Chapitre VII - Tout raconter

15 octobre 1995,

Je crois qu'il n'y a pas eu plus pire instant dans ma vie. Je crois aussi que cet instant a été celui que j'ai le moins compris dans ma vie. Premièrement, l'aveu de Blaise. Et ensuite, le comportement de Drago. Tout était allé trop vite et je n'ai pas eu le temps de faire pause. Pas eu le temps de lui demander pourquoi, comment. Pas eu le temps de comprendre.
Maintenant, deux choix s'offrent à moi.

Drago, ou Blaise.

Et en choisissant Blaise, j'ai juste peur de rater l'occasion d'aimer Drago.

-Tu m'expliques. Tout. Du début à la fin.

Pansy lui jeta un regard de supplice mais Daphné resta de marbre, les mains sur les hanches, un regard d'acier. Assise en tailleurs sur son lit, la brune soupira bruyamment et tenta de chercher quand tout cela avait commencé.

-J'ai reçu des poèmes.

-Des quoi ? s'étrangla Daphné.

-Tu m'as bien entendue. Ça s'est passé après notre dispute dans les bois. J'étais dans la bibliothèque et...

-Attends une minute. Quelle dispute dans les bois ?

-Tu ne t'en rappelles pas ? On a séché pour aller se baigner, Théo, Drago, toi et moi.

-Oh ! Tu étais partie en courant et Drago t'avait suivie.

-C'est ce jour-là que je lui ai dit que je l'aimais.

La bouche de Daphné s'ouvrit toute seule. Elle était immobile, debout devant le lit à la fixer comme si elle avait une araignée sur le front.

-Tu lui as dit que...

-Il m'avait poussée à bout, ok !

-C'était pas une raison ! C'était lui qui aurait du deviner, lui qui aurait du être attentif depuis le début à tes regards, tes sourires et tes mots !

-Le fait est que je lui ai dit.

Elle songea à ce qui s'était passé après, à cette discussion qu'elle avait écouté sur Narcissa Malefoy mais se garda d'en faire mention. Il s'agissait de sa vie privée, et si elle en parlait à quelqu'un, même de confiance, Drago ne lui pardonnerait jamais. D'autant plus qu'elle n'était même pas censé le savoir...

-Continue, ordonna son amie en faisant les cent pas dans la pièce. Les poèmes, c'est ça ?

-En effet. J'étais dans la bibliothèque la première fois que c'est arrivé. Je suis partie de ma place pour aller chercher un livre et quand je suis revenue, un parchemin était posé sur mon livre.

-Je peux le lire ?

Pansy hocha la tête et sortit de sa commode de nuit les deux parchemins qu'elle avait reçu. Elle tendit le premier à Daphné qui se mit à le lire avec attention.

-Je ne sais pas d'où il vient, dit-elle après sa lecture, ni qui est l'auteur, mais ce qui est sûr, c'est que le style est trop ancien pour que ce soit un élève. À l'évidence, on l'a choisi pour transmettre ses propres émotions.

-Quoi comme émotions ?

-Si on le transporte à notre époque, je dirais le regret d'un acte horrible, ou peut-être d'une ignorance. Il fait allusion aussi à une figure féminine condamnée aux ténèbres. Il parle de sorcière, donc la signification pourrait changer en fonction de la nature du poète. Que s'est-il passé ensuite ?

-Drago a débarqué d'on ne sait où et il s'est excusé.

-Rien sur la dispute ?

-Je lui ai dit de ne pas se prendre la tête avec ça. Il avait l'air vraiment gêné.

-Tu m'étonnes, rit-elle. J'aurais tout donné pour entendre Drago s'excuser autre que devant ses parents.

-C'est ce que je me suis dit aussi, sourit-elle. Enfin bref.

-Oui, continuons, dit Daphné en s'asseyant à côté d'elle.

-Vient la scène dans la Salle Commune, quand il a provoqué les Fawley.

-Je me souviens oui, fit-elle pensivement, se remémorant certainement son intervention.

-Après cela, Drago est allé jouer du piano et...

-C'était du Chopin. Une nocturne qui a été connue après la mort du compositeur.

-Depuis quand tu t'intéresses à la musique ?

Elle rougit violemment. Pansy devina que cela avait quelque chose à voir avec Théo mais elle décida de ne pas aller plus loin.

-Bref, je me suis dirigée vers la table commune et j'ai découvert un second poème.

Elle lui tendit l'autre parchemin et la blonde le lut en fronçant les sourcils.

-Celui-ci est plus compliqué à comprendre, mais il dégage un fort sentiment de tristesse et de souvenir amer. Comme pour insister sur le regret, encore une fois.

-Mais le regret de quoi ?

-Je ne sais pas, peut-être que la personne qui t'as donné ça voulait te dire quelque chose mais n'a jamais eu l'occasion de le faire.

-Ça n'a aucun sens. Ça ne colle pas.

-Attends, tu sais qui c'est ?

