𝘊𝘏𝘈𝘗𝘐𝘛𝘙𝘌 𝘘𝘜𝘈𝘛𝘙𝘌 - cauchemar&co.


ELIZABETH se réveilla en sursaut, ses cheveux humides accompagnant ses mouvements vers l'avant. Une goutte de sueur glissa de la naissance de sa chevelure pour couler sur son front, tombant finalement sur son nez. Elle l'essuya d'un coup de main, ne réprimant même pas une grimace dégoûtée. Elle s'était toujours demandée pourquoi, quand son corps ne pouvait pas chauffer, la transpiration était le côté désagréable de la chaleur qu'elle avait gardé. N'était-ce pas assez d'être condamnée à vivre une vie sans jamais ressentir la chaleur du feu de sa salle commune, ou même cet élément essentiel que les gens aimaient dans une étreinte ? 

Au moins, son problème avait apporté quelque chose qu'elle aimait à qualifier de positif (parce qu'elle devait bien se forcer à trouver des côtés positifs à la chose, non?). Elizabeth avait appris à se concentrer davantage sur ses sens, et presque rien ne lui échappait. Elle semblait s'ancrer particulièrement sur le toucher et, petite, elle se trouvait souvent à tenter d'imaginer, de se souvenir, de la sensation de chaleur qui venait avec un contact. Elle pouvait ressentir la différence du goût entre quelque chose qui était censé être froid, et quelque chose qui était censé être chaud, mais pas à cause de leur température.

La sueur normalement tiède, parfois froide, pour les autres lui était terne, et la seule sensation qu'elle lui donnait était un léger chatouillement (sans compter le dégoût). La larme solitaire qui coulait sur sa joue, elle, était un échantillon de la mer qui emplissait son corps.

L'essuyant rapidement de son visage -ce qu'elle aurait eu l'air bête si quelqu'un l'avait vue pleurer après un cauchemar !-, elle renifla, et regarda autour d'elle. Seule la lumière de la presque-pleine lune et le scintillement des étoiles éclairaient la pièce, de leur lueur opposée qui, pourtant, se liait si bien l'une à l'autre.

Elizabeth avait toujours été de ceux qui préféraient la nuit à la journée. De jour, tout le monde semblait heureux, plein de vie, rayonnant de la même manière que le faisait le soleil dans le ciel. Mais la nuit, ô, la nuit. Les secrets revenaient, la nuit. Le mystère pointait le bout de son nez. La peur et la tristesse se montraient, comme la lune montant dans le ciel. Tout cela plaisait à Elizabeth, et ça depuis enfant. Au fond, pensait-elle, la nuit était un peu comme elle.

La vue de ses trois camarades en train de dormir sous cette lumière si spéciale détendit presque Elizabeth, qui profita de cette émotion pour s'allonger de nouveau sur son matelas. Le fin drap sur son corps -elle avait d'ores et déjà envoyé valser ses grosses couvertures-, les fines gouttelettes de transpiration créant des petites tâches d'humidité voyantes sur la blanc du tissu.

Elle savait les signes de la chaleur -elle avait passé tant de temps à les prétendre, plus jeune, qu'elle était familière avec eux... et puis, c'était utile de savoir comment agir sous un grand soleil d'été pour ne pas avoir de corps de chaleur-, ce qui faisait qu'elle savait très bien que toute cette transpiration ne pouvait être que négative.

Soupirant délicatement pour ne pas réveiller ses colocataires, elle décolla de son corps le drap, le faisant tomber au sol d'un bruit étouffé qui lui fit grincer les dents. Alors, elle positionna sa tête sur son oreiller, et ferma les yeux.

Toujours pas. Chaque fois que le noir de ses pupilles effaçaient la vision de sa chambre, son esprit projetait des images de son mauvais rêve, comme pour se moquer d'elle. "Tu ne peux pas fuir". Sa main s'agrippa à son drap de frustration, et elle se redressa en position assise sur son lit en jurant doucement. Il n'y avait aucune chance pour qu'elle ne se rendorme. Pas après ça.

