire', il peut t'entendre.", maugréa Remus en levant les yeux au ciel, avant de rajouter, un peu plus fort pour être sûr que James l'entende, "Guignol.", puis de planter sa fourchette dans une gaufre en haut de sa pile pour la dévorer en deux bouchées. Il fut seulement coupé par le petit coup que James, qui avait du se pencher en arrière et tendre le bras vers Remus -se collant donc par conséquent à Elizabeth qui lui donna un petit coup dans les côtes- lui avait attribué derrière la tête.

"Eh bah dit donc, Rem, t'es de mauvais poil!", s'exclama James. Elizabeth ne put s'empêcher de pouffer (cette blague était bien plus drôle lorsque l'on comprenait sa profondeur!), ce qui poussa James à poursuivre : "On dirait bien que tu as-

-Si tu finis ta phrase par 'une faim de loup', tu ne verras pas la prochaine pleine lune."

James haussa les sourcils avant de pincer ses lèvres et de le sceller, mimant de jeter la clé derrière lui. Sans qu'il s'y attende cependant, Elizabeth se prêta au jeu et fit mine d'attraper cette petite clé qu'il avait lancée, avant de lui faire un clin d'oeil.

"Ça pourra me servir plus tard, mais en attendant...", elle imita l'ouverture de la serrure qui bloquait la bouche de James. "Je préfère quand tu parles.

-Est-ce que c'est le bon moment pour avouer que je ne comprends rien à ce qu'il se passe depuis ce matin?", James se tourna vers Dorcas, qui se grattait nonchalamment la joue. Même si ce geste était des plus mondains, James sentit son coeur s'accélérer à la trace rouge qu'elle avait laissé. Il fut surpris de son soulagement lorsque rien de plus n'arriva. Qu'est-ce qu'il lui arrivait?

La vérité était que James n'avait même pas remarqué que Dorcas était assise en face d'eux, et pourtant, c'était la même chose presque tous les matins depuis il ne savait quand. À vrai dire James avait récemment été frappé par la vitesse à laquelle sa routine avait été perturbée. Après tout, deux mois plus tôt, il ne connaissait Elizabeth Luck et Dorcas Meadowes que de noms.

Enfin, le fait était que voilà dix bonnes minutes déjà qu'il était assis là, et il ne s'était pas un instant aperçu que Dorcas était, elle aussi présente. Pourtant, Dorcas n'était pas le genre de personne qu'on pouvait se permettre de ne pas voir et, plus que tout, elle était une amie de James. Alors pourquoi la simple vision de Remus et Elizabeth sortant de la norme avait effacé le monde autour?

"Et-", commença James, tentant de faire disparaitre le gout amer de la culpabilité. Si seulement Elizabeth pouvait lui attraper le visage et lui fermer les lèvres de nouveau! Il n'aurait alors pas besoin de tenter de se racheter pour quelque chose dont personne n'était au courant. "Et tu n'as aucun indice?"

Désormais, il voyait Dorcas. Il voyait son expression déboussolée, presque énervée, non pas que James n'ait pas fait attention à elle -merci Merlin!-, mais plutôt parce que quelque chose se tramait, un secret rodait, et personne n'avait la bonté de lui en faire part. Il regarda alors Elizabeth qui, même si elle semblait vouloir rester impassible, ne put s'empêcher de lancer un regard en coin à Remus. Il se retourna alors vers Dorcas pour la voir hausser les épaules.

"Peter et Sirius sont arrivés vingt bonnes minutes avant toi, et ils ont presque tout de suite commencé à se fixer. Ça a duré environ trois jours, avant que Mr Remus ici-présent n'abrège leurs souffrances et leur disant 'Elle sait'. Et depuis, malgré mes véritables supplications, personne ne semble foutu de-

-Elle sait?", réagit presque tout de suite James, se tournant d'un coup vers Elizabeth et Remus. Ce dernier hocha solennellement de la tête, un petit sourire naissant sur le coin de ses lèvres, ce qui sembla avoir l'effet d'un ressort sur James, qui se leva pour reculer en vitesse vers la porte de la Grande Salle.

Ses yeux examinaient le visage d'Elizabeth, s'assurant discrètement qu'il n'y trouverait aucun dégout -même s'il était sûr et certain que ce ne serait pas le cas. Il se sentit tout de suite très bête de son action. Serait-elle assise là, collée à Remus, si elle le voyait comme un monstre ou qu'il la dégoutait? Lui lancerait-elle ce regard d'amour et de bienveillance qu'elle lui lançait au moment même et que, égoïstement, James voulait lui aussi recevoir?

