𝖯𝖱𝖮𝖫𝖮𝖦𝖴𝖤
Sur ce chapitre (et les prochains), je nommerai des lieux qui sont vraiment dans le livre. À vous de vous munir de la carte des clans pour mieux vous repérer dans votre lecture.
Bonne lecture !
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Le reflet de la lune sur la flaque que fixait Saut Discret, la nuit de son baptême de guerrier, le fit soupirer d'ennui. Jamais il ne s'était autant ennuyé de ses douze lunes d'existence. Pas une feuille envolée par la brise, ni aucune jolie proie à chasser dans les nombreuses touffes d'herbes...
Le chat noir et blanc leva la tête vers les étoiles. Elles scintillaient. Le Clan des Étoiles allait-il lui laisser une nuit aussi calme ? Saut Discret ne l'espérait que très peu.
Assis à - ce qu'on appelait - l'entrée du camp, il reniflait l'air au moindre bruit de pas, ou du vent soufflant dans les feuilles des arbres.
— Je me demande pourquoi je dois garder le clan après ce qu'il s'est passé il y a quatre lunes... bougonna le félin. Qui oserait nous attaquer après un tel événement, tiens ? Une si terrible bataille qui a asséché les cœurs de tous les chats du lac. Qui oserait s'aventurer trop près des frontières ? Eh bien, personne !
Saut Discret laboura le sol de colère, de ses griffes peu aiguisées. La terre était si sèche que son geste la rendit plus humide... Il se lécha presque aussitôt les griffes, qui lui servaient d'arme de chasse, pour se libérer de la terre coincée entre ses coussinets.
Saut Discret se coucha sur le flanc, gardant la tête levée vers l'horizon invisible, pour éviter de sombrer dans le sommeil.
— Pff... souffla le jeune guerrier. Eh puis, je ne peux même pas dormir, au risque que ça finisse mal pour moi. Et si c'est pour terminer puni de repas et de toutes autres activités... Hors de question.
Le mâle observa les alentours et tenta d'apercevoir quelqu'un ou une chose qui pourrait le distraire... Mais avec la nuit noire, aucune chance de trouver une quelconque occupation que de dormir jusqu'à l'aube. Saut Discret regarda les étoiles, d'un air suppliant.
— S'il vous plaît, dites-moi ce que je dois faire... supplia-t-il. Je vais devenir fou à force de m'ennuyer !
Il soupira avant de poser sa tête entre ses deux pattes avant. Saut Discret ferma les paupières.
Le jeune mâle ouvrit les yeux. La nuit était toujours aussi calme. Il se leva, malgré sa lourde et pesante fatigue. Saut Discret vit une feuille voler sous l'effet du souffle du vent. Pourtant, lui, ne ressentait pas la brise sifflante... Bizarre... se dit-il. Il continua son chemin, peu attentif aux crissements des brindilles sous ses coussinets.
Une forte odeur de campagnol lui brûla les narines. Quelle délicieuse odeur... murmura-t-il. Le jeune félin s'accroupit en position de chasse pour tenter de localiser sa proie. Très bonne idée, car il parvint facilement à la débusquer. Saut Discret s'approcha peu à peu de la bête, toujours en rampant contre l'herbe tapie par de nombreuses feuilles mortes. Cette fois-ci, il se fit avoir par le crissement des feuilles rousses. Zut ! grommela-t-il. Il ne vit pourtant pas le campagnol s'enfuir, comme il le devrait...
Il se releva, bredouille, avant qu'une légère douleur sur le flanc ne le déséquilibre.
— Aïe, se plaint Saut Discret avant de se coucher sur le flanc.
Le chat grimaça face à la vive douleur du dos. Ça doit être la fatigue... supposa-t-il. Saut Discret bailla un instant avant de regarder autour de lui. Toujours rien à faire. Le chat noir et blanc observa le lieu où il se trouvait. Résultat : il comprit qu'il était toujours à l'entrée du camp...
— Pourquoi je me pose cette question pourtant logique ? grommela-t-il contre lui-même.
La pénombre lui fit tourner la tête. Saut Discret décida de se dégourdir les pattes, en se promenant le long du fleuve. Un chat au pelage roux et blanc particulièrement soigné, sortit des fourrés et se retrouva soudainement face à lui.
— Ha, ha, ha... ricana l'inconnu. J'attendais ce moment depuis bien longtemps. (Saut Discret ne su quoi répondre, incapable de reconnaitre le chat) Si tu sais à quel point ce jour promet de me remplir de joie pour les jours à venir. Je vais te tuer, Saut Discret.
— Non, enfin... Je... paniqua l'intéressé, qui ne comprenait pas ses paroles.
— Ce n'est pas une question, dit-il sans prendre la peine d'échapper un rire (ô qui l'emmènerait sans aucun doute dans la Forêt sombre à sa mort).
Saut Discret recula d'un pas.
— Tu as peur de la mort, pauvre petit chaton ? ricana de nouveau l'intrus. Tu verras, c'est pas si terrible que ça. Et puis...
