𝘊𝘏𝘈𝘗𝘐𝘛𝘙𝘌 𝘖𝘕𝘡𝘌 - yeux de vert [1/2]

ELIZABETH avait toujours -depuis aussi longtemps qu'elle s'en souvenait, et elle avait oublié une partie de son enfance- adoré les gaufres. À chaque fois que sa mère en faisait, et ce depuis petite, elle ne pouvait se retenir et en mangeait autant qu'elle ne le pouvait. Il s'agissait de l'un des ses péchés mignons comestibles, comme l'étaient le café, les chewing-gums à la chlorophylle et la tarte aux pommes. La mère d'Elizabeth avait même dû arrêter d'en faire régulièrement, de sorte à ce que sa fille s'en lasse, alors que c'était l'un des seuls petits-déjeuners qu'elle réussissait à préparer sans faire brûler quelque chose (c'était le père d'Elizabeth qui cuisinait, quand il le pouvait. Et comme il arrivait bien souvent qu'il n'arrive pas à temps pour préparer à manger, Elizabeth avait dû apprendre à le faire, mais il s'agit d'une autre histoire!).

Manger des gaufres était donc devenu quelque chose d'assez rare chez Elizabeth Luck : c'était devenu une sorte de récompense, quelque chose qu'on ne lui préparait que pour des évènements spéciaux comme les fêtes, et le matin de chacun de ses anniversaires.

Lorsqu'elle était arrivée à Poudlard, Elizabeth s'était retrouvée extrêmement surprise en découvrant que, à chaque petit-déjeuner, les tables de la Grande Salle comprenaient, entre autres viennoiseries, des gaufres encore chaudes, dont l'odeur douce -parfois vanillée- s'envolait pour parfumer tout la pièce. Et pourtant, même si l'un de ses péchés mignons était chaque jour sous son nez, elle se retenait. Elle se retenait, faisait comme si ces gaufres n'existaient pas, comme si elle était chez elle et que sa mère n'en avait pas préparé. Elle ne s'en offrait que pour -comme chez elle- les occasions spéciales, si elle avait cinq bonnes notes de suite, ou que c'était l'anniversaire de l'un de ses amis (étrangement, elle acceptait beaucoup plus les gens comme amis lorsque c'était leur anniversaire).

Le vendredi treize octobre n'était l'anniversaire de personne. À la connaissance d'Elizabeth, rien n'était censé avoir lieu. Et pourtant, assis en face d'elle, James Potter se goinfrait de gaufres, les enfilant une par une sans même prendre le temps de les apprécier, avec comme seule défense "La préparation des élections de Quidditch m'a empêchée de bien manger, hier soir.", ou même "Je fais du sport, j'ai le droit de manger.". Elizabeth savait que c'était des sornettes puisqu'elle aussi faisait du sport -au moins deux fois par semaine, elle courait sur le terrain de Quidditch et s'amusait à voler toute seule-, et jamais cela ne l'avait forcée à manger davantage. De plus, ce que mangeait James n'était pas vraiment approprié pour combler ce que le sport avait éliminé. Mais enfin, James était James, et il mangeait ce qu'il voulait. Par Godric, si ça le rendait heureux de manger ça, Elizabeth n'avait rien à redire.

Mais, parce qu'il y a souvent des mais, un vendredi treize. Elizabeth avait l'habitude de voir James manger nonchalamment le plat qu'elle se réservait pour les occasions spéciales, et elle laissait toujours couler, mais la nuit précédente avait été un désastre pour elle. Son sommeil avait de nouveau été dérangé par un cauchemar, pire que le précédent, et elle n'avait pas trouvé la force de réveiller quiconque pour la réconforter : encore plus qu'elle avait peur de ses cauchemars, Elizabeth craignant d'être la personne égoïste qui décidait de gâcher le sommeil de ses amis parce qu'elle avait fait un cauchemar et qu'elle n'était pas assez mature pour se dire que ce n'était que un cauchemar.

Alors, à la place, elle était tout simplement restée éveillée le reste de la matinée, de trois heure du matin jusqu'à sept heure. D'abord, elle avait passé une grande partie de son temps avec ses carnets pour tenter de créer de nouveaux sortilèges et maléfices, avant de réviser pour son cours de potion de la journée et, finalement, déranger dans le plus grand silence possible le dortoir -qui ressemblait davantage à un début de porcherie- qu'elle partageait avec Dorcas, Lily et Marlène.

