♱ - 𝐂𝐇𝐀𝐏𝐓𝐄𝐑 𝟐.





- Hey les gars, ça va ?

Essoufflée, les cheveux en bataille, l'interpellation de la rose fut à moitié étouffée par la stridente sonnerie qui retentit dans le hall du lycée à l'instant précis où elle ouvrit les lèvres. Cela ne l'empêcha tout de même pas de se faire entendre par ses amis.

Se retournant vivement à l'entente de son exclamation, l'Uzumaki lui adressa un large sourire, les yeux pétillants.

- Oh Sakura ! On a bien failli croire que t'allais pas venir aujourd'hui !

Près de lui, le troisième membre de leur trio -et son accessoirement meilleur ami- ne dit rien, évitant le regard de l'Haruno. Heureusement, le blondinet savait parfaitement parler pour deux.

- Désolé, j'étais à la recherche d'Ino. Vous l'auriez pas vu ? Il n'y a pas moyen de mettre la main sur elle, elle est vraiment introuvable...

Le jeune homme jeta un coup d'œil en direction du noiraud, qui secoua négativement la tête, avant de répondre à sa camarade avec une mine un peu surprise.

- Non, pas depuis qu'on est arrivés. Mais il est que 8h. Peut-être qu'elle a été convoqué par quelqu'un, on la retrouvera sûrement dans le labo. Bon par contre va falloir qu'on se presse, on va arriver en retard !

Et suivant ses compagnons tandis qu'ils se dirigeaient vers la pièce où avait lieu leur cours de physique-chimie, elle pressa le pas, se convainquant qu'elle retrouvera sans aucun doute sa meilleure amie devant leur salle, qu'il n'y avait aucune raison de s'inquiéter.

Son mauvais pressentiment ne la quitta pourtant pas.

L'inquiétude lui fit même oublier de relever la présence d'absence de réponse de la part des deux garçons à sa toute première question.

⋆ ੈ.‧₊📞

Éreintée, elle passa pour la énième fois sa mèche indigo derrière son oreille, tentant vainement de l'immobiliser afin qu'elle arrête enfin de la perturber. Et pour la énième fois, elle eut à peine le temps de se pencher sur son cahier que cet épis bleuté de malheur retombait sur sa feuille. Mais quelle accès de folie matinale l'avait poussé à rendre leur liberté à ses cheveux ?!

De désespoir, elle laissa chuter son stylo sur son bureau et empoigna sa tignasse nuit entre ses mains, la torsadant et l'enroulant avant de s'emparer d'un crayon qu'elle tenta de coincer en elle de sorte à former un chignon provisoire.

Mais malheur, ses cheveux étaient bien trop lisse, et son accessoire de fortune bien trop impuissant face à cela. Ce dernier s'en allait d'ailleurs saluer le carrelage dans un petit bruit, ses mèches retombant dans son dos un peu plus en pagaille.

Se retenant de lâcher un juron, elle baissa finalement les bras, reprenant son stylo et se plongeant dans l'écriture du discours barbant que la soporifique voix de leur professeur leur dictait, pestant contre ces touffes bleu horizon qui revenaient lui casser les pieds.

Il allait vraiment qu'elle pense à les couper un jour. Et cette fichue frange qui se rallongeait un peu plus chaque jour au point de presque lui cacher la vue...

Intérieurement, elle se promit qu'à la pause, elle passerait aux toilettes pour au moins tresser ses cheveux en une petite natte dans l'espoir de tirer un résultat plus profitable de leur prochaine heure, de philosophie.

Laissant leur enseignant noté d'une teinte rougeâtre la liste des exercices qu'ils se devaient désormais de réaliser au tableau, elle laissa ses prunelles lavande se perdre au loin, derrière la vitre de la fenêtre à sa droite.