Elizabeth descendit de son lit, posant directement ses pieds dans de petits chaussons dont la matière la réconforta un poil. Sur la pointe des pieds, elle marcha jusqu'à la vitre. Lorsqu'elle en fut assez proche, elle tendit sa main, et pouffa comme une enfant lorsque le verre se couvrit d'une petite buée. Elle étendit son index et toucha la fenêtre, permettant à une multitude de petits flocons de se créer, avant de fondre rapidement. Elle avait hâte que la température baisse à Poudlard : ainsi, ces formes restaient, et ça lui ferait plaisir de voir Lily et Marlène, deux de ses camarades de chambre, les admirer comme si elles étaient des oeuvres d'art.

Maintenant qu'elle était totalement réveillée, la sueur qui avait couvert son corps un peu plus tôt n'avait de cesse de se refroidir, avant d'être rattrapée par la douce chaleur ambiante et de fondre. Elizabeth trouvait cela tristement amusant : la malédiction qu'on lui avait lancée faisait d'elle un obstacle à la nature.

Attrapant ses lunettes sur sa table de nuit, elle les essuya rapidement sur son tee-shirt et les enfila pour y voir plus clair, son regard bleu ancré sur la forêt interdite, et la cabane du garde de chasse, Rubeus Hagrid, avec l'idée qu'elle devait passer le voir le plus tôt possible : cela devait faire une bonne semaine qu'ils ne s'étaient pas parlés, et la douceur de l'homme lui manquait atrocement. Pas que ses autres amis n'étaient pas doux, non, seulement, Hagrid et sa passion pour les animaux fantastiques lui rappelaient sa grand-mère et, avec lui, elle se sentait un peu plus chez elle.

Elizabeth recourba ses jambes sous sa poitrine, et elle posa sa joue sur ses genoux. Ses yeux étaient désormais vers le sol à côté d'elle, où le désastre qu'elle avait créé avec toutes ses affaires jonchait. Son drap était en boule au sol, avec son pan bas gauche coincé sous son matelas. En dessous, on pouvait voir la plume de Peter -qu'elle avait pourtant posée sur sa table de nuit la veille-, et un angle du parchemin ensorcelé de Remus.

Elle haussa l'un de ses sourcils en regardant le bout de papier. Et si... ? non, elle ne pouvait pas. Et pourtant... Pinçant les lèvres, Elizabeth tendit son bras pour attraper entre deux doigts le parchemin, puis la plume. Après tout, elle n'était pas prête de se rendormir. Qu'y avait-il de mal dans demander de la compagnie à son meilleur ami ? Au pire, il était endormi et ne voyait pas le message avant le lendemain, au mieux il le voyait, et ils attendaient le lever de soleil ensemble, comme ils l'avaient déjà fait tant de fois.

Trempant la plume dans un pot d'encre noire, Elizabeth réfléchit profondément à ce qu'elle pouvait bien écrire. Cela ne devait pas être trop vague, "Salle Commune maintenant" ne ferait qu'alarmer le pauvre garçon. Elle ne pouvait pas non plus écrire "Es-tu éveillé ?" -même si l'idée traversa rapidement son esprit encore un petit peu dans les vapes-, parce que le garçon ne pourrait rien répondre. Ce n'était pas un parchemin à double-sens, malheureusement. Tout ce qu'il pouvait faire pour y répondre, c'était monter dans le dortoir des filles, et Elizabeth n'était pas sûre que les autres filles soient heureuses de découvrir Remus Lupin dans leur chambre au beau milieu de la nuit.

Elle tapota deux fois son ongle contre la plume, frustrée de ne pas trouver quoi écrire. Elle leva la tête vers le plafond de sa chambre et, avant que ses yeux ne se posent sur le lustre en son milieu, une idée jaillit dans sa tête. Les coins de ses lèvres se redressèrent en un sourire satisfait, et elle posa enfin la plume sur le papier : "Peux pas dormir, rendez-vous dans Salle Commune. J'y serai pour environ 30 minutes.". Elle hésita un instant, avant de signer du surnom "Flocon". Peut-être qu'ainsi, en utilisant ce surnom maudit, et pourtant si justement choisi, Remus se rendrait-il compte de la nature de son mauvais rêve.

