X. Régulus
-Régulus, Gabrielle est en bas, elle veut te voir. Eh, depuis quand tu fumes ?
Bellatrix entra dans sa chambre et lui arracha sa cigarette des doigts.
-C'est quoi le problème ?
-Tu es trop jeune encore. Et puis passe toi de l'eau sur le visage, tu as une tête affreuse.
Régulus la maudit intérieurement tandis qu'elle sortait aussi rapidement qu'elle était entrée. Il ne pouvait même pas être tranquille dans sa propre chambre. Il ferma la fenêtre et sortit sans avoir fait ce que sa cousine lui avait ordonné. Après être descendu les escaliers et avoir faillit se perdre entre tous les couloirs identiques qui composaient cette maison, il trouva finalement le salon et y trouva Gabrielle Devigne, assise sur le sofa d'un air préoccupé. À son arrivée, elle releva vivement la tête et l'incita à s’asseoir face à elle.
-Je crois qu'il y a eu un malentendu entre ma sœur et toi.
-Il n'y a eu aucun malentendu, répliqua-t-il d'un ton cinglant.
-Elle a passé ces deux derniers jours à pleurer.
-C'est étonnant que ce soit le fautif qui agisse comme la victime. Elle a du vous raconter comment notre réveillon de Noël s'était passé, n'est-ce pas ?
-Vaguement.
-Alors je vais vous raconter les détails, fit-il en se penchant en avait et en posant ses coudes sur ses genoux. Votre sœur, après s'être gentiment présenté, m'a attiré dans une des pièces de votre magnifique demeure et a couché avec moi.
Le visage de Gabrielle pâlit à ses mots, mais elle garda le silence.
-Je dois dire qu'elle est très énergique et que moi-même j'étais assez essoufflé de...
-Je me passerai de ces genres de détails.
-Très bien. Après donc, avoir couché avec moi, j'ai appris par accident que, oh surprise, c'était visiblement dans ses habitudes de faire ce genre de choses. Et vous savez pourquoi ?
Elle secoua la tête.
-Par jalousie. Pour vous. Alors j'ai vite compris que je ne signifiais rien du tout pour elle. J'étais une nombre dans une foutue liste qu'elle aimait énumérer pour montrer qu'elle aussi était capable d'attirer des garçons dans son lit.
-Victoria est maladroite. Très maladroite. Elle écrit, beaucoup, des poèmes, des histoires, mais quand il s'agit de parler elle ne sait pas faire.
-Je crois qu'elle savait très bien ce qu'elle disait à ce moment là.
-Je comprends ce que tu peux ressentir. Elle t'a fait du mal, mais s'il te plaît, vous devez parler. Mettre les choses au clair. Je la suspectais déjà de faire ce genre de... d'activité avec plusieurs de nos invités. Mais à chaque fois elle en ressortais indifférente et continuait toujours de sourire comme si rien ne s'était passé. Avec toi, elle en est ressortie totalement détruite. Elle a commencé à hurler de rage et sa magie, mêlée à sa colère a fait que tous les cristal de la pièce où elle se trouvait ont éclaté. Tu sais très bien ce que cela signifie. Si elle aurait joué la comédie, sa magie ne se serait pas manifesté de cette manière.
Régulus avait déjà assisté à ce genre de spectacle avec Narcissa, lorsque elle et Lucius Malefoy s'étaient disputés dans le salon des Black et qu'après son départ, tout s'était brisé dans la pièce. La magie des sorciers se manifestaient souvent dans des situations de tristesse profonde, tout comme les enfants manifestaient leur capacité magique dans des crises de colère.
-Que vous a-t-elle dit ?
-Qu'elle ne comprenait pas pourquoi elle tenait autant à vous.
Il baissa la tête et inspira profondément. Il aurait voulu lui dire que lui non plus ne comprenait pas. Le désir et la passion qu'il avait ressenti pour elle ce soir là ne s'était pas envolé, loin de là. C'était comme si un aimant s'acharnait à le tirer vers elle. Il s'était dit que ce serait passager, que ce sentiment finirait pas s'éteindre avec le temps, mais il n'avait fait qu'augmenter.
-Ce qu'elle a fait était humiliant.
-Et elle le regrette. Beaucoup. S'il te plaît, laisse-lui une seconde chance. Jamais je ne l'ai vu dans cet état pour un garçon. Elle répète sans cesse qu'elle veut vivre indépendante, qu'elle ne ressent rien pour personne et que ça lui va parfaitement, mais les choses ont changé avec toi. Ce début a peut-être été précipité, mais je ne doute pas un instant que votre histoire mérite d'être prolongée. Je vois en toi quelque chose de bien.