Même si on aurait pu penser que tenter de fabriquer à partir de rien de nouveaux sorts était la tâche la plus compliquée, il n'en était rien. En effet, c'était le dernière tâche qui avait été la plus compliquée : pour commencer Lily, malgré ses airs de gille parfaite, gardait autour de son lit une myriade de bouts de parchemins avec des notes de cours, des rappels de ce qu'elle devait faire, ou même des résumés de ce qu'elle devait apprendre pour le cours suivant (et Elizabeth se demandait réellement comment Lily trouvait le temps de tout réécrire) ; Dorcas laissait toutes sa collections d'accessoires -badges, rubans, bijoux, cartes de tarot- un peu partout dans la chambre, négligeant totalement les petites boites cartonnées cachées sous son lit, qui n'attendaient que d'être remplies ; Marlène, quant à elle, gardait des paquets de sucrerie et deux/trois livres de Quidditch. Elizabeth aussi avait sa part de bazar, avec sa pile de carnets dont les feuilles rajoutées grossièrement tombait et ses sachets remplis de lettres de sa grand-mère.

Alors non, le travail n'avait pas été simple. Il avait même été si compliqué que, pour se récompenser elle avait emprunté deux rubans bleus dans la boite -dorénavant remplie- de Dorcas, les utilisant pour attacher les deux tresses sur sa tête qui se finissaient juste au dessus de ses épaules à cause de la longueur de ses cheveux. Sans le vouloir, avec cette coiffure, elle semblait encore plus adorable que d'habitude.

Cependant, son physique ne représentait en rien son humeur de ce matin là, durant lequel elle regardait avec envie James manger des gaufres comme si sa vie en dépendait. Bien vite, et envoutée par la fatigue, l'envie laissa place à la jalousie, et Elizabeth lança un regard mauvais à James, qui fut remarqué par Remus. Ce dernier se mit à pouffer, attirant les yeux d'Elizabeth sur lui. Elle fronça les sourcils, souhaitant le regarder, lui aussi, méchamment, mais le fin sourire sur les lèvres de son meilleur ami réussit à transformer sa moue boudeuse en une grimace qui trahissait son envie de rigoler.

"Tu sembles bien de mauvais poil, Floc'. Mal dormi? ", s'exclama James, ayant accordé son attention sur le duo au moment même où il avait senti les yeux bleus d'Elizabeth sur lui. Comme à chaque fois, l'utilisation du surnom provoqua une sorte de blanc autour de la table, et Jame ses retrouva avec quatre pairs de yeux sur lui. Il haussa les épaules en signe d'innocence, avant de se reconcentrer sur Elizabeth.

"J'ai rêvé de toi, cette nuit." fit-elle contre toute attente, battant des cils. Ces mots étaient sortis naturellement de sa bouche, comme s'ils avaient été programmés. Ses mains se posèrent sous son menton pour le soutenir, et elle sourit tendrement au garçon. Celui-ci sentit le coin de ses lèvres se retrousser, faisant tomber quelques miettes des gaufres qu'il avait dévorées mais s'arrêta bien vite lorsqu'Elizabeth continua : "Rien que ça, ça explique la mauvaise nuit que j'ai passée.

-Je vais faire comme si je n'avais pas entendu.", décida-t-il d'un air boudeur en baissant de nouveau la tête.

Après avoir rigolé, cachée par sa main, Lily la tendit vers Elizabeth, ne pouvant cacher son sourire après que sa nouvelle amie ait remis James à sa place, bien vite suivie de Dorcas et de Sirius. Marlène et Peter, eux, pouffèrent simplement, bien trop concentrés sur leur nourriture pour réagir davantage. De son côté, Remus peint sur son visage un sourire des plus satisfaits, et se rapprocha d'Elizabeth pour passer son bras autour de ses épaules, avant de donner une petite pichenette sur ses tresses.

"Ça faisait longtemps que je ne t'avais pas vu avec ça, tiens.", fit-il avec un petit sourire.

Elizabeth ne répondit pas, trop amusée à embêter James. Elle lui envoya comiquement un baiser, qu'il fit mine de chasser avec la manche de sa robe de sorcier, la petite moue qu'il avait sur les lèvres se battait avec un sourire qui essayait de prendre sa place sur son visage.

"Tu m'étonnes, elle m'a volé mes rubans pour ses tresses!", grogna Dorcas. Elizabeth fit comme si elle ne l'avait pas entendue, levant les yeux au ciel. Sa petite bataille avec James n'était pas encore tout à fait finie, pour lui en tout cas : il avait commencé à lui lancer des petits bouts de gaufre, tandis qu'elle le fixait, un air ennuyé sur le visage, attendant patiemment qu'il finisse.

Assez rapidement, seulement, les yeux d'Elizabeth se décollèrent de James Potter.  Elle avait un horrible impression d'être observée. Que quelqu'un, présent dans la salle, l'observait. Une personne semblait la mettre à nu, et cela avait le don de la perturber énormément.

Cherchant le coupable -recevant encore des miettes de petit déjeuner-, Elizabeth laissa son regard clair s'égarer sur les tables voisines. Poufsouffle, Serdaigle, Serpentard, il y avait bien trop de tables qu'elle allait devoir examiner avant de trouver quels yeux semblaient sonder son âme. En premier lieu, elle croisa ceux de Clément Scamender, et leva sa main pour le saluer chaleureusement. Les joues du garçon prirent une teinte grenat et il lança un petit regard à Philip Connor, à sa gauche, avant de la saluer à son tour.

Après l'intervention de Botanique, Clément avait tenu son rôle de collègue à merveille, et était resté avec elle tous les cours durant, empêchant un accident, quelque ce soit, d'arriver. Il avait même pris l'habitude de passer sa tête au dessus de l'épaule d'Elizabeth, de temps à autre, pour lui faire rajouter des informations ci et là, dans son carnet. Quand elle lui avait demandé ce qu'elle pourrait faire pour le remercier, il avait simplement répondu que le simple fait d'avoir à veiller sur elle et ne plus s'ennuyer en cours était assez. Autant que son père était doué en créatures magiques, Clément l'était en Botanique.

En sortant de cours, elle pouvait se souvenir avoir entendu Philip, le même qui était placé à côté de Clément, dans la Grande Salle, le charrier sur sa proximité avec Elizabeth, ce qui l'avait fait ricaner. Elle avait alors fait signe à Dorcas de l'attendre, et avait sautillé jusqu'à Clément pour, finalement, lui poser un fin baiser sur la joue, les laissant, Philip et lui, dans un état de surprise proche d'indescriptible. Partant retrouver Dorcas, elle avait entendu le dernier s'exclamer : "SI c'est comme ça, je te vole ta place pour le cours."

Cependant, malgré leur amitié, Clément s'avéra ne pas être la personne dont le regard la transperçait, puisque même lorsqu'il tourna la tête, Elizabeth se sentait toujours observée. Alors, lorsque Clément se pencha pour parler à l'un de ses amis, Elizabeth eut la possibilité de lancer un coup d'oeil à la table des Serdaigle. Toujours pas. Malgré tout, quelque chose d'autre attira son attention -il fallait dire qu'Elizabeth était distraite assez facilement-.

Assise à la table des Serdaigle, Rowan Shadows balançait rapidement sa main devant les yeux de son frère jumeau, Erwin. Elizabeth connaissait Rowan depuis quelques années : elles avaient été mises ensemble pour un travail qu'elles avaient dû faire ensemble en Métamorphose. Malgré ses efforts, la Serdaigle n'avait pas réussi une seule fois à se concentrer sur le devoir, ayant toujours quelque chose qui la distrayait, l'écriture de son nom sur le parchemin fut sa seule participation dans le devoir.

Le fait était que, même si elle avait du mal à se concentrer sur une seule chose, Rowan avait toujours été très intentionnée envers son frère, ce qui expliquait les gestes qu'elle faisait devant ses yeux pour rapporter son attention sur elle. Et, même si elle était loin et que ses lunettes étaient sales, Elizabeth réussit à remarquer quelques gouttelettes qui glissaient dans le rabat de la chemise du garçon, la rendant transparente par endroits, tandis que ses mains tremblantes étaient accrochées à la table. Intriguée, Elizabeth arrêta sa recherche quelques instants, préférant essayer de comprendre ce qui arrivait à Erwin. Cependant, lorsque celui-ci se tourna vers sa soeur avec un petit sourire rassurant, Elizabeth détourna finalement les yeux pour reprendre sa quête.

Ce fut, comme par hasard, à la dernière table de sa liste qu'Elizabeth trouva finalement la personne qu'elle recherchait, la table qui était placée à l'exact opposé de celles de Gryffondors. Les Serpentards. Si Elizabeth s'attendait à être surprise, elle ne s'attendait pas à cela. En effet, en même temps qu'elle avait découvert l'identité du coupable, elle découvrit que ce n'était pas elle qu'on observait, mais la jolie Lily Evans, à côté d'elle. Il fallait dire qu'il était simple de se tromper, avec la distance qui séparait les deux tables. Cependant, un mystère restait complet : pourquoi Lily ne remarquait pas le regard insistant des Severus Rogue sur elle?

Elizabeth n'avait jamais particulièrement fait attention au drama qui avait eu lieu entre Lily et Severus, ni même à la relation qu'ils avaient entretenu. Elle savait uniquement qu'ils avaient été de très proches amis de longue date, mais que tout avait éclaté suite à une dispute, comme un ballon de baudruche qu'on aurait trop gonflé. La pression avait alors fait s'envoler les deux loin l'un de l'autre.

Par manque d'intérêt, et surtout parce qu'elle était trop concentrée sur les révisions de ses BUSE's avec Remus, Elizabeth n'avait pas vraiment été mise au courant de comment tout cela s'était réellement terminé. Ce qu'elle savait juste, c'est que Lily avait passé des soirées entières à en pleurer dans les bras de Marlène, à lui demander comment elle aurait pu possiblement tout arranger. Alors Elizabeth, qui n'était pas proche de Lily, à l'époque, avait seulement pu se demander à elle même : qu'est-ce qui avait été grave au point de briser une relation de bien plus de cinq ans?

Elizabeth dut se mordre la langue pour ne pas automatiquement se tourner vers Lily et lui poser la question -il était tout simplement impensable de la mettre dans une situation si embarrassante, surtout avec les maraudeurs autour d'elle-. À la place, elle agrippa le bras de Remus pour le rapprocher d'elle, gardant son regard sur Severus. Elle avait froncé ses sourcils, comme si cela pouvait l'aider à détecter une quelconque émotion sur le visage du garçon qui pourrait l'aider à comprendre ce qu'il voulait à Lily. Mais, dès lors qu'il remarqua le regard d'Elizabeth sur lui, il détourna les yeux pour parler à Avery, placé juste à côté de lui.

"Qu'est-ce que tu mijotes?", lui demanda Remus à l'oreille, intrigué par son manque de paroles ainsi que son manque de réaction face à James, qui claquait des doigts devant elle pour attirer son attention. Elizabeth frotta ses yeux de sa main, avant de lever la tête vers Remus, puis de regarder James, qui, lui aussi, attendait la réponse avec impatience :

"Rien du tout, Rem. J'étais juste... dans mes pensées.

-Donc t'es pas partie bien loin, au final.", se moqua James, avant de se cacher derrière son assiette vide en voyant tous les morceaux de gaufre qu'il avait lancé sur Elizabeth éviter, et se jeter sur lui de tous les côtés. "Pas mes cheveux, espèce de-

-Dis moi Li.", sortit Sirius de nulle part. Lily et Elizabeth se tournèrent d'un même mouvement vers lui, laissant James maugréer tout seul, moqué par Remus. Sirius releva la tête en voyant les deux filles tournées vers lui. Il grimaça, ayant oublié que ce surnom pouvait désormais porter à confusion. Il leva la fourchette qu'il faisait tourner dans ses doigts depuis le début du repas quand il ne mangeait pas, et en pointa les dents vers Elizabeth. "La beauté gelée.", rajouta-t-il pour préciser. Bien vite, il intercepta le torchon qu'Elizabeth lui avait lancé au le visage, avant de continuer :"Oui, toi. Puisque les cours de cet après-midi sont tous annulés-

-Ils sont annulés?!", s'exclama Dorcas, un grand sourire dans le visage, plaçant les paumes de ses mains sur la table pour se redresser. Sirius donna un petit coup dans son bras, ce qui la fit déraper et se rassoir sur le banc. Alors qu'elle avait donner un coup à Sirius, quelqu'un la coupa :

"C'est un vendredi treize, aujourd'hui, alors bien-sûr qu'ils sont annulés.", fit Remus en levant les yeux au ciel, comme si c'était évident. "C'est la meilleure date pour collecter de l'eau de Noé, après tout."