D'un pas de loup, Elizabeth se dirigea vers sa valise pour y attraper un bas de pyjama rayé. Après tout, elle avait beau être très proche de Remus, elle ne pouvait pas arriver jambes nues en face de lui. Et puis, et si d'autres personnes avaient eu la même idée qu'elle, et étaient descendues dans la salle commune à cette heure ?

Elle s'approcha de la porte, et, la main sur la poignée, elle entendit une grognement qui la fit sursauter. Elle attendit quelques secondes pour voir si le son allait se reproduire, ou si c'était simplement un fragment de son imagination, mais quand le grognement se fit entendre une nouvelle fois, Elizabeth se jeta presque sur sa baguette, et lança un Lumos pour s'éclairer.

Elizabeth ne s'attendait à rien de précis : elle était dans un château magique où les portraits parlaient et les escaliers bougeaient, elle avait appris à ne pas se poser trop de questions. Cependant, Elizabeth ne s'attendait pas non plus à trouver une Lily Evans respirant hâtivement, sans doute au beau milieu, elle aussi, d'un cauchemar. Sans hésiter un instant de plus, elle se précipita vers le lit de Lily, qui s'était redressée d'un coup.

"Eh, ça va ?", demanda Elizabeth en s'accroupissant aux pieds du lit de Lily. Elle savait bien que Remus l'attendait potentiellement en bas, mais Elizabeth ne pouvait cesser de penser à propos de ô combien elle aurait aimé avoir quelqu'un près d'elle, dix minutes plus tôt, lorsqu'elle s'était réveillée d'un cauchemar.

Les deux filles n'avaient pourtant jamais été très proches. Plus précisément, la dernière fois qu'elles s'étaient parlées, c'était au club de Slug qui avait eut lieu moins de deux semaines auparavant -et encore, la seule raison pour laquelle elles s'étaient parlées, étaient d'esquiver les élèves prétentieux qui n'attendaient que de vanter leurs vertus-.

Néanmoins, elles ne pouvaient pas nier aimer la présence l'une de l'autre : si Lily avait au départ craint qu'Elizabeth ait le même caractère que d'autres populaires -comme James Potter-, elle avait vite découvert que ce n'était pas le cas. Elizabeth était même de très bonne compagnie, et ça peinait Lily de n'avoir découvert cela que tard durant leurs cinq années de partage de dortoir.

De son côté, Elizabeth avait tout de suite apprécié Lily. Elle lui rappelait beaucoup Remus dans sa façon d'agir -même si le côté espiègle qu'elle trouvait très souligné chez le garçon l'était bien moins chez Lily, voire presque inexistant-.

Aucune des deux ne savait réellement la raison pour laquelle elles ne s'étaient jamais parlées plus que ça. Il aurait pourtant suffit d'une sortie pour savoir cela. Même leurs amies semblaient s'apprécier entre elles ! Tout était disposé de sorte à ce que les quatre filles du dortoir s'entendent parfaitement, mais jamais n'y avait-il eu de déclic. Enfin, jusqu'à ce soir là.

"Un mauvais rêve, c'est tout."

Elizabeth était une bonne menteuse, en général. La plupart du temps, en tout cas, elle arrivait à se sortir de situations par le mensonge ou le déni. Cette qualité -était ce vraiment qualifié comme une qualité ?- faisait qu'elle arrivait aisément à voir quand on lui mentait. Ou peut-être Lily Evans était tout simplement une très mauvaise menteuse. Il y avait quelque chose de plus. Ce n'était pas "tout", comme Lily l'avait affirmé.

Il s'agissait probablement de la deuxième hypothèse puisque, à la simple rencontre des yeux d'Elizabeth, Lily replaça une mèche de ses longs cheveux roux derrière son oreille, et admit :

"C'est juste que- tu sais, avec la guerre et la menace envers les moldus et nés-moulus, je panique un peu", nouveau regard d'Elizabeth. "Un peu beaucoup. Ça ne t'arrive jamais, à toi ?"

