Chapitre 30
Je me souviens de ce jour où j'ai été moi-même prisonnière des affres de la pluie, en proie à des tourments qui s'étaient mis à posséder mes propres gestes sans que la raison n'intervienne.
Ce jour où j'ai cru que ma surdité m'avait arraché l'une des dernières choses qui donnait un peu de sens à mon existence, il pleuvait aussi. Enfermée dans une transe colérique en croyant ne plus mériter le bandeau que j'avais sur le front, je m'étais mise à faire du mal aux arbres, à hurler en silence sous le chagrin du ciel.
Je pense qu'on a tous une manière différente de gérer les démons qui nous dévorent à l'intérieur de soi. J'avais choisi la colère.
Kakashi semblait avoir opté pour s'engouffrer dans le vide qui habitait ses propres yeux.
Ce qui me faisait tout drôle, c'était que ce jour où j'avais perdu la raison sous la pluie, il était venu me sortir de là ; aujourd'hui, c'était à mon tour de le faire entrer dans mon propre appartement, de stopper l'ascension des gouttes d'eau qui avaient traversé ses vêtements et imprégné sa chair, de lui offrir la chaleur d'un endroit sec où il ne serait pas seul, où je pourrais peut-être le faire revenir à la vie.
J'avais pioché à la va vite quelques serviettes de bain ainsi que ses propres vêtements qu'il m'avait aidé à enfiler ce fameux soir de pluie où j'avais découvert que j'étais profondément amoureuse de lui. Je les avais gardés tout au fond du tiroir de ma commode en pensant les lui rendre un jour, et voilà que j'en avais enfin l'occasion.
A présent plantée devant lui alors qu'il semblait perdu au milieu de mon propre salon, je croisai ce regard terne qui me terrifiait. Son corps entier frissonnait d'avoir tant bravé le déluge qui tombait au dehors, et il ne semblait même pas s'en rendre compte.
- Il faut enlever ça. Vous allez attraper la mort.
Il ne réagit pas, et je cherchais quelque chose dans son œil sombre qui me dirait s'il comptait se débarrasser seul de ses vêtements imbibés d'eau qui pesaient aussi lourd que la pierre.
Rien. Rien de rien.
En soufflant par le nez, non pas d'agacement mais d'anxiété, je posai doucement mes doigts sur la tirette de son gilet vert avant de le dézipper avec une lenteur qui visait à ne pas le brusquer.
Dieu, cet homme que je croyais si invulnérable me parut tellement fragile, à cet instant. Comme s'il avait été fait de cristal et que j'avais peur de le briser en mille morceaux rien qu'en le touchant.
C'était la deuxième fois que j'entrevoyais quelque chose de... brisé, chez lui. Et même si cela pouvait s'apparenter à de la désillusion, je ne me sentais déçue de rien. Oh non, ça, au grand jamais ; mon corps comme mon esprit s'étaient profondément inclinés envers Kakashi Hatake, et même si ses blessures paraissaient béantes, insurmontables, je les prenais avec. C'est ce qui faisait qu'il était lui, et c'était de lui dont j'étais tombée amoureuse.
Je parvins non sans mal à le débarrasser de son gilet qui avait difficilement voulu quitter son buste ; je le jetai sur le sol sans trop d'attention, passant à l'étape suivante.
Son chandail, dont la couleur originelle semblait être bleu marine, était à présent noir comme la suie et lui collait à la peau. Voulant retarder le moment où je serai obligée de lui enlever moi-même le plus possible, je préférai me mettre sur la pointe des pieds, passer mes bras au-dessus de ses épaules pour aller chercher le nœud de son bandeau frontal dans l'épaisseur de ses cheveux mouillés et le faire tomber de son front. Je le fixai intensément en même temps, observait la façon dont ses mèches détrempées se plaquaient contre son front, comment son regard morne semblait passer à travers moi, ainsi que la pâleur alarmante de sa peau.
C'était si dur, de le voir comme ça.
Je ne pus m'empêcher de poser mes deux mains sur ses joues masquées, et de le supplier.
