XIII. Sirius

-Tu as vu Marlène ?

-Nop.

James enfouit une grosse part de tarte à la mélasse dans sa bouche, sous le regard réprobateur de Lily, assise quelques mètres plus loin. Sirius, lui, n'arrivait pas à manger. Cela faisait quelques jours qu'il n'avait pas vu sa petite amie et l'inquiétude commençait à lui couper l'appétit.

-Je suis sur qu'elle va bien, le rassura Rémus qui nota le regard vide de son ami vers son assiette.

-J'aimerais m'en assurer moi-même.

-Continue sur cette lancée mon pote, lança James qui semblait de bonne humeur ce matin. Les filles aiment que leur copain soient protecteurs.

Rémus lui asséna une légère claque derrière la tête pour son manque de tact. James arbora son sourire idiot qui énervait Sirius dans ses mauvais jours. Il s'apprêtait d'ailleurs à dire une autre idiotie quand Giovanna Levanti, une italienne de la maison Serdaigle vint jusqu'à leur table. Elle avait de longs cheveux longs bruns qui lui arrivaient jusqu'à la taille et les yeux d'une transparence déconcertante, ce qui la rendait plus belles que quinze Vélanes réunies. Peter la fixa comme si elle était un ange tombée du ciel, mais celle-ci concentra toute son attention sur Sirius.

-Je peux m'asseoir à côté de toi ?

-Pourquoi ?

Elle haussa les épaules.

-Comme ça. Pour te consoler dans ta tristesse.

Elle n'attendit pas son autorisation et s'assit à côté de lui, sous les regards interrogateurs des trois autres Maraudeurs. Mais c'était comme si Sirius était dans un autre monde. Il ne semblait pas s'apercevoir des intentions de la jeune fille, et se prêtait au jeu comme si s'inquiéter pour  sa petite amie le fatiguait. 

-Si tu veux après on va faire un tour.

-Non, il peut pas, intervint subitement James. Il a... des trucs à faire.

-Si ça te fait plaisir, répondit Sirius en ignorant la remarque de son meilleur ami.

Un grand sourire traversa le visage de Giovanna. Elle posa une main sur sa cuisse et rapprocha ses lèvres à son oreille.

-Et puis on pourra après aller dans ta chambre.

Mais à ce moment précis, Marlène entra dans la Grande Salle, et son cœur s'arrêta de battre. Son visage pâle devint plus pâle encore et elle s'enfuit en courant sous le regard enfin réveillé de Sirius.

-Faut que j'y aille, s'exclama-t-il précipitamment en repoussant la Serdaigle.

Celle-ci le regarda partir d'un air maussade, et James retrouva son sourire vainqueur.

-Tu vois qu'il avait des trucs à faire.

Sirius courut jusqu'à la Salle Commune, tous ses sens en alerte. Il aurait bien voulu se gifler pour avoir été un idiot fini, mais il n'avait pas le temps. Il avait entendu ses pas se précipiter vers la tour des Gryffondors et il comptait bien s'excuser et lui expliquer. Lorsqu'il entra dans la salle, il la vit appuyée contre le rebord d'une fenêtre, le dos tourné. Il n'entendit aucun sanglot, mais il savait ce qu'elle ressentait. De la déception. De la jalousie. De la colère.

-Marlène, je...

-Dégage.

Elle avait prononcé ce mot avec tant de haine qu'il recula de quelques pas, ayant eu l'impression d'avoir reçu une gifle.

-J'étais préoccupée pour toi, je n'ai pas fait attention à elle et...

-J'ai dit dégage.

-Non.

Elle se retourna et laissa voir ses yeux injectés de sang, sa peau livide et ses lèvres tremblantes. Sirius voulut s'approcher d'elle pour la prendre dans ses bras, lui répéter combien il était désolé, mais elle l'arrêta d'un geste de la main. Elle ne méritait pas ça. Pas elle.

-Je veux que tu sortes.

-Et moi je veux t'expliquer qu'elle n'est rien pour moi.

-Pars putain ! s'exclama-t-elle en un tremblement.

Elle posa une main sur sa bouche et ferma les yeux, comme pour ravaler un sanglot. Sirius fronça les sourcils. Il y avait autre chose.

-Qu'est-ce qui ne va pas ?

-Ce qui ne va pas c'est toi ! J'aurais du m'en douter. Sortir avec le garçon le plus populaire de Poudlard a ses risques.

-Je te dis qu'elle n'est rien pour moi ! C'est toi qui compte Marlène, ça fait des jours que je ne t'ai pas vu, en fait depuis Noël et je m'inquiétais !

-Et tu te consolais dans ses bras ?

-Arrête sérieusement, c'est de la jalousie forcée.

-Jalousie forcée ? Oh vraiment ? Dis-moi Sirius, comment réagirais-tu si un garçon m'entourait dans ses bras et me chuchotait quelque chose à l'oreille ?

Il baissa la tête pour ne pas affronter son regard. Elle avait raison.

-Je le tuerais.

-Voilà. Alors pourquoi ça marcherait dans un sens et pas dans l'autre ?

-Je t'aime Marlène. Je suis désolée de t'avoir fait de la peine, vraiment, je ne recommencerai pas je te le jure.

-C'est ce qu'ils disent tous avant de commettre l'irréparable et prétendre que ça peut être pardonné.

Il fronça les sourcils une deuxième fois en voyant ses mains trembler et ses yeux prêts à verser des larmes. Ce n'était pas le genre de Marlène de faire toute une scène et de dire de tels choses pour une autre, sachant pertinemment que Sirius l'aimait et que son charisme naturel attirait naturellement les filles qu'il repoussait toujours.

-Marlène, dis-moi ce qui se passe vraiment.

