Chapitre 26
Alexeï
— Tu veux boire quelque chose ?
Je parle un peu plus fort que voulu dans l'optique qu'Athalia puisse m'entendre à travers tout le brouhaha extérieur.
Elle reste collée à moi, les yeux hagards, et je commence à m'inquiéter en me disant qu'elle n'avait peut-être pas prévu qu'il y aurait autant de monde.
J'en suis d'ailleurs le premier surpris.
Le bar en plein air se situe juste en face de la mer. On entend à peine les vagues venir se déposer sur le sable fin, puisque l'instrumental répétitif des musiques qui passent couvre tout le reste.
Mais il y a aussi les rires, les cris, les discussions enjouées qui font bourdonner l'endroit de gaieté.
L'odeur de l'océan se mélange à celle de l'alcool, et les effluves acidulés mêlées à celle du sel donnent à l'atmosphère un goût particulier. Pas déplaisant, mais plutôt festif.
Un petit kiosque a été installé et fait office de bar au cœur de la plage. Un préau en bambou a été dressé au-dessus, et des guirlandes de lumières sont enroulées autour des poteaux en bois. Il y en a tellement qu'elles illuminent à elles seules l'endroit, et le sable que l'on aperçoit au-delà du plancher en bois, érigé lui aussi pour l'occasion.
Les planches craquent sous nos pas et ce bruit semble légèrement perturber Athalia, qui peine à rester concentrée.
Depuis qu'on est arrivés, elle regarde surtout par-delà l'horizon, vers l'ombre d'un océan qu'on peine à apercevoir depuis la disparition du soleil. Comme si elle tentait de s'échapper à la simple force de sa vision.
Je prends alors l'initiative de glisser ma main dans la sienne, et avant que je n'aie le temps d'estimer la portée de mon geste, un frisson m'électrise le bras. Il remonte et m'hérisse les poils, avant de faire frémir l'entièreté de ma colonne vertébrale.
Je ne sais pas si Athalia vient de ressentir la même chose que moi, mais en tout cas, elle n'est plus du tout focalisée sur la mer avoisinante.
C'est moi qu'elle observe désormais avec ses grands yeux bruns, encadrés par certaines de ses mèches qui élargissent son regard. À l'intérieur, j'y vois s'y répercuter les dizaines de couleurs qui tournoient autour de nous et qui illuminent majestueusement ses iris.
Elle est profondément belle.
La sincérité de ma pensée me ramène subitement à la réalité, et manque de me faire lâcher un sourire incontrôlé.
— Je vais commencer avec de l'eau.
Après ce qui me semble une éternité, Athalia m'apporte sa réponse en élevant la voix. Ses doigts se resserrent autour de mes phalanges, ses pupilles baignant dans les miennes, avant que je ne me tourne vers le bar en bois, où s'affaire derrière le barman.
Ses gestes sont à la fois précis, frénétiques, fermes et assurés, tandis qu'il fait tourner le shaker à cocktails entre ses doigts.
Plusieurs verres sont alignés face à lui, prêts à recevoir la boisson divine qu'il prépare, tout comme les personnes qui se tiennent debout non loin de là dans l'attente que leurs commandes leur soient servies.
Je m'avance tant bien que mal malgré la foule qui reste présente près du kiosque, comme si c'était un point d'eau en plein désert.
Je garde les doigts d'Athalia prisonniers des miens, et arrive après quelques secondes de bataille au niveau des serveurs.
Ils demandent quelques indications au barman, et repartent après avec leurs plateaux pleins à craquer. Je me suis toujours demandé avec quelle dextérité ils parvenaient à défier la gravité.
Autant dire que si j'étais à leur place, les verres sur mon plateau auraient fait des dominos avant même que je n'aie fait deux pas.
— Bonsoir, on va vous prendre deux verres d'eau, s'il vous plaît.
Une fois que je parviens à atteindre le bar, Athalia sur les talons, je m'adresse au barman dont les mains sont occupées à faire plusieurs choses à la fois.
Il jette des glaçons colorés dans les verres, y accroche au bord des rondelles de citrons jaunes ou vertes, ou bien des rondelles de pamplemousse, avant d'y verser le liquide ambré contenu dans le shaker.
Impressionné, je reste accaparé par ses gestes pendant un instant, avant de l'entendre me rire au nez.
— Si vous voulez de l'eau, vous en avez en face de vous.
Son ton cassant et méprisant parvient étrangement à mes oreilles de manière très distincte. Il m'irrite le tympan.