Non, ça n'était jamais arrivé à Elizabeth. Aussi égoïste que cela puisse paraître, Elizabeth avait d'autres choses auxquelles penser que ça. Elle était au courant de la guerre sans merci, et qui paraissait sans fin, contre les forces du mal, mais elle ne s'était jamais vraiment attardée dessus, comme si elle et sa famille étaient protégés de tout, que rien n'allait leur arriver. Les mots de Lily firent monter une angoisse nouvelle en elle, mais elle fit de son mieux pour la ravaler. Elle serait forte pour deux, ce soir. Regardant Lily avec des yeux pleins de confiance, sa bouche se mit à chuchoter d'elle même, récitant un discours qu'elle n'avait même pas appris :

"Pas vraiment, non.", Lily écarquilla les yeux de surprise. "Nous sommes à l'abri ici, avec Dumbledore. Quant à nos familles- je sais qu'ils auront une solution. Les miens, par exemple, ont décidé de partir chez ma grand-mère, si les choses se compliquent. Elle vit à la campagne, tu vois ? C'était son rêve d'enfance et, une fois mariée, elle l'a réalisé.", Lily hocha la tête, se laissant emportant dans l'histoire. "Elle a une grande maison, assez éloignée de la population, avec une grange rouge juste à côté. Maintenant que mon grand-père n'est plus là, elle vit avec ce chien -un Saint Bernard- qui fait ma taille debout.", Lily ricana en imaginant l'image, et son visage semblait s'apaiser, bercée par les voix et les gestes d'Elizabeth. "Tous les trois jours, l'aide aux personnes âgées lui rend visite pour s'assurer de sa santé. Une fois, elle en a eu marre et s'est cachée dans la grange. Ils l'ont cherchée pendant deux heures."

Lily rigola une nouvelle fois, cette fois un peu plus fort, et dut cacher sa bouche avec sa main pour que le son de sa voix ne réveille pas les autres.Elizabeth sourit chaleureusement, soulagée de réussir sa mission. Au moins l'une d'entre elle serait guérie de son mal, même si ce n'était que pour une soirée.

"Elle a un énorme potager, tu sais. Elle me laisse l'entretenir quand je vais la voir -donc dès que je sors de Poudlard, mes parents travaillent beaucoup-. J'avoue avoir ruiné quelques plants au départ, mais avec le temps, je me suis avérée être très douée.

-C'est pour ça que tu aimes la botanique ?", s'intéressa Lily, penchée vers Elizabeth tant elle était intéressée par ses dires. Tout de suite, Elizabeth secoua les mains, et répondit :

"Oh non ! Je n'aime pas la botanique.", Lily hocha la tête, mais ses yeux disaient le contraire. Elizabeth lui donna une petite tape sur la jambe. "C'est pas une blague ! Tout ce que je note, c'est pour ma grand-mère. Je lui écris tout dans mes lettres. Elle m'a même fait promettre de lui rapporter un peu de l'engrais magique qu'ils utilisent pour les mandragores. Mais, bien-sûr, c'est un secret."

Lily traça une croix sur son coeur, promettant de ne rien dire. Elle eut l'air pensive un instant, avant de sourire tendrement. Elle posa alors sa main chaude sur la bras presque gelé d'Elizabeth, se battant avec elle même pour ne pas sursauter à sa température -elle savait que cela ne ferait que blesser la fille qui venait de lui partager un bout de sa vie-, et ouvrit la bouche pour dire :

"Elle m'a l'air incroyable, ta grand-mère !

-Crois le ou non, c'est ce que tout le monde me dit.