-Rien ! s'exclama-t-elle d'une voix cassée. Rien du tout, laisse-moi !

Mais le ton de sa voix et sa réaction lui donna raison. Il n'avait pas la moindre intention de partir et de la laisser dans cet état. Il avait peut-être été idiot une fois, mais pas deux.

-C'est hors de question.

-Sors Sirius, dit-elle avec un calme qui ressemblait au ciel bleu juste avant d'être recouvert d'un orage noir.

-Non.

-SORS ! hurla-t-elle brusquement.

-Dis-moi ce qui ne va pas et je sortirai !

Elle le fixa avec un regard vide, brisé, un regard qu'il n'avait jamais vu en elle et qui le rendit misérable. Ça lui faisait presque mal de la voir ainsi, il lui aurait donné le monde entier pour qu'elle retrouve le sourire.

-Il est mort, dit-elle dans un murmure.

-Quoi ?

Qui ? fut la première question qui lui passa par la tête. Il pensa à Régulus, vu que Marlène était amie avec lui, mais un coup d’œil à sa chevalière lui suffit pour être rassuré.

-Mon frère est mort.

Puis elle éclata en sanglot.
Ça devait arriver. Elle avait tant tenté de cacher son désespoir, de faire comme si tout allait bien que tout explosait de manière destructive. C'était le pouvoir que Sirius avait sur elle. Faire tout exploser autour d'elle, et à l'intérieur d'elle. Il n'attendit pas son autorisation pour la prendre dans ses bras de manière protectrice et la serrer contre lui comme s'il craignait qu'elle le repousse une fois de plus. Lorsqu'il se rendit compte qu'elle peinait à tenir sur ses jambes, il la conduit vers le sofa tout en continuant de passer une main dans ses cheveux et lui chuchoter des mots doux pour la calmer.

-Il l'ont retrouvé mort dans une ruelle, continua-t-elle contre lui. Ils l'ont tué... Je les déteste, je les hais...

Sans même qu'elle ne le précise, il comprit de qui elle parlait. Ses muscles se contractèrent. Finn faisait partie de ceux qui espionnait les Mangemorts au service d'un ordre dont il avait appris l'existence en écoutant les rumeurs qui couraient. Si ces derniers avaient découvert qu'il était un traître, alors il n'était pas étonnant qu'ils aient décidé de l'éliminer, voire de le faire souffrir avant.

-Mon père n'a même pas osé venir lors de l'enterrement, tout ça est sa faute j'en suis sûre...

-Quel enterrement ? Comment ça ?

Marlène se détacha et essuya ses joues avec la manche de son pull. Son regard se déviait chaque fois qu'il essayait de la regarder dans les yeux. Il pria pour que sa pensée ne soit pas véridique.

-On l'a enterré il y a deux jours.

-Et tu ne m'as rien dit ?

Il se sentait presque trahi. L'idée qu'elle ait perdu son frère et qu'elle soit allé à son enterrement sans même lui en dire un mot le blessait profondément. Comme s'il n'était pas utile pour elle, comme si elle ne voulait pas de son appui.

-Je... je ne voulais pas te faire souffrir pour rien, James m'a parlé de ton oncle et de...

-Ma famille est une chose Marlène, toi tu en es une autre. Je ne comprends pas pourquoi tu m'as tout caché, je croyais qu'on avait confiance l'un l'autre.

-J'ai confiance en toi ! s'exclama-t-elle au bord des larmes. Seulement, je... je n'aime pas lorsque les événement me concernent.

Ni quand un sujet de discussion la concernait directement, cela il l'avait compris. Marlène n'aimait pas être le centre du monde, au contraire. Elle laissait passer les autres avant elle, les écoutait, les aidait quand elle même se brisait.

-Dans un couple, chaque événement concerne tout le monde. J'aurais pu être là pour toi.

Son ton s'était radouci, car il ne voulait pas la rendre plus triste qu'elle ne l'était déjà mais le fait qu'elle lui ait caché quelque chose d'aussi important continuait de le blesser.

-Je sais et j'ai pensé à toi à ce moment là. J'ai même pensé écrire une lettre pour que tu me rejoignes mais au final je l'ai brûlée.

-Pourquoi ?

Elle haussa les épaules tout en continuant de dévier le regard.

-Je sais pas. Au final, des gens meurent tous les jours, un enterrement ou un autre...

-On s'en fiche des autres. Tu as perdu un frère, merde ! Et tu prétends que ce n'est rien quand tout dans ton attitude crie que ça te fait du mal et que tu as besoin d'un soutien !

-Je n'ai pas besoin de soutien !

-S'il te plaît, met ton orgueil de côté. Juste pour une fois. Pour toi, je me suis dévoilé tout entier, je t'ai raconté mes pires hontes et je t'ai même laissé voir mes cicatrices. J'avais confiance en toi car je savais que tu n'allais pas le prendre à la légère. Tu penses vraiment que j'allais venir te voir et te dire « bah, perdre un frère ça peut arriver tous les jours » ?

-Non. Mais je... je sais pas. Je suis désolée, crois-moi...

-Je te crois, c'est bon, soupira-t-il.

Il passa un bras autour de sa taille et l'attira de nouveau contre lui. Elle se laissa faire.
Il y avait de l'amour entre eux, c'était certain. De l'amour, de la passion, du désir, tout ce qu'il y avait dans un couple. Seulement, de cette soirée, ce qui resta fut une brisure dans leur relation. Une infime brisure, comme un petit craquellement. Le manque de confiance de Marlène avait amené Sirius à douter de lui-même. L'image de Giovanna contre Sirius avait hanté Marlène toute la nuit, en plus du visage cadavérique de son frère.
Et comme dans toute construction, le moindre craquellement pouvait conduire à la destruction la plus complète.


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