Elle commencerait son travail plus tard. Sur l'instant, détailler le rossignol perché sur la branche de l'hêtre parant leur terne cour était plus attrayant. Les feuilles jaunes, orange, brunes le désertant, tourbillonnant, virevoltant dans l'air pour après toucher le sol, dansaient, paraissaient s'accorder avec art à la douce mélodie s'échappant du bec du volatile. Enfin, la distance l'empêchant de la percevoir, elle était obligée de l'imaginer. Elle le faisait d'ailleurs sans mal, la symphonie gazouillée carillonant presque à ses oreilles. Les ramure du vieil arbre ployerent sous le poids des autres oiseaux très vite venus rejoindre leur compagnon. De loin, elle vit un nid. Branchages le formant couleur brune.

. Comme ses doux cheveux. Les larmes lui montèrent aux yeux. Peut-être que, finalement, les exercices de mathématiques n'étaient pas si repoussant que cela...

⋆ ੈ.‧₊📞

Mask Game.

À deux, ils avaient formé cela à coups de quelques pensées et espoirs murmurés à trop haute voix, à l'aide d'une pleine lune.

Dans les bois, l'une penchée sur une branches, ses prunelles sarcelles scintillantes du reflet des étoiles en elles, l'autre appuyé sur le tronc, ils ne se connaissaient pas. Ils ne s'étaient pas aperçus.

Elle avait jugé qu'il était temps pour elle de reprendre le chemin de son logement, avait gracieusement sauté de son perchoir, et avait manqué de lui atterrir sur le crâne.

Il avait hurlé de peur, et elle l'avait frappé par réflexe, mais de peur aussi.

Comprenant leur mutuelle méprise, ils s'étaient l'un l'autre excusés, avaient échangés de niaises banalités, et s'étaient séparés.

Puis par hasard s'étaient recroisés quelques jours plus tard, au même endroit. Leur échange s'approfondit, une étrange complicité naissant entre eux. Pas le genre d'amitié fusionelle, ou de sympathie complémentaire. Eux deux, ça avait plutôt été comme deux êtres s'étant retrouvé sur le même bateau. États mentaux semblables, désespoir commun, ils s'ennuyaient, et tiraient de la compagnie de l'autre une occupation nouvelle.

La sensation de ne plus avoir à craindre le jugement de l'autre, car au final, cet autre ne valait pas mieux que soi. Complexe, mais pas désagréable.

L'idée de la création de leur étrange claste était venue assez tardivement, un peu plus de deux mois après qu'ils aient commencés à se côtoyer. Ce fût après qu'il lui ait avouée avoir déjà croiser d'autres personnes elles aussi trouvant refuge à leurs peines dans ses hectares d'étendues d'arbres, la nuit.

Ils n'avaient pas grand chose à perdre, de toute façon.

Et même si, pour lui, cela était un moyen de venir en aide à ses errantes âmes en peine, à tous ses êtres qui, comme eux, devaient tous refoulés et se laisser tourmenter en silence, pour elle, ce n'était qu'un jeu. Qu'une nouvelle distraction, telle l'arrivée du jeune homme dans sa vie, avec pour unique différences de plus grandes proportions.

Il n'avait, au passage, pas réellement eu son mot à dire sur le choix du nom de leur clan, qu'elle avait choisie seule.

Au bout d'une semaine, elle était Belette, lui Renard, et, autour d'un feu, dans une clairière au fin fond de la forêt, ils finissaient d'expliquer les lois de leur groupe à deux jeunes femmes aux masque de chat et lapin, ainsi qu'à un homme à celui de faucon.

Souriez.

Gardez la tête haute.

Déguisez vos faiblesses, vos tourments.

Devant eux, votre cœur est masqué.

Ici, c'est votre visage qui doit l'être.

⋆ ੈ.‧₊📞

Souffrance : Douleur, accès de douleur physique ou moral.

Non.

Peine : Souffrance morale ; état psychologique fait d'un sentiment de tristesse et de dépression dont la cause est connue.

Pire.

Tourment : Supplice, torture; très grande douleur physique, vive souffrance morale.

On se rapproche...

"Les peines doivent produire sur l'âme de l'homme mes mêmes ravages que l'extrême douleur cause sur son corps"

T'en fait pas, Balzac, on a dépassé l'extrême douleur depuis belle lurette déjà...

Elle tenta de faire le tri dans son esprit. Son subconscient paraissait pourtant contre ce choix.

Tracas, martyr, détresse, supplice, affres, désolation, déchirement, assaillement, misère, abbatement, amour.

Une ribambelle de "douleur" se déployant dans son crâne comme la bande annonce des cauchemars à venir risquant de troubler son sommeil. Sentant l'habitude Angoisse toquer à la porte de son âme, elle tendit la main, cherchant à l'aide de gestes frénétiques sa boîte de comprimées sur la table de chevet.

Vite.

Mais cette partie subliminale de son cerveau ne semblait pas en avoir eu assez. La torture n'était pas terminée.

Angoisse, crainte, effroi, panique, inquiétude épouvante frayeur, affolement, appréhension, alarme, peur.

De la nuit. Du jour.

De la solitude. De la compagnie;

Des autres.

D'elle-même, de ses pensées, de sa mémoire.

De la vie.

Mais pas de la mort. Oh non, pas d'elle, heureusement.

Douce délivrance... 

Elle enfonça dans sa bouche quelques pilules, les avalant sans en connaître le nombre.

Dans l'obscurité de sa chambre, l'écran de son téléphone s'éclaira subitement, illuminant légèrement la pièce, le nom de sa meilleure amie s'affichant sur la surface de verre du cellulaire.

"Temari"

Elle laissa les notes de la musique choisie en guise de sonnerie se cogner contre les murs et noyer la pièce, emplissant ses tympans.

" J'ai cru t'apercevoir, au beau milieu de mes rêves,

Et le temps d'un regard, j'ai vu tous tes poèmes... "

Elle profitait du morceau de Nej', cascade sur les joues, les yeux pivoine.

Des heures que cette mule tentait de la joindre. Des heures qu'elle l'ignorait, n'éteignant tout de même pas le mobile, ne prenant pas la peine de la bloquer. Cela ne servait à rien, têtue que cette blonde était, elle serait capable de violenter ses frères ou d'autres de leur camarade pour les soudoyer de lui passer leur téléphone.

Et puis, elle l'aimait bien, ce son.

" J'ai voulu être ta Muse, mais la fin est cruelle. Quelqu'un t'attrape de cette place, je n'serais jamais, elle. "

La mort.

On disait qu'elle avait fait une rechute. Personnellement, elle préférait voir les choses sous un autre angle. Avouer qu'elle n'avait rien trouver de bon à voir dans le monde extérieur et de tenter par contrainte de renouer avec ce dernier.

La compagnie des fantômes de son esprit et des démons de ses rêves étaient tout aussi plaisante que la leur. Il n'allait pas le lui rendre, de toute manière.

En boule sous sa couverture, ses sanglots redoublaient, la sonnerie tournant les talons aussi rapidement qu'elle était venue.

Et, dans un effort surhumain, elle s'extirpa telle une larve à moitié de ses draps, s'emparant de sa bouteille pour vider d'une traite le peu qu'elle contenait et chasser l'acre goût des médicaments. Au moins, ce fichu renouement raté avec le dehors -et plus précisément sa psychiatre- lui aura permis de se procurer une ordonnance, avec, à sa clé, ces chères morphines de l'esprit. Que ce soit somnifères ou antidépresseurs, peut importe. Tant qu'ils la calmaient...

Elle allait enfin retrouver son bain rosé et cotonneux et même, avec un peu de chance, se faire écraser par un sommeil lourd et vide de tous cauchemars. Exactement ce qu'il lui fallait pour affronter la journée du lendemain. Car il avait évidemment fallut qu'ils soient samedi, qui dit week-end, qui dit sa blondasse de compagne qui allait lui casser les pieds en ne manquant pas de pointer le bout de son nez chez elle pour la pousser à se ressaisir.

Les sédatifs eurent heureusement vite raison d'elle.

Nébuleux, confortable, doux, onirique.

Univers irréel, utopique, s'empara d'elle.

Elle s'en était allée.



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