Jimin guida son ami à travers le dédale du manoir jusqu'à une pièce accueillante. La porte s'ouvrit sur un cocon de chaleur et de quiétude. À l'intérieur, deux sofas se faisaient face, dressés telles des sentinelles protectrices, entourant une table basse en bois vieilli. Une cheminée crépitante diffusait sa douce chaleur dans toute la pièce, donnant un air réconfortant à l'endroit. Quelques décorations coréennes, héritées des siècles passés, ornaient les murs avec élégance. Une fenêtre, les rideaux délicatement relevés, offrait une vue imprenable sur le jardin enneigé de la demeure, comme un tableau vivant figé dans le temps.

Young-Jae, se laissant glisser sur l'un des sofas, plongea son regard fatigué dans chaque détail de cette pièce empreinte d'une aura apaisante. C'était comme si chaque objet racontait une histoire, chaque meuble, chaque recoin respirait la tranquillité. L'atmosphère était empreinte d'une sérénité qui berçait l'âme tourmentée du cher ami.

Le murmure de Jimin dissipa l'émerveillement de Young-Jae. Il avait presque oublié sa présence. L'offre d'une boisson chaude lui parvint, venant troubler le voile de la réalité qui le captivait.

Les yeux creusés par la fatigue, Young-Jae fixa Jimin quelques instants, cherchant à démêler les fils de ses pensées embrumées. Puis, d'une voix presque timide et éteinte, il murmura :

- Un thé chaud serait parfait, si cela ne te dérange pas.

Un sourire bienveillant se dessina sur le visage de Jimin. Il scrutait Young-Jae, essayant de percer le mystère de son trouble, de comprendre les tourments qui le rongeaient. Une chaleur réconfortante émanait de son regard, empreinte d'une douceur presque poétique. Puis, sans dire un mot, Jimin quitta la pièce, laissant Young-Jae seul avec les murmures de cette demeure enveloppante.

Quelques minutes plus tard, Jimin réapparut dans la pièce, un plateau entre ses mains.

- Nayung a insisté pour que je t'apporte aussi des biscuits, dit Jimin avec douceur, ils sont faits maison.

Young-Jae le remercia, puis Jimin déposa délicatement le plateau sur la table basse avant de s'installer en face de son ami sur le canapé. En prenant une gorgée de thé brûlant, Young-Jae ressentit une chaleur réconfortante l'envahir.

- Veux-tu enlever ton manteau ? Il fait assez chaud grâce au chauffage, murmura Jimin avec bienveillance.

Young-Jae acquiesça et s'exécuta. Puis, après un silence troublé seulement par le crépitement du feu dans la cheminée, Young-Jae finit par parler :

- Jimin... J'aimerais te présenter mes excuses une fois de plus. Je n'ai pas pu m'empêcher de repenser à toutes les paroles que je t'ai adressées par le passé et, franchement, je ne trouve aucune excuse valable. Tout ce que je peux te dire, c'est que je regrette sincèrement et que j'aimerais que tu me pardonnes. Obtenir ton pardon est d'une importance capitale pour moi.

Le silence s'était installé entre eux après une demande de pardon, une de plus dans une série ininterrompue. Jimin était fatigué de cette épreuve, mais il savait au fond de lui qu'il était prêt à faire des efforts pour pardonner Young-Jae.

Enfin, après un long moment, Jimin brisa le silence d'une voix douce mais empreinte de résolution.

"Je suis prêt à essayer de te pardonner, Young-Jae. Mais je ne pourrai jamais oublier la douleur que tu m'as infligée." Sa voix était emplie d'une sincérité nuancée de tristesse.

Young-Jae hocha la tête avec compréhension, gardant le silence. Ses yeux se baissèrent, refusant de rencontrer le regard de Jimin. Inconsciemment, il commença à s'écorcher les extrémités de ses ongles, se blessant encore une fois. Mais Jimin remarqua ce geste auto-destructeur et saisit rapidement les mains de Young-Jae, le suppliant d'arrêter.