— Et puis quoi ? hurla le guerrier noir et blanc. Si tu veux me tuer, tu pourras encore attendre longtemps !
— Ça, c'est ce que tu crois ! rit une nouvelle fois le félin roux et blanc.
Saut Discret n'eut pas le temps de riposter que son adversaire se jeta sur lui. Le guerrier du Tonnerre sortit ses griffes, prêt à riposter, de manière violente, cette fois-ci.
De nombreuses questions se bousculaient dans la pensée de Saut Discret : qui est ce félin ? Que me veut-il ? Pourquoi... Mais, il entama à peine sa question, que son adversaire planta ses crocs dans le cou du chat noir et blanc. Saut Discret se débattit avec l'aide de ses pattes arrières, mais le félin roux et blanc était plus fort que lui. L'adversaire du guerrier lâcha son emprise dans le cou de Saut Discret, et tenta de lui labourer le flanc. Saut Discret roula sur le côté pour éviter l'attente - malgré sa respiration rauque. Il se retrouva dans un tas de ronces. En tentant de se relever - tant bien que mal -, le chat noir et blanc se fit de nouveau avoir par la force de son agresseur : il lui avait sauté dessus. Saut Discret le regarda. Du sang gouttelait de ses crocs. Son regard était rempli d'une lourde haine, et son air de vengeance pour le chat noir et blanc était encore présent. C'est bientôt fini pour moi... pensa-t-il en reniflant. Saut Discret voulut tout de même tenter une attaque, mais, trop faible pour faire un geste, il s'effondra de nouveau.
Les yeux fermés, il inspira une dernière bouffée d'oxygène et plongea dans un très long sommeil.
— Suis-je mort ? Mort ? Mort ? résonna une voix dans sa tête. Ça y est... Ça y est... C'est la fin.
Un chat s'avança près de lui dans la pénombre. Saut Discret se leva aussi rapidement que possible. Assis, les oreilles tournées vers l'inconnu, il ne pouvait apercevoir que la sombre silhouette imposante du nouveau venu.
— Bonsoir Saut Discret ! salua le mâle en s'asseyant à ses côtés. Tu dois être surpris de ce rêve étrange.
— Ça y est, je suis mort ! s'exclama l'intéressé en voyant le guerrier.
Le mâle noir à la fourrure étincelante émit un petit rire étonné face à la vive réaction de Saut Discret.
— Es-tu sûr de ce que tu racontes, au moins ? interrogea le chat du Clan des Étoiles.
— Pourquoi ce chat m'a-t-il tué ? Je suis bien mort au Clan des Étoiles, non ? Je veux des explications ! grogna le jeune félin en hérissant ses poils. Et, qui est ce chat qui m'a tué ?
— Calme toi... Tu n'es pas mort. Tu as seulement vu comment tu allais mourir, souffla le chat-étoile.
— Pourtant, j'ai... C'est comme si j'avais vraiment tout ressenti, c'est... C'est vraiment atroce.
— Je sais, malheureusement.
— C'est pas très joyeux tout ça... grommela-t-il.
Le chat-étoile lui lécha l'oreille.
— Ton père voulait tellement te voir... Mais, je voulais d'abord rencontrer mon petit-fils. Surtout car je devais te parler, annonça-t-il en le regardant dans les yeux.
— Tu es... Tu es mon grand-père ? s'étonna Saut Discret. Papillon de Nuit ?
Le grand chat noir acquiesça, et regarda les étoiles. Saut Discret hésita avant d'ajouter :
— Tu sais, Papillon de Nuit, c'est terrifiant ce qui se passe en ce moment. J'ai peur de...
— Nous avons tous peur... le coupa son aîné. Je sais que c'est difficile, mais nous ne pouvons rien faire.
— Mais...
— Oui, j'ai toujours su que si une chose comme la terrible bataille - que lorsque tu étais encore un jeune apprenti - arriverait, plus rien ne serait comme avant. Même le Clan des Étoiles est à présent divisé... souffla Papillon de Nuit. J'espère que ce n'est pas la fin.
— La fin de quoi ? questionna Saut Discret.
— La fin des clans...
Saut Discret frissonna à l'idée que les clans n'existent plus. Il repensa soudainement à son rêve étrange.
— Si j'ai bel et bien rêvé de ma mort, quand aura-t-elle lieu ?
— Le temps te le dira le moment venu... répondit Papillon de Nuit.
— Mais...
— Sois patient.
— Je ne suis pas impatient ! Je... Non, tu as raison, je ne veux pas le savoir, marmonna le félin.
Sa remarque amusa Papillon de Nuit.
— Tu auras d'autres visions... Certaines seront peut-être plus dures à avaler que les autres, mais n'aies pas peur, et garde la tête haute... À l'avenir, n'essaie pas d'empêcher que les morts arrivent.
Saut Discret sentit ses paupières se fermer après les paroles de son grand-père. Il voulut l'interroger sur ses paroles, mais ce fut sans effort, et il s'endormit.
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environ 1470 mots
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