-Vous vous trompez. Mon frère est quelqu'un de bien. Pas moi.
-Victoria sera capable de te montrer le contraire. Elle a toujours été douée pour guider les gens sur le bon chemin.
Oui et moi j'ai toujours réussi à montrer aux gens qu'ils se trompaient.
-Et si vous vous voyiez cette après-midi ? proposa Gabrielle. J'ai promis à Narcissa une ballade, ce sera l'occasion que tu viennes avec nous pour la retrouver.
Il n'avait pas vraiment le cœur à sortir, mais savoir qu'il y retrouverait Victoria le réjouissait. Cela aurait du renforcer sa colère envers elle, mais pour une raison qu'il ignorait, il avait vraiment envie de mettre tout cela au clair et espérait de nouveau qu'elle et lui écrivent leur histoire.
-Bien.
-Parfait. À cette après-midi alors.
Après le déjeuner, lui et Narcissa se préparèrent pour sortir sous le regard réprobateur de Bellatrix. Celle-ci avait commencé à s'interposer pour l'empêcher de trop bouger, mais en voyant que même ses parents ne disaient rien, elle avait abandonné. Pour eux, leur fille pouvaient se balader quelques fois et elle respectait la limite, même s'ils n'étaient pas au courant qu'elle sortait tous les soirs par la porte arrière du manoir.
-Tu reviens dans deux heures, répéta l'aînée pour la énième fois.
-Ne t'en fais pas Bella, je sais ce que je dois faire. Nous trouverons un banc et nous nous assiérons pour discuter.
Bellatrix hocha la tête et la regarda partir avec une lueur d'inquiétude dans les yeux. Son regard se posa sur la bague qu'elle portait au doigt. Depuis ce matin, le blanc de la pierre était devenu légèrement plus pâle que d'habitude. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle avait bien peur de le deviner trop tard.
Narcissa et Régulus prirent une diligence pour se rendre au parc que leur avait indiqué Gabrielle. D'après les dires, ce parc contenait un énorme labyrinthe taillé sur ordre de Louis XII de France pour sa femme, afin que celle-ci ne s'ennuie plus des jeux répétitifs de la cour. Depuis, il avait été entretenu et ouvert au public. On disait que là-bas était né tellement d'histoire d'amour, comme pour rappeler le nombre d'amant que cette reine française avait rencontré entre ces murs de végétation. Gabrielle avait certainement choisi l'endroit en son honneur.
-Nous sommes arrivés, prononça en français le conducteur.
Narcissa lui donna cinq gallions et descendit grâce à l'aide de son cousin. Là-bas, ils retrouvèrent Gabrielle qui les accueillit tout sourire aux lèvres. D'un simple regard, elle fit comprendre que sa sœur se trouvait déjà à l'intérieur de la construction verte, alors il s'y aventura par le premier chemin qui se présenta. Les buissons étaient hauts et sauvages, tellement sombres qu'ils semblaient vouloir avaler tout membre qui tentait de l'effleurer. Il y croisa plusieurs couples qui se baladaient à l'intérieur de manière paisible, sans craindre un instant de ne pas trouver la sortie. Déjà qu'il se perdait dans sa propre demeure, alors il n'imaginait pas dans un labyrinthe. Narcissa et Gabrielle finiraient bien par aller le chercher d'ici la tombée du jour.
Il marcha quelques kilomètres et se rendit compte aussitôt qu'il n'y croisait plus personne. Génial. Il avait du s'aventurer bien plus profondément qu'il ne devait. Il songea à faire demi-tour quand une voix familière l'arrêta dans son élan.
-On dit que le labyrinthe réunit les âmes semblables.
Elle provenait de l'autre côté du mur de végétation. Le cœur de Régulus s'arrêta de battre, l'instant de réaliser que cette voix appartenait à Victoria. Sa main toucha le feuillage épais, comme si en l'enfonçant à l'intérieur il pouvait toucher sa peau si douce.
-Et tu y crois ?
Des bruits de pas se firent entendre. Elle était partie. Régulus suivit le son et se mit à courir entre les murs hauts qui les séparaient. Après avoir tourné plusieurs fois dans des tournants qu'il ne reconnaissait pas, il s'arrêta de nouveau, essoufflé.