- Kakashi-sensei, s'il vous plaît, réveillez-vous !
Sa main frémit, je la vis dans le coin de mes yeux, et mon souffle se coupa d'anticipation. Allait-il enfin réagir ?
Il leva doucement le bras et ses doigts vinrent effleurer le creux de ma taille, d'un mouvement si aérien que je le sentis à peine. Son regard se baissa sur son propre geste, toujours aussi fade, mais le voir bouger de son propre chef était déjà une amélioration, même si je ne compris pas son intention.
Ses épaules commençaient à frémir dangereusement et je sus qu'il était temps que je lui enlève ce haut trempé qui lui rongeait la peau. Je déglutis, avant de poser à mon tour timidement mes mains sur sa taille à lui, là où j'ai pu m'emparer du bas de son chandail auquel son masque semblait relié. Je soulevai alors le vêtement lourd dans un geste ample, et à ma plus grande surprise, Kakashi accompagna le mouvement en levant les bras pour me le laisser passer au-dessus de sa tête. Etant beaucoup plus petite que lui, ce fus une tâche ardue, surtout que le tissu semblait vouloir fusionner avec sa peau et s'y collait avec acharnement.
Je parvins finalement à jeter le chandail en boule dans un coin de la pièce à son tour. Je pris soin de ne pas fixer son torse à présent nu, comme il avait pris soin de ne pas regarder ma propre peau à découvert le jour où il m'avait aussi aidée à me débarrasser de mes vêtements imbibés d'eau.
Sans son masque, son visage me parut plus livide encore, les traits profondément marqués et tirés. Alors qu'il s'était remis à fixer ses mains, je lui en prenais une et le guidai doucement vers la salle de bain, refusant de le laisser seul une seconde rien que pour chercher de nouvelles serviettes propres.
A l'instant où je le fis passer la porte de ma salle d'eau, je vis son regard s'allumer momentanément et il se dirigea vers le lavabo. Surprise de le voir animé à nouveau, je poussai un soupir de soulagement et laissai un peu de tension accumulée dans mes épaules s'échapper.
- Je... Je vous laisse là ? je proposai timidement. Je vous mets vos vêtements ici. Je... Faites-moi savoir si vous avez besoin de quelque chose.
Vu son état, je ne m'attendais à aucune réponse. J'étais un peu anxieuse à l'idée de le laisser seul, mais peut-être avait-il besoin d'un peu d'intimité. Avec un dernier coup d'œil sur l'homme penché sur le lavabo, je finis par quitter la pièce en laissant la porte légèrement entrouverte.
Je soupirai profondément comme pour évacuer mon agitation, avant de me diriger prestement dans ma chambre. Mes habits trempés me pesaient aussi sur les épaules et je réalisai seulement maintenant que je mourrais de froid. Je m'attelai alors à me changer prestement pour me vêtir de vêtements amples, avant de guetter le moindre signe de mon sensei depuis mon salon.
Au bout de vingt minutes à tourner en rond sans aucun signe de lui, je n'en pouvais plus. Je me plantai devant la porte de la salle de bain, hésitai une seconde, avant de passer prudemment ma tête dans l'encadrement.
C'était pas possible. Il n'avait pas bougé. Toujours penché sur le lavabo, je remarquais simplement qu'il avait allumé l'eau du robinet et semblait se laver les mains avec une eau brûlante, au vu de la condensation qui s'était accumulée sur le miroir. Je m'approchai lentement, avant de regarder son visage.
Son expression avait changé. Ses traits n'étaient non plus fanés mais maintenant tirés en une grimace qui exprimait de la douleur, et peut-être... de la peur ? Ses yeux étaient rivés sur ses mains qu'il frottait rudement sous l'eau chaude, la mâchoire serrée.
- Kakashi-sensei ?
C'est comme s'il ne m'entendais pas. Puis, je baissai les yeux sur ses paumes rendues incroyablement rouges par le frottement et l'eau bouillante, et je m'alarmai.
Depuis combien de temps est-ce qu'il se lavait les mains comme ça ?
- Ecoutez, Kakashi-sensei...
Je tendis la main pour couper l'eau et attirer son attention, mais il ne cessa jamais de frotter frénétiquement ses mains. C'est au moment où il tendit le bras pour rallumer le robinet que m'enflammai, horrifiée.
- Kakashi ! je criai alors en lui prenant les épaules.
Entendre son nom sans suffixe honorifique dû le surprendre assez pour qu'il tourne enfin son regard vers moi.
Et Dieu, ce qu'il avait l'air désemparé. Mon cœur se fendilla alors que je me sentais de plus en plus impuissante. La situation m'échappait complètement, putain.
Alors, je le vis ouvrir la bouche pour la première fois depuis que je l'avais débarrassé de son masque, et cela me surpris tellement que j'en eu le souffle coupé, patientant avidement qu'il formule enfin des mots à poser sur ce qu'il était en train de vivre.
« Ça ne veut pas partir. »
- Qu'est ce qui ne veut pas partir ? J'espérai que ma voix était aussi douce que je voulais qu'elle le soit.
Son regard vola à nouveau sur ses mains rougies par ses mauvais soins. Elles tremblaient.
« Le sang... Il y en a partout. Ça ne veut pas partir. »
Et là, je compris que le Ninja Copieur était en train de vivre un véritable cauchemar éveillé.
Je m'approchai alors de lui avec résolution, écartai ses poignets pour retirer ses paumes de sa vision, et me mis sur la pointe des pieds pour qu'il ne soit capable de regarder que moi.
- Kakashi... Il n'y a pas de sang, ici. Nulle part.
J'espérai avoir été assez ferme, assez convaincante. Il papillonna des paupières, et son regard sembla faire une mise au point sur mon visage, comme s'il était en train de réaliser que j'étais vraiment là pour la première fois. Son Sharingan était lui aussi ouvert, et j'ignorai le frisson de terreur qui me traversa alors que je le vis tourbillonner paresseusement.
Une expression de réelle stupeur s'empara alors de ses traits et je sursautai tandis qu'il attrapait brusquement mon visage de ses mains brûlées.
Une demi-seconde plus tard, je me retrouvais plaquée contre le mur, ses lèvres sur les miennes m'embrassant férocement. Etourdie, le souffle coupé par la force avec laquelle mon dos avait heurté la tapisserie, j'eus du mal à gérer la fureur de ce baiser brusque et inattendu.
Alors que tous ceux que nous avions échangés auparavant étaient empreints de douceur, de délicatesse, d'une timide découverte mutuelle, celui-ci était nécessiteux, débordant de besoin, un peu rude et précipité, comme s'il craignait que je ne disparaisse en fumée dans les secondes qui suivraient. Choquée, je me débattis d'abord, ne supportant pas la bestialité de son geste presque animal, refusant de concevoir une affection aussi avide et agressive.
Et puis, je saisis l'écho désespéré dans la façon dont les lèvres de Kakashi se pressaient contre les miennes. Comme s'il était navré de faire ça d'une manière si éperdue, qu'il s'excusait tandis qu'il rongeait mon visage, mais qu'il en avait terriblement besoin, de s'accrocher à moi comme ça, de ressentir quelque chose qui pourrait encore le raccrocher un peu à la réalité alors que ses ombres voulaient l'emmener.
Alors, je le laissais entrer dans ma bouche, je lui permettais d'y déverser toute la souffrance qui l'habitait, de se servir de moi comme d'une échappatoire s'il le voulait. Je ne savais rien de ce qu'il vivait mais j'avais conscience que c'était dur, que c'était invivable, et si je pouvais l'aider à faire diversion à tout ce qui le torturait de l'intérieur, je l'acceptais sans hésiter, même si c'était pour endurer un baiser sec et brusque qui me froissait et me chagrinait terriblement.
