chapitre 10

Tria adore Noël et c'est pourquoi, elle est debout de grand matin, dans son pyjama trop grand pour elle, assise devant son sapin immense. Son petit frère, Louis, l'observe avec ses grands yeux verts et elle lui donne un petit paquet avant d'ouvrir ses cadeaux.

Comme prévu, elle trouve des livres, une poupée, des os de chauve-souris et une construction à faire. Remerciant ses parents, elle monte dans sa chambre afin de mettre sur son étagère d'objets étranges, les os puis elle pose la poupée à côté de Remus avant de les observer un instant en souriant. La jeune fille redescend prendre son petit déjeuner et elle rêvasse devant son bol avant que son père ne lui tapote l'épaule.


— Ton parrain et ta marraine vont arriver pour le repas de midi, dit-il, tu as préparé les cadeaux que tu voulais leur offrir?


— Est-ce que Remus sera là? demande Tria en ouvrant ses grands yeux.


— Je ne sais pas chérie, répond le jeune homme. Tu sais, ça fait longtemps qu'il ne vient plus, il a sûrement des choses à faire.


— Mais, on est amis maintenant, réplique Tria. Il m'a offert une poupée.


Louis fait un signe en direction de sa grande sœur et Tria tourne la tête vers lui pour le regarder. Le petit garçon fait quelques signes avec ses mains, incapable de parler et Tria lui répond. Elle a mis du temps à apprendre la langue des signes, mais elle se débrouille bien à présent. Croquant dans son pain au chocolat, elle sourit à sa mère qui dépose un baiser sur son crâne.


— Ne traîne pas trop dans la douche, dit-elle amusée. La dernière fois, j'ai bien cru que tu avais fait un malaise.


Tria roule des yeux en riant, la dernière fois, elle observait les bulles de la mousse disparaître. La jeune fille a des parents très protecteurs, ils la considèrent encore comme une enfant et peut-être que son comportement y est pour quelque chose, mais c'est surtout sa maladie qui les rend attentifs. La petite brune s'empresse d'aller prendre un bain et y reste un peu trop longtemps.

Elle adore l'eau et elle trouve ça drôle. Une fois sèche, elle met un joli ruban bleu pâle dans ses cheveux ondulés puis elle enfile une robe de la même couleur avec un petit col. Elle ressemble à ses poupées, mais en plus jolie. Tria s'impatiente, elle n'aime pas attendre et elle va trouver sa mère sur le canapé.


— Ils arrivent bientôt? demande la brune.


— Dans un moment, répond sa mère. Tu as le temps d'aller t'amuser si tu veux.


— Oh, d'accord, et maintenant? Est-ce qu'ils arrivent bientôt?


— Tria, va t'amuser ma puce, dit la jeune femme.


Tria marmonne, mais elle abandonne et elle va trouver Louis afin de jouer avec lui. Lorsqu'enfin, on frappe à la porte, elle bondit dessus et l'ouvre, cherchant Remus. Elle se renfrogne en ne le voyant pas puis, les Lupin s'écartent et le jeune homme apparaît derrière eux.


— Monsieur Remus! s'exclame Tria. Bonjour parrain, bonjour marraine.


Elle entoure Remus de ses bras et le jeune homme rougit alors que leurs parents sourient. Ça fait des années qu'il n'est pas venu et il est un peu gêné surtout qu'il s'en veut. Il adore les parents de Tria et il les salue en souriant.


— On est contents de te revoir, dit le père de Tria. Allez jouer un moment si vous voulez, le temps qu'on s'installe.


Jouer? Remus n'a pas joué depuis l'enfance, mais il ne dit rien et il suit Tria qui lui attrape la manche afin de le tirer. Dans la chambre de la brune, il frissonne. Comment fait-elle pour dormir alors que la pièce est remplie de choses terrifiantes? Un frisson le parcourt et il regarde la jeune fille.


— Joyeux Noël Monsieur Remus, dit Tria.


— Joyeux Noël, Tria, répond-il.


Le brun l'observe, elle est tellement jolie avec ses joues roses et cette robe. Il remarque Louis qui se faufile dans la chambre et le salue d'un signe de main, ne connaissant aucun signe dans le langage du petit garçon. L'enfant s'agrippe à sa sœur et il observe Remus, ce qui le met mal à l'aise.


— C'est gentil d'être venu Monsieur Remus, dit Tria. Ça fait longtemps que papa et maman ne t'ont pas vu. Et puis Louis aussi.