-Des filles assises à la même table ont vu Blaise le déposer.

-Blaise ! s'exclama son amie en se relevant brusquement. On parle bien de Blaise Zabini là ?!

-Parce que tu connais beaucoup de Blaise peut-être ?

-C'est pour ça que tu...

-...étais avec lui aujourd'hui.

Daphné recouvrit sa bouche, assemblant les morceaux un à un.

-Je... c'est difficile à s'imaginer...

-Vraiment ? Il a essayé de m'embrasser à deux reprises.

-Oui, pour la deuxième, j'y ai assisté. En réalité, je pensais que Drago allait venir avec nous ce jour-là, Camille le lui avait proposé et il avait accepté, mais c'était avant que tu ne reviennes ici en pleurant toutes les larmes de ton corps.

-On s'est disputé ce soir-là. Blaise venait de m'inviter au Pré-au-Lard et il avait entendu toute la conversation.

-Pansy, je crois que Drago est jaloux.

-Non, fit-elle en secouant la tête. Non, ce n'est pas possible. Drago ne m'aime pas, en tout cas pas comme une petite amie.

-Ah oui, et tu m'expliques pour ce matin, chez Rosemerta ? Je te rappelle juste que Blaise est encore à l'infirmerie pour s'être approché de toi trop près.

-Je ne sais pas ce qui l'a poussé à agir comme ça, soupira-t-elle. Je n'en ai absolument aucune idée.

-Moi non plus, mais je n'aime pas ça. On dirait que tu lui appartiens.

-Il a toujours été possessif, le défendit-elle.

-Mais que je sache, tu es sa meilleure amie, pas sa copine. Vos vies amoureuses doivent être personnelles.

-Je ne dis pas qu'il a bien agi. Moi aussi je ne comprends pas. Et je ne comprendrai sûrement jamais.

Elle rangea les poèmes dans son tiroir et entre-aperçut les pétales noirs de la rose. Fallait-il également lui dévoiler ce détail ? Non, elle s'en garderait. Ce n'était qu'une fleur, après tout. Aucune information ne pouvait être tirée d'elle.

-Pour les poèmes, reprit Daphné, j'aimerais aller voir ma tante pour savoir d'où ils viennent. Elle est libraire.

-C'est un libraire moldu qu'il faut aller voir. Je connais presque tous les auteurs sorciers mais je n'ai jamais lu ça.

-Et comment comptes-tu te rendre dans une librairie moldue ?

Pansy haussa les épaules comme si la réponse était évidente.

-On voyage depuis le Pré-au-Lard. Je connais une manière de ne pas être vues.

-Tu es préfète, Pansy.

-Et ?

Elle la fixa avec une mine scandalisée.

-Tu devrais montrer l'exemple !

-Personne ne le saura. On sera discrète.

-J'espère pour toi. Si mes parents apprennent que j'ai brisé les règles pour me rendre chez les moldus, ils me tueront.

-C'est pour une bonne cause. Tu me suis, donc ?

La blonde soupira, passa une main dans ses cheveux lisses avant de lancer :

-Bien sûr que je te suis. Je te suivrais partout, Parkinson.

19 octobre 1995,

Je n'ai parlé ni à Drago ni à Blaise depuis des jours. J'ai laissé le temps s'écouler pour réfléchir et prendre du recul. Et en faisant cela, un sentiment étrange s'est emparé de moi : la colère. Drago n'avait aucun droit de faire cela. Daphné a raison, comme toujours : je suis sa meilleure amie, pas sa copine. J'en ai assez de m'empêcher de vivre une relation amoureuse juste pour lui. S'il veut de moi, qu'il me le dise, mais jusqu'à maintenant, il m'a bien fait comprendre qu'il s'en fichait complètement.

Les pas de la Serpentard résonnèrent dans le long couloir du château. Elle marchait d'un rythme rapide, sûr, comme si elle cherchait quelque chose en particulier.

Je n'ai aucune idée de ce que je vais faire. J'ai envie de lui montrer que je ne suis pas sa possession. Je veux qu'il souffre comme il me fait souffrir.

Des voix masculines retentirent devant elle. Elle approchait du but. Pansy surpassa les quelques mètres de différence et arriva a la hauteur de Théo, Crabbe, Goyle, Drago et Blaise, ces deux derniers se tenant aussi éloignés que possible l'un de l'autre.

J'ai envie qu'il me voit lui échapper, qu'il me supplie de revenir. Je l'aime, et je l'ai toujours aimé, mais ça a duré trop longtemps. J'en ai assez de l'attendre. Vais-je regretter ce que je vais faire ?

Elle se posta devant Blaise et brusquement, sans prévenir, déposa ses lèvres sur les siennes. Le regard douloureux de Drago se posa sur elle et eut l'impression de se fissurer de l'intérieur. Mais malgré son corps qui lui hurlait d'arrêter cette folie, elle prolongea le baiser plus longtemps, plus longtemps, encore plus longtemps.

Peut-être, oui.

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