Coca Kiss (Kokonui)

Après plus de trois mois d'attente, voici l'OS pour hoshi_steph ! Désolée du retard, pour me pardonner, voici un OS de plus de 3 600 mots sur du kokonui ! J'ai essayé au maximum de respecter tes mots-clefs, mais j'ai eu du mal avec malentendu. Désolée si les persos sont OOC, j'ai voulu essayer quelque chose...

J'ai eu du mal avec la fin, tu me diras ce que tu en penses. J'espère que ça te plaira quand-même ! Si tu veux que je te refasse un OS, dis-le moi !

AVERTISSEMENT

Cette histoire parle de la rencontre entre deux individus d'Internet à la vie réelle. En tant qu'auteur, je suis responsable de ce que j'écris donc de ce que vous lisez.

Rencontrer quelqu'un que l'on connaît sur Internet dans la vraie vie peut être tentant, mais il y a des risques importants liés à cela. On ne sait jamais qui se cache derrière un pseudo, un sourire, un mot. Des personnes d'apparence gentilles peuvent être malveillantes, même si on les connait depuis longtemps.

1) Ne dévoilez jamais votre adresse sur Internet, même en message privé, ni aucune autre donnée sensible.

2) N'acceptez jamais de rencontrer quelqu'un que vous ne connaissez pas dans un lieu isolé.

3) Prévenez toujours votre famille et/ou vos amis de ce que vous allez faire, où, et avec qui.

4) Écoutez votre instinct. Si vous ne voulez pas aller à un rendez-vous, si vous ne le sentez pas, même au dernier moment, écoutez votre instinct et n'y allez pas.

Trigger Warning:

Mention de sang
Mention de médicaments
Mention d'erreur médicale

Tout avait commencé par une conversation, une banale conversation.

Glad_ieul
|J’ai jamais bu de coca de ma vie

Assis dans l’univers pixelisé de Heart of Shadow, le nouvel MMORPG à la mode, l’humain de Cactus_béni regarda l’elfe de Glad. Les sakura en fleurs faisaient ramer son pc. Le bruit de la ventilation résonnait, seul, dans sa chambre.

Le Village de la Cascade était un lieu prisé des joueurs qui en avaient marre de faire des quêtes ou de s’entretuer dans des guerres de guilde. L’architecture rappelait le Japon médiéval, et la superbe cascade qui surplombait le village en faisait un lieu de rencontre populaire parmi les joueurs. 

Une heure douze du matin. Quelques rares joueurs traînaient encore dans le village, s’échangeant des objets ou des conseils. 

Cactus_béni
|Comment ça jamais ?

Glad_ieul
|Mes parents veulent pas

Cactus_Béni
|Relou tes parents 
|On dirait les miens

Glad_ieul
|Mes parents sont médecins, ils croient trop que ça va me tuer 

Cactus_béni
|Ceci explique cela ah ah

Glad_ieul
|D’ailleurs, ils font quoi tes parents ?

Kokonoi souffla derrière son écran, puis tapa sur son clavier :

Cactus_béni
|On dit pas ses infos persos à des inconnus 

Glad_ieul
|On se connaît depuis des mois, mais je comprends ta vigilance. 
|Désolé.

C’était vrai. Ils appartenaient tous les deux à la même guilde, le Toman, et ils s’étaient rapidement liés d’amitié car ils jouaient tous les deux des soigneurs, un rôle vital dans n’importe quelle équipe.

Kokonoi aimait la manière de jouer de Glad, qui prenait toujours soin des autres joueurs de la guilde et aidait les petits nouveaux.

Il réfléchit un instant, son regard perdu dans le monde pixelisé. Son personnage remontait de temps en autre son chapeau en bambou. Il tapa :

Cactus_béni
|T’excuse pas
|Si c'est toi je peux le dire
|C’est un peu honteux
|Ils sont genre
|Énergéticiens
|Ils sont ultra bobo et je peux pas boire de soda non plus
|Ils pensent ça va me polluer les chakras 

Glad_ieul
|Y’a pas de honte à avoir, on choisit pas sa famille.
|Imagine : un fils de médecin et d’énergéticien qui se rencontrent sur un jeu.

