Chapitre 10
Jour présent,
La neige se répand doucement dans la douce nuit de cet hiver. Elle tombe et s'échoue dans le plus grand des silences et elle étincelle sous le clair de lune. Tout est bien trop calme et Walburga soupire, se tournant et retournant dans le lit. Orion ronfle à côté d'elle et lorsqu'elle le regarde, elle a l'envie de le poignarder comme chaque fois qu'elle a l'occasion de le penser. Elle se relève en silence et enfile sa nuisette, nouant une robe de chambre autour de son corps.
Elle se sent toujours coupable lorsque Orion lui fait l'amour, comme si par cet acte, elle trahissait Sirius et elle se dégoûte. La femme se dirige en silence vers la porte et elle la referme doucement une fois dans le couloir. Walburga s'arrête devant la porte de Regulus qu'il a laissée ouverte et elle l'observe dormir. Il n'y a que dans ces moments qu'il paraît heureux et son cœur se serre.
Il ne vivrait pas tout ce malheur s'il était né dans une autre famille. Elle sait qu'il souffre du fait que Steviah est dans la grotte, cet endroit froid où les gens se font briser. La mère de famille n'y a jamais été en tant que prisonnière, mais elle a entendu les hurlements, les supplications.
Elle sait que Steviah le subit tout comme Sirius, son propre enfant qu'elle a envoyé afin qu'il puisse revenir dans cette famille. Elle a conscience du mal qu'elle fait, mais il faut être comme ça pour survivre, elle le sait mieux que personne. La brune pousse la porte de son fils et elle descend les escaliers dans ce même silence lourd. Passé le hall, elle s'arme de chaussures et enfile un long manteau avant de sortir dehors.
Le froid glacial la saisit et elle frissonne, mais elle ne fait pas demi-tour et trace son chemin. Ses empreintes de pas disparaissent rapidement, recouvertes par la neige. Walburga traverse le terrain et arrivée à l'orée de la forêt, de là, elle s'enfonce à l'intérieur. Elle connaît le chemin par cœur et pourrait le faire les yeux fermés. Elle traverse jusqu'à arriver à une petite carrière fermée à l'aide d'un sortilège.
Levant sa baguette, elle fait apparaître la tombe de Sirius et elle s'agenouille devant, posant une main sur la pierre froide.
— Joyeux Noël, mon amour, souffle-t-elle.
Elle ferme les yeux et lorsqu'elle les ouvre, elle n'est plus que l'adolescente folle amoureuse de Sirius, aussi pure et innocente qu'il est possible de l'être dans cette famille. Les larmes coulent doucement alors que ses jambes absorbent l'eau de la neige, mais elle ne ressent plus le froid, tout ce qu'elle ressent, c'est lui, Sirius.
— Comment oses-tu encore venir ici? dit-il dans son dos. Après tout ce que tu as fait.
Walburga ne se retourne pas, elle ne peut pas affronter ce fantôme qui la poursuit, qui hante ses pas, son ombre et elle sent une boule noire dans sa gorge. Il a raison, elle est devenue un monstre, la personne qu'elle ne voulait jamais devenir, mais désormais, elle se déteste.
— Je suis tellement désolée, dit-elle. Je .. comment voulais-tu que je réagisse? Je t'ai perdu et je me suis perdue en même temps. Je suis morte le jour où tu es mort.
— Ne mets pas ma mort en cause de ton changement, répond le blond. Tu n'en as pas le droit! C'est parce que tu es faible, tu n'es rien d'autre qu'une faible et égoïste. Tu es un monstre. Regarde ce que tu fais à tes fils.
— Arrête ..
Pourtant, il continue, il lui crache au visage toutes ses vérités, la pourrit de tous les noms et elle se bouche les oreilles avant de hurler, haletante. Il s'agenouille alors devant elle et lui relève le menton. Elle ferme les yeux, refusant de le regarder.
— Regarde-moi, dit-il. Regarde ce que tu as fait. Tu ne m'as peut-être pas tué, mais désormais tu me retiens. Regarde ce que je suis!
Il hurle de le regarder et elle sanglote, ouvrant les yeux. Un nouveau sanglot s'échappe alors qu'elle ne voit plus qu'un cadavre osseux et défiguré. Un haut-le-cœur la saisit, mais elle n'arrive pas à bouger, elle est paralysée.
— Tu es un monstre, Walburga, souffle-t-il d'une haleine fétide et un liquide noir coule de sa bouche. Tu l'as toujours été au fond. Tu maudis tout ce que tu touches.
Walburga secoue la tête, prisonnière de ses propres démons et répète des « non » plusieurs fois dans un souffle. Sirius, création de son propre esprit pour ne pas sombrer dans la folie.
Elle ne voit pas qu'il n'est pas là, qu'il est simplement quelque chose qu'elle a créé pas pour se faire sombrer dans le chagrin, mais pour rester saine d'esprit. Le vrai Sirius, celui qui la faisait rire, n'aurait jamais dit toutes ces horribles choses.