-Oh, je te crois. Tu penses que je pourrai la rencontrer, un jour ? Je pourrais même lui faire rencontrer mes parents, tiens ! Mon père a tenté le jardinage, il y a deux ans, et ça a fini en parcelle de jardin brûlé. Ma mère se demande encore comment c'est arrivé, et ma sœur est persuadée que c'est moi qui ait trafiqué quelque chose. Peut-être que ta grand-mère et toi pourraient lui donner des conseils !", Elizabeth hocha la tête, pouffant face à l'enjouement de Lily, qui était bien plus communicatif que prévu. "Eh,", s'arrêta brusquement Lily, surprenant Elizabeth. "Qu'est-ce que tu faisais réveillée, d'ailleurs ?

-Mauvais rêve aussi.", fit-elle véridiquement, avant d'enchaîner rapidement pour ne pas qu'on lui pose trop de questions : "J'allais descendre pour tenter de voir Rem, tu m'accompagnes ?

-Oh, du moment que James n'est pas là, ça me va !"

Elizabeth aurait éclaté de rire si Lily n'avait pas couvert sa bouche de ses deux mains pour l'en empêcher.

Lily Evans était de nature curieuse, c'était une des peu de rumeurs sur elle qui étaient vraies (en même temps, entre ça et la rumeur qu'elle était secrètement mariée à James -elle était presque sûre que c'était le garçon qui avait lancé cette rumeur-...). C'était si vrai que, lorsqu'elle sentit que le visage d'Elizabeth, lui aussi, était froid, elle voulut plus que tout lui demander ce que tous se demandaient : comment était-ce arrivé ?

Mais, parce qu'il fallait bien un mais, Lily Evans avaient d'autres rumeurs véridiques à son sujet. Elle était respectueuse et respectable, sûrement plus que la plupart des autres élèves de Poudlard. Alors, elle mordit sa langue pour empêcher les mots de sortir de sa tête. À la place, elle poursuivit sa phrase, faisant redoubler le rire d'Elizabeth :

"Au début c'était marrant, mais ça fait cinq ans, par la barbe de Merlin !

-Allons-y. On ne veut pas faire attendre Lupin, n'est-ce pas?"

Lily se leva de son lit, agrippant toujours la main d'Elizabeth pour sortir du dortoir. Si, au début, elle avait mené la marche, les rôles s'inversèrent lorsqu'elle ralentit pour fermer précautionneusement la porte derrière elle. Alors, Elizabeth passa devant, et tira Lily dans les escaliers, descendant à une cadence inhumaine, apeurée d'avoir raté Remus. Les deux filles devaient bien avoir passé dix minutes à parler, là-haut. Et si Remus était descendu, ne l'avait pas vue et était remonté ?

Deux soupirs se firent entendre, lorsqu'elles arrivèrent dans la salle commune des Gryffondors. Si l'un était un soupir à cause de la marche sportive qu'elle venait d'endurer -Lily n'était pas vraiment un fan de sports-, l'autre était un soupir de déception. Illuminant la pièce de son puissant sortilège de Lumos, Elizabeth n'aperçut pas la longue silhouette de Remus, qu'elle avait appris à reconnaître après ces années d'amitié. La cheminée avait encore quelques braises, des traces d'affaissement se voyaient encore sur l'un des deux canapés en face de celle-ci, mais Remus Lupin n'était pas présent.

Elizabeth se retourna vers Lily, qui avait avancé à ses côtés, et lui lança un regard désolé, s'excusant silencieusement pour l'avoir entraînée pour rien. Si elle n'avait rien fait, peut-être que Lily serait déjà rendormie dans son lit, à rêver du petit bout de paradis que semblait être la maison de la grand-mère d'Elizabeth. Cependant, Lily l'excusa d'un mouvement de la main, prétextant qu'après la discussion qu'elles avaient eu, elle se sentait totalement éveillée. Il n'y avait, d'après elle, "aucune chance qu'elle se rendorme", malgré l'heure qu'affichait la grande horloge. Cinq heure trente.

Tic

Elles s'assirent "gracieusement" sur le canapé -elles tombèrent davantage dessus-, en face des restes du feu. Quelques lueurs rouges semblaient s'amuser dans la cheminée, dansant l'une avec l'autre dans un spectacle hypnotisant.