Il ne cessa d'observer Elizabeth que quand la porte engloutit son corps, et ce même s'il ne lui avait fallu que quelques centimètres pour être persuadé de son acceptation. Lorsque la porte claqua, cependant, un nouveau chaos fit son apparition :

"Mais qu'est-ce qu'elle sait?!"





Elizabeth n'avait pas la moindre idée de comment elle s'était retrouvée là, dans le dortoir des garçons, avec ses derniers rodant autour d'elle comme des rapaces cherchant le meilleur angle pour attaquer leur proie.

Elle ne savait pas même pourquoi ils agissaient de la sorte, comme si elle n'était pas voulue dans la chambre, d'ailleurs : c'était eux qui étaient revenus dans la grande salle, le pas si ferme et coordonné qu'il n'y avait nul doute qu'ils s'étaient entraînés à l'avance, avant de lui attraper le bras pour la trainer. Dorcas et Remus n'avaient que maladroitement suivis, et Dorcas s'était retrouvée enfermée à l'extérieur, déclenchant en elle une certaine colère. À ce moment-là, elle était d'ailleurs en train de tambouriner contre la porte, espérant d'être incluse -même si elle n'en avait en vérité que très peu à faire, son but ultime étant de faire culpabiliser ses amis : après tout, ils n'étaient pas les seuls à garder des secrets.

Elizabeth aurait tout donné pour être capable de dire qu'elle ne connaissait pas cette chambre comme le fond de sa poche, et pourtant : aussitôt arrivée qu'elle s'était déjà naturellement dirigée vers le lit de Remus, s'asseyant à son bord (et elle aurait pu faire tout cela les yeux fermés).

C'était d'ailleurs tout autant naturellement que Remus était venu poser sa tête sur ses cuisses, ayant une belle vue sur le menton d'Elizabeth. Il avait décidé de laisser tomber l'idée de persuader les garçons d'arrêter d'embêter Elizabeth : après tout, ils avaient tout droit de vouloir tester sa confiance (même s'il savait très bien que personne ici ne doutait d'elle, sans quoi il aurait tout arrêté avant même que ça ne commence). Non, pour une fois, les maraudeurs préformaient un acte aussi innocent qu'attendrissant, et Remus n'allait pas être celui qui allait les en empêcher.

Elizabeth avait été la première personne avec qui il avait volontairement partagé sa condition. Ça le frappait, maintenant qu'il y mettait des mots. Elle n'avait pas découvert qu'il était un loup garou en le voyant se transformer -comme l'avaient fait les autres garçons-, non, les mots étaient sortis de la bouche de Remus alors que son esprit n'était pas sûr de le souhaiter. Cependant, si les mots étaient sortis, c'était que son coeur, lui, était prêt. Et ça, il l'avait compris lorsqu'Elizabeth avait ouvert cette fichue porte de toilette qui les séparait pour le prendre dans ses bras.

Remus avait l'impression, maintenant, d'avoir atteint son paradis personnel. C'était apaisait, comme des caresses le long de la nuque ou les bras d'une mère, de e plus être sur ses gardes, de ne plus craindre, chaque nuit de pleine lune, qu'Elizabeth ne laisse son côté "aventureuse" prendre le dessus et ne découvre son secret. Et le meilleur dans tout cela, c'était que c'était réel. Il ne l'avait pas ensorcelée pour qu'elle pense de la sorte, elle ne semblait pas vouloir mener des expériences scientifiques sur lui. Ils étaient encore et toujours Rem et Eli, avec comme seul changement un nouveau lien les liant entre eux. Rem et Eli, les condtition-ned. Les damnés.

Cependant, à côté du soulagement de Remus, on pouvait trouver l'intérêt de trois autres garçons, trois adolescents qui avaient toujours rêver de jouer au good cop/ bad cop, et ce sans s'être attribué les rôles auparavant. Sirius fut le premier à s'approcher, levant de deux doigts le menton d'Elizabeth.

"Dis moi joli coeur... Tu n'as pas répété ce que tu sais à qui que ce soit, pas vrai?", Elizabeth dû se retenir d'éclater de rire, mais le pire arriva lorsque James attrapa l'épaule de Sirius pour le décaler.

"Laisse moi faire, Black.", il se pencha en avant vers le lit de Remus, ce qui força ce dernier à ôter sa tête des cuisses d'Elizabeth, où il s'était logé. Il posa ses poing sur les draps, un de chaque côté d'Elizabeth, qui la fit se reculer en, cette fois, rigolant doucement. "Quelqu'un d'autre que toi sait?", il attendit avant de continuer, plus fort cette fois, ce qui fit tressaillir Sirius, "Hein?"