-Je ne sais pas. Tout dépend de comment sont les nôtres.
Il se redressa vivement. Elle était face à lui, habillée d'une cape bleue foncée qui la couvrait du froid, ainsi que d'un chapeau accroché grâce à son chignon sur le côté.
-Victoria, souffla-t-il.
À sa plus grande surprise, il vit qu'une larme était tombée de son œil. Pourtant, elle lui adressait un sourire timide, presque triste.
-Je comprendrai si tu me disais que tu ne veux plus me voir.
-Je... j'aimerais pouvoir le dire avec indifférence. Mais c'est bien plus compliqué que cela.
-Pourtant je t'ai fait du mal, beaucoup de mal, ça ne devrait pas être difficile. La haine devrait surpasser l'attraction que tu as pour moi.
-Tu parles au conditionnel.
-Parce que c'est ce tu es censé penser. Mais je vois dans ton regard que ce n'est pas le cas. Pourquoi ?
-Je n'en ai aucune idée.
Il parlait avec sincérité. Il ne savait pas pourquoi il n'était pas en colère contre elle. Il l'avait été pourtant. Pendant les deux jours qui s'était écoulé entre le réveillon et ce moment là, il avait refusé de lui pardonner, allant jusqu'à pousser des jurons dans son sommeil pour la faire disparaître de ses pensées. Mais face à elle, toute cette colère s'était envolée. Elle provoquait en lui une paix intérieure qu'il appréciait. Il ne savait pas si c'était dû à son étrange capacité à lire dans le regard des autres, mais ce qui était sûr c'était qu'il voulait rester avec elle le plus longtemps possible. Juste pour évanouir toute cette haine qu'il avait pour sa vie et pour lui-même.
Avant qu'il n'ait pu prononcer un mot de plus, elle disparut soudainement derrière une rangée de haies. Régulus voulut la poursuivre mais se trompa de chemin et se rendit vite compte qu'un mur les séparait de nouveau. Elle se jouait de lui mais curieusement, il aimait cela.
Il s'était rapproché du feuillage pour entendre plus facilement ses pas. Lorsqu'elle tournait, il tournait également. Lorsqu'elle empruntait un autre chemin, il s'efforçait d'en trouvait un qui soit collé à ce dernier, sans parvenir à trouver celui dans lequel elle se trouvait. La frustration commença à le gagner, mais au moment où il songea à s'arrêter, elle apparut soudainement devant lui et l'embrassa sans qu'il n'ait vu venir son geste.
Le temps s'arrêta de s'écouler, son cœur s'arrêta de battre. Il mourut l'instant d'un baiser. La brise fraîche caressa leur peau, fit danser quelques cheveux sur le front de Victoria. Lorsque enfin, ils se décidèrent de se détacher, son souffle se fit court.
-Tu l'as fait avec d'autres ça aussi ?
Son regard se fit coupable. Elle secoua la tête et la baissa en même temps.
-Non. Je n'ai jamais aimé personne d'autres comme je t'aime toi.
Il posa un doigt sur son menton et le lui fit relever. Ses yeux brillaient sous le soleil hivernale. Jamais il n'avait vu telle beauté, et tant de douleur à la fois.
-Ce n'était pas un sermon. Et je... moi aussi je t'aime.
C'était étrange comment sonnaient ses mots sortis de ses lèvres. Il avait lu des centaines de romans où dire ces trois petits mots semblait la chose la plus facile du monde. Pourtant, c'était tout le contraire. Mais la satisfaction qu'on en ressentait en l'entendant, le bonheur que cela suscitait était bien plus puissant que n'importe quel sortilège. Cela semblait guérir toutes les blessures intérieures qu'il avait accumulé toutes ces années.
-Tu me pardonnes ?
-Oui.
Leur second baiser fut plus passionné encore. Cette fois-ci, aucune trace de tristesse, de désespoir. C'était le bonheur mis à nu, l'amour percuté de plein fouet par leur geste passionné. En s'embrassant, il semblait que rien ne pouvait les atteindre. Ni la guerre, ni les ténèbres, ni Voldemort, ni leur haine pour être le cadet de leur famille. Plus d'ombre pour les cacher, plus de jalousie. Ils étaient là l'un pour l'autre, ils s'aimaient. Un sentiment tellement puissant qui semblait pouvoir détruire ce monde par sa seule évocation.
Soudain, un cri perça le silence qui s'était installé dans le labyrinthe.
Un cri que Régulus reconnut immédiatement.
Narcissa.
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