Tac

Autour d'elles, de nombreuses boîtes de jeu étaient posées ci et là. Si certaines étaient rangées dans les étagères prévus pour ça, d'autres étaient encore ouvertes, ou bien grossièrement empilées les unes sur les autres.On voyait des jeux d'échec, magiques ou non -même si ça ne changeait rien pour Elizabeth, qui ne savait jouer à aucun des deux-, jeux de cartes, de dames : on pouvait trouver de tout.

Tic

La salle commune des Gryffondors était accueillante. Au fond d'elle, Elizabeth pensait que nulle autre salle commune ne pouvait être plus chaleureuse : après tout, les couleurs automnales de Gryffindors ne faisaient que renforcer le confort que la salle amenait. On pouvait la comparer à un chalet de montagne, ceux auxquels on se rend avec sa famille pour y trouver un sentiment de sûreté. Le rouge et l'or soulignaient vraiment la beauté de la pièce.

Tac

Un bâillement sortit de la bouche d'Elizabeth qui, au contraire de Lily, se fatiguait de plus en plus. Qui aurait pu croire que raconter sa vie pouvait être si fatiguant ? Elle se pencha légèrement pour poser sa tête lourde sur l'épaule couverte de son amie, qui sentit tout de suite le frais s'approcher d'elle, lui transperçant les vêtements. À peine Elizabeth eut-elle fermé les yeux qu'elle se rappela de la raison pour laquelle elle n'avait pu s'endormir en premier lieu. Elle avait hâte que Remus -et sa façon de la rassurer- se pointent.

Tic

"Bonsoir mesdames !", fit une voix derrière les deux filles, les faisant sursauter en même temps. Se retournant d'un coup sec, Elizabeth reconnut Sirius Black, et un soupir de soulagement quitta ses lèvres. Faisant bien attention à ce qu'il la voit, elle leva les yeux au ciel, gagnant de sa part un regard qui se voulut mauvais, mais qui finit par se remplir de joie, accompagné d'un petit sourire. "Vous en avez mis du temps, j'ai cru que c'était une blague. Vous imaginez, me faire une blague, à moi ! Ç'aurait été le comble.

-Donc tu nous as vu descendre, et nous as espionnées dans le noir ?", demanda doucement Elizabeth en se massant l'arête du nez, déjà épuisée par le garçon.

"Ouais.", il avait l'air fier, et, étrangement, le sourire sur ses lèvres réussit à en provoquer un plus discret, mais toujours visible, sur le visage d'Elizabeth.

"Wicked.

-Tu n'as pas contacté Remus ?", Lily coupa court à leur conversation. Elle n'avait rien contre Sirius, pas vraiment, c'était juste qu'elle ne savait pas si elle allait être capable de supporter un James 2.0, avec l'obsession sur elle en moins. Remus, au moins, savait se montrer sérieux de temps à autre. Sirius inspira profondément, feignant le choc face à ses mots.

"Tu me blesses, Evans. Moi qui croyait que ma présence allait te réjouir ! Flocon, elle, sait quelle joie c'est de m'avoir en sa présence, pas vrai ?

-Y'a pire.", déclara-t-elle nonchalamment. Sirius la remercia d'un signe de tête, tandis que Lily soupira.

"Si ma présence ne suffit pas à la grande Lily, je peux toujours aller chercher Potter...", il fit mine de reculer en direction des escaliers menant à son dortoir.

"Par Merlin, non !", s'exclama Lily en se jetant sur le dos du canapé, le bras assez tendu pour retenir Sirius par la manche, et l'attirer vers elle. Il laissa échapper un rire moqueur, haussant un sourcil.

"Pas besoin de crier, Evans.", rétorqua-t-il joyeusement. "Je sais que, malgré ton grand amour pour James -hum hum-, il ne vaut rien quand je suis là.

-Si tu veux.", céda finalement Lily, reposant son dos contre le canapé.