Les yeux de tous ses amis se dirigèrent vers lui, attendant de plus amples détails, et Remus ôta son bras des épaules d'Elizabeth pour placer ses mains sur la table. Il soupira, avant de continuer son explication : "C'est l'un des -si ce n'est le- remède anti-douleur le plus efficace qui puisse exister. La rumeur dit que, si on en prend une trop grande quantité, ça peut avoir l'effet d'une sorte de- de drogue. C'est assez compliqué à trouver. D'après Le guide des remèdes magiques de Sally Healer, ça apparait seulement dans les feuilles d'arbres tombées au sol à partir de treize heure treize tous les vendredi treize. Et encore, même en sachant ceci, c'est difficile d'en trouver assez pour remplir un tube à essai.

-Je ne sais pas si je suis fascinée ou effrayée que tu aies mémorisé tout ça.", fit Dorcas, les yeux écarquillés. Sirius rigola, et claqua dans sa main, attirant l'attention des quelques élèves autour.

"Et une fois de plus, Lunard nous impressionne avec son amas de connaissances qui n'intéresse absolument personne.", déclara-t-il en grimaçant. À ses mots, Elizabeth fronça les sourcils, et replaça les quelques mèches de cheveux qui s'étaient échappées de ses tresses derrière son oreille. Elle tourna alors sa tête vers Remus, et le rassura d'un air doux :

"Fais pas attention à lui. Moi, ça m'intéressait.

-Bien sûr que ça t'intéresse, beauté.", répondit gentiment Sirius en lui souriant, pendant que Remus attrapa la main d'Elizabeth, lui accordant une petite pression, pour la remercier. Sirius mima une expression attendrie avant de continuer : "Après tout, vous êtes tous les deux des Je-sais-tout.

-Je ne sais pas si je dois prendre ça comme un compliment ou comme un reproche.", commenta Elizabeth en se grattant le sourcil.

"Prends ça comme un compliment, t'es quand même associée à moi.", sourit innocemment Remus avant de se lever, tapotant doucement l'épaule d'Elizabeth. Il fit signe aux autres de se lever à leur tour : "Allez, en route mauvaise troupe! On ne veut quand même pas être en retard pour le cours de Potion, n'est-ce pas?"

Un éclat de malice lui éclaircissait dans les yeux, rendant son visage encore plus lumineux. Elizabeth fronça les sourcils, avant de se tourner vers les autres, tentant de comprendre ce qu'ils avaient derrière la tête. Elle ne fut pas surprise de découvrir qu'ils partageaient tous ce même éclat, désormais. Les autres se redressèrent, tout sourire.

"T'as raison, Lunard comme toujours. Quoi de mieux pour commencer la journée qu'un cours totalement normal de Potion?", ajouta James, regardant tour à tour chacun des maraudeurs. Les filles se regardèrent entre elles à la mention du surnom, mais laissèrent tomber comme quand Sirius l'avait prononcé, décidant de laisser leur petite scène se dérouler devant leurs yeux.

"Exactement, Cornedrue. Après tout, il n'arrive jamais rien en cours de Potion, surtout pas aujourd'hui!

-Tout à fait, Patmol.", termina Peter, hochant solennellement la tête, ne pouvant empêcher un sourire de monter à ses lèvres. Il lança un fin regard -qui ne passa pas inaperçu- à Eli. "Rien de spécial, surtout pas quelque chose qui obligerait nos quatre Gryffondores préférées-

-Avec Lily nominée comme ma préférée.", ponctua James, coupant rapidement Peter.

"Comme je dirais, surtout pas quelque chose qui obligerait nos quatre Gryffondores préférées d'utiliser un sortilège d'imperméabilité!"

Le quatuor se regarda pour pouffer, avant de s'en aller vers la sortie d'une marche rapide. Elizabeth leva les yeux au ciel, avant de se rappeler de l'intervention précédente de Sirius. Elle se leva, plaçant ses mains autour de sa bouche pour amplifier sa voix :

"Siri!", le garçon aux cheveux corbeau se retourna sans pour autant cesser sa marche, trébuchant presque sur James devant lui. "Qu'est-ce que tu souhaitais me dire, toute à l'heure?

