J'ai observé en compagnie de Bast le bateau qui s'éloignait de la côte, sentant comme si on arrachait une partie de mon coeur... ça allait être tellement dure sans eux...

Mira

Le navire s'éloignait progressivement de la côte, Yassop et moi étions sur le pont arrière du Red Force, observant l'île qui petit à petit n'était plus qu'un point à l'horizon. Le sniper s'est appuyé les avant-bras contre la rambarde en bois, laissant un long soupir sortir d'entre ses lèvres, l'air lasse et un peu boudeur également. C'était la première fois qu'on allait se retrouver sans le capitaine, ça allait nous faire drôle et puis je sentais que l'équipage ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter pour lui.

- Tu crois que ça ira pour Shanks ?

- Oui, je ne me fais pas de soucis ! Eh puis... Ce n'est pas comme si on l'avait laissé tout seul aussi ! Ajoutais-je en souriant.

- T'as raison... Affirma-t-il en se redressant. Mais je ne peux pas m'empêcher de me faire du souci pour cet imbécile...

- C'est normal en même temps !

- Enfin... Soupira-t-il. ça va ta blessure ?

- Oui, ça va mieux, c'est presque totalement guéri !

- Tant mieux...

Nous avons échangé un sourire et le blond m'a raccompagné jusqu'à l'infirmerie où je me suis rallongé afin de me reposer encore un peu. Malgré ma régénération due à mon statut de lycan, la blessure mettait tout de même du temps à se refermer, il fallait dire qu'en même temps ce sal pirate n'y était pas allé avec le dos de la cuillère. L'entaille était assez profonde et la lame avait touché un de mes organes vitaux. Alors j'allais mettre un peu de temps à en guérir mais je m'en remettrais. Après tout j'avais bénéficié des bons soins de Bast, je ne m'en faisais donc pas, j'avais une totale confiance en lui et en ses capacités. Je savais aussi que le capitaine ne risquait rien avec lui, qu'ils veilleraient l'un sur l'autre et j'espérais qu'ils puissent devenir amis tous les deux. Cela ferait du bien au démon d'avoir quelqu'un, autre que moi, à qui il pourrait se confier...

En songeant à tout cela, j'ai fermé les yeux et me suis doucement laissé glisser dans les bras de Morphé, n'ayant plus de mal à trouver le sommeil car ma blessure me faisait moins souffrir. L'équipage entamait un nouveau voyage, Ben en serait notre guide mais je ne me faisais aucun souci, il allait s'en sortir à merveille et s'il avait besoin d'aide, il pouvait toujours compter sur celle de Yassop, Lucky où la mienne afin de l'épauler. En tous les cas, nous n'avons guère vu les premiers mois passés, nous avons exploré les eaux du nouveau monde jonché de tempêtes, de chute de neige, de soleil en plein cagnard et de grêlon. Nous avons découvert de nouvelles îles aux températures bien trempées, passant d'un hiver rude à des étés brûlants, tout en appréciant les climats tempérés et tropicaux. Nous étions tous impatient de faire de nouvelles découvertes, de tester les divers plats locaux et les boissons alcoolisées, de profiter des îles pour nous y reposer et flemmarder un peu.

Dans ses moments-là, Shanks nous manquait. Il avait ce petit truc, ce petit "je ne sais quoi" qui faisait que l'équipage était plus joyeux, que les hommes poussaient plus facilement la chansonnette et avaient bien plus soif d'aventure. Il nous manquait oui, il me manquait surtout, c'était dur sans lui... Et quelquefois, on recevait de ses nouvelles, une petite lettre par ici et par là. Dans ces instants, l'équipage se rassemblait sur le pont, se pressant autour de moi afin que je leur lise les quelques mots qu'il nous avait écrits. On était un peu comme une bande de gamins, attendants de lire avec impatience les aventures du héros d'une bande dessinée finalement... Il terminait toujours par nous dire de faire attention à nous et qu'on se reverrait tous bientôt, qu'il fallait s'armer de patience et que tout se passerait bien.

File en aiguille, une année s'était écoulée depuis que nous avions quitté le capitaine, nous avons eu l'occasion de nous mesurer à quelques pirates appartenant à la flotte de Newgate, d'autres plus modeste, ainsi que quelques marines, nous faisant un petit nom sans la présence du capitaine à nos côtés dans le monde de la piraterie. Nous approchions d'une île au climat tempéré où l'on pouvait déjà apercevoir au loin une immense forêt de pins. Il ne semblait pas y avoir de village côtier, l'île était peut-être inhabitée tout simplement. Toutefois, comme nous avions besoin de faire le plein de provision et de nous dégourdir les jambes, nous avons jeté l'ancre et avons rejoint le rivage à l'aide de quelques chaloupes. L'air y était doux, ça nous changeait de la précédente île où le soleil et la chaleur du désert avaient failli avoir notre peau.