Cactus_béni
|C’est pas ce qui est en train de se passer ? 

Glad_ieul
|Justement, imagine la probabilité pour que ça arrive.

Cactus_béni
|Manquerait plus qu’on habite dans la même ville

Glad_ieul
|Tokyo

Cactus_béni
|Tokyo

Kokonoi fixa son écran. Le clair de lune pixelisé illuminait leur personnage. 

Cactus_béni
|Imagine
|On se voit en scred pour boire un coca ensemble

Glad_ieul
|C'est pas toi qui avait dit de faire attention aux inconnus ?

Cactus_béni
|Touché
|Mais t’es pas un inconnu pour moi
|On soigne ensemble depuis des mois

Glad_ieul
|Merci de m’avoir sauvé du boss, l’autre fois.

Cactus_béni
|De rien, c'était naturel
|On avait perdu notre tank, y’avait personne pour te protéger

Glad_ieul
|Juste… t’es sérieux pour la rencontre ? Le coca et tout ?

Le cœur de Kokonoi s'accéléra. Il inspira lentement par le nez, puis expira par la bouche. Il osa écrire :

Cactus_béni
|Oui, je suis sérieux
|APRÈS SI TU VEUX PAS C'EST COOL AUSSI

Il voyait que Glad écrivait quelque chose dans le chat, mais plusieurs minutes passèrent sans rien. Il commençait à s’inquiéter : et s’il était allé trop loin ?

Glad_ieul
|Jeudi 18H. 
|Café Blueberry à Shibuya.
|Je suis blond et j’ai une cicatrice sur la tronche. Tu me reconnaîtras. 

Glad se déconnecta, comme le cerveau de Kokonoi.

La ventilation tournait toujours. 

Jeudi, 18H.

Kokonoi regarda nerveusement son téléphone, à côté du bar. Ses doigts gelés tapotaient des notes sur son écran, reflet de ses pensées troublées.

Et si Glad ne venait pas ?
Et si Glad n’était pas un adolescent comme lui, mais un vieux monsieur pervers ?
Et si Glad était en fait-,

Il secoua la tête, et resserra sa bombe anti-agression dans sa poche. Si la situation tournait au vinaigre, il pourrait toujours riposter.

Mais pour l’instant…

Rien.

La foule de Shibuya, imperméable à ses états d'âme, passait devant lui. Dans chaque visage, chaque mouvement, il espérait et craignait à la fois de le voir. Son cœur sursautait à chaque tête blonde, à chaque haut rouge. Alors qu'il perdait espoir,

il le vit.

Perché sur des talons hauts, avec un large pull rouge pour braver le froid, il courrait (comment faisait-il ?), slalomant entre les piétons, expérimenté. Il s'assit à l’une des tables de la terrasse dans un mouvement fluide, et ouvrit son téléphone.

Blond. Une cicatrice sur le visage. Ça ne pouvait être que lui.

Il n’osa s’approcher, le jaugea un instant. L’air détaché qu’il abordait lui rappelait celui des chats.

Koko aimait les chats.

Il inspira un grand coup, se rappelant des techniques de respiration que ses parents lui avaient apprises quand il était petit. Inspirer, expirer, lentement… Il aurait dû prendre des granulés homéopathiques pour se calmer.

Il y alla.

Kokonoi s’installa l’air de rien à la table de l’inconnu connu, et demanda :

— Glad ? C’est toi ?

Il releva la tête de son écran, surpris.

— Cactus ?

Il semblait lui-même ne pas y croire. Kokonoi sourit.

— Oui. Mais tu peux m’appeler Koko.

— Inui.