Elizabeth posa sa main sur son torse pour le repousser en arrière. Malgré tout, Elizabeth savait qu'une certaine inquiétude voletait dans les airs, invisible comme un mot mais bruyante comme un cri, ce qui faisait qu'elle savait aussi qu'elle devait faire attention à ce qu'elle répondait. Ils ne doutaient pas d'elle, ils savaient juste que, dans un monde où les loups-garous existaient, il était tout à fait possible que même Elizabeth pète un plomb.

"Je ne l'ai dit à personne, Potter.", il sembla dubitatif, alors elle rajouta : "Crois le ou non, mais je m'y connais assez en malédiction, et ça ne me viendrait même pas à l'esprit de crier au monde que mon meilleur ami est un loup-ga-", Elizabeth s'arrêta brusquement.

Il n'y avait aucune chance pour que quiconque ne les entende : ils avaient sécurisé la pièce avec un exsurdato, lancé d'abord par Peter, puis Remus, et enfin, pour s'assurer de la protection totale de la salle, par Elizabeth. Et pourtant, les mots qu'Elizabeth avait été sur le point de prononcer avait stoppé tout le monde net, comme si elle avait dit le nom du plus grand mage noir du monde magique.

Seul un expert de magie noire aurait pu déjouer le sortilège lancé par les adolescents, et pourtant, Elizabeth étant au coeur de plusieurs mystères étranges à Poudlard, elle n'était plus si sûre que personne ne pourrait l'entendre.

Alors, elle s'était tue. Puis elle reprit :

"Ce que je veux dire, c'est que j'ai assez de bon sens pour savoir que dire que mon meilleur ami est un être extraordinaire aurait davantage de conséquences néfastes que de conséquences positives."

James hocha pensivement la tête, ses yeux se posant sur un Remus dont le regard projetait tout ce qu'il pensait d'Elizabeth, et de la façon qu'elle avait de transformer ce qu'il était en quelque chose de bien moins horrible que la réalité aussi rapidement. L'éclat de panique qui était encore présent lors du petit déjeuner avait totalement disparu.

Finalement, grattant ses poils de barbe qui refusaient de pousser (malgré tous les sorts qu'il avait essayé pour s'assurer du contraire), Sirius énonça la seule information dont ils disposaient, la seule chose dont il était entièrement et complètement sûr :

"Alors tu sais tout."

C'était presque effrayant, de le dire à voix haute. Faire des blagues dessus, imiter des hurlements dans la forêt, tout cela ne servait qu'à limiter l'impact de la vérité, et ça marchait : grâce à cela, Remus avait presque l'impression que sa condition n'était qu'une simple maladie, courte et curable. Mais le fait qu'Elizabeth le sache, le fait que tous ses amis aient l'air si sérieux, c'était effrayant. Et Elizabeth, malgré la petite pique qu'elle avait au coeur de savoir que le fait qu'elle sache avait tout changé, comprenait alors pourquoi un pli d'inquiétude barrait le front des maraudeurs contre leur gré.

Remus remarqua la nouvelle expression d'Elizabeth, un sourire poli qui cachait un sentiment étrange qu'il n'était pas sûr qu'elle-même comprenait. Il remarqua aussi celle de ses amis, qui étaient gênés, qui avaient probablement le coeur serré et un sentiment de honte d'avoir eu, au fond d'eux, peur de la réaction d'Elizabeth. Alors, même si c'était lui qui subissait, lui qui aurait eu besoin de réconfort, il fit sa mission de changer l'expression de tous ses amis, parce qu'il comprenait qu'il n'était pas le seul touché par sa condition, que tous ses proches en souffraient. Et il fit ceci en prenant la parole :

"Elle sait tout, ouais. Et j'aurais presque voulu qu'elle ne sache jamais, mais elle sait et elle est là- elle reste là, parce que c'est... c'est Elizabeth."

Comment un prénom avait-il pu devenir adjectif, et comment cet adjectif non-déclaré pouvait-il avoir été compris de la même manière pour chacun des maraudeurs? Personne ne le savait. Et pourtant, c'était là, c'était réel. 

Sans que les garçons ne la regardent un fois, Elizabeth avait l'impression qu'ils la fixaient. Et pourquoi pas, après tout? Elle était Elizabeth. Gênée, elle fit un geste afin de prendre ses lunettes en main, prête à les essuyer, tout en entrouvrant la bouche pour commencer à parler, mais James l'arrêta en s'emparant des lunettes en levant les yeux au ciel. Commençant à les essuyer sur sa veste, il releva rapidement la tête en haussant les sourcils pour inciter Elizabeth à dire ce qu'elle semblait vouloir dire :

"C'est définitif alors? Ça signifie que vous ne comptez pas m'exécuter?