J'essayai ainsi de suivre le mouvement comme je le pouvais, de ne pas perdre mon souffle pour lui rendre le sien. Il tenait mon visage si fort que ça me faisait mal, mais je pouvais le supporter. Il mordillait mes lèvres, il dévorait ma bouche, et je sursautai violemment lorsqu'une de ses mains vint tirer ma tête en arrière pour lui donner une emprise plus ample sur mon visage. Je n'avais d'autre choix que de griffer désespérément son dos nu, de me défendre comme je le pouvais en lui rendant une part de sa férocité. C'était étrange, un baiser qui avait l'aspect d'une bataille, d'un combat à mort, comme si une vie en dépendait.
Sa main s'empara de ma hanche, et il la serra si fort que j'étais convaincue qu'il y laisserait un bleu. Je dû gémir, et Kakashi s'immobilisa subitement, cessant d'un coup ses attaques sur ma peau.
Il recula si vite, en me laissant essoufflée contre le mur, tremblante comme une feuille. Ma vue oscilla un peu par le retour subit de l'air dans mes poumons, et pourtant je pus nettement distinguer la façon dont ses sourcils étaient intensément froncés alors qu'il me regardait avec incertitude.
Parce que son regard avait enfin retrouvé sa clarté. Ses deux yeux grands ouverts brillaient de mille émotions différentes, un fouillis que je ne parvins pas à saisir, mais je m'en fichais. Il était sorti de cette transe apathique qui l'avait rendu absent, et c'est tout ce qui comptait.
A bout de souffle, Kakashi me dévisageait, en fouillant mon visage comme s'il y cherchait désespérément quelque chose.
Il ouvrit alors la bouche, et mon cœur fit un bond sous l'effet de l'anticipation.
« Pourquoi tu n'as pas peur ? »
En n'osant décoller mon dos du mur, je lui lançai un regard interrogateur.
- Peur de quoi ?
« Peur de moi. »
- Pourquoi j'aurais peur de vous ?
Déboussolée, ce fut mon tour de chercher des réponses dans son expression torturée.
« Je t'ai fait mal. »
Je secouai la tête en souriant faiblement.
- Ce n'est rien. Vous ne l'avez pas fait exprès.
« Et si je l'avais fait exprès ? »
Je tombai dans son regard qui semblait ravagé par la souffrance. Mon cœur se serra.
- Jamais vous ne feriez ça.
« Pourquoi ? »
- Parce que vous êtes quelqu'un de bien.
Ses traits se muèrent en une grimace de douleur et il chercha à nouveau quelque chose dans mes yeux, peut-être une preuve que je mentais.
Il ne trouva rien.
« Comment peux-tu affirmer une chose pareille ? Tu ne sais rien. »
Il y avait quelque chose dans son expression qui ressemblait à de la colère, mais bizarrement, je ne fus aucunement intimidée.
- Effectivement, je ne sais rien de vous, je confirmai avec une certaine amertume. Mais...
Je fis quelques pas en avant, et il me lança un regard horrifié, comme si j'étais en train de commettre une grosse erreur.
Encore une fois, je m'en fichais. Une profonde affection débordait de mon cœur et je voulais tout tenter pour qu'il la sente, pour qu'il la voie, qu'il comprenne que je ne reculerai jamais devant lui.
Je levai un bras et posai doucement une main sur sa joue, et je le sentis se raidir contre ma paume, en me fixant, médusé.
- Mais c'est vous qui m'avez sauvée. C'est vous qui m'avez tirée de mon cauchemar, c'est vous qui m'avez appris à vivre avec le silence. Qu'importe ce que vous avez fait, qu'importe ce qui vous est arrivé, je m'en fous. Pour moi, vous êtes formidable, et vous pourrez me dire ce que vous voulez, me repousser comme vous le pouvez, mais je le penserai toujours.
Kakashi demeura figé un moment, interdit, à me dévisager profondément. Il avait haussé ses sourcils, entrouvert la bouche comme s'il était sous le choc, et ses yeux brillaient, brillaient tellement.
Je lui offris un sourire sincère, en caressant doucement sa joue de mon pouce dans un geste tendre. Alors que je m'attendais à un nouveau rejet, il ferma lentement ses paupières et appuya son visage contre ma main, en acceptant ainsi mon toucher, ma présence et mon aide.
