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Je publie le dimanche maintenant...

Accoudé sur son vieux balcon rouillé, Namjoon traînait son regard fatigué sur le ciel gris.

Il embrassait des yeux cette ville qui lui paraissait si belle autrefois, sur ces grands immeubles teintés de lumières jaunâtres, sur ces routes de béton qui s'enfonçaient au loin, sur ces passants aussi petits que des fourmis qui grouillaient dans les rues.
Sur ce ciel d'un bleu grisâtre aux nuage cotonneux, sur ses longs doigts allongés d'une cigarette qui se balançaient dans le vide.

Il en tira une autre bouffée, recracha la fumée vers le ciel, et regarda avec fascination les cendres rougeoyantes qui illuminaient sa main pendant une fraction de seconde.

Il se sentait si vide.

Pas au point que l'idée de sauter du balcon ne lui paraisse envisageable, mais il se sentait tout de même si vide.

Jimin.

En boucle son esprit repassait les images de son visage trop beau, et il en faisait des cauchemars toutes les nuits.

Il fut tiré de ses pensées par un claquement sec qu'il reconnut immédiatement comme étant celui d'une porte de balcon qu'on ferme un peu trop fort.

Seulement, son voisin de droite dormait (on l'entendait ronfler) et celui du dessus était de sortie (sa voiture n'était pas là).

Donc ça ne pouvait qu'être...

Il fixa la cloison en bois un instant, essayant d'imaginer encore l'autre qui se trouvait derrière.

Un renflement le dit sursauter. Il éteignit immédiatement sa clope, de peur de se faire cramer.

Immobile, il entendit l'autre fondre en larme, hoqueter, se moucher tant bien que mal.
La respiration bloquée il l'entendit s'assoir, et en se penchant un peu en avant il vit du coin de l'oeil ses jambes qui pendouillaient dans le vide.

L'idée de rentrer discrètement dans son appartement lui vint, mais il ne pouvait pas. Et puis l'autre entendrait forcément le bruit de la porte et comprendrait qu'il était là, à l'entendre pleurer.

Mais que pouvait-il faire ?

Parler ? Il n'avait pas les mots. Il bégaierait, et le temps qu'il trouve ses mots l'autre aurait déjà fui.
Ne rien dire ? La culpabilité lui serrait déjà si fort le coeur qu'il ne s'en sentait pas capable.
Lui faire comprendre qu'il était là ? Glisser une clope de son côté ?  Un chocolat chaud ?

Et puis, ça lui vint comme une illumination.

Quelques minutes passèrent, et les sanglots de Jimin s'intensifièrent, des petits cris aigus étouffés passant la barrière de ses lèvres et brisant à chaque fois un peu plus le coeur en miette de Namjoon.

Sa voix à lui s'éleva doucement dans les airs, passant de frisson à murmure, de murmure à chuchotement, de chuchotement à parole.

Le blondinet s'arrêta de pleurer : d'abord parce qu'il réalisa que quelqu'un l'entendait depuis le début, ensuite parce qu'il réalisa que c'était Namjoon, et enfin parce que... Il se sentait un peu réconforté, curieusement.

La voix du plus grand était rauque, brisée, une voix de fumeur un peu fatiguée.
Il ne chantait pas totalement juste, et ça n'était certainement pas la plus belle chose qu'il entendrait jamais.
Mais ça lui fit un effet doux et chaud dans l'estomac, des chatouilles qui lui firent accélérer le coeur et tourbillonner la tête.

Pas comme les papillons qui le bouffait quand elle lui souriait non, mais plus comme une chaude sensation de familiarité, comme si un ours en peluche tout chaud l'enlaçait très fort.

Et il oublia tout.

Plus de haine, plus de corps encombrant, plus de regrets ni de souvenirs.
Plus de ses sourires à elle, plus de peurs, plus de larmes.

L'esprit vide mais le coeur apaisé et le corps si détendu qu'il se sentait presque glisser dans le sommeil.

Et sa voix délicate se mêla à celle bien plus grave de son voisin alors qu'ils chantaient tout deux la même chanson.
Une chanson si jolie, une promesse de s'aimer et d'essayer d'être heureux.

Leurs deux voix opposées se mêlaient si bien qu'elles se fondaient ensemble, poussières de bruit masquées par la ville voilée de noir.

Et tous deux fermaient les yeux, envahis par ce calme si doux.

Namjoon ne s'était jamais senti aussi bien de toute sa vie.

Leurs âmes entrèrent en symbiose, vraiment, pendant un instant, et ne firent plus qu'un.

Leurs coeurs battirent la même chamade, leurs yeux ouverts sur le ciel s'embuèrent des mêmes larmes d'émotion.

Leur monde gris s'emplit de beauté.

Leur vie prit un sens.

Leur sourire devint sincère.

Leurs larmes devinrent un trop-plein de bonheur.

La chanson prit fin, mais leur bulle indolore n'éclata pas aussi violemment qu'ils auraient pu l'imaginer. Elle creva lentement, les laissant peu à peu reprendre leurs esprits.

Sois ta lumière, disait la chanson, illumine toi-même ta vie.
Les paroles vous disaient de vivre et de ne plus vous faire souffrir même si la solitude vous dévorait avec violence.

C'était un peu comme une promesse qu'ils venaient de se faire à travers tout ces mots.

La grande main de Namjoon passa derrière la grande barrière en bois contre laquelle il était appuyé, la main fermée et le pouce et le petit doigts tendus.

Il attendit. Entendit l'autre s'avancer.

Et un petit doigt se lia au sien, son pouce pressé contre celui de l'autre : le signe de la promesse.

Pas un mot ne fut prononcé, mais ils savaient.

Ils se promirent d'être leur propre lumière.
Ils se promirent de ne plus se détruire.

Deux (presque) inconnus qui partageaient leur chaleur et leurs sourires à venir par leurs petits doigts liés.

Ca pourrait paraître ridicule, un peu niais, invraisemblable, mais surtout...

Qu'est-ce que c'était beau...

Qu'est-ce qu'ils étaient beaux..

Qu'est-ce que le monde à cet instant paraissait beau !

- - -

Voilà, en espérant que ça vous a plu !!!

On approche de la fin :c

L'OS arrive bientôt >~<

Soyez vos lumières.

💜

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