-Je débats encore sur le sujet.", répondit Sirius au-tac-au-tac, le sourire au coin de ses lèvres racontant cependant une goutte autre histoire que ses mots. James pouffa, s'approchant de nouveau d'Elizabeth pour reposer ses lunettes -maintenant propres- sur son nez, un rictus accroché à ses lèvres. 

"Non, Eli. Ça veut dire qu'on doit te montrer quelque chose.", Peter inspira dramatiquement, posant sa main sur les épaules de Sirius et James, retenant un sourire. 

"Vous pensez réellement qu'elle est prête. 

-C'est maintenant ou jamais. 

-Évitez de trop me la brusquer.", ajouta Remus. Elizabeth se tourna tout de suite vers lui, intriguée. Si ses mots auraient pu sembler bienveillants, ils avait cependant été dits avec une telle malice qu'Elizabeth se crut presque être en danger. Qu'était-il arrivé à cet air mélodramatique qu'ils avaient tous déployé suite au 'Elle est Elizabeth'?

Après avoir échangé un dernier regard les uns aux autres, tous les maraudeurs se dirigèrent vers la porte de leur dortoir d'une seule traite, Remus arrivant dernier puisqu'il avait été placé -d'un accord muet- à la charge de tirer Elizabeth hors de son lit. 

Elle finit par les suivre volontairement, après dix bonnes minutes de laisser ses pieds glisser sur le sol tandis que Remus la trainait et de :

"Allez les gars, dites moi! C'est pas cool!"




Elizabeth s'était attendue au pire (mais en même temps, ce n'était pas quelque chose dont une personne amie avec non pas un mais tous les maraudeurs pouvait se dispenser). Elle s'était imaginée enfermée dans une pièce, forcée de leur raconter le chose la plus gênante sur sa vie avant qu'ils ne la laissent enfin sortir; être amenée au terrain de Quidditch pour que James tente (encore) de lui faire rejoindre l'équipe une bonne fois pour toute; ou alors être jetée dans une salle de cours n'étant pas la sienne pour aucune raison valable. Et pourtant, elle les avait suivi (presque) aveuglément : dans tous les cas, elle savait qu'elle ne risquait rien de grave, avec eux. 

Cependant, cette dernière idée fut mise en doute lorsqu'elle se rendit compte qu'ils étaient en train de se diriger vers la forêt interdite qui, comme son nom l'indiquait, était interdite (pas que cela ne la dérange -elle même s'y rendait sans vraiment y faire attention lorsque Clément lui parlait d'une créature qu'il y avait aperçu, ou qu'Hagrid lui demandait de l'aide-, mais cela n'annonçait rien de bon venant des maraudeurs).

"Est-ce que je dois commencer à vous faire mes adieux ou vous comptez me garder en vie encore un peu?", demanda-t-elle en lançant un regard hésitant vers Poudlard, dressé derrière elle comme l'ombre d'un parent, lui rappelant qu'ils n'étaient pas vraiment censés être là étant donné qu'ils avaient cours dans moins d'une heure. 

"Pourquoi? Tu as peur, Luck?", se moqua James, surgissant de derrière elle en posant ses mains sur ses épaules, habillé de son sourire le plus arrogant. Elizabeth ne tressaillit pas un instant. À la place, elle tourna légèrement sa tête pour pouvoir voir son ami.

"Ça te ferait bien trop plaisir, Potter.", elle lui fit un clin d'oeil avant de retirer ses mains du bout des doigts, comme si elle craignait d'être infectée par elle-ne-savait-quelle maladie qu'il transportait avec Lui. Remarquant son action, James ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel, mais une idée sembla bien vite lui venir en tête, puisqu'il sourit diaboliquement. Avant qu'elle n'ait le temps de réfléchir, il approcha sa main de son visage, la faisant reculer. "James. James, n'essaie même pas."

Mais James continuait d'avancer, la menace enfantine de sa main se rapprochant dangereusement du visage d'Elizabeth, qui peinait à marcher en arrière en évitant de marcher sur des branches. Finalement, la voix de Peter résonna : 

"Eh James, c'est pas toi qui était impatient de lui montrer tu-sais-quoi?"

Elizabeth et James s'arrêtèrent, et Elizabeth fut étonnée d'être frustrée que ce jeu qu'elle avait pourtant eu l'impression de tant détester soit fini. 

"Oh, ne te mets pas martel en tête, on a tout le temps du monde.", répondit James, baissant cependant sa main pour la faire pendre le long de son corps. Il regarda alors de nouveau Elizabeth, donnant une petite pichenette sur le pont de ses lunettes. "On reprend ça plus tard, Luck. 