Un silence s’installa. Koko ne savait quoi dire, et Inui avait l’air d’être dans la même situation que lui. Il glissa son regard au sol, vit ses talons qu’il tapait au sol. Une idée germa dans sa tête.

— Comment tu fais pour courir en talons ? D’ailleurs, c’est quelle marque ?

Le visage d’Inui s’ouvrit.

— Alors, en fait c’est très simple…

La conversation coula naturellement de là, et quand la serveuse vint prendre leur commande, ils répondirent en chœur :

— Un coca !

Elle repartit, et Inui lui confia :

— Officiellement, j’ai dit à mes parents que j’étais parti réviser avec des potes.

— Genre tu révises alors que tu joues à un MMORPG.

Inui prit un faux air outré.

— Ouais, je révise, pour être médecin et dire à mes patients de pas boire de coca. Et toi ? T’as inventé quoi comme excuse pour tes parents ?

— Pas besoin, ils me font confiance.

Cette phrase laissa un goût amer dans sa bouche. La serveuse vint l’arracher de ses pensées.

— Vos coca messieurs, dit-elle en déposant les deux verres.

Koko espérait se rincer la bouche du mensonge qu’il avait dit à ses parents. Sortir avec des potes, qu’il avait dit.

Alors que Koko n’avait pas un seul ami.

— À la tienne ! fit Inui en rapprochant son verre du sien.

— À la tienne.

Ils trinquèrent à il-ne-savait-quoi, leur amitié naissante ? Leur rencontre ? Leur premier coca ? Toujours était-il qu’il bu son verre.

La première gorgée pétilla dans sa bouche, puis sa gorge. Le sucre ravagea ses papilles et remonta dans son nez.

— Ah !

— T’as bu de travers ? rit Inui, un sourire aux lèvres.

— C’est pas drôle ! J’ai le nez qui picote maintenant !

— Ouais, mais est-ce que t’as aimé au moins ?

— Je sais pas, faut que je goûte encore.

Il retenta l’expérience. Le sucre perça ses lèvres, s’arrosa sur sa langue, et il sentit ce rafraîchissement immédiat, même dans un froid pareil. Les bulles réhaussaient la saveur, comme autant de petites explosions inoffensives.

— Alors ? demanda Inui, son verre à moitié vide entre les mains.

— C’est pas mal, concéda-t-il.

— Pas mal ? Après avoir bousillé tes chakras ?

— Ouais, y’a quoi ?

— T’es irrécupérable, comme la fois où t’as failli mourir dans l’antre du boss !

— C’est arrivé une fois !

Ils discutèrent longtemps, reprenant des sodas à leur table.

— Et toi, soupira-t-il après son troisième verre de coca, ça te fait quoi de boire ça ?

Le blond se mit à réfléchir.

— J’ai l’impression… d’enfin pouvoir dire merde à mes parents, et ça me soulage, quelque part. C’est comme si je commençais à vivre ma propre vie. Pour tout te dire…

Il leva les yeux au ciel un instant, vit les nuages gris passer, paresseux, dans le ciel.

— Je commence à en avoir ras-le-cul. Ils contrôlent presque tout ce que je fais, l’ordi, c’est ma seule liberté. Ils veulent que je sois médecin comme eux, mais moi, je sais ce que je veux faire plus tard !

— Et c’est quoi ?

— Être modèle.

Il avoua cela à mi-mots, presque honteux.

— Enfin, j’ai déjà posé pour des potes, mais jamais avec de vrais photographes. T’façon, y’a beaucoup trop de pervers dans le milieu.

— C’est vrai, tu fais bien d’être prudent.

Koko pensa à sa bombe anti-agression qui attendait toujours dans sa poche. Il n’était donc pas le seul à être prudent.

— C'est pour ça, continua-t-il, que j’adore le cosplay. J’ai tout un atelier dans ma chambre ! J’adore me mettre dans la peau d’autres personnages, c'est ma manière de rendre hommage aux œuvres que j'aime. Tu devrais essayer, c’est génial !