La surprise se peignit sur le visage de Jimin lorsque, contre toute attente, Young-Jae se mit à éclater en sanglots, se blottissant dans les bras réconfortants de Jimin. Les mots semblaient se perdre dans sa gorge, les lourds secrets qu'il portait s'échappant sous forme de larmes et de sanglots.

Jimin resserra son étreinte autour de Young-Jae, laissant son épaule accueillante lui servir de refuge. Les pleurs de Young-Jae étaient déchirants, portant avec eux la douleur d'un passé douloureux, marqué par les abus sexuels qu'il avait subis pendant son enfance. Jimin pouvait ressentir toute la confusion et la détresse qui l'accablaient, et cela le brisait le cœur.

L'incompréhension se resserrait autour de Jimin. Il ne voyait jamais Young-Jae, son ancien bourreau, dans un état de vulnérabilité semblable à celui-là. Young-Jae avait toujours été arrogant, paraissant constamment imbu de lui-même. Mais à cet instant, Jimin repoussa doucement Young-Jae qui tenait encore fermement les extrémités du pull qu'il portait.

- Je... Young-Jae ? Pourquoi es-tu en larmes ? bredouilla Jimin.

Young-Jae renifla, lâcha finalement Jimin et baissa les yeux. Il ne savait pas s'il devait briser ou non le silence qui lui avait été imposé depuis si longtemps.

- Je... Jimin, je... murmura Young-Jae, incertain de la façon dont il devait s'y prendre.

Il n'avait jamais tenté d'en parler depuis cette époque où il avait été obligé de mentir à la police. Depuis lors, il avait passé toutes ces années à se convaincre que tout cela n'était qu'une invention de son esprit.

Comment, comment expliquer qu'on avait été victime d'agressions sexuelles ?

Jimin demeura immobile, attendant silencieusement que Young-Jae retrouve enfin son calme afin de pouvoir lui poser à nouveau la question qui le tourmentait.

« Je... Il y a sept ans, mon oncle a abusé de moi », avoua enfin Young-Jae d'une voix basse et tremblante.

À cet instant précis, Jimin ressentit comme une cascade glacée qui lui avait été jetée au visage. Il fit un pas en arrière, puis un autre, son visage parcouru de multiples expressions fugaces.

« Ji... Jimin ? Tu... Tu me crois, n'est-ce pas ? » implora Young-Jae, désarmé face à la réaction de son camarade.

Alors, Jimin passa une main lasse dans ses cheveux :

« Alors... l'histoire dont parlait la police était donc vraie ? Mais... Tu m'avais assuré que c'était faux, que tu n'avais jamais été victime, tu m'as juré que c'était faux ! » s'écria Jimin, en proie à une confusion déroutante. « Pourquoi m'avoir menti ? Pourquoi avoir dit à la police que c'était faux ? »

Young-Jae se leva du canapé et se saisit de son manteau.

« Tu ne peux pas comprendre... Je... Je t'en parlerai une autre fois. J'ai déjà trop dit », murmura-t-il avant de quitter la pièce.

Laissant la pièce derrière lui, Young-Jae arpenta les couloirs d'un pas vif, animé d'une urgence intérieure. Rapidement, il croisa le chemin de la mère d'accueil de son ami. Une lueur dans les yeux, il lui annonça sa nécessité de s'en aller dans l'instant. Un sourire chaleureux se dessina sur le visage bienveillant de la mère, qui lui assura qu'il serait le bienvenu à tout moment s'il souhaitait revenir. Imprégné de gratitude, Young-Jae acquiesça d'un signe de tête puis se dirigea d'un pas déterminé vers l'entrée. Cependant, à cet instant précis, Jimin réussit enfin à le rattraper :

- Attends, Young-Jae. Tu ne peux pas partir ainsi, après ce que tu m'as confié. J'ai besoin de comprendre.

Les pas de Young-Jae se firent plus lourds et son esprit lassa suivre le cours ennuyeux de la conversation. Ainsi, il s'arrêta, se tournant subitement vers Jimin. À cet instant précis, Jimin sentit une émotion étrange l'envahir. Il posa ses yeux sur Young-Jae, et malgré les marques de fatigue gravées sur son visage, il ne put s'empêcher de ressentir une certaine beauté émaner de lui.