Une partie de l'équipage était resté sur le bord de la plage, préparant un campement de fortune à l'ombre des pins, installant dans un premier temps un feu de camp pour nous tenir au chaud cette nuit et faire griller quelques poissons, taillant par la suite dans un vieux tronc d'arbre quelques bancs et amassant quelques fruits à proximité du rivage afin de se sustenter un peu. Quant à Yassop et moi, nous nous sommes aventuré un peu plus loin dans la forêt afin de chasser et rapporter quelque chose de plus consistant à l'équipage. Alors que nous progressions à travers les gigantesques pins, nous nous sentions quelquefois observer. On avait du mal à déterminer si ce qui rôdait autour de nous était animal ou humain et surtout si cela était hostile ou non.

Plus on progressait entre les arbres, plus on avait l'impression que cette chose se rapprochait. Au détour d'un arbre, Yassop sortit un instant de mon champ de vision, quant à moi, je fus attiré par quelques bruits, des petits couinements qui provenaient d'un buisson. Je me suis accroupi devant ce dernier avant d'en écarter le feuillage délicatement et quel ne fut pas ma surprise quand j'y découvris une jeune fille, à peine âgé d'une dizaine d'années à la chevelure brune. Je l'ai tout de suite senti et vue surtout, elle était comme moi... Elle avait encore ce petit nez qu'ont les louveteaux à la naissance et ses oreilles touffut étaient rabattues vers l'arrière, montrant sa peur. J'ai esquissé un doux sourire sur mes lèvres, ne faisant aucun geste brusque et allant même jusqu'à faire apparaître mes oreilles de loup, toutes blanches.

- N'est pas peur... Je ne te ferai aucun mal...

- Vous êtes... Comme nous...?

- Oui... Répondis-je dans un sourire. Comment tu t'appelle ?

- An... Anna...

- Moi c'est Mira, enchanter Anna ! Tu veux bien sortir de ta cachette ?

- Non... Il y a des humains... Et... On doit rester caché...

- Ils ne sont pas méchants, je te l'assure...

- Je... Je préfère rester là... Dit-elle en se recroquevillant.

- Je comprends...

Je me suis redressé doucement, cherchant du regard Yassop qui ne devait pas être bien loin. Je tendais l'oreille également afin d'écouter les bruits alentour. Je n'ai pas tardé à entendre le petit "clic", distinctif de l'arme qu'utilisait généralement le sniper, accompagné d'un grognement rauque et finalement, j'ai entendu le blond qui m'appelait, la voix légèrement chancelante. J'ai accouru dans sa direction, m'arrêtant net devant la scène. Là, devant Yassop se trouvait un lycan, massif aux poils totalement noirs, les babines retroussées, il grognait et avait acculé le blond contre un amas de roches. Le pirate le tenait en joue, une sueur sur le front, les mains fermement cramponné à son fusil. Moi j'étais juste derrière le loup, restant hors de son champ de vision, prête à intervenir au cas où les choses tourneraient mal...

- Yassop.... Pose ton arme... Affirmais-je en m'accroupissant.

- Quoi ? T'es malade ! Je vais me faire bouffer...

- Fais-moi confiance... Pose ton arme...

- T'es sûre de toi ?

- Fais ce que je te dis...

Le blond laissa un ralement passer entre ses lèvres avant de se baisser très lentement, déposant avec autant de délicatesse que cela lui était possible son fusil sur le sol. Il resta à la suite accroupi devant la bête tandis que le lycan fit quelques pas en sa direction, approchant sa gueule du visage du sniper qui ne faisait clairement pas le fier. Il s'arrêtait progressivement de grogner, jusqu'à claquer ses machoirs devant les yeux du pirate et s'en retourner comme il était venu. Yassop laissa passer un long soupir avant de se laisser tomber par terre, soulager. Je me suis approché, posant une main sur son épaule. Je pouvais entendre son coeur battre à tout rompre, il avait eu une sacrée frayeur visiblement...

Nous avons malgré tout échangé un rire afin de détendre l'atmosphère avant que je ne l'aide à se relever et que nous n'entamions la marche pour regagner la plage où se trouvait le reste de nos compagnons. En nous voyant revenir les mains vides, ils furent surpris. Je leur ai alors expliqué avoir rencontré une enfant qui avait la même particularité que moi et que certainement, elle ne devait pas être seule ici. La présence de cette meute me fit alors songer que peut-être il s'agissait de celle de Tom, avec un peu de chance si les dieux le voulaient bien... Tout au fond de mon coeur, je l'espérais, j'avais envie de le revoir, de pouvoir discuter avec lui, de pouvoir au moins partager une étreinte car il arrivait que parfois, il me manque. Après tout, il avait été le premier grand amour de ma vie, mon meilleur ami, un frère avec qui j'avais grandi...