-Mmh à voir.", hésita-t-elle, lui rendant sa pichenette, ce qui provoqua un petit rire chez James. "Avec la chance que j'ai, je finirai sans issu, le dos contre un arbre. 

-Pas que ça me déplaise.", ricana-t-il. Elizabeth lui frappa le bras, les joues rougies par le simple fait qu'il puisse penser d'elle la sorte. 

"Garde tes répliques pour Lil's, Potter.", le réprimanda-t-elle. James perdit son sourire un instant, mais il fit en sorte de le revêtir le plus vite possible. "Peut-être qu'un jour, elle sera charmée par... ton charme? 

-Peut-être. En attendant, il me faut quelqu'un d'autre à embêter, et je crois que j'ai trouvé la personne parfaite."

Et, après avoir secoué les cheveux d'Elizabeth en deux-en-trois mouvements, James jogga légèrement pour rattraper le retard qu'il avait pris avec le groupe, laissant son amie le maudire sous sa barbe en essayant de se recoiffer. 

Après avoir démêlé au mieux ses cheveux (ce qui ne fut pas aussi compliqué que ça, finalement), Elizabeth fut heureuse de voir que Peter l'avait attendue, un peu en retrait des autres. Comprenant qu'elle l'avait vue, il tendit la main dans sa direction pour lui faire signe de le rattraper, ce qu'elle fit rapidement. Enfin arrivée à son niveau, il lui chuchota, d'une manière qui semblait à la fois imprévue et très préparée : 

"T'inquiète pas 'Liza, même avec les cheveux décoiffés, tu étais très belle.", Elizabeth sourit, et passa son bras sous celui de Peter. 

"Merci, Pan. C'est tellement dommage que certaines personnes ne soient pas comme toi.", répliqua-t-elle, accentuant sur le 'certaines personnes' afin que les autres garçons ne l'entendent. Cependant, seul Remus semblait avoir l'ouïe fine (ou alors, les autres préféraient faire la sourde oreille), puisque ce fut le seul à se retourner, fronçant les sourcils tout en mettant un doigt devant sa bouche pour lui faire signe de se taire. "Quel rabat-joie."


Elizabeth n'avait jamais été réellement effrayée par la forêt interdite. Pour elle, Poudlard et ses environs avaient toujours été les lieux les plus sûrs sur terre, alors jamais elle n'avait été complètement terrifiée à l'idée d'entrer dans la forêt interdite (même si, elle devait l'avouer, elle se méfiait toujours de ce qui l'entourait, par simple précaution). Mais avec tout ce qu'il s'était passé cette année, Elizabeth devait avouer que le bruit du vent, sifflant dans ses oreilles, et celui de feuilles craquant sous leurs pas ressemblaient anormalement à une super sonnerie qui lui annoncerait que quelque chose d'horrible était sur le point d'arriver. 

Il fallait dire que la météo, ce jour là, y était aussi pour beaucoup : en plus de l'air effrayant qu'Elizabeth donnait à la forêt, la nature avait joué de ses forces, si bien que d'énormes cumulonimbus gris foncés ornaient le ciel juste au dessus d'elle, grondant une fois toutes les cinq minutes -une autre sonnerie qu'Elisabeth rêvait de respecter-, et assombrissant cette forêt qui pouvait paraître si chaleureuse et accueillante l'été venu. 

Mais ce n'était pas tout : la forêt interdite était connue pour ses gigantesques et larges arbres, tous si identiques (et en même temps différents pour un oeil averti) les uns des autres avaient l'air, dans les beaux jours, d'immenses statues de Dieux Grecques placées dans un labyrinthe distingué et verdâtre. Dorénavant, ce labyrinthe semblait plus macabre, lugubre, stressant même, et les arbres avaient l'apparence de ces suceurs d'âme, les détraqueurs, qu'Elizabeth craignait tant. 

Une chose était sûre : cette année, ainsi que tous les événements qui avaient eu lieu, avait transformé Elizabeth en une froussarde (même si, elle devait l'avouer, elle avait déjà une bonne dose de froussardise dans ses gènes).

Il arrivait parfois qu'Elizabeth ne questionne le choix du Choixpeau de la mettre chez les Gryffondors, les braves et vaillants. Elle savait qu'il avait hésité -après tout, peu de personnes avaient la chance de patienter cinq bonnes minutes sous le scanner cérébral qu'était le Choixpeau-, et il lui arrivait de se demander si cette hésitation n'était pas due au fait qu'il avait vu cette faille en elle, ce manque flagrant de courage qu'elle pouvait ressentir chez elle. Et, s'il l'avait vue, qu'est-ce qui l'avait fait trancher pour les Gryffondors? 