Je le fixe froidement, éberlué qu'il puisse tenir de tels propos, mais surtout, qu'il ait l'air de s'en moquer puisqu'il retourne à ses commandes.
Il ne compte donc pas nous servir.
Très bien.
— Je vous demande pardon ? J'ai demandé de l'eau, pas votre avis, je réplique durement pour attirer son attention. Je ne vous le redemanderai pas une deuxième fois.
— Al'...
Le nouveau surnom qui sort soudain d'entre les lèvres d'Athalia fait bondir mon cœur dans ma poitrine, mais ne suffit pas à m'apaiser face à l'idiot que j'ai face à moi.
Malheureusement.
— Mec, tu crois que j'ai que ça à faire ? réplique l'autre homme qui se tourne vivement vers moi lorsque je lui tiens tête. Perdre du temps à te servir un verre d'eau, au vu de toutes les commandes que j'ai ? Va à la fontaine du village. Ça te fera marcher, ça te fera du bien.
Un grondement sourd s'échappe de mes lèvres, mais la musique ambiante suffit à le cacher.
Je fixe l'autre homme, dont le verre de ses épaisses lunettes reflète les guirlandes lumineuses autour de nous, et laisse un lent sourire étirer les coins plissés de ma bouche.
Je n'ajoute rien de plus, malgré le regard inquisiteur d'Athalia, et lâche sa main pour me diriger vers le côté du kiosque. Je suis bel et bien conscient de tous les regards qui divergent dans ma direction, mais je n'en ai que faire.
Ils sont venus pour s'amuser, alors on va s'amuser.
Sans attendre, je pousse la petite porte battante qui permet d'avoir accès à l'intérieur du bar. Je me retrouve très vite dans le périmètre du barman, et ne peux m'empêcher de lui servir un sourire insolent en voyant l'air outré qu'il me lance.
— Mais qu'est-ce que tu fous, toi !
Il s'essuie rapidement les mains sur son tablier, mais je l'ignore et fouille dans les placards pour trouver des verres.
Les pulsations de la musique font vrombir mes organes et certaines étagères du bar, mais je n'y prête pas attention et attrape ce dont j'ai besoin après quelques minutes passées à les chercher.
— Tu n'as pas le droit d'être ici ! Repose ça, c'est privé !
Le barman continue de s'égosiller, et tente de m'arracher les verres des mains. Malheureusement, même si je ne suis pas très musclé, il est beaucoup plus fin que moi et je n'ai donc aucun mal à le repousser.
Athalia est toujours prostrée là où je l'ai laissée, et se mordille les lèvres de nervosité malgré le clin d'œil que je lui fais pour lui montrer que tout est sous contrôle.
Ou presque.
Je suis peut-être un peu trop sûr de moi malgré la situation, mais ça ne m'empêche pas de m'approcher de l'un des robinets pour remplir les deux verres que je tiens dans mes mains.
— C'est interdit de rentrer dans le kiosque et de venir derrière le bar ! s'écrie-t-il en voyant qu'il ne parvient pas à m'arrêter.
— Je t'avais dit que je ne te le répéterai pas une deuxième fois. La prochaine fois, tu écouteras du premier coup. Bonne soirée.
Je lui resserre mon plus beau sourire, et quitte le kiosque lorsque j'ai ce que je veux.
Beaucoup de personnes se sont arrêtées de danser autour de moi, et me lancent des regards mi-confus, mi-scandalisés, mi-amusés. Je ne sais pas vraiment lesquels sont mes préférés.
Sûrement ceux qui sont scandalisés.
— Tiens, chaton.
Je donne son verre à Athalia, et remets mes cheveux en arrière une fois que ma main est libre. Je porte ensuite mon propre récipient à mes lèvres, et bois presque tout d'un coup, comme si je n'avais pas bu depuis des jours.
Ça donne soif de se donner en spectacle.
— Pourquoi tu...
Athalia s'arrête subitement de parler, alors que je la fixe profondément dans l'attente qu'elle poursuive.
Pourquoi je quoi ? Pourquoi l'ai-je appelé soudainement chaton, ou pourquoi me suis-je permis de passer derrière le bar pour aller nous chercher à boire ?
À travers la lutte qui fait briller son regard, j'ai l'impression qu'elle se pose ces deux questions à la fois, voire même plus, bien que pour les autres, je ne parviens pas à m'en faire une idée.