-On en parle après!

-À plus tard, Lily Fleur! C'était un plaisir de déjeuner avec toi!", pipa rapidement James, avant d'être littéralement poussé dans l'ouverture de la porte avec un petit rire, tandis que Lily, les joues rouges, souffla bruyamment pour montrer son exaspération.

Et, juste comme ça, James partit avec ses acolytes, laissant pendant un court instant la Grande Salle dans le silence. C'était comme si leur départ avait emporté, pendant une seconde, le bonheur de tous. Cependant, un cri de certains septièmes années, et le brouhaha habituel reprit.

"Ça, c'est bien les garçons.", fit Dorcas avec un regard méchant vers la porte par laquelle ils étaient passés, avant de se décaler en face d'Elizabeth, vite rejointe par Marlène.

"À qui le dis-tu.", soupira Lily, ses mains posées sur ses joues pour cacher leur rougeur d'énervement envers James.

Cependant, les yeux d'Elizabeth étaient de nouveau concentrés sur quelque chose d'autre. Sur quelqu'un d'autre, plus récemment. Elle ne put s'empêcher de remarquer que Severus avait recommencé à fixer Lily.


Elizabeth n'avait jamais été du genre à trop se mêler des affaires des autres. Quand elle entendait une bribe d'information sur une personne quelque part, elle ne cherchait pas forcément à en savoir plus, et préférait vérifier si l'information était véridique à la source. Certes, elle était heureuse lorsqu'on se confiait à elle, puisqu'elle aimait bien apprendre des choses sur ses proches, mais elle n'avait jamais pris pour habitude de creuser dans la vie des gens afin d'en retirer des informations -elle n'aurait, par contre, eu aucun mal à le faire au cas échéant-. Elle faisait confiance à ses amis pour lui dire ce qu'elle devait savoir (ce qui pouvait être assez égoïste quand on savait que, même si elle connaissait Dorcas depuis bien plus longtemps que Remus, c'était à lui qu'elle avait communiqué la totalité son secret. C'était bien heureusement que, malgré le coup qu'en avait pris son égo, Dorcas avait compris que c'était simplement quelque chose de traumatisant pour Elizabeth, et que c'était normal qu'elle ne veuille pas en parler).

Malgré tout, Elizabeth ne pouvait s'empêcher d'avoir un certain intérêt dans l'ancienne relation qu'entretenaient Lily Evans et Severus Rogue. Le rouge et le vert, littéralement. L'antidote et le poison. Dans un sens aussi, le feu et la forêt.

Elizabeth elle-même avait quelque fois parlé nonchalamment au garçon. Elle n'avait cependant jamais été assez proche de lui -elle ne pouvait même pas le qualifier d'ami, et elle doutait sur le terme 'connaissance'- pour se rendre compte de la tension qui était née entre Lily et lui. Elle s'en rendait compte, dorénavant. Elle se rendait compte de la pointe de tristesse dans les yeux de Lily quand, sans qu'elle ne le fasse exprès, ses yeux se dirigea vers Severus. Qu'est-ce qui avait bien pu séparer l'un des meilleurs duos de têtes d'ampoule de Poudlard? Etait-ce plus profond qu'une simple dispute?

Alors, après être sortie de la Grande Salle et avoir commencé le chemin vers le cours de Potion avec les autres filles, Elizabeth s'était retrouvée à froncer les sourcils, les yeux comme ancrés au sol, tandis que l'ongle de son index repoussait les cuticules de son pouce. Bien sûr, deux des trois amies à ses côtés remarquèrent qu'elle était distraite mais pensaient qu'Elizabeth se faisait simplement du souci pour le prank à venir des maraudeurs. Celle restante, cependant, avait bien remarqué qu'Elizabeth était distraite, sans pour autant assumer que c'était à cause du prank (au contraire, si ça avait été pour le prank, Elizabeth aurait plutôt eu l'air surexcitée, demandant aux autres ce qu'elles l'imaginaient être). Alors, prenant son rôle de meilleure amie à coeur, Doras attrapa la main d'Elizabeth après une minute de regards inquiets.

"Qu'est-ce qu'il se trame dans ta petite tête?", chuchota Dorcas d'un air rassurant. Quand elle chuchotait, Dorcas avait toujours eu ce petit timbre, presque cassé, qui avait don de réconforter Elizabeth. C'était probablement le réconfort que Dorcas -pas seulement sa voix, Dorcas toute entière- lui apportait qui avait attiré Elizabeth vers elle, au début.