"Qu'est-ce qui te semble si difficile à comprendre ?" murmura Young-Jae d'une voix presque éteinte. "Je te l'ai dit, j'ai été victime d'abus sexuels quand j'étais plus jeune. C'est tout ce que tu as besoin de savoir."

Le regard vide de Young-Jae, semblable à une fenêtre sur un monde d'ombre, fit frissonner Jimin. Devant cet abîme de désespoir, il ressentit une peur viscérale, celle qui naît de la rencontre avec une profonde détresse.

"Tes yeux vides... et ta voix si faible me font peur, Young-Jae", avoua Jimin, les mots se chuchotant à travers sa crainte.

Un sourire triste se dessina sur les lèvres de Young-Jae, comme une ultime adieu à l'innocence perdue. Sa voix brisa le silence, résonnant dans l'air chargé d'émotions.

"Je te raconterai tout, Jimin, quand le moment sera venu. Je te dois cette vérité, après tout ce que je t'ai infligé. Mais avant cela, je te supplie, garde mon secret, rien qu'à toi. Je... Je sais que tu vas donner une performance de danse le premier janvier, n'est-ce pas ?" Jimin acquiesça timidement, bouleversé par les mots de Young-Jae. "Ce jour-là, je serai là pour toi, et je te dirai tout."

Jimin, encore sous le choc de cette révélation, n'eut pas le temps de réagir. Young-Jae avait déjà disparu, laissant derrière lui un vide immense.

°

Assis devant l'instrument de musique seul dans cette pièce qui, autrefois, était resplendissante de vie, Taehyung fixait intensément les touches noires et blanches du piano. Leur silence pesant résonnait en lui, ravivant les souvenirs d'une journée inoubliable. C'était lors de sa dernière fête d'anniversaire en compagnie de sa défunte mère, alors qu'il fêtait ses dix ans. Sa mère et lui avaient passé toute la matinée à jouer du piano, la mélodie s'élevant dans le cocon familial avant d'être éclipsée par les rires joyeux qui accompagnaient la dégustation d'un délicieux gâteau.

Mais cette journée avait été marquée par une douleur insidieuse, cachée derrière les sourires. Sa mère était en phase terminale du cancer du sein, et la seule intention de ce moment passé en famille était de créer des souvenirs inaltérables avant l'inévitable adieu. Tous les trois ensemble, ils avaient décidé de chasser la tristesse pour quelques heures, de laisser le bonheur prendre le dessus.

Aujourd'hui, cinq ans plus tard, Taehyung célébrait son quinzième anniversaire. Les flocons de neige délicatement déposés sur le sol lui rappelaient l'effervescence qui régnait autrefois. Alors que sa mère d'accueil s'affairait en cuisine pour préparer une petite fête, une vague de nostalgie l'envahit. La présence chaleureuse de sa mère lui manquait cruellement en cet instant précis, son absence laissant un vide douloureux.

Le manoir était plongé dans une douce ambiance feutrée, le calme régnait en maître. Dans les couloirs, les murmures délicats du vent semblaient conter des histoires anciennes, invitant à l'évasion.

Allongé sur son lit, Jungkook se sentait beaucoup mieux que quelques jours plus tôt. Il détestait être malade, encore plus lorsqu'il y avait tant de choses qui l'appelaient à la vie. Cependant, une voix douce résonna dans son esprit, celle de Nayung. Elle lui avait murmuré que Taehyung se trouvait dans la salle de musique du manoir, un lieu envoûtant où les notes de piano se mêlaient à l'âme des mélomanes.

Timidement, Jungkook se leva de son lit et, s'appuyant sur les murs pour se soutenir, se dirigea vers la salle de musique. Son cœur battait à tout rompre, un mélange exquis d'excitation et d'appréhension. Il savait que Taehyung était différent, qu'il détenait une part de mystère qui l'intriguait profondément.