Elizabeth allait souvent dans le bureau du professeur Dumbledore. Il lui arrivait d'y être convoquée simplement pour que Madame Pomfresh ait un endroit calme et sans oeil baladeur pour surveiller l'évolution de la condition d'Elizabeth, mais aussi pour bien d'autres choses. Et à chaque fois, elle passait devant ce Choixpeau, mourant d'envie de lui demander pourquoi. Elle avait tant de questions à lui poser, tant à savoir sur elle-même, et pourtant, elle n'avait jamais le cran. Peut-être que, finalement, elle avait peur que la réponse à ses questions ne lui plaise pas, qu'il avoue qu'il s'était trompé. Parce qu'Elizabeth avait trouvé une nouvelle maison, un refuge, chez les Gryffondors, et elle savait que savoir qu'elle n'aurait pas dû y être pourrait le briser. 

Elizabeth aurait bien continué de penser à ses failles pendant tout le trajet, mais quelque chose l'en dissuada. Son teint devenant plus blanc qu'il ne l'était auparavant, elle s'arrêta, tentant de calmer les bruits de son coeur pour que personne ne l'entende. Personne ne remarqua son arrêt : Peter avait rejoint les autres lorsqu'ils avaient parlé d'un prank à lancer sur le professeur Têtenbas durant l'un des prochains cours de Défense Contre Les Forces Du Mal, et ils avaient depuis été bien trop impliqués dans leur discussion pour porter plus d'attention que ça à Elizabeth. 

Ne regardant même pas leurs ombres continuer de s'enfoncer dans les bois, Elizabeth sortit doucement sa baguette de sa poche, espérant que la chose qu'elle avait entendue ne l'ait pas vue, et ne soit pas en train de se précipiter vers elle pour l'attaquer. Peut-être était-ce de l'écho, ou un coup de vent qui avait transporté une discussion jusqu'à ses ouvertes bien trop ouvertes. Le fait était qu'Elizabeth avait entendu quelque chose, et que, jusqu'à ce qu'elle se retourne, elle avait autant de chance d'être sur le point d'être attaquée que de ne rien subir. Elizabeth avait toujours trouvée simplette la théorie du chat de Schrodinger. Aujourd'hui, elle lui apportait un réconfort inimaginable.  

Ce fut en pensant à Peeves, à Erwin, à la porte qu'elle avait mystérieusement vue le soir de sa retenue avec Colin, et surtout à elle-même, qu'Elizabeth se retourna. Si elle avait la possibilité de résoudre l'un des mystères de Poudlard, l'un de ses mystères, elle n'allait pas laisser partir sa chance simplement parce qu'elle avait peur. 

Alors, tendant sa baguette comme un mordu aurait tendu un couteau de cuisine, Elizabeth fit un demi-tour brusquement, lançant au même moment un Expelliarmus sans même ouvrir sa bouche. Mais il n'y avait rien ni personne, simplement le noir intersidérale de la forêt derrière elle. À moins que... Elizabeth ne réfléchit pas plus. Le sort qu'elle avait lancé avait ricocheté contre un arbre, en faisant tomber une branche qui, si elle ne s'était pas décalée, aurait écorché bien plus que la paume d'Elizabeth. 

"El!", car la voix de Sirius, le plus vif du groupe, qui courut pour la retrouver. 

N'y avait-il réellement rien derrière elle? Ou Elizabeth tentait-elle d'enlever de son esprit la personne au corps allongé qu'elle avait vue, debout, derrière un arbre, les lèvres rouges comme du sang? Non, Elizabeth ne pouvait pas, plus, être passive à ce qui l'entourait, comme elle l'avait été les années précédents. C'était une nouvelle année. 

"Je savais que c'était une mauvaise idée de venir ici.", paniqua James depuis l'épaule de Sirius, qui avait attrapé la main d'Elizabeth pour observer la profonde griffure qui y figurait, quelques gouttes de sang perlant de la plaie. 

"C'est toi qui en a eu l'idée, idiot.", le réprimanda Sirius en poussant sa tête en arrière, le faisant tituber en arrière jusqu'à ce qu'il cogne dans Peter, qui le retint difficilement. Sirius se reconcentra alors sur Elizabeth : "Pas trop mal? 

-Ça dépend, je peux avoir un bisou magique?

