10 - La plus belle peinture à l'huile.

   ── Lis-moi, pour apprendre à m'aimer.

Pdv interne :

- C'est ici ? Il me demande naïvement, face à un immense bâtiment.

- À ton avis ? Je réplique en soufflant du nez.

Nous sommes face à l'entrée du musée, un somptueux immeuble. C'est un de mes musées favoris, en partie parce que c'est le plus proche de chez moi d'ailleurs. On a quand même dû prendre le métro, puis le bus pendant une trentaine de minutes.

Arriver ici avec Chigiri, c'est tellement étrange. J'ai l'impression de m'ouvrir à lui, et de briser une règle que je m'étais promise de ne pas enfreindre. Tout comme le toit du lycée, cet endroit c'est un peu mon jardin secret. Certes, il y a toujours beaucoup de monde, mais dès lors où je suis entourée de ces nombreuses œuvres, toutes les personnes présentes deviennent insignifiantes.

C'est à la limite de jouissif de voir à quel point je suis capable de faire abstraction de ce qui m'entoure quelques fois. C'est dommage que ça ne se limite qu'à l'art, j'aimerais bien être aussi passionnée pour autre chose que la peinture.

- Tu viens régulièrement ?

- Oui, assez souvent. Une fois par semaine je pense.

- Oh ! Il s'écrie étonné. Mais ça coûte pas... Cher ?

- Chigiri... Ce musée il est gratuit. Je le rassure en riant doucement.

Sa bouche s'ouvre sous le choc, et il finit par soupirer. On s'avance au point d'entrer dans l'antre des plus grandes fabulations qui existent, et pour parfaitre ce moment assez unique, une très gentille dame nous accueille.

Et tranquillement, nous avançons dans le musée. Un silence lénitif nous borde, et nous accompagne dans notre passade.

De magnifiques tableaux décorent les murs beiges, et des lustres rustiques ornent le plafond, faisant du lieu un endroit tout simplement exquis. Mes pas serpentent le parquet en chêne massif en point de Hongrie, le faisant grincer quelques fois.

- Dis-moi (y/n), pourquoi tu as voulu poser pour ces peintres au lycée ? Me demande Chigiri sur un pic de curiosité.

Je m'arrête au milieu d'un couloir, devant un splendide tableau de geishas.

- Pour l'argent.

- Ah-

- Non je plaisante ! Je m'exclame en pouffant. Enfin, à moitié. C'est avant tout pour l'expérience, et pour le plaisir de me voir sous différents traits. Mais c'est aussi pour l'argent, pour atteindre mon rêve. J'ajoute en lui faisant face.

- Ton rêve ?

- Oui, j'aimerais beaucoup m'acheter une peinture un jour ! Je m'extasie, les yeux remplis d'étoiles.

Il sourcille légèrement, sûrement étonné.

- Mais ça coûte hyper cher ?? À ce rythme là même dans dix ans je serai encore en train d'économiser ! Je me morfonds, un sourire aux lèvres, tandis qu'il lâche un petit rire.

- Je vois.

- Acheter un tableau sera l'apogée de ma relation à l'art. Mais du coup y'a le temps avant d'y arriver. Je grommelle, une touche d'agacement au fond de ma voix.

Il hoche la tête, impressionné par ma détermination j'imagine. On se déplace de quelques mètres pour observer une sculpture, qu'il critique éhontemment avant de passer à une autre peinture.

- Mais là tu vas me dire que ça ça te détend ? Il s'étonne face à ce style abstrait, sortant du cubisme. Que c'est... beau ???

Le jugement dans sa voix est sans précédent.

- Alors, non. Je le reprends en insistant sur la négation. Personnellement cette œuvre je ne la trouve pas belle en soit, et pour le coup elle ne me procure rien en particulier. Et c'est normal, tout le monde n'est pas touché par la même chose, et j'ai envie de dire, encore heureux. J'enchaîne comme si mes dires étaient une évidence. Mais ce que j'apprécie plus que tout, c'est essayer de deviner les sens des tableaux. Après tout rien n'est établi, rien n'est dicté. Chacun y voit sa propre histoire, et c'est ça que je préfère. Rien n'est plus apaisant que de s'imaginer un monde et un récit à travers ces ébauches.

Il reste sans voix, scotché. Je fronce les sourcils, inquiète d'en avoir trop dit. La pensée qu'il puisse réfuter mon point de vue m'effraie, si il y a bien une chose dont j'ai besoin, c'est qu'on me comprenne. Sinon ça crée un malaise encombrant qui me colle à la peau.