Louis tire sur la manche de sa sœur et il signe quelque chose ce qui redouble la gêne de Remus. Peut-être que s'il était venu plus souvent, il pourrait comprendre ce qu'il dit et il s'en veut soudain.


— Louis demande pourquoi tu n'es pas venu avant, explique Tria.


Remus se mord la lèvre. Louis a six ans, la dernière fois que Remus l'a vu, il en avait deux alors le petit garçon ne doit même pas le reconnaître. Le jeune homme ne sait pas trop quoi répondre et il se sent de plus en plus mal.


— Ben, dit-il, je ... tes parents m'ont manqué aussi, c'est juste que je .. hum .. tu sais, j'ai beaucoup de choses à faire alors ...


— C'est ce que maman a dit, répond Tria. Mais c'est pas grave, maintenant, tu es là. Est-ce que tu veux que je te montre mes os que j'ai eus ce matin? Ce sont des os de chauve-souris.


— Oh vraiment? C'est gentil mais je ...


Le pauvre garçon n'a pas le temps de protester qu'elle lui fourre les os sous le nez et il grimace. Peut-être qu'un jour, ce sont des os de loups qu'elle aura et rien que cette pensée le fait frémir. Et il a l'impression que Tria lit dans ses pensées lorsqu'elle reprend la parole.


— J'ai vu un loup hier, dit-elle. Il était beau. J'aurais bien voulu m'approcher, mais papa n'a pas voulu.


— Il a raison, les loups, c'est dangereux, bafouille Remus.


— Mais ils sont beaux, je suis sûre qu'ils peuvent être gentils, lâche-t-elle. En fait, je suis sûre que toutes les créatures peuvent l'être, il suffit simplement d'être gentil avec elles. Peut-être que c'était un loup-garou en plus.


— Q-Quoi?


— Je rigole, les loups-garous n'ont pas cette forme, dit-elle. J'aurais préféré un loup-garou, j'aurais peut-être pu l'aider, mais ce n'était pas la pleine lune alors ce n'était qu'un loup.


— Tria! Les loups-garous sont dangereux, tu ne peux pas les aider! s'exclame Remus.


— Ils ne sont dangereux que parce qu'ils ont besoin d'aide, réplique Tria. Ils ne savent pas se contrôler mais je suis sûre que si quelqu'un voulait bien les aider et ...


— Arrête! la coupe Remus en la secouant à moitié ce qui fait pleurer Louis. Non, pardon, je ..


Il se recule alors que Louis se cramponne à Tria qui dévisage le jeune homme de ses grands yeux. Remus se pince les lèvres et il n'ose même plus dire quoi que ce soit pourtant, il se force parce qu'il ne veut pas faire peur.


— N'essaie jamais d'aider un loup-garou, dit-il, c'est trop dangereux, ce sont des monstres.


— Tu n'es pas gentil, réplique la brune. Ils ont juste besoin d'un ami.


Remus soupire, ça ne sert à rien d'essayer de convaincre Tria parce qu'elle est têtue. Les paroles de la vendeuse de poupées lui reviennent en mémoire et il frissonne. Le paquet dans sa poche lui donne l'impression d'avoir la jambe lourde et il fourre la main à l'intérieur, la refermant sur le cadeau.


— Hum ... Tria, dit-il, je .. j'ai quelque chose pour toi.


Les yeux de Tria s'ouvrent et Remus sent son cœur s'emballer. Il sort délicatement le petit paquet cadeau et il n'a pas vraiment le temps de le donner à Tria qu'elle lui a déjà pris des mains et se précipite pour l'ouvrir. La jeune fille entrouvre la bouche en découvrant un collier avec une petite constellation et elle relève la tête.


— Il est trop beau! Je vais le garder toute ma vie, dit-elle. Merci Monsieur Remus, tu me le mets?


— Oh euh, oui, d'accord, répond le brun en s'approchant. Ce .. ce n'est pas grand chose, c'est ...


«C'est juste l'étoile de l'amour parce que je suis fou amoureux de toi, mais que je suis un abruti qui n'ose même pas te le dire» veut-il dire, mais il se contente de se taire et il retire les cheveux de Tria, frissonnant avant de lui mettre le pendentif.


— merci, dit-elle, moi aussi, j'ai un cadeau pour toi.


Tria se jette sous son lit et elle en ressort un gros paquet. Remus écarquille les yeux, se demandant bien ce qu'il contient tant, il est énorme. En le prenant, il constate que c'est mou et il appréhende un peu parce qu'avec Tria, ça peut aller d'un cadre photo à un squelette entier. Cependant, en découvrant l'énorme ours en peluche, il se sent soulagé.