"Euh, le prank?", osa Elizabeth, sa voix passant dans les tons aigus. En général, Elizabeth était une assez bonne menteuse. Comment aurait-elle survécu à Poudlard si ce n'était pas le cas, sachant ses tendances à se faire remarquer malgré elle?

Il y avait une personne cependant, et une personne seulement devant laquelle Elizabeth ne pouvait pas résister, une personne devant laquelle le mensonge le mieux formé pouvait être trahi. Dorcas. Dorcas et son regard -maintenant blasé- qui montrait qu'elle n'était pas bernée. Voilà devant qui Elizabeth ne pouvait pas mentir. Alors, avec un petit soupire, et en blessant la voix, Elizabeth se reprit :

"Si tu n'arrêtes pas de me regarder comme ça, je te ferai bouffer ta baguette.

-Si tu me disais la vérité, je ne te regarderai pas comme ça, Elizabeth! Maintenant dis moi : est-ce que c'est parce que tu as peur de ce que prévoit de te dire Black? Parce que si oui, je peux le forcer à-

-Par Merlin, non! Ça avait même quitté mon esprit.", Elizabeth pinça les lèvres et lança un regard dans la direction de Lily, avant de recentrer son attention sur Dorcas. "J'aimerais savoir ce qu'il s'est passé entre Lily et Severus. Pourquoi ils ne se parlent plus, et pourquoi chacun d'entre eux semble si blessé par leur distance.", Dorcas s'étouffa avec l'air, attirant malgré elle l'attention des deux filles devant. Elizabeth tapota le dos de son amie, avant de faire signe aux autres que tout allait bien, et elle baissa encore la voix pour se justifier : "J'ai vu Severus fixer Lily ce matin."

Dorcas écouta attentivement avant de hocher la tête, l'air pensive. Elle et Elizabeth étaient devant des escaliers, à un couloir seulement de la salle de Potion, et même si des dizaines d'élèves la poussaient presque pour pouvoir se rendre en bas plus vite, et ne pas arriver en retard à leur cours, Dorcas descendait les marches une par une. Elizabeth elle-même la doubla, dévalant les marches au pas de course pour attendre, comme à son habitude, son ami en bas, un sourire satisfait presque indiscernable sur les lèvres (elle avait encore plus l'air de l'enfant qu'elle était, ainsi!).

Lorsque Dorcas arriva finalement au niveau d'Elizabeth, elle semblait avoir trouvé sa solution, aussi simple soit-elle. Elle haussa les épaules, et entra Lily d'un signe de tête tout en déclarant :

"Il vaudrait mieux demander directement à la source pour ce genre d'information. Tout ce que je sais, c'est que, de ce qu'on m'a dit, il a fait l'idiot -c'est pas si surprenant pour un Serpentard!-, et que ça a causé la perte de Roussie, et une humiliation digne du plus grand mage noir signée les maraudeurs.", Elizabeth ricana, l'air ennuyée :

"Une vie d'humiliation, tu veux dire. Même si ils se sont calmés cette année, c'est toujours pas terrible.

-Je pense qu'il le mérite.", en voyant l'incompréhension sur le visage d'Elizabeth, elle poussa de l'index les lunettes rondes de sa meilleure amie sur son nez, et continua, sûre d'elle. "Perdre l'amitié de Lily, Eli. De Lily Evans ! Si ça avait été moi, l'histoire aurait été différente-

-Il ne serait plus en vie, déjà.", marmonna Elizabeth.

"Mais de Lily! Il faudrait être un démon pour le faire. Cette fille pardonnerait même un inconnu qui aurait brûlé sa maison.", Elizabeth acquiesça. Il fallait maintenant qu'elle réfléchisse vite étant donné que la salle de Potions n'était plus bien loin. Devait-elle ou non aborder le sujet vert avec Lily?

Elizabeth n'était pas connue pour faire des choix particulièrement vite, mais, cette fois-ci, elle ne prit pas tant de temps que cela à en faire un. Il fallait dire que le regard du garçon sur Lily était si... si transperçant qu'il avait laissé une grosse impression sur Elizabeth. C'était un mélange de jalousie, de regret, de douleur, même (enfin, peut-être que l'esprit d'Elizabeth était aussi en train de placer Severus en tant que victime).