- Tu ne trouves donc pas ce tableau beau ? Me demande-t-il pour être sûr et absolument certain.

- Pas le moins du monde. Je n'aime pas comment il est dessiné. Je rajoute en faisant la moue. Mais me faire un scénario tout autour de la scène représentée, c'est ça qui anime mon cœur.

Un blanc vient de nouveau combler cette conversation.

- On continue ? Je reprends, voyant qu'il n'a clairement pas la même perception que moi, et qu'il se fait donc royalement chier.

Notre route se poursuit, couloir après couloir, pièce après pièce. Bien qu'au final, le musée ne soit pas très grand, donc nous arrivons vite à la fin de notre visite.

- Oh (Y/n) regarde celui-là ! Il s'écrie en tirant légèrement mon t-shirt de sa poigne.

Il me pointe du doigt une énième œuvre avant de s'y hâter. Nous nous posons devant, et pour le coup, je la trouve d'une banalité folle. Elle n'éveille aucun sentiment en moi, par contre en Chigiri, oui. Alors, je me surprends à prêter plus d'attention à son visage et à son ébahissement.

Je scrute les moindres de ses détails, que ce soit sa peau d'une finesse sans pareil, ou ses cils inférieurs étonnement longs. Je remarque que, quand il est autant concentré, il se pince la lippe, et laisse ses mèches s'affaisser sur son front. Ses billes roses coruscantes sont rivées sur le mur, et il ne me prête plus aucune forme d'attention. Ses sourcils se haussent un chouïa tandis que son regard se déplace du premier à l'arrière plan.

Il est tout bonnement sublime. Plus je l'observe, plus mon cœur devient lourd.

- J'aime beaucoup celle-ci. En conclut-il en s'éloignant un peu de la peinture.

Nous marchons encore quelques courtes minutes, jusqu'à terminer notre tour, rassasiés. Dans ma tête, je suis toujours émoustillée par sa beauté.

- Et au final, c'était laquelle ta préférée ? Me questionne Chigiri avant de sortir, curieux.

- Toi. J'ose lui dire en souriant.

Peut-être est-ce l'ambiance de ce lieu qui me fait pousser des ailes, peut-être est-ce une pulsion, ou peut-être est-ce tout simplement la lassitude de se taire sur des vérités.

- Quoi ? Il lâche, décontenancé.

- Quiconque t'as dessiné, sache qu'à mes yeux tu es le plus beau des supports. On a dessiné tes contours avec perfection et je ne pourrais rêver voir une plus belle peinture à l'huile que celle que tu représentes à mes yeux. Je lui dis doucement, en souriant. Sache que tu es vraiment beau Chigiri.

Ses sourcils se froncent, et ses joues se teintent d'un très joli rouge tandis que des bribes de mots peinent à s'échapper de sa bouche.

- Après je pense qu'on te le dit souvent, mais je voulais quand même te le dire. Je rajoute accompagné d'un rire.

- Qu'est-ce qui te prend de me sortir ça ? Me demande le rose sur la défensive, confus et gêné.

- J'ai plus le droit de dire ce que je pense maintenant ? Je réplique en pouffant.

Sa bouche reste béante, et lui sans voix. Il finit par soupirer, et par afficher un radieux sourire. Comme le calme après la tempête.

- Tu es vraiment intéressante comme personne, tu le sais ça ? Il souffle. Pas forcément dans le bon sens du terme après mais bon.

- T'es vile comme petit copain en fait. Je raille face à ce tacle discret.

Il me jette un faux regard noir, ce qui me fait marrer. Et au bout du compte, je réalise qu'à ses côtés, j'arrive à me mettre dans une bulle aussi. Je sens que l'art n'est plus la seule chose qui fait battre mon cœur à la chamade et qui me passionne, lui aussi à ce don là envers moi.

──────── 𓆏 ────────

────── ❃ ──────

J'ai un peu de retard désolée ! (Je travaille sur un os en même temps donc c'est pour ça 🥲)

Chigiri s'intéresse enfin à l'art ! J'espère que le chapitre vous a plu, pour le coup il est bien focus sur les peintures et tout ça 🦇

Merci énormément pour les 2k vues aussi, je suis trop heureuse <333

À samedi !

~ Maë ♡ ~

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top