Elizabeth parlait étrangement peu. Un mélange de déception et de contentement se lisait sur son visage : elle aurait préféré que Remus soit à ses côtés, mais ces deux là pouvaient bien suffire-. Le spectacle qu'ils lui offraient était très divertissant, assez pour la distraire de l'horreur qu'elle avait vu en rêve. En plus de tout cela, si ce beau spectacle lui permettait d'observer de près le célèbre Sirius Black, numéro un dans la liste des "si j'ai l'occasion, je prends" de Dorcas, c'était gagnant-gagnant.

Elizabeth devait avouer comprendre la certaine attirance que ressentait Dorcas pour Sirius : après tout, elle la ressentirait aussi elle ne l'avait jamais vu ainsi, dans un tee-shirt Led Zeppelin bien trop grand pour lui, et un bas de pyjama rayé aux couleurs de Gryffondor.

Sirius Black était d'une beauté ahurissante qui attirait tout de suite les yeux. Il avait cet air de mauvais garçon mystérieux qui avait le don de voler l'attention de quiconque croisant son regard gris. Il était clair qu'il prenait soin de son apparence, et pourtant : Elizabeth aurait pu jurer que, même négligé, il garderait ce charme si spécial et propre à lui-même, celui que personne d'autre ne semblait pouvoir égaler. Sirius avait une façon de s'exprimer, de se tenir, de bouger son visage -que ce soit ses yeux, ses sourcils, sa bouche ou encore ses pommettes-, qui faisait de lui une personne des plus intéressantes à observer. Et ô! Il le savait. Il le savait et il en jouait, embrassant sa beauté comme une vieille amie.

"T'as fini de m'admirer ou t'as encore besoin de quelques secondes ?", fit-il alors en se rapprochant dangereusement d'elle, la faisait quitter ses pensées. Il était si proche qu'elle était sûre qu'il pouvait sentir la respiration fraiche qui sortait de ses narines et, tout de suite, elle tenta de respirer moins fort, avant de lui répondre :

"Attends une minute." Un p'tit tour s'il vous plait monsieur ?", elle exagéra avec un accent Posh, accompagnant ses mots d'un petit mouvement de baguette.

Aussitôt, Sirius sentit un petit vent soulever légèrement son tee-shirt, le poussant sur le côté, avant qu'il ne se laisse tourner sur lui-même avec un gloussement qu'il ne prit même pas la peine de cacher. Quand il eut fini, il passa par dessus le dossier du canapé en un petit bon, et se glissa entre Lily et Elizabeth, entourant leurs épaules de ses bras chauds. Presque tout de suite, il serra les dents en grommelant :

"Oi Flocon, t'es gelée !

-Flash News !", s'exclama-t-elle en levant les yeux au ciel, décalant un peu son corps de celui de Sirius par réflexe. "Tu comptes prévenir la Gazette ?

-Je te trouve un peu froide avec moi."

Il reçut deux coups de poing dans les épaules, l'un d'Elizabeth, fort, mais dont le côté joueur se remarquait avec le sourire amusé sur ses lèvres, et l'autre de Lily, moins fort mais plus méchant, comme pour l'avertir de ne pas blaguer avec ça. Lily avait déjà vu Remus et Dorcas faire des remontrances à quiconque utilisait le surnom "Flocon", alors elle ne doutait pas qu'ils auraient fait la même chose s'ils avaient été là. Elle n'était pas encore sûre de ce qui était arrivé à Elizabeth, mais ça semblait être quelque chose d'assez grave pour ne pas rire dessus.

Sirius couina en feignant la douleur, se frottant une épaule après l'autre.

"Nan mais je n'y crois pas ! Bande de sauvages.

-Rien que tu ne mérites pas." siffla Lily en tendant sa main vers Elizabeth, qui frappa dedans en ricanant.

"Une alliance contre moi, horreur ! Je peux aller chercher un partenaire pour que le combat soit égal, ou...

-Remus, peut-être ?", demanda Elizabeth en haussant un sourcil. "Je veux dire, c'est quand même lui que j'avais espoir de contacter, pas le célèbre Sirius Black à l'odeur de chien mouillé.