— Peut-être qu’on pourrait se cosplayer en personnages de Heart of Shadow ?

— J’y pensais justement ! Je te montrerais comment faire, si tu veux ?

— Tu veux… qu’il y ait d’autres fois ?

— Oui ? Je passe un bon moment avec toi. Ce serait dommage qu’il n’y ait pas de prochaine fois. Tu pourras me montrer des trucs d’énergéticien, si tu veux.

Koko rit.

— Ouais, et comment te nettoyer les chakras aussi, après avoir bu tant de coca.

Inui tapota ses talons au sol. Koko avait appris qu'il s’agissait de Louboutin, grâce à leur semelle rouge.

— Tu sais, Koko… commença le blond.

Il était tout ouïe.

— Je pensais que ce serait gênant. Qu’on aurait rien à se dire. Mais c’est drôle, c’est plus facile que ce que j'imaginais.

Koko sourit.

— Moi aussi, j’étais stressé. Et j’avais un peu peur.

— Vraiment ?

— Ouais, j’pensais que tu serais un troll ou un vieux monsieur bizarre, mais en fait…

Il ne termina pas sa phrase. Inui compris.

— Bon, dit le blond, je vais devoir y aller. Merci pour ce moment.

Chacun paya sa part, et Koko partit le cœur léger, heureux de cette aventure, le goût du coca encore sur les lèvres.


C

’était devenu une habitude.

Jeudi, 18H, à Shibuya. Ils exploraient le monde comme leur personnage exploraient celui de Heart of Shadow. Ils avaient presque tout fait : l’interdit des hamburgers, des bars peu regardant sur l’âge, des arcades jusqu’à pas d'heure. Koko lui apprit les méthodes de respiration, des trucs et astuces d’énergéticien, et Inui lui apprit à faire ses propres cosplay. Ils projetaient d’aller ensemble à la conférence d’Heart of Shadow, déguisés en leur personnage, avec le reste de la guilde du Toman.

Ils s’étaient échangés leur numéro de téléphone, les rapprochant. Koko lui envoyait des images idiotes en plein cours, et recevait en réponse des images encore plus stupides.

Petit à petit, leur amitié grandissait, sous le regard bienveillant de Tokyo la grande. Chaque pas qu’ils prenaient ensemble était un bonheur pour Koko. Il avait enfin l’impression d’avoir quelqu'un sur qui compter, qui le comprenait.

Quand Koko commença à avoir des sentiments pour Inui, c’était vers leur dixième rendez-vous, après que le blond lui ait dit, entre deux verres de coca :

— T’es vraiment ma personne préférée.

Cette phrase résonna si profondément dans son cœur qu’il dû prendre des granulés homéopathiques pour se calmer. Sans effet. Il se confia à ses parents, qui aussitôt lui dirent :

— Comment est-elle ?

Avant de se raviser…

— Ou il, peu importe.

Ils lui donnèrent du quartz rose, pour attirer l’amour, et brûlèrent des bâtons d'encens en son honneur. Tout devait être prêt dans le cosmos pour lui porter chance. Si cela gêna un peu l’adolescent, il savait que pour ses parents, c’était leur manière d’aider sans pour autant interférer directement dans sa vie. Il les remercia dans sa tête.

Il attendait avec impatience le prochain jeudi.

De : Inupi
|On peut plus se voir.
|Désolé.

Son cœur se fissura.

De : Vous
|Pourquoi
|Tes parents ont découvert ?

De : Inupi
|Ils détestent ta famille.

Ils détestent ta famille.

De : Vous
|Pourquoi ??
|Réponds-moi

De : Inupi
|Je peux pas, désolé.
|Au revoir.

Il ne répondit ni à ses messages, ni à ses appels. Koko était dévasté. Alors il demanda à ses parents, désemparé :

— Pourquoi les Seishu nous détestent-ils ?

— Le médecin qui a tué notre aïeul via une erreur médicale était un Seishu. Jamais notre enfant ne se liera avec cette famille de malheur !

