Chapitre XVIII - Sors de ma vie

Le rythme de la musique résonnait dans sa poitrine, dans sa tête et dans son corps comme des martèlements trop souvent assénés. Pansy rejeta la tête en arrière et profita d'être mêlée aux corps dansants pour disparaître un petit instant de son existence maudite. Elle en aurait presque rigolé tient. Mais elle n'y arriva pas. À la place, plusieurs larmes coulèrent sur ses joues rosies.

Tout en poussant des jurons, elle s'avança vers le comptoir en titubant et au lieu de verser le Whiky Pur Feu dans son verre, elle but directement dans la bouteille. L'alcool laissa sa brûlure dans sa gorge et dans son intestin. L'envie de tout recracher la prit, mais elle s'efforça d'avaler, non sans grimacer. Elle reprit une gorgée, puis une autre, et encore une autre. Pour se noyer, certainement. Se noyer dans ses larmes, dans son chagrin, dans la boisson. À défaut d'être à ses côtés, il était dans ses hallucinations. C'était tout ce qu'il lui restait de Drago Malefoy.

La fête de Marcus Flint était pour ainsi dire spéciale. Le jeune homme aimait moderniser les choses, aussi avait-il eu l'idée de mettre la musique à fond et inviter tous les Serpentard qui voulaient oublier un court instant leurs obligations ou leurs études. Cela n'aurait pas pu tomber mieux. Pansy laissa tomber la bouteille au sol quand elle fut vide et retourna dans la chaleur humaine mouvante. Camille était peut-être là, vu que c'était son frère qui avait organisé la fête, mais à vrai dire, elle n'avait pas cœur à parler avec elle. Au fond, elle avait eu raison depuis le début. Drago était toxique. Terriblement toxique. Mais elle l'aimait. Et ça l'empoisonnait, petit à petit. Elle se voyait de loin, elle se détestait, elle se dégoûtait d'elle-même, mais lui s'acharnait à rester dans ses pensées et elle continuait de se dégrader, parce que c'était tout ce qui lui restait à faire. Mourir, peu à peu. Disparaître. S'oublier.

Les lumières clignotantes l'aveuglèrent. Les rires parvinrent jusqu'à ses oreilles mais elle ne les enregistrait pas, elle n'enregistrait rien en fait. Elle était là, mais elle n'était pas là, comme absente, déjà morte de l'intérieur. Son corps seul dansait, son âme pleurait. C'était une contradiction étonnante qui se déroulait en elle. Ça lui faisait mal, son souvenir lui faisait mal, alors elle buvait pour l'oublier, elle se laissait aller, mais tout ce qu'elle obtenait c'était son nom sur ses lèvres, toujours, tout le temps. Ses mains qui parcouraient lentement son corps, son rire cristallin, son regard à en faire trembler plus d'un. Ses sourcils qui se soulevaient et son sourire malicieux quand il avait une idée spéciale en tête, ses bras puissants qui l’enveloppaient, les frissons quand il l'appelait « Beauté ». Elle avait perdu toutes ses sensations. Tout ça. Tout avait disparu. Astoria lui avait pris sa raison de vivre.
Une colère vive s'empara d'elle mais au même instant elle eut l'impression que sa tête se comprimait, prête à imploser. Elle tituba entre tous les sorciers se déhanchant autour d'elle, perdue. L'instant d'après, elle s'était remise à danser. Un rire la prit. Elle la tuerait. Elle tuerait Astoria. Mais ce n'était pas le moment. Plus tard.

Des mains se posèrent sur ses hanches. Elle ferma les yeux, totalement absente d'esprit. Cette présence devint assez vite une emprise et une voix lui murmura dans l'oreille :

-Je te veux.

Un rire franchit ses lèvres. Qu'il la prenne. Qu'il la kidnappe, qu'il la tue, elle n'en avait rien à faire. Sa réaction ne parut pas plaire au jeune homme qui lui empoigna le poignet et la tira hors de la piste de danse. Pansy se laissa faire. Son rire s'était éteint, son esprit lui hurlait de se dégager, mais sa vue se flouta à mesure qu'elle prenait conscience de ce qui se passait.

-Hey... lâchez-moi...

Elle se mouva lentement, sans grande force, et ce fut au tour du Serpentard de rire. Il la tira encore plus brutalement et elle faillit tomber en avant. La surprise fit apparaître des points noirs devant ses yeux.

-Elle t'as dit de la lâcher abruti.

L'emprise disparut aussi rapidement qu'elle était apparue. Un jeune homme blond, habillé d'un costume élégant poussa l'autre comme s'il le dégoûtait au plus profond de son être. Le Serpentard, en le reconnaissant, parut effrayé en le reconnaissant et détala au plus vite. Pansy mit du mal à y revoir net, mais regretta aussitôt de s'être efforcé d'y arriver.
Un frisson la parcourut au moment où ses yeux plongèrent dans les siens.

-Ça va ?

Ah vraiment ? C'était tout ce qu'il trouvait à dire ? Il détruisait sa vie, son cœur, ses espoirs, et tout ce qu'il trouvait à dire était « ça va ». Mais bien sûr que ça allait, voyons. Comment ne pourrait-il pas en être autrement.