-Dans tes rê-

-Quelle idée de s'arrêter, aussi! On est dans la forêt interdite, pas dans le jardin de ta mamie!", continua James en jetant les mains en l'air, en proie à une panique telle qu'on ne lui connaissait pas. Elizabeth fronça les sourcils et pouffa : 

"Eh James? Regarde.", elle pointa sa baguette vers sa main, que Sirius tenait encore, et lança un petit Episkey, qui répara sa main en un coup de baguette. Elizabeth cacha un petite grimace lorsqu'elle remarqua que, de part la profondeur de la plaie, son sort lui avait laissé une petite cicatrice, mais au moins elle allait bien. Elle regarda de nouveau James, qui hocha la tête en soupirant de soulagement. Avait-il toujours été si inquiet? Elizabeth découvrait-elle une nouvelle facette de James Potter? Elle n'en avait aucune idée. Mais trop y penser allait sûrement gâcher ce souvenir, alors elle se permit de ne pas trop le questionner. Juste celui-là.

Remus pouffa légèrement, ce qui sembla tout de suite détendre l'atmosphère. C'était un grand habitué des plats d'Elizabeth, il savait donc parfaitement qu'elle savait comment se rafistoler (il lui avait fallu deux ans pour se faire à l'idée qu'elle savait prendre soin d'elle, mais, désormais, cette information était ancrée en lui). 

"Pourquoi est-ce que tu t'es arrêtée?", la questionna-t-il à la place, se mettant sur la pointe des pieds -même s'il n'en avait clairement pas besoin- pour regarder au loin, derrière elle, cherchant la source de tous ces tracas. 

Elizabeth Lila Luck était loin d'être folle. Il était loin d'être rare, cependant, qu'elle ne remarque des choses que personne d'autre ne remarquait à prime abord, comme les cheveux blancs qui apparaissaient dans la touffe de cheveux de Remus lorsqu'une pleine lune arrivait, ou encore la façon qu'avait Sirius de plisser les yeux à chaque fois qu'on lui demandait de lire quelque chose. Cependant, coup de chance ou de malchance selon le point de vue, les choses qu'Elizabeth remarquait, cette année là, étaient bien plus atypiques, étranges, et ce même pour un endroit aussi magique que Poudlard, où tout semblait possible. 

Non, Elizabeth n'était pas folle, mais elle avait l'impression que le monde se révoltait pour la faire passer comme telle, et elle refusait d'être vue ainsi. Pas quand elle avait passé si longtemps à se faire moquer, et qu'elle commençait à accepter que les choses étaient telles qu'elles étaient.

 Elle refusait que ses amis parlent un jour d'elle comme ils parlaient occasionnellement de Sibylle Trelawney, une jeune sorcière de troisième année, une copie crachée de leur professeure de Divination, plus précisément, qui avait un jour arrêté Elizabeth en posant sa main sur son épaule en insistant sur le fait que 'quelque chose n'était pas normale', tout en déblayant quelque chose à propos d'une prophétie qui devait se réaliser, ou quelque chose du genre.

 Elizabeth avait alors eu la mauvaise idée d'en parler à Sirius, qui en avait aussitôt parlé à James, qui en avait parlé au reste du monde.

 Malgré tout, même si elle n'avait osé l'avouer à personne, Elizabeth avait été quelque peu... choquée par cette interaction des plus étranges et, désormais, dès lors qu'elle voyait Sibylle au bout d'un couloir, elle changeait de chemin.

"J'ai cru entendre un... un cerf.", bégaya-t-elle en se grattant le bras droit, souriant maladroitement. Peter pouffa, tandis que Sirius regarda James droit dans les yeux, haussant un sourcil connaisseur. James était bouchée-bée, et attendait patiemment qu'on lui annonce que c'était une mauvaise blague. Tentant de rendre son mensonge plus plausible, Elizabeth continua : "J'ai peur des cerfs. Une mauvaise expérience quand j'étais en cinquième année- l'année dernière, du coup. Depuis, je ne peux les voir qu'en photo, et encore!"

Remus éclata de rire, se rapprochant de James pour lui taper amicalement dans le dos. Celui-ci paraissait à la fois amusé et blessé. Ignorant les fous rires de ses amis, il s'approcha d'Elizabeth pour lui passer le bras autour du cou, la faisant avancer, collée contre lui, suivi par les autres, s'enfonçant encore et encore dans l'infinité de la forêt interdite.

"Tu sais Elizabeth, les cerfs ne sont pas si diaboliques que ça..."

Et de nouveau, un fou rire pour Sirius. Si Elizabeth voulait voir ce que les garçons avaient à lui montrer, il valait mieux qu'elle se taise, elle le sentait. Elle n'était pas à l'abri de la décision soudaine de l'un d'entre eux de rebrousser chemin, suite à quoi elle ne saurait jamais ce qu'ils avaient souhaité lui montrer. 

Il fallut dix bonnes minutes pour que James ne cesse son plaidoyer pour les cerfs, et cinq minutes de plus pour que les rires ne cessent complètement (même s'il était possible d'entendre, par moments, des petits pouffements de Sirius). Alors, décidant qu'ils étaient allés assez loin dans la forêt interdite, Peter arrêta tout le monde.