— Mais pourquoi ?

— Nous avons créé un trou dans leur vie parfaite, et ils refusent de vivre avec cette erreur. Cette honte traverse les générations, sans qu’aucun ne prenne le courage de l’assumer. Les Seishu sont des lâches !

— Mais… mais si je l’aime…

— De mon vivant, mon enfant n’aimera jamais un Seishu !

Son cœur était en miettes, mais il lui restait un espoir : Heart of Shadow. Si Inupi s’y connectait… s’ils pouvaient se parler, au moins une dernière fois…

Il le fallait.

Cactus_béni
|Quelqu’un a vu Glad ?

Invincible_Mikey
|Il a dit qu’il serait là qu’à partir de minuit
|Il a des problèmes avec sa famille

L’attente fut interminable. Koko avait passé dans sa tête tous les scénarios possibles, du rejet complet à l’espoir fou que peut-être, peut-être, les choses allaient s’arranger.

Quand il vit que Glad s’était connecté, il se précipita vers lui. La marée de pixels faisait cracher son ordinateur.

Cactus_béni
|INUPI
|Faut qu’on parle c'est urgent

Glad_ieul
|Ouais, là je joue en scred
|Faut pas que mes parents soient au courant

Cactus_béni
|Je sais, pour nos familles

Glad_ieul
|Non, tu ne sais pas.
|Pas tout, du moins.

Cactus_béni
|C’est-à-dire ?

Glad_ieul
|Ton aïeul qui est mort avait refusé les soins conventionnels et avait préféré les médecines alternatives
|Du moins, c’est ce que ma famille m’a dit.
|Ainsi, il n’y aurait pas eu d’erreur médicale,
|Mais le dossier a été clos sans donner raison à aucun des partis

Cactus_béni
|Qu’importe qui a raison ou tort, c’est ridicule de vouloir nous séparer !

Glad_ieul
|Tu parles comme si t’étais amoureux.

Cactus_béni
|Parce que c’est le cas

Inupi ne répondit pas. Koko tapa à s’en tordre les doigts :

Cactus_béni
|J’aime nos sorties, et je t’aime toi.
|C’est compliqué pour moi de te le dire, mais depuis notre premier verre de coca, je pense à ça. À nous. À ce qu’on pourrait être. Et je sais que c’est idiot mais je pense que j’y crois, à ce “nous”.
|J’y crois.
|Et parce que j’y crois, je veux avoir ta réponse : veux-tu continuer de soigner avec moi ?

Inupi ne répondit pas. Koko se dit que c’était le lag ou un bug, mais quand il vit les trois petits points sautiller, signe d’une réponse en cours d’écriture, son cœur rata un battement.

Glad_ieul
|Oui, je le veux.

Koko avait envie de pleurer.

Glad_ieul
|Marions-nous
|Dans le jeu je veux dire.

Koko pouffa.

Cactus_béni
|Oui, marions-nous
|Prévenons le Toman d’abord

Malgré l’heure tardive, tous répondirent présents, et l’on leur expliqua la situation.

Takemichou
|On dirait trop un film !!
|Ne vous inquiétez pas, on va organiser tout ça tout de suite !

Ainsi, les préparatifs commencèrent.

Ils allaient se marier. La guilde du Toman avait tout organisé. L’endroit serait le Village de la Cascade, là où tout avait commencé. La lune pixelisée baignait le Village de la Cascade d’une lumière douce, et les sakura virtuels lâchaient une pluie de pétales qui flottaient dans l’air, faisant toujours cracher son ordinateur.

Koko soigna son apparence, vêtit son avatar de ses plus beaux habits. Son humain revêtait une robe longue et blanche sertie de pierres bleues, avec une longue traîne en dentelle. Certes, ce n’était pas l’équipement le plus approprié pour se battre dans le jeu, mais il collait au moins à la situation.