Il se laissait enfin aller.
« Tu... Tu es incroyable. »
Sa grande main vint se poser au-dessus de la mienne, et il croisa ses doigts entre les miens. Mon corps entier vibra en conséquence, comme si nous venions d'entrer en résonnance, et ce geste fut si fort, nos doigts simplement entrelacés contre sa joue.
J'y vis quelque chose de grand et de beau. De l'acceptation, ou du moins, les prémices. Kakashi ne m'expliqua pas quels étaient les noms gravés sur la stèle qu'il était allé voir aujourd'hui, la raison pour laquelle le vide avait eu raison de lui sous la pluie, quel était ce sang qu'il avait pensé voir sur ses mains, ni la raison pour laquelle il semblait espérer que j'aie peur de lui. Ce n'était pas grave. Peut-être qu'il me le dirait, un jour. Peut-être pas. Ce qui comptait, c'est qu'à cet instant-là, il ait repris conscience de la réalité, une réalité où j'étais là, prête à calmer ses névroses, avec peut-être une promesse qu'il s'ouvre enfin, qu'il ne me laisse plus penser seule à un futur où les choses ne seraient plus si compliquées, si douloureuses.
Je me mis sur la pointe des pieds et l'embrassai doucement. Il ne recula pas, il ne me repoussa pas. Il me laissa faire en ouvrant grand les bras, en me gardant serrée contre lui, avec cette tendresse marquée dans son âme, dont lui-même ne semblait pas avoir conscience, et qui m'avait tant manquée ce soir-là.
Lorsque je me reculai, les joues rouges d'émotions, son regard vagabonda sur mon visage. Kakashi semblait à présent... un peu plus apaisé, certes, mais aussi épuisé. Les cercles noirs sous ses yeux me le prouvaient déjà assez bien, mais le plus inquiétant était sa pâleur maladive, conjuguée aux frémissements qui s'emparaient régulièrement de son corps tout entier et la forme voûtée de ses épaules.
Je réalisai alors avec horreur qu'il tenait à peine sur ses deux jambes.
- Vous êtes resté combien de temps devant la stèle ?
Il avait momentanément fermé les yeux avant que je ne le surprenne en parlant. Il ne les rouvrit pas pour autant en me répondant.
« Je ne sais plus. »
Le Ninja Copieur sursauta lorsque je m'emparai de son poignet pour le tirer hors de la salle de bain. Il me suivit en trainant des pieds, comme s'il avait du mal à supporter son propre poids. Il me lança un regard mi-désorienté mi-endormi alors que j'allumai la lumière de ma chambre dans laquelle je l'avais obligé à entrer.
« Il faut que je rentre chez moi, » il articula en m'observant, incrédule, arranger les draps de mon lit.
- Il en est hors de question.
Avant même qu'il ne puisse lever un sourcil, je le poussai et je fus étonnée de la facilité avec laquelle je l'avais fait basculer sur le matelas. Il devait être vraiment exténué.
Je fis de mon mieux pour ne pas laver des yeux cette drôle de vision de lui, torse nu et étalé sur mes propres draps. Kakashi essaya de se redresser immédiatement sur ses coudes mais je posai une main forte en plein milieu de sa poitrine chaude et musclée pour l'en dissuader et il se figea en même temps que je me mis à rougir.
- Vous tenez plus debout, je me justifiai en me sentant balbutier. Vous allez vous reposer ici et vous rentrerez demain.
Il ne semblait pas avoir la force de se battre. Il laissa lourdement tomber sa tête sur un oreiller, vaincu. Ses yeux se fermèrent à nouveau et à cet instant, je ne pus me retenir plus longtemps de détailler les muscles saillants de son torse et de ses bras.