— Tu n'avais pas à faire ça ! finit-elle par exploser, avant de baisser d'un ton lorsque les regards autour de nous convergent dans notre direction. Alexeï, si on me reconnaît... Si on me voit mêlée à un scandale, peu importe son envergure...
Sa voix se brise dans sa gorge, et ses pupilles retournent immédiatement sonder tous ceux autour de nous, comme si l'un de ses fans allait surgir de la foule à tout instant pour se jeter sur elle.
Je comprends alors, qu'en effet, je n'ai pas prêté une seule fois attention aux problèmes que ça pourrait potentiellement lui rapporter.
Je suis parti du principe que j'ai fait ça de mon propre chef, qu'Athalia n'y est pour rien, mais je me rends compte qu'au vu de nos métiers respectifs, et du fait que nous sommes souvent ensemble, les gens pourraient facilement nous assimiler l'un à l'autre.
— Écoute, je suis désolé, je ne...
— Là, ils sont là ! Alexeï, Athalia, je vous présente mon meilleur ami pour les soirées à venir !
Jenny se pointe soudain à nos côtés, un verre à moitié rempli d'un liquide verdâtre qui devient émeraude suivant la lumière près de laquelle il est exposé.
Elle est accompagnée d'un homme dont les mèches blondes deviennent facilement rayonnantes grâce à l'éclairage à proximité de notre quatuor.
Il est très grand, puisqu'il nous dépasse tous d'une bonne tête, et son torse, lui, est bombé quand il s'avance à notre hauteur. Il souligne ainsi sa silhouette baraquée, et les manches courtes de son t-shirt marquent, elles, sans mal, ses biceps musclés.
Pendant un bref instant, je suis soulagé qu'il ne soit pas le barman avec qui j'ai eu un accrochage il y a quelques minutes. Parce que sinon, je n'aurais peut-être pas fait autant le malin.
— Enchanté, je m'appelle Adan.
Il se présente chaleureusement, et nous tend sa main libre, puisque l'autre tient son verre dont le cocktail couleur corail me rappelle la teinte des lèvres d'Athalia.
Je toussote quelque peu pour m'éclaircir les idées, et lui rends son accolade avant de voir qu'Athalia, elle, n'en fait rien. Elle baisse les yeux vers la paume d'Adan tendue vers elle, la toise sans bouger, et finit par le saluer simplement d'un léger signe de tête en se rapprochant de moi.
Adan n'a pas l'air d'y prêter grande attention, puisqu'il avale simplement une gorgée de sa boisson avant de nous demander si on passe une bonne soirée.
Mais avant que je n'aie pu apporter, ou du moins essayer d'apporter un semblant de réponse, Jenny glisse un bras autour de mon cou et me claque un baiser humide, bruyant, et surtout inattendu, sur la joue.
— C'est dégoûtant, je maugrée en essuyant la légère trace de salive qu'elle m'a fait du plat de la main.
Je la repousse ensuite du coude pour la décoller de moi, bien qu'au contraire, son comportement m'amuse. Elle ne me semble d'ailleurs pas tout à fait sobre si j'en crois le rose de ses joues et la légère dilatation de ses pupilles.
Mais elle resserre davantage sa prise autour de ma nuque, et me lance un regard appuyé, avant de fixer en coin Athalia.
Ses iris font un ping pong entre nos deux visages, avant qu'elle ne se décide à les stabiliser définitivement sur moi.
— Tu ne dirais pas ça si ça venait d'elle, chuchote-t-elle, le nez plissé.
Le bruit étouffé qui sort d'entre mes lèvres, que je ne parviens pas à retenir à l'instant où elle prononce ce sous-entendu, témoigne de la surprise qui vient de m'ébranler.
Je me reprends de justesse, le bout des oreilles fiévreux, et vois qu'Athalia, derrière l'épaule de Jenny, me lance une œillade inquisitrice.
Elle n'a pas entendu.
Rassuré, j'inspire un grand coup par le nez, et finis de me dépareiller de la salive de Jenny toujours sur ma joue avec le bout de mon index.
— Oui, on passe une bonne soirée, merci.
Adan acquiesce, mais le regard que me lance Athalia et que je sens profondément appuyé sur ma personne, me fait comprendre que ses pensées sont bien différentes des miennes.
Et pour cause, je sais que j'y suis pour quelque chose.
— Adan est l'un des gérants du bar. Du moins, nous explique Jenny qui porte sa paille à ses lèvres pour en aspirer une bonne lampée, