Main dans la main
"dans tes yeux,
l'enfer semble si beau."
zlamana dusza
– Harry Potter... est mort ! Harry Potter est mort !
Les derniers Mangemorts se frayaient un chemin pour assister au spectacle devant le château détruit et ravagé. Ils se réjouissaient à présent. Rien ne leur faisait plus peur. Ils avaient gagné. Narcissa se demandait comment elle arrivait à respirer avec un mensonge aussi gros sur le cœur. Elle les menait tous à l'abattoir et personne n'en savait strictement rien.
Derrière le château en ruine, fruit d'une bataille mortelle, le soleil se levait tranquillement comme si pour lui, tout ça n'avait aucune importance. Que ce n'était qu'un petit détail dans un monde si vaste. Il donna un plus grand aperçu de l'étendu des dégâts : le toit effondré, des blocs de pierre jonchant le sol, la destruction même mise en image sous leurs yeux. Les résistants sortaient petit à petit. Une petite rousse cria, d'autres se mirent à pleurer. Narcissa observa tout, la moindre personne, recherchant son fils d'un air désespéré. Et si Potter lui avait menti ? S'il avait hoché la tête dans le seul espoir de sauver sa peau ? Mais au moment où elle s'apprêtait à défaillir, une tête blonde émergea des ruines de l'école. Son visage était noirci de cendres, ses yeux gris recouverts d'un voile triste et fatigué. Ses doigts se cramponnaient à la baguette de sa mère comme s'il avait peur que quelqu'un se jette sur lui et veuille sa mort. La guerre lui avait pris toute son énergie. Narcissa voulut le serrer contre elle, passer une main dans ses cheveux pour le rassurer, le consoler, mais entre eux, il y avait le Seigneur des Ténèbres et un sourire carnassier planté sur son visage froid. Cet homme qui ne soupçonnait même pas s'être fait avoir par une femme qu'il avait pris plaisir à détruire.
Il reprit la parole lorsque le silence retrouva son droit.
– Harry Potter est mort. Il a été tué alors qu'il prenait la fuite, essayant de se sauver pendant que vous donniez vos vies pour lui. Nous vous apportons son cadavre comme preuve que votre héros n'est plus.
Il se délectait de son mensonge. Personne ne le croyait, bien évidemment, mais il prenait un plaisir fou à salir son image. S'il savait que le garçon entendait tout...
– La bataille est gagnée. Vous avez perdu la moitié de vos combattants. Mes Mangemorts sont plus nombreux que vous et le Survivant est fini à tout jamais.
Narcissa était la seule à connaître la vérité. Elle était la seule à savoir qu'après son vain discours, lorsque Potter déciderait, la bataille reprendrait. Mais à vrai dire, elle en avait rien à faire. Elle voulait juste retrouver Drago et rentrer chez elle. Le reste ne l'intéressait plus, à présent.
– Il ne doit plus y avoir de guerre. Quiconque continuera de résister, homme, femme, enfant, sera éliminé ainsi que tous les membres de sa famille.
Encore son mot. Éliminer. Comme s'il s'adressait à de vulgaires insectes indésirables.
– Sortez maintenant du château, agenouillez-vous devant moi et vous serez épargnés. Vos parents, vos enfants, vos frères et vos sœur vivront, ils seront pardonnés, et vous vous joindrez à moi pour que nous reconstruisions ensemble un monde nouveau.
Le parc et le château étaient silencieux. Personne ne bougea. La plupart assimilait peu à peu le fait que tout allait être plus affreux à présent. Que le méchant de l'histoire avait gagné, cette fois.
– Venez, insista Voldemort, le sourire aux lèvres.
Narcissa fixait Drago, mais ce-dernier semblait l'avoir oubliée. Pourquoi ne venait-il pas ? Bellatrix aussi, montée sur un tas de pierre, fixait son neveu avec soupçon. Il mettait trop de temps. S'il ne venait pas, il gagnerait la haine de tous les Mangemorts en plus de celle des résistants. Parce qu'un Malefoy resterait un Malefoy, et que leur nom était déjà associé au mal. Lucius fit une tentative et l'appela d'une voix cassée :
– Dra... Drago.
Il tendit légèrement sa main, dans l'espoir de voir son fils avancer plus vite, car les murmures commençaient déjà à se propager. Mais contre toute attente, il détourna le regard. Il ne comptait pas venir. Parce qu'au milieu, il voyait celui qui avait détruit sa vie, celui qui avait détruit sa mère, et il ne voulait pas le contenter. Il ne voulait pas se plier à lui, se soumettre alors qu'il lui avait presque tout pris. Alors peut-être que si c'était elle qui l'appelait, il comprendrait. Il comprendrait que venir près d'elle n'était pas donner sa foi à lui, mais juste rejoindre sa famille. Sa voix se fit douce et tendre, emplie d'amour.
– Drago.
Cette fois-ci, son regard croisa le sien. Il avait peur. Peur de faire le mauvais choix et de le regretter toute sa vie. Peur de s'engager dans quelque chose de perdu. Il ne regardait plus les avantages qu'il y avait dans chaque clan, il regardait le clan qui était susceptible de gagner le plus vite. Pour que tout s'arrête, une bonne fois pour toute. Mais dans l'altitude de sa mère, il comprit qu'elle souhaitait la même chose que lui.
– Viens.
Alors il observa autour de lui, il vit tous les regards noirs posés sur sa personne et comprit que ce clan là n'était pas fait pour lui. Et puis, Harry Potter était mort. Ils allaient perdre, de toute manière. Il s'avança, marcha jusqu'au milieu du parc, évitant soigneusement de croiser le regard du Seigneur des Ténèbres posté au milieu. Mais ce-dernier, comme s'il avait deviné son intention, prononça d'une voix faussement joyeuse :
– Ah. Bravo, Drago. Bravo.
Puis il l'enlaça. Ce geste coupa le souffle à tous les Mangemorts présents. Drago resta de marbre, presque paralysé par cette affection totalement contradictoire à la personne. Il semblait prier pour que ce moment passe le plus vite possible. Finalement, Voldemort s'éloigna et laissa son jeune fidèle rejoindre rapidement ses parents. Le soulagement traversa Narcissa en une vague de frissons. Il était là. C'était fini. Ils étaient réunis, et à présent, plus rien ni personne ne les sépareraient. Elle passa son bras autour de ses épaules et le mena affectueusement dans leurs rangs. Son cœur était léger. Elle n'arrivait pas à croire que cet instant puisse arriver. Tout était terminé, enfin, enfin... Ils se tournèrent de nouveau vers le clan adverse et sans prévenir, il lui serra la main. Il la serra si fort. Est-ce qu'il avait fait le bon choix ? Il n'en savait rien. Mais il ne regrettait pas, parce que sa mère était à ses côtés. Après tout ce qu'elle avait fait pour lui, il lui devait au moins cela. Narcissa attrapa la main de Lucius et leur deux mains se lovèrent l'une dans l'autre. Les trois Malefoy se serrèrent la main, à l'abri des regards, presque secrètement. Ils étaient réunis, et rien ne les sépareraient jamais.
Dans le silence solennel qui s'était installé, d'autres pas avancèrent. C'était un garçon au visage abîmé, clopinant comme un infirme.
– Ah ma foi, j'avoue que j'espérai mieux, dit Voldemort souriant à moitié.
Des rires aigu retentirent dans leurs armées, celui de Bellatrix surpassant tous les autres. Narcissa se demanda s'il riaient pour contenter leur Maître ou parce qu'ils trouvaient cela réellement drôle.
– Et qui pouvez-vous bien être, monsieur ?
Sa voix sonnait comme une insulte. Mais le garçon n'en fut pas déstabilisé.
– Neville Londubat.
Encore une vague de rire. Plus forte, cette fois. Narcissa jeta un regard à sa sœur, qui se délectait de voir le fils de ses anciennes victimes s'avancer comme un soumis vers son Maître. Cela la mit mal à l'aise. À l'époque, elle avait refusé de croire que Bellatrix avait torturé avec autant de plaisir Alice et Frank Londubat, et voir leur fils aujourd'hui lui serrait le cœur. Pour la première fois, elle voyait sa sœur aînée non pas comme un être qui compatissait pour elle, et l'aimait, mais comme une meurtrière sans âme. Et cela lui fit mal. Si mal.
– Et bien Neville, je n'ai pas de doute que nous trouverons une place pour toi dans nos rangs.
– Je voudrais dire un mot.
Il étonna tout le monde. Son hésitation lui fit valoir le regard interrogateur de tous ses compagnons. Mais encore une fois, il tint bon.
– Parle Neville, je suis persuadé que tout le monde ici sera très intéressé par ce que tu vas nous dire.
Voldemort était dos à elle, mais Narcissa devina qu'il grimaçait. Il sentait le piège. Il sentait que la résistance se trouvait plus forte, mais il ne pouvait pas se battre contre. Pas encore. Le garçon ne se fit pas attendre.
– Que Harry soit mort, c'est secondaire. La mort foudroie tous les jours. Amis, famille. Oui. Oui on a perdu Harry ce soir. Mais il est toujours avec nous. Ici.
Il posa une main sur son cœur.
– Comme Fred, et Rémus. Tonks.
Le souffle de Narcissa se coupa. Elle empêcha les larmes de monter. Tonks. La fille d'Andromeda. Sa main serra plus fort celle de Lucius. Elle se mordit la lèvre intérieure pour garder un visage froid et stoïque.
– Tous les autres, reprit-il. Et il y aura un sens à leur mort.
Puis il se tourna vers Voldemort et cracha :
– Mais à la vôtre non. Parce que vous avez tort. Le cœur de Harry battait pour nous, pour nous tous ! Ce n'est pas terminé !
Puis il dégaina une épée et Narcissa comprit que c'était le moment. Le moment où tout recommençait, le moment qu'elle devait fuir. Potter sauta des bras du géant et alors Voldemort comprit qu'il s'était fait avoir. Il tenta de lui lancer des sorts, mais le garçon se réfugia derrière les murs encore debout du château. Puis il se tourna vers son armée pour voir une grande partie d'entre eux fuir. Ceux qui lui étaient les plus fidèles, du moins il l'avait pensé. Il vit l'échec face à lui, il vit son monde se détruire, son règne se terminer. Avery, Rookwood, Rowle, tous fuyaient. Des fumées noires montaient vers le ciel et disparaissaient dans les nuages. Narcissa prit quelques instants pour savourer ce moment. Elle eut même un sourire. Quelle joie de le voir, pour la première fois, échouer. Quelle joie de voir son expression transmettre l'horreur de la situation. Harry Potter n'était pas mort. On lui avait menti.
C'est lorsqu'il croisa le regard de l'ancienne Black qu'il comprit. C'est lorsqu'elle lui renvoya sa haine en pleine face qu'il se rendit compte combien il s'était fait avoir par sa victime. Quelle ironie. La roue tournait, les rôles changeaient. Pour le plus grand plaisir de Narcissa. Elle attrapa la main de son fils et le tira vers le chemin inverse de la bataille. Il suivit, sans opposer de résistance. Voldemort regarda Lucius, lui fit comprendre que si lui aussi l'abandonnait, il... que ferait-il ? Ah oui, il le tuerait. Il les tuerait tous. Quand il aurait tué Harry Potter, il les tuerait tous. Oui, mais il restait Harry Potter. Toujours lui. Toujours ce gamin au milieu de son ambition, toujours ce gosse qui semblait s'accrocher à la vie et s'interdisait de le voir gagner. Voldemort poussa un cri de rage. Lucius venait de choisir de suivre sa femme et son fils.
Derrière eux, les cris des Mangemorts et des opposants retentissaient pour une énième bataille. Les mains de Narcissa et Drago ne se lâchèrent pas. Sur le pont à moitié détruit par les géants, jonché de pierres brisées et de corps blancs comme la mort, les deux silhouettes sombres marchaient droit vers la liberté. Derrière eux, le chaos, la destruction, la douleur, tout ce que Narcissa avait subit ces dernières années. Devant eux, le silence, le calme, enfin. Bellatrix se trouvait derrière, au sein de la bataille, mais pour la première fois, elle ne ressentit rien. Ni regret, ni tristesse. Bellatrix, la vraie Bellatrix qu'elle connaissait, avait déjà vendu son âme à ce monstre qui prônait la mort comme un moyen d'établir le pouvoir. Elle était déjà morte dans son cœur. Ça lui faisait mal, oui, mais Drago était à ses côtés et Lucius était en train de les rejoindre.
Au final, toutes les histoires tristes n'étaient pas obligées de se terminer mal.
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