Même s'il était plutôt svelte, le corps du Ninja Copieur était une arme, aiguisée d'un tranchant fin et mortel. Sa peau nue laissait entrevoir une véritable carte de guerre, où figuraient les vestiges de ses combats récents comme anciens, à travers la multitude de cicatrices qui lacéraient sa chair, certaines ayant blanchi avec le temps et d'autres, rosées, semblaient encore fraiches, comme s'il avait à peine arrêté de saigner. En le regardant, c'est comme si je lisais une histoire violente, marquée par les lames qui avaient écorchés sa chair et les heures d'entrainement cruels qui avaient définis les contours robustes et puissants de sa musculature.
Kakashi Hatake était beau d'une manière dangereuse, et l'observer là, allongé dans mon lit me fit déglutir difficilement et le feu me monta aux joues.
Embarrassée de l'épier ainsi à son insu, je me préparais à m'éclipser lorsque sa main rugueuse vint brutalement enserrer mon bras.
« Où est ce que tu vas ? »
Il me toisa à travers ses yeux mi-clos et je me raclai la gorge.
- Euh... Je vais dormir sur mon cana...
Kakashi m'attira avec une force que je ne lui soupçonnais plus vu son état, et c'est avec horreur que je me retrouvai à dégringoler sur mon lit avec lui.
Avant que je ne puisse esquisser le moindre geste pour me défendre, le Ninja Copieur se tourna sur le côté, m'enserra de ses bras puissants et me bloqua contre son torse chaud. Il fourra son nez dans mes cheveux et je sentis une longue expiration heurter la peau de mon cou, qui provoqua une nuée de frémissements sur l'entièreté de mon anatomie.
Figée et le cœur battant, je tentai de me faire à l'idée d'être là, blottie contre le corps robuste mais éreinté de Kakashi Hatake, les jambes entremêlées sur mes propres draps. J'osai à peine respirer, alors que je sentais ses grandes mains sur mes épaules et le bas de mon dos qui me maintenaient près de lui, et son souffle lent et régulier percuter ma mâchoire.
Je me demandai un instant s'il s'était déjà endormi, lorsque je perçus la vibration fragile de ses cordes vocales contre ma peau.
Il parlait. Une nouvelle fois, sans que je puisse l'entendre.
Mes plans pour me sortir de ces bras qui me tentaient trop pour mon propre bien furent remplacés par cet émerveillement amer qui m'envahissait chaque fois qu'il faisait ça. Il aurait été ironique de dire que j'étais à l'écoute, mais c'était un peu le cas ; je fermai les yeux et me concentrai sur l'onde que produisaient ses paroles contre ma chair, comme si j'étais capable d'en comprendre les vestiges, comme si je pouvais tracer les contours des mots qu'il imprimait sur ma peau.
Ça me berçait, tendrement. Je ne voulais plus être autre part qu'ici même, dans ce lit, dans ses bras, tandis qu'il me chuchotait à l'oreille des mots que je ne comprenais pas mais qui faisaient gonfler mon cœur rien qu'à l'idée qu'ils soient doux, qu'ils me soient peut-être adressés.
Ma main vint trouver refuge dans ses cheveux secs à présent, que je caressai distraitement alors que je sentais le sommeil prendre possession de mon corps endolori par cette soirée insolite. Je n'avais plus la force de redouter le lendemain matin, à me demander quelle réaction il aura lorsqu'il se réveillera ici, dans mon lit, contre moi. Est-ce qu'il me sourira ? Est-ce qu'il partira ?
Est-ce qu'il regrettera ?
Ces questions flottèrent indistinctement dans mon esprit alors que je m'endormais, à bout de forces, emportée par la voix silencieuse de Kakashi qui résonnait dans mon cou et ses bras chauds tout autour de moi.
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Petit chapitre 100% Kakashi! J'espère qu'il vous aura plu. J'ai eu particulièrement du mal avec celui-ci... je sais pas, j'ai l'impression qu'il est complètement raté T_T
En tout cas, les prochains sont ceux que j'ai préféré écrire. J'espère que ça se sentira :')
On approche de la fin, les gars... Plus que trois chapitres et un épilogue (me tapez pas). Ca me fait déjà bizarre à cette idée.
Mais bon, en attendant, la suite arrive jeudi!
Emweirdoy
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