"C'est ici que vous comptez m'assassiner?", demanda Elizabeth en observant les alentours. Les garçons se regardèrent. Pourquoi était-elle si persuadée qu'ils comptaient se débarrasser d'elle? 

À quelques pas, elle aperçut un petit étang dont la pierre le surmontant était couverte de mousse verte. L'eau était étonnamment claire, mais Elizabeth savait qu'il ne fallait jamais se fier aux apparences, surtout dans la forêt interdite. Elle attrapa un petit caillou à ses pieds et le jeta dans l'étang. Aussitôt, il rebondit et cogna contre l'épaule de Peter, qui couina. Elizabeth tenta de se retourner pour s'assurer qu'elle n'avait pas blessé son ami trop gravement, mais elle s'arrêta mis chemin, lorsque Sirius cria :

"Ne te retourne pas, on est nus!"

En deux secondes, elle regardait de nouveau l'étang et, pour davantage de protection, la main de Remus vint couvrir ses yeux.

"C'est quelque chose que vous faites souvent?", demanda-t-elle malicieusement, avec un petit sourire. "Emmener une jeune fille innocente dans la forêt avant de vous déshabiller devant elle?"

Le bruit de vêtements étant retirés s'arrêta, et Elizabeth pouvait imaginer les garçons se regarder un à un, se rendant compte de leurs agissements et de pourquoi Elizabeth avait eu l'air de trouver cela si étrange. Si ce qu'ils allaient faire était évident pour eux, elle n'avait reçu aucun indice, aucune indication sur le pourquoi du comment. Après quelques secondes, Peter répondit :

"Bah généralement, c'est Remus qu'on amène-", le bruit d'une main frappant son crâne retentit, faisant pouffer Elizabeth.

"Mais non Eli, t'es la seule à avoir ce privilège.", le corrigea Sirius d'une voix mielleuse.

"Techniquement, on se déshabille derrière toi.", observa James, avant de murmurer : "Je ne sais pas si c'est vraiment mieux, finalement...

-Et puis, tu n'es pas vraiment innocente.", fit nonchalamment Remus. 


Après un petit moment, Remus autorisa Elizabeth à se retourner. Alors, ses yeux s'écarquillèrent. L'endroit où ses amis étaient quelques minutes auparavant était désormais vide de présence humaine, puisque deux animaux y figuraient. Parmi eux, on pouvait observer un énorme chien noir qui ressemblait étrangement au Sinistros, si on pouvait croire son livre de Divination. Le chien vint néanmoins presque tout de suite se placer sous la main d'Elizabeth, quémandant des caresses. À ses côtés se trouvait un gigantesque cerf, aussi majestueux que fier -sûrement James-, dont les yeux fixaient Elizabeth comme pour observer sa réaction. 

"Des Animagus.", murmura-t-elle pour elle-même. Remus hocha la tête sagement, avant de s'avancer pour ramasser quelque chose à terre. Alors, Elizabeth comprit où était passé son troisième ami, Peter -parce qu'il était inimaginable qu'il ait pris la forme du gros chien noir-, qui s'était transformé en rat, et que les grosses pattes du cerf cachaient jusqu'alors.

"Ils essayaient de se transformer depuis qu'ils savent mon... secret. Depuis la troisième année. Ils n'ont réussi que l'année dernière, et restent avec moi durant toutes mes transformations, à chaque pleine lune."

Remus aimait infiniment ses amis et Elizabeth pouvait voir que c'était réciproque. Elle-même avait été fascinée par les animagus depuis qu'elle avait vu le professeur McGonagall se transformer en chat, en troisième année (elle n'avait pas eu besoin de se changer, elle, mais ce talent venait sûrement avec le temps), ce qui faisait qu'elle savait à quel point il était compliqué et long d'en devenir un. Il était presque impossible d'en devenir un par accident (presque, parce qu'Elizabeth savait à quel point le monde magique était rempli de possibilités).

Remus regardait ses amis, les yeux remplis d'un amour infini et inimitable, si bien qu'il lui fallut une bonne minute avant de se reprendre et de demander à Elizabeth, les yeux froncés.

"Tu n'as pas peur de James?", les joues d'Elizabeth se tintèrent de rose, et elle s'approcha de James pour poser sa main sur son nez -ou plutôt sa mufle-, gagnant du temps afin d'inventer un mensonge passable. Elle le caressa deux fois, l'animal se fondant dans sa main, et finit par dire :

"Il ressemble plus à un élan qu'à un cerf, pour être honnête."

James se figea, avant de s'écarter brusquement, vexé.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top