Il se demanda ce que faisait Inupi. Les autres membres de la guilde s’étaient habillés en hommes et femmes d’honneur, ou en mascottes ridicules. Tous spammaient des messages de bonheur ou de préparation pour les festivités à venir. Koko, ou plutôt Cactus_béni, ou peu importe, attendait dans un coin, attentif au moindre mouvement et message de ses coéquipiers.

Cactus_béni
|Où est Glad ?

Invincible_Mikey
|Il se prépare, tu seras pas déçu promis

La tension de Koko atteignait des sommets. Il n’en pouvait plus, ses mains tremblaient. Il ne savait pas s’il était dans un rêve ou un cauchemar.

Enfin.

Il le vit.

Dans une tenue rouge et or, des fleurs blanches dans les cheveux, il était tout simplement…

Cactus_béni
|Magnifique.

Glad_ieul
|Merci. Tu es beau toi aussi.

Il sentit ses joues rougir, même caché derrière son écran. Ils se rapprochèrent de l’autel, où Invincible_Mikey les attendait, déguisé en prêtre.

Invincible_Mikey
|Par le pouvoir de maître de guilde qui me sont conférés, je vous déclare…

Il n’entendait que son cœur battre dans sa poitrine. Il se demandait si c’était la même chose pour Inupi.

Invincible_Mikey
|Partenaires !

Les gens applaudirent ou spammèrent l’emoji cœur, tandis que Koko voyait leur deux personnages s’embrasser. Son cœur se gonfla. Il pensait être seul, mais il était en réalité bien entouré.

Glad_ieul
|Je ne pourrais pas être avec vous à la conférence, vu que je suis privé de sortie, mais
|Merci pour tout. Vous êtes géniaux.
|Cactus, je t’aime.

Koko regarda les bandes de tissu éparpillés au sol.

Il allait le faire.

Il cousu, raccommoda, rapieca, reprisa, coupa et recoupa, tailla et recolla, colla et décolla, découpa et serti. Enfin, quand il n’en puis plus, il démonta, remonta, re-démonta, cracha du sang puis termina.

Son cosplay était fin prêt.

Pour Inupi, il sera le plus beau des cosplayer.

Le jour tant attendu était arrivé ; celui de la convention de Heart of Shadow. Il était avec ses parents, qui ne voulaient pas qu’il soit seul, prétextant la foule, mais il savait que c’était pour mieux le surveiller.

Il entra dans le hall d’exposition et fut agressé par tout le bruit et la lumière qui s’y dégageait. Ça lui donnerait presque mal au crâne. Les organisateurs s’étaient donné du mal pour cette première convention, mais à quel prix ? Le brouhaha de la foule qui se déplaçait et se marchait dessus n’aidait pas.

Certains cosplayers étaient allés très loin, et Koko avait l’impression de n’être, avec son cosplay, qu'un simple humain. Il était vêtu de ce qu’il avait porté à son “mariage”. Il se sentait tout de même un peu moins ridicule autour de tous ces gens qui faisaient mieux et pire.

Il rencontra les membres de sa guilde au point de rendez-vous qu’ils s’étaient fixé -à côté des poubelles-,  et il fut surpris par l’apparence de certains. Il imaginait Mikey… hé bien, plus grand.

Mais Inupi n’était pas là.

Ses parents se plaignirent de l’énergie qui se dégageait des stands, des énergies contradictoires de gros rats capitalistes, selon eux. Koko en profita pour les semer avec l’aide de ses amis. Il se cacha avec Draken, Mikey et Takemichou au détour d’un stand de nourriture. Mikey tapait dans les friandises du stand, sous le regard désapprobateur du plus grand.

Son téléphone vibra.

De : Inupi
|J’ai réussi à me barrer

Koko n'en croyait pas ses yeux.

De : Vous
|T’es où ??

De : Inupi
|Je suis à l'entrée.
|Le mec elfe avec une traînée de fleurs, c’est moi.

