2- Le cours de sortilèges
« L'amour est une rose.
Chaque pétale est une illusion.
Chaque épine est une réalité. »
Charles Baudelaire.
Le professeur Flitwick s'avança parmi la rangée de tables tout en posant diverses questions sur la théorie qu'ils étaient censés apprendre pour aujourd'hui. Narcissa faisait défiler les pages avec empressement, ne sachant même pas de quelle théorie il parlait. Elle songea à demander à son voisin de table, Augustus Rookwood, mais celui-ci était bien trop occupé à répondre à un parchemin lancé par Corban Yaxley tout en ricanant pour pouvoir lui répondre correctement.
– Mrs Black ! appela tout à coup le professeur. Pouvez-vous nous citer ce qu'est un sortilège d'illusion ?
Le cœur de Narcissa se mit à battre la chamade. Elle jeta un coup d'œil désespéré à son manuel ouvert à la mauvaise page quand elle entendit Corban chuchoter son nom :
– Black ! Psssst !
Elle tourna discrètement la tête et le vit mimer sa réponse avec des gestes étranges. Mais il s'arrêta net sous le regard noir de Flitwick sans qu'elle n'eût pu deviner le sens de sa danse. Elle tenta :
– C'est pour donner l'illusion de quelque chose ?
– Mais encore ? grimaça le professeur, légèrement agacé.
Toute la classe rigola même si personne ne connaissait la véritable réponse. Tous, sauf Lucius qui fixait la cour depuis sa fenêtre d'un air songeur.
– Mr Malefoy ! appela Flitwick qui s'était lui aussi aperçu du manque d'attention de son élève.
Lucius sursauta, violemment tiré de ses pensées.
– Pardonnez-moi professeur, je n'ai pas bien entendu votre question.
– Pouvez-vous nous citer un des avantages du sort d'illusion ? Reformula Flitwick, faisant preuve de beaucoup de patience.
– Il permet de disparaître en une seconde aux yeux d'autres personnes, répondit-il machinalement.
Corban siffla d'admiration ce qui plongea la classe dans un nouveau fou rire.
– Taisez-vous ou je ne donne pas les dix points aux Serpentards !
Une moitié de la classe se tut immédiatement tandis que l'autre moitié, composée principalement de Gryffondors, se mit à crier le plus fort possible. Augustus sortit sa baguette et chuchota un sort qui les fit tous taire.
– Je rajoute dix points de plus pour l'intervention de Mr Rookwood, ce qui fait un total de vingt points !
Corban applaudit discrètement tout en lâchant un petit rire de moquerie. Les Gryffondors firent tous la moue et à la demande du professeur, le voisin de Narcissa désactiva à contrecœur le sort qui scellait leurs lèvres.
Tandis que Flitwick reprenait son cours, Augustus donna un petit coup de coude à Narcissa et lui chuchota :
– Je ne sais pas ce qui se passe entre toi et Malefoy, mais ça n'a pas l'air d'aller.
– Il se passe que ce ne sont pas tes affaires, le rembourra-t-elle.
Lucius, resté à l'écart du groupe, ne put donc pas entendre leurs chuchotements, mais Corban, placé derrière eux, s'avança discrètement de quelques chaises vides et tendit un bout de parchemin à son camarade. Narcissa, piquée par la curiosité, tenta de le prendre des mains, mais Corban lança un sort à un cordon qui s'enroula autour de ses poignets et cloua ses mains sous la table.
– Secret défense, mini Black, minauda-t-il, fier de son sortilège réussi.
Augustus lisait lentement le parchemin, tentant de décrypter tant bien que mal l'écriture illisible de son ami. Au fur et à mesure, son visage pâlit et ses yeux s'écarquillèrent, comme s'il venait d'apprendre une terrible nouvelle. Narcissa se demanda ce que pouvait bien contenir ce parchemin et tenta de se libérer de ses liens, mais la cordelette ne fit que se resserrer davantage. Flitwick ne se rendait compte de rien, plongé dans l'exposition de son livre adressée à des élèves qui ne l'écoutaient pas.
Finalement, Augustus froissa le papier et le brûla. La cordelette se desserra au moment où les cendres se déposèrent sur la table. Narcissa lança un regard furieux à son compagnon de derrière avant d'interroger du regard son voisin de table. Rookwood avait adopté une mine inquiète.
– Et bien maintenant je sais pourquoi ça ne va pas fort entre vous deux, marmonna-t-il.
Corban fit les gros yeux et lui intima de se taire avec une claque sur l'épaule, mais Narcissa avait déjà tout entendu.
– Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
– Vous allez-vous... commença Augustus avant que Corban ne le coupe, furieux :
– Mais tais-toi donc ! Je t'ai dit de ne pas le dire ! Tu ne sais pas lire ?
– Pourquoi veux-tu le lui cacher si elle le sait déjà ? Se rebella Augustus.
– Mais je ne sais pas si elle le sait moi !
– Et bien demande-lui, elle est juste devant toi ! s'exclama-t-il en pointant sa main vers Narcissa qui les observait depuis le début, un sourcil relevé.
Corban se tut, sourit devant sa stupidité et s'adressa à sa camarade :
– Tu sais ?
– Ça va être dur de répondre si je ne sais même pas de quoi vous parlez, répondit-elle d'un air détaché.
À vrai dire, elle avait déjà sa petite idée, mais ne voulait pas être prise pour une idiote si elle se trompait. Corban se creusa la tête pour tenter de poser la question sans dévoiler pour autant l'information, mais Augustus le coupa de court en questionnant :
– Pour votre mariage, tu sais ?
Corban ouvrit grand les yeux avant de plaquer sa main contre son front, désespéré par son ami. Mais lorsque Narcissa hocha la tête, il soupira de soulagement tandis que Augustus affichait un sourire de vainqueur.
– Mais la question est : (les deux relevèrent brusquement la tête) comment vous, vous savez ?
Augustus pointa immédiatement du doigt son compagnon de derrière qui blêmit.
– Heu, et bien... bafouilla-t-il sous le regard inquisiteur de Narcissa, tu sais que... avec Lucius... et bien on est dans le même dortoir... alors... comme il y avait une... une lettre dépliée, j'ai... j'ai lu...
Les yeux de Narcissa lui lancèrent des éclairs au moment où elle comprit. La curiosité de Corban était vraiment maladive, songea-t-elle, irritée qu'il se soit immiscé dans leurs affaires personnelles et qu'il l'ait révélé, de plus est, à Augustus. Ce dernier reprit son air sérieux et chuchota plus discrètement, car Flitwick leur lançait des regards noirs plus souvent :
– Ne sois pas trop dure quand même, avec Lucius.
– Occupe-toi de tes affaires, grogna-t-elle, sentant sa rage vouée au monde entier revenir avec force.
– Il vient de perdre sa mère, ajouta-t-il dans un souffle.
Narcissa se figea immédiatement. Éléonore Malefoy était morte ? Elle avait peine à y croire. La dernière fois qu'elle l'avait vue, c'était au gala du Noël dernier et elle rayonnait de beauté et de vie. Comment avait-elle pu décliner de façon si brutale en seulement un an ?
– Une maladie inconnue, répondit Corban à sa question informulée.
– Depuis quand sais-tu lire dans les pensées toi ? S'enquit-elle.
– Depuis que le Maître me l'a appris, répondit-il fièrement.
– Le Maître ?
– Voldemort, expliqua Rookwood.
Elle se rappelait à présent que Bellatrix, sa sœur, utilisait cette appellation toutes les fois où elle parlait de lui. Elle ne savait pas que Yaxley s'était aussi plié devant lui. Pour sa part, elle essayait de rester le plus possible éloignée de ce grand mage noir, même si elle partageait en quelque sorte son idéologie.
Elle reporta son regard sur Lucius qui continuait d'observer d'un air absent l'extérieur. Tout à coup, elle s'en voulut d'avoir été si froide envers lui, ce matin même. Si elle avait su, elle aurait été plus compatissante et aurait déchaîné sa colère sur quelqu'un d'autre. Mais ce qui était fait ne pouvait être défait.
Corban posa sa main sur son épaule pour attirer de nouveau son attention.
– Il était en colère contre toi ce matin. Tu sais, lui non plus n'a pas le...
– Oui, je sais, le coupa-t-elle.
– Tu aurais pu tomber sur pire, j'espère que tu en es consciente.
– Tu es en train de me faire la morale là, ou quoi ?
– Non, je te dis juste que tu as de la chance d'être tombée sur lui. Pense à ta sœur qui s'est retrouvée avec Lestrange.
– Je ne pense pas que Bellatrix soit vraiment préoccupée par son mariage, rétorqua-t-elle en reportant son regard sur son manuel sous le regard insistant du professeur.
– Fais ce que tu veux, capitula-t-il, mais ne te plains pas par la suite que ton mariage est désastreux, parce que ce sera uniquement ta faute.
Narcissa s'apprêta à lui lancer une réplique cinglante quand les cloches retentirent. Corban s'enfuit le plus vite possible, suivi de près par Augustus, Avery et Wilkes qui s'étaient installés un peu plus loin. Lucius quitta lui aussi la salle rapidement et Narcissa en profita qu'il soit seul pour aller lui parler. Elle courut presque jusqu'au milieu du couloir en l'appelant. Il se retourna, surpris, mais son visage s'assombrit lorsqu'il l'aperçut. Sans vraiment réfléchir à ce qu'elle disait, elle commença :
– Écoute, j'ai appris pour ta mère et...
– Je ne veux pas de ta pitié, Black, lui cracha-t-il en lui tournant le dos et en continuant sa marche.
– Non... attends !
Elle courut de nouveau puis se posta face à lui, pour l'empêcher de faire un pas de plus.
– Je suis désolée pour ce matin, s'excusa-t-elle. Je venais de lire la lettre et j'étais très énervée, mais ce n'était pas contre toi...
– Il fallait réfléchir avant de parler, fit-il froidement.
Il voulut la contourner, mais elle l'en empêcha de nouveau. Avant qu'elle n'ait pu dire quoi que ce soit, il siffla :
– J'ai un cours de potion que je n'aimerai pas manquer par ta faute. Je crois que tu m'as bien fait comprendre ce matin que tu ne voulais pas de moi donc inutile d'insister. Et si tu t'intéressais ne serait-ce qu'un peu à ma vie, tu aurais déjà su depuis le début que ma mère était morte. Mais comme tout tourne autour de toi, comme tes sentiments sont plus importants que les miens et bien je te prie de bien vouloir te pousser parce que j'ai autre chose à faire que de perdre mon temps à parler avec une narcissique de première classe !
Il avait déballé cela en un souffle, sans s'arrêter. Faisant face à la mine éberluée de Narcissa, il décida de lui fausser compagnie et partit en direction des cachots.
Alors cette fois-ci, Narcissa s'autorisa à laisser une larme dévaler sa joue.
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