-Premièrement : aouch. Et deuxièmement, ton Remus chéri est en plein sommeil réparateur. Pauvre chou, il est encore tombé malade !"

Elizabeth hocha la tête, compréhensive. Peut-être que ce n'était pas si mal, que ce soit Sirius qui se soit pointé. Elle n'aurait pas aimé avoir réveillé pauvre Remus, ou pire, que ce soit James qui ait réceptionné le message.

Un bâillement quitta ses lèvres, et même tenter de l'étouffer avec ses petites mains ne réussit pas à l'arrêter. Grâce à cette petite interaction, les images terrifiantes de son cauchemar avaient quitté son esprit, et elle se sentait sombrer dans le sommeil. Ses paupières étaient lourdes, et elle se savait trop faible pour arriver à porter leur poids encore longtemps.

Elle savait que, si elle s'endormait, elle ne pourrait pas se reposer plus d'une heure en raison de l'heure à laquelle elle s'était initialement réveillée, mais elle mourait d'envie de fumer les yeux. Même pour quelques secondes.

Lançant un petit regard à Sirius, qui, lui aussi, semblait fatiguer, elle répéta timidement l'action qu'elle avait commencée avec Lily : elle pencha, d'abord un peu hésitante, sa tête vers l'épaule vers Sirius. En d'autres circonstances, elle n'aurait même pas imaginé faire une telle action, surtout avec une personne qu'elle connaissait si peu. Et pourtant, elle se sentait obligée de le faire, déjà par son corps qui priait pour qu'elle le laisse se reposer, et ensuite par son esprit. "Ouvre-toi", lui disait-il. Alors elle le fit. Elle partagea un bout d'elle-même, une part de son passé, de son présent, et de son futur, en se penchant un peu plus sur l'épaule carrée de Sirius.

Sirius bailla à son tour, resserrant son étreinte sur les épaules des filles pour les rapprocher d'elle, et Elizabeth trouva le moment opportun : elle se permit finalement de poser sa tête sur lui. Au départ, elle sentit qu'il s'était figé, luttant pour ne pas couiner face à la froideur d'Elizabeth, et elle faillit se retirer. Au bout de quelques secondes seulement, il mit son mal de côté, et s'habitua à la fraîcheur d'Elizabeth. Elle était d'ailleurs utile, en cette journée malheureusement chaude d'octobre, et Sirius se retrouva à préférer cette fraîcheur à la chaleur corporelle de Lily -qui, malgré ses propos, avait été la première à s'endormir-. Inconsciemment -ou non-, il se rapprocha d'Elizabeth, qui se positionna plus confortablement sur lui.

Il était heureux d'être descendu : il était bien mieux ici que dans le brasier qu'était son dortoir ! Quelle idée de mettre quatre adolescents dans une même pièce avec une chaleur pareille !

Avant de sombrer dans le sommeil, Sirius se mit à penser. Il devait avouer que Remus avait de bon goût au niveau de ses relations : il ne connaissait pas Elizabeth depuis longtemps, et il n'avait jamais fait vraiment attention à elle, mais il savait d'ores et déjà qu'ils allaient devenir de bons amis. Elle était agréable, et avait pu montrer sa bonne humeur compatible lors du récent déjeuner qu'elle avait partagé avec lui et ses amis. Si, ce jour là, elle n'était pas restée assez longtemps pour laisser une marque dans l'esprit de Sirius, elle y avait laissé une graine, et il sentait cette graine grandir, maintenant qu'il l'avait près d'elle.

Lui vint aussi à l'esprit l'idée qu'Elizabeth Luck était une fille avec qui il serait heureux de trainer, de parler, de rigoler, et peut-être même de concocter des plans diaboliques à deux mornilles cinquante mais qui lui provoquaient des fous rires incontrôlables. Il lui vint l'idée que, peut-être qu'Elizabeth Luck en valait la chandelle.

Et, quand Sirius Orion Black avait une idée en tête, il était connu qu'il était difficile de la faire en sortir.

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