Ce soir-là, alors que le feu du campement avait été allumé afin de nous tenir chaud, qu'une partie de l'équipage dormait tandis que d'autres veillaient à la sécurité ou discutaient tout simplement, je me suis aventuré à nouveau dans la forêt, seule. J'ai laissé libre cours à mes instincts, cherchant ceux de mon espèce à travers les pins. L'odeur me conduisait dans l'intérieur des terres de l'île, aux pieds des montagnes plus à l'Est où ils avaient trouvé refuge en voyant notre navire arrivé près de la côte. Il était là, une petite troupe de quelques personnes, trois où quatre familles pas plus. Je suis resté un instant à les observer, accroupi à la lisière de la forêt, à contresens du vent afin de ne pas me faire repérer. En approfondissant mes observations, j'ai remarqué un jeune garçon qui ne devait pas être comme nous, lui était humain. Il ne semblait pas être au mieux de sa forme, il avait une toux assez grasse, il restait assis à l'écart du groupe. Ils avaient établi leur refuse dans quelques grottes, l'endroit devait être bien trop humide, pas étonnant qu'il soit tombé malade...

Alors que mon regard se portait particulièrement sur ce garçon, il fut abordé par un homme, grand, les cheveux d'un brun foncé presque noir mi-longs, la barbe courte et bien taillée, la peau légèrement mate et les yeux d'un bleu nuit. Même si ses traits avaient vieilli j'aurai reconnu cette carrure entre mille autres et en l'apercevant comme ça, de loin, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire et de sentir mon coeur battre d'une douce mélodie. Bien que j'aimais Shanks, d'un amour sincère et profond, j'étais encore très attaché à Tom, malgré ce qu'on avait vécu. Je tenais encore énormément à lui mais je me voyais mal entamer une quelconque relation. Notre séparation restait très douloureuse pour moi et on avait eu tous les deux des paroles très blessantes que je regrettais amèrement.

Tandis que j'étais un peu perdu dans mes pensées, je fus interpellé par une petite main d'enfant qui tapotait sur mon épaule avec gentillesse et curiosité. Mes yeux se sont posés sur cette petite brune rencontrer un peu plus tôt, nous avons échangé un doux sourire me demandant ce que je faisais là...

- J'étais venu voir un ami... Dis-je en chuchotant.

- Qui est-ce ?

- Tu vois le grand gars là-bas aux cheveux noirs... C'est lui que je suis venu voir...

- Tom ? Tu le connais depuis longtemps ?

- Oui... Tu veux bien faire quelque chose pour moi ? Demandais-je en posant une main sur le haut de la tête brune.

- Oui... Répondit-elle dans un léger acquiescement.

- Dis-lui que Mira aimerait le voir...

- D'accord !

La petite brune m'a alors décroché un grand sourire, semblable à ceux que m'accordait Luffy. Elle s'est redressée avant de trottiner gaiement en direction de Tom et du jeune garçon dont il prenait soin. Je les ai un peu observé, attendant de voir la réaction du lycan avant de retourner quelque peu dans les profondeurs de la forêt. Je savais qu'il n'aurait aucun mal à me retrouver de toute manière. grâce à mon odeur. J'ai regagné un petit point d'eau, attendant patiemment qu'il ne me rejoigne et plus les minutes passaient plus je me disais que peut-être il n'avait pas envie de me revoir. Je comprenais totalement cela dit, après tout, notre séparation n'avait pas été facile, je l'avais quitté lui mais pas uniquement, j'étais partis de la meute et ça c'était inacceptable aux yeux des lycans. Je m'étais assise au bord de l'eau, j'écoutais le hululement des chouettes, le bruit du courant de la rivière un peu plus en amont et les petits bruissements des animaux nocturnes.

Tandis que j'étais là, assise paisiblement, le craquement soudain d'une branche me fit me redresser et me retourner presque aussitôt. Nous nous sommes longuement regardé, sans un mot, je pouvais sentir les battements de mon coeur jusqu'au bout de mes doigts et l'entendre raisonner dans mes oreilles. Alors que j'allais simplement bafouiller un "bonjour" et lui demander comment il allait, il s'est avancé vers moi et d'un geste rapidement, témoignant d'un certain empressement, j'ai senti ses bras se refermer sur moi, m'enlacer et me serrer de toute leur force contre lui. Je pouvais sentir ses doigts s'agripper à ma veste, son souffle se caresser à ma nuque alors que la chaleur réconfortante de son corps m'enveloppait progressivement. De mon côté, j'ai passé mes bras autour de son cou et j'ai doucement fermé mes yeux qui s'embuaient de larmes, profitant de notre étreinte et réalisant à cet instant à quel point il m'avait manqué.

- Je suis tellement heureuse de te voir...

- Tu m'as manqué Mira...

- Toi aussi... Affirmais-je la gorge serrée.

Nous nous sommes relâché progressivement, ses mains remontèrent jusqu'à mes joues où quelques-uns de ses doigts ont rabattu les mèches blanches qui y traînaient à l'arrière de mes oreilles. Son geste était accompagné d'un tendre sourire et dans un mouvement hésitant, il s'est penché afin de s'emparer de mes lèvres. Et je sais bien qu'à cet instant j'aurais dû le repousser mais je n'en avais ni la force, ni même l'envie...