— C'est parce que les ours en peluche, ils aiment les câlins, explique la brune. Et j'aime bien te faire des câlins, t'as la peau chaude.


— Merci, Tria, il est ... il est chouette, dit Remus.


L'ours est normal. Pas de cicatrices, pas de boutons en guise d'œil. Le jeune homme sent le regard de Tria et il tourne la tête vers elle avant de rougir un peu alors qu'elle prend un air soudain timide.


— Je sais que tu n'aimes pas en parler, commence la brune doucement, mais moi, j'aime bien tes cicatrices et les ours, ils sont forts, indépendants et bien qu'ils ne se laissent pas facilement voir, ils ont un cœur. Moi, je pense que tu es comme un ours. En plus mignon.


Cette fois, le visage de Remus s'embrase et il sent son cœur prêt à exploser. Le jeune homme ne sait pas trop quoi dire, il sait que ce n'est pas une déclaration d'amour, mais venant de Tria, ça le frappe en plein cœur. Il n'a pas le temps de répondre qu'on les appelle pour manger et il laisse l'ours sur le lit, suivant le frère et la sœur dans le salon.

Tout le repas, il observe Tria qui parle, elle ne fait que ça, elle raconte tout un tas de choses et il l'écoute, les yeux grands ouverts parce qu'il est fasciné. Il pourrait l'écouter durant des heures et il s'en veut de ne pas avoir essayé d'être son ami, bien plus tôt. Il aurait dû l'être, mais elle lui faisait peur. Peut-être que maintenant, il est assez grand pour comprendre. À dix-sept ans, il est capable de voir qu'elle l'a toujours intimidé.


— Dire que dans quelques mois, ils terminent l'école, dit Hope. Je n'arrive pas à le croire! Qu'est-ce que tu vas faire, Tria?


— Je vais travailler avec les animaux, annonce la petite brune. Je vais ouvrir un endroit où même les animaux qui font peur auront leur place.


— Je suis sûre que tu seras excellente, répond Hope. Remus n'a pas encore réfléchi bien que je lui dise qu'il faut qu'il sache et rapidement, c'est important.


— Maman, grogne Remus. J'ai encore quelques mois pour réfléchir.


— Les mois, ça passe vite, Monsieur Remus, dit Tria. Tu viendras me rendre visite quand on sera plus à l'école?


Remus déglutit avec peine alors qu'il tourne les yeux vers la petite brune et la réalité le rattrape. Quelques mois. Il ne reste que quelques mois et ensuite, il ne verra plus Tria à la table du petit déjeuner, les cheveux en bataille. Il ne la verra plus en cours de potions, sentant tous les bocaux en grimaçant et son ventre se noue.


— Tu me montreras les créatures que tu auras, dit-il en essayant de ne pas montrer sa détresse.


Les yeux de Tria s'illuminent alors qu'elle hoche vigoureusement la tête. Pourtant, le cœur de Remus se fissure. Tria va disparaître de sa vie un jour. Un jour, elle rencontrera quelqu'un, elle tombera amoureuse de cette personne et rien que cette pensée le fait avoir une bouffée d'angoisse.


— Je vais aux toilettes, dit-il.


Remus se précipite dans la salle de bain et il essaie de respirer correctement. Comment peut-il faire pour être un adulte, abandonner tout ce qu'il aime? Et surtout, comment faire pour ne pas sombrer dans le chagrin en sachant que Tria va simplement sortir de sa vie? Le brun inspire et expire, essayant de retenir le tremblement de ses mains puis il souffle avant de retourner à table.

Le reste de la journée se déroule bien même si cette angoisse ne le quitte pas, mais voir Tria déballer ses cadeaux lui rend un peu de son sourire. Elle ressemble à une enfant qui s'émerveille pour tout et n'importe quoi et quand vient l'heure des adieux, il ne refuse pas l'étreinte de la brune et lui rend malgré le gros ours en peluche dans ses bras.


— On se voit après les vacances, Monsieur Remus, dit-elle. Merci pour le collier, je vais le garder pour dormir aussi.


— Passe une bonne fin de vacances, Tria, répond Remus.


Il la salue avant de tourner les talons, il a bien essayé de contacter Sirius, raconter ses vacances, mais quelque chose ne va pas avec son ami et il ne sait pas quoi. Il se doute que ça doit venir de Steviah, elle aussi semble avoir changé quand il l'a croisée la dernière fois et un frisson le parcourt, car peut-être que c'est ça, d'être adulte. Changer et s'éloigner de celui qu'on a toujours été.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top