-Dégage, parvint-elle à articuler après être parvenue à ouvrir sa bouche pâteuse.

Elle voulut reculer mais le sol tangua soudainement et des bras puissants la retinrent. Elle le repoussa dès qu'elle sentit son épiderme contre la sienne.

-Dégage ! hurla-t-elle, les yeux débordants de larmes.

Ce fut à son tour de reculer. Son visage était plus pâle que jamais.

-Pansy...

-Sors de ma vie ! Laisse-moi en paix ! C'était ce que tu voulais que je fasse non ?

La musique s'était arrêté. Tout le monde s'était retourné vers eux, s'amusant de cette petite scène improvisée. Le pire était que tout le monde connaissait déjà leur histoire. Les secrets ne perduraient pas longtemps entre les membres d'une même maison.

-Je pense qu'on ferait mieux de s'expliquer plus loin.

-Il n'y a rien à expliquer Drago.

Sur ces mots, elle se retourna et s'empara d'une bouteille qui était à sa portée sur une des tables pour la porter à ses lèvres. Faisait-elle pitié ? Certainement. En avait-elle quelque chose à faire ? Absolument pas. Elle n'avait déjà plus d'image. Pansy Parkinson n'avait plus d'honneur. Elle s'était faite humiliée quand elle s'était rendue compte que même ses amies étaient au courant que son futur fiancé fréquentait la plus jeune sœur Greengrass. Quand ses parents avaient rompu de force l'arrangement et que cette information s'était faite connaître publiquement. Pansy Parkinson n'avait plus de réputation, alors autant continuer sur la lancée.

Mais visiblement, l'auteur de sa destruction n'était pas du même avis. D'un coup de la main, il fit valser la bouteille qui se brisa au sol dans un énorme fracas. C'était marrant. Il venait de faire la même chose avec sa vie.

-Tu joues à quoi là ?

Elle se retourna et le fixa dans les yeux d'un air de défi. Certes il était plus grand qu'elle, mais cela ne l'intimida pas.

-Je pourrais te poser la même question.

Sa témérité lui donna envie de le frapper.

-Oh vraiment. Tu veux vraiment que je te réponde ? Tu veux vraiment savoir pourquoi je suis là, à me foutre en l'air pendant que monsieur veut encore jouer au chevalier sauvant sa princesse ? Va sauver ta Greengrass chérie, je n'ai plus besoin de toi.

Les murmures parcoururent la foule. La mâchoire de Drago se contracta. Il fit un geste pour lui prendre la main mais elle le repoussa instinctivement.

-Je t'interdis de me toucher.

-Pansy, s'il te plaît, laisse-moi m'expliquer.

-Il n'y a rien à expliquer, tu m'entends ? se mit-elle à hurler, la voix brisée. Je t'aimais ! Je t'aimais et tu t'es joué de moi, depuis le début !

-Non, non tu te trompes c'est...

-Quand est-ce que tu m'as dit que tu m'aimais, hein ? Quand, Drago ? J'ai attendu que tu prononces ces trois mots pendant des mois, en espérant qu'un jour je les entende, qu'un jour je ne douterai plus que mes sentiments étaient réciproques, mais rien ! Je me suis donnée à toi, je t'ai aidé à te rapprocher de ta mère, je t'ai tout donné, tout, et toi tu n'as même pas été capable de me dire « je t'aime » ! Puis tu me caches ta relation avec Astoria, tu me mens, et tout ce que tu trouves à faire c'est me demander à quoi je joue ! C'est toi qui a planté le couteau et tu prétends que tu es la victime ! Je te hais ! Je te hais !

Elle se jeta sur lui et dans un cri déchirant le frappa sur le torse, encore, et encore, et encore. Elle répéta qu'elle le haïssait, qu'il devait aller en enfer, et elle continuait de le frapper de ses poings faibles tout en versant toutes les larmes que son corps était capable de produire. Il se laissa faire. Peut-être qu'en un sens, il pensait qu'il le méritait. Peut-être qu'il voulait juste qu'elle se défoule, avant de la laisser avec sa peine. Mais ce qu'il fit après surprit autant Pansy que lui-même.

Il s'empara de ses poignets avec douceur et l'embrassa doucement. Leur baiser possédait un goût salé, un goût d'alcool mêlé à la tristesse profonde. Il n'y avait rien de romantique dans ce geste. C'était juste pour la calmer. Les calmer. Parce qu'en l'embrassant, elle se rendit compte que lui aussi pleurait.

Il l'entraîna ensuite loin de tous les regards curieux et ils s'enfermèrent tous deux dans une chambre. Leur souffle se mêlèrent, leurs peau fondirent l'une dans l'autre dans le feu de la passion. Leur esprit se vidèrent, ils oublièrent la peine, la douleur, la colère et tout ce qui les avait séparé depuis le début. Nus, à découvert, délivrés de tout secret, ils s'embrassèrent comme jamais ils ne l'avaient fait auparavant.

Pansy crut même entendre un « je t'aime » atteindre ses oreilles avant de se laisser porter par ses émotions. Mais à son réveil, à la découverte du lit vide, elle se demanda si elle ne l'avait pas rêvé.

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