Ou peut-être que si. Elle ne le saura jamais. Elle pleure et ressent un frisson lorsqu'il disparaît et elle se laisse tomber sur le sol, en position fœtale et ses pleurs lui secouent le corps. Il n'est pas là. Il ne l'est plus depuis longtemps, mais elle ne veut pas le laisser partir.
Elle ne peut pas, c'est trop douloureux. Elle reste prostrée dans le froid durant un long moment et quand enfin elle se décide à se relever, son corps tremble et elle chancelle sur ses jambes. D'un coup de baguette, elle fait apparaître un bouquet qui se forme contre la pierre tombale.
— Je t'aime, dit-elle d'une voix enrouée. Je t'aime tellement, je suis désolée.
De nouveau, elle pleure, mais elle ne peut se permettre de rester plus longtemps. Walburga inspire profondément et lance le sortilège de protection avant de rebrousser chemin. Elle ne sait pas si se recueillir sur la tombe de Sirius est un bien ou un mal. Voudrait-il qu'elle vienne alors qu'il a toujours fui les monstres comme elle?
Secouant la tête, elle rentre au manoir et elle se change avant de se rallonger dans le lit. Elle sent Orion qui grogne puis qui passe son bras autour de sa taille. Parfois, même si elle le déteste de tout son être, elle se blottit contre lui comme en cet instant pour trouver une chaleur. Elle ferme les yeux, imaginant Sirius et un pâle sourire naît sur son visage fatigué.
Lorsqu'elle se réveille, le son d'un piano résonne dans la maison et elle retire le bras d'Orion avant de se lever. Elle inspire profondément avant de descendre dans le grand salon et elle trouve Regulus devant l'instrument. Elle l'a entendu en parler à Steviah un jour, lui dire qu'il lui apprendrait et elle sent ses yeux la brûler. Regulus veut apprendre le piano à Steviah tout comme Sirius a tenté de lui apprendre et elle a un sanglot qu'elle couvre de sa main.
— Mère, tout va bien? demande Regulus en s'arrêtant de jouer.
— Oui, tout va bien, dit-elle en s'avançant vers lui. Continue.
Elle pose une main sur l'épaule de son fils et elle se pince les lèvres, résistant à l'envie de le prendre dans ses bras. Regulus se remet à jouer et elle ferme les yeux, se laissant bercer par les notes, transportée de nouveau dans le passé. Elle ressent les mains de Sirius sur les siennes, sa voix qui fredonne et elle déglutit avec peine.
— Mère, êtes-vous sûre d'aller bien?
Walburga rouvre les yeux et se racle la gorge avant de baisser les yeux vers le jeune homme. Elle ressent un immense chagrin, après tout ce qu'elle lui a fait, il s'inquiète encore pour elle. La brune s'installe à ses côtés et regarde les touches du piano.
— Tu t'es trompé, dit-elle.
Elle pose sa main sur les touches et joue quelques secondes afin de montrer à Regulus comment faire pour que la mélodie sonne plus juste. Lorsqu'elle termine, le brun la dévisage et entrouvre la bouche.
— Je ne savais pas que vous saviez jouer, dit-il.
— Je ne sais pas, répond-elle. Ce n'est rien de plus que trois touches.
Un silence s'installe et durant ce temps, Regulus a l'impression de voir une facette différente de sa mère. Plus douce et plus humaine. Walburga relève les yeux et les plonge dans ceux de son fils. Il semble hésiter, mais en profite en voyant que la brune a l'air encline à la conversation.
— Steviah .., commence le bouclé. Combien de temps va-t-elle encore rester là-bas? Et Sirius ..
— Le temps qu'il faudra, répond Walburga. Ils vont devenir une version meilleure d'eux, ils vont nous rejoindre, tu verras.
— Mais mère, je ...
— Non, coupe-t-elle. Il n'y a pas de pitié dans cette famille, Regulus. Les faibles ne sont pas les bienvenus.
— Pardon, je ne voulais pas ..., dit-il.
Elle se relève, retrouvant son air sévère et Regulus pense alors avoir imaginé ce moment de douceur. Le jeune homme garde les yeux rivés sur les touches du piano jusqu'à ce qu'elle parte et il laisse couler ses larmes.
Il entend encore les hurlements de Steviah et de son frère, leurs supplications, et il se relève précipitamment. Il a tout juste le temps d'atteindre l'évier qu'il vomit et il halète, une rage et une tristesse s'emparant de lui comme un ouragan qui le ravage. Il est trop faible, il n'a rien fait pour protéger la fille qu'il aime et son frère.
Regulus serre l'évier entre ses paumes et relève les yeux vers le miroir, son regard est noir alors qu'il souffle bruyamment. Il ne peut pas laisser faire. Tant pis si Steviah a choisi Sirius alors qu'elle est mariée à lui, il doit les sauver.
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