"Dis moi, Lily Fleur.", l'interpellée toisa Elizabeth, qui lui sourit innocemment. Elle accéléra le pas pour arriver au niveau de Lily, et poser maladroitement son bras autour de ses épaules. Immédiatement, Lily devina que la suite de cette conversation n'allait pas être sa préférée. "J'ai une question à te poser. À propos d'un certain garçon, yeux verts, cheveux noirs, Serpentard.

-Je commence où?", déclara Lily après un long soupir perçu comme interminable par Elizabeth.

Ainsi, le trajet vers le cours de Potions fut considérablement ralenti par le pas lent du quatuor, qui écoutait sans un bruit la douce voix de Lily tandis qu'elle contait comment tout s'était fini. Il fallait avouer que, à la fin de son récit, encore plus de questions valaient dans l'esprit d'Elizabeth, comme des mouches autour de viande. Pourquoi? Pourquoi Severus Rogue avait-il si violemment insulté Lily Evans, qui était censée être sa 'meilleure amie', après qu'elle ait essayé de le défendre? Pourquoi n'aurait-il jamais tenté de s'excuser? Quelle mouche l'avait piqué?

Il était connu de tous qu'Elizabeth, tout comme Lily, était une née-moldue. Cela lui avait été reproché pendant toute sa scolarité à Poudlard. Elle pouvait même se souvenir de son arrivée, ce sentiment d'incompréhension quant à pourquoi elle était jugée comme 'inférieure' par certains, alors que la seule chose qu'elle désirait, c'était de profiter de ce que ses anciens camarades moldus n'auraient jamais la chance d'apprendre. Elle, qui s'était considérée comme l'une des enfants les plus chanceuses au monde, ne comprenait pas pourquoi d'autres élèves la rabaissaient pour son sang. 

C'était Dorcas, d'ailleurs, sa première amie, qui l'avait rassurée, avec l'une de ses rares preuves de sagesse : 'Tu as bien plus de mérite qu'eux- que nous autres. Nous, la magie nous a été offerte sur un plateau d'argent par nos génétiques. Toi, ta magie t'a été donnée à la naissance parce que quelqu'un pensait que tu serais capable d'en faire des merveilles. Alors fais des merveilles, Elizabeth. Fais des merveilles, parce que personne d'autre ne sera capable de les faire à ta place.'. Elizabeth avait trouvé cela très attendrissant à l'époque, et, même quand elle apprit que Dorcas avait simplement mémorisé par coeur la lettre qu'avait écrite sa mère (elle lui avait en effet demandé des conseils pour pouvoir rassurer Elizabeth), cet attendrissement ne s'était pas éteint. Cependant, même si Elizabeth avait ce passage de sa vie marqué dans sa tête, qui rappelant d'être fière de ce qu'elle était, il y avait toujours des choses qui la touchaient, qui lui rappelaient de la pire manière possible qu'elle était toujours considérée inférieure par certains. Être appelée 'sang-de-bourbe' était l'une de ces choses.

Alors oui, Elizabeth comprenait parfaitement pourquoi Lily s'était énervée contre Severus à l'entente de ces mots. Et pourtant, Elizabeth combattait son esprit pour essayer de se convaincre elle-même que le garçon avait toujours une chance de rédemption. Elle voulait découvrir du regret en lui, découvrir une envie profonde de s'excuser et de se racheter.

Elizabeth souhaitait ceci parce qu'elle remarquait bien la mine triste qu'arborait Lily quand elle parlait de celui qui valait tant, autrefois ; parce qu'elle savait que, pire qu'une rupture amoureuse, une rupture amicale était dévastatrice ; parce qu'elle voulait que Lily et Severus parlent, s'expliquent un minimum (ou plutôt qu'il s'explique, et lui demande son pardon à genou).

'Ne quitte jamais quelqu'un avec des non-dits, Betty. Nourris par le chagrin et la colère, ils deviennent la pire arme qui soit.'

Elizabeth se souvenait de l'impact que le mot 'arme' utilisé par sa grand-mère avait laissé sur elle, plus jeune, parce que peu importe son utilisation, une arme finit toujours par causer du tort à une personne. Et non, Elizabeth ne laisserait pas Lily être blessée.

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