Koko se rendit avec ses amis à l’entrée, zigzaguant entre les cosplayers et le reste. C’était difficile à cause de sa robe qui se prenait dans ses pieds, mais la grosse carrure de Draken permettait de forcer le passage sans trop de résistance.

Enfin.

Il le vit.

De sa longue traîne de fleurs, de sa robe blanche aux détails pourpres, de ses oreilles d’elfe… Inupi incarnait avec grâce un être de la forêt, en harmonie avec la nature.

Inupi le regarda et sourit.

— Je t’ai manqué ?

— Inupi !

Il lui sauta dans les bras, et faillit le faire tomber avec lui, débordé par l’émotion. Leur robe s’emmêlèrent entre elles, se confondaient dans leurs détails pourpres et bleus.

— Je croyais ne plus jamais te revoir !

— Moi aussi !

Koko recula, pour mieux voir Inupi dans son entièreté. Autour d’eux, la foule, impassible, bougeait. Comme à Shibuya.

— Comment t’as fait pour venir ?

— Je te raconterai plus tard, là, on passe du bon temps !

— Mais mes parents sont là ! Et les tiens doivent te chercher !

— Et alors ? lui répondit-il.

Doucement, Inupi lui tendit la main, et il l'a prise.

— C’est notre moment, nous sommes forts. Et puis…

Il entendit au loin Takemichou rire aux côtés de Mikey.

— Nous ne sommes pas seuls.

Ils rejoignirent leur groupe d’amis et s’amusèrent à travers les différents stands. Ils burent du coca jusqu’à s’exploser le ventre, et Takemichou prit une peluche pour sa petite-amie, qu’il avait gagnée au stand du coin. Cette journée semblait être comme un rêve, hors du temps. Koko ne voulait plus partir d’ici, il ne voulait plus lâcher la main d’Inupi.

Au loin, ils entendirent :

— Encore vous ! Allez-vous donc nous hanter jusqu’à la fin ?

— À qui le dites-vous !

Le sang de Koko ne fit qu’un tour. Il pâlit.

— Nos parents ! s’exclama-t-il.

— Oui, ils se sont vus !

— Ça sent les embrouilles… marmonna Draken.

Ils se précipitèrent sur le lieu de la dispute. Une petite foule encerclait leurs parents, qui en étaient presque aux mains. 

— Arrêtez ! cria Koko, sa voix s’élevant au-dessus du tumulte.

Tous les regards se tournèrent vers lui. Il détestait ça, et se sentait se rétracter. Il n’avait pas pris ses granules homéopathiques avec lui, quelle plaie.

Inupi resserra sa main dans la sienne.

— Allons-y.

Ils avancèrent d’un pas. Le blond s’éclaircit la voix.

— Nous, descendants de la famille Seishu et Hajime, déclarons que cette querelle entre nos deux familles ne nous empêchera pas de nous aimer !

Koko ajouta, la voix légèrement tremblante :

— Père, mère, je sais que vous ne voulez que le meilleur pour moi, mais il faut comprendre que c'est lui que j’aime.

Un silence lourd tomba sur la convention. Le regard des deux familles était perçant.

Puis…

— Ça ne sera pas facile, dit le père d’Inupi, la voix douce.

— Mais il nous faut avancer, continua la mère de Koko. Pour le bien de nos enfants.

Il n’y avait pas de solution magique. Mais ce fut un début. Un petit pas vers une compréhension mutuelle qui semblait impossible il y a encore quelques heures. C’était comme si le souffle que retenait des centaines de gens se relâchait. L’ambiance se fit tout de suite plus légère. La main d’Inupi ne quitta pas celle de Koko.

— Peut-être qu’un jour, les choses changeront, pensa tout haut Koko.

— Moi j’y crois, dit Inupi en serrant sa main dans la sienne.

Et sans trop réfléchir, ils s’embrassèrent, sous les acclamations et sifflements de leurs amis.

Un baiser au goût de coca.

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