Lorsqu'il poussa la porte de la salle de musique, il découvrit Taehyung assis devant le piano, captivé par les touches blanches et noires. Ce dernier avait toujours été distant, cherchant refuge dans une solitude apparente. Mais parfois, dans ses éclairs de conversation avec Jungkook, une lueur d'authenticité surgissait, illuminant son regard.

Jungkook s'avança timidement, incertain de la réaction de Taehyung. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, ses joues rosissant sous l'effet des émotions naissantes. Il voulait tout connaître de celui qui captivait son esprit, même s'il ignorait la signification de ces sentiments.

"Salut, Taehyung," articula-t-il doucement, cherchant ses mots avec précaution.

Le pianiste tourna la tête vers lui, une lueur d'étonnement dans le regard. Le temps sembla se figer autour d'eux, créant une bulle intime où seuls leurs cœurs pouvaient parler. Jungkook continua d'avancer, l'air hésitant, délicatement perché sur le fil ténu de l'affection.

"Joyeux anniversaire, Taehyung," murmura-t-il, les mots s'échappant de sa bouche comme des papillons frêles.

Un sourire fugace éclaira le visage de Taehyung, son masque de retenue se fissurant brièvement. Cela suffit à alimenter l'étincelle dans le cœur de Jungkook, alimentant une lueur d'espoir dans sa poitrine. Il désirait ardemment comprendre les émotions profondes qui grandissaient en lui, mais la magie de ce moment était indicible.

Leurs yeux se fixèrent dans une étreinte silencieuse, nul besoin de mots pour exprimer les sentiments. Le doux son du piano continuait de flotter dans l'air, berçant l'atmosphère de leur rencontre. Jungkook, si jeune et innocent, découvrait les prémices d'un amour encore inconnu, tandis que Taehyung, muré dans sa solitude, révélait brièvement un fragment de lui-même.

Dans cette scène poétique, les mots n'étaient que des reflets de pensées et de sentiments indicibles, illuminant la beauté mystérieuse de cette rencontre. Les battements du cœur de Jungkook résonnaient dans sa poitrine, témoins silencieux de la transformation qui commençait à s'épanouir en lui.

Quelques instants plus tard, Jin arriva à leur rencontre, annonçant que Nayung avait grand besoin d'eux. Ensemble, ils quittèrent la salle de musique, parcourant les couloirs sous la houlette de Jin, telle une étoile filante illuminant leurs pas. C'est ainsi qu'ils aboutirent à la salle à manger, où Taehyung fut émerveillé de découvrir tous les enfants du foyer réunis en une symphonie de rires et de chuchotements. Les murs étaient parés d'étendards festifs, offrant au regard le doux mantra de "joyeux anniversaire", accompagné du chiffre 15, gracieusement étalé partout, célébrant l'âge qu'il atteignait aujourd'hui.

L'allégresse envahit le cœur de Taehyung alors que tous entonnaient avec une même voix joyeuse un chant d'anniversaire. Sa mère d'accueil s'avança solennellement, faisant glisser devant lui un gâteau majestueux, ses bougies flamboyantes dansant fièrement sur le sommet. L'espace d'un instant fugace, Taehyung se figea devant cette scène, hésitant quant à la décision à prendre : fuir en courant ou rester parmi les siens.

Ses pieds semblaient vouloir le mener vers la sortie, mais les sourires sincères qui ornaient chaque visage endormirent ses doutes et l'incitèrent à faire un ultime effort. Doucement, il se rapprocha des autres, gardant néanmoins une distance subtile, préservant cette part de lui qui se sentait différente. Il expira avec délicatesse, soufflant les bougies qui, dans un dernier éclat de flamme, s'éteignirent avec grâce.

Après avoir récolté sa part de gâteau, Taehyung, empli de gratitude, adressa quelques mots de remerciement aux adultes bienveillants qui l'entouraient. Mais en évitant les regards insaisissables, il se fraya un chemin discret, trouvant refuge dans un coin plus paisible de sa chambre sous le regard bienveillant de Nayung et surtout, admiratif de Jungkook...

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Voilà, j'espère que ça vous a plu le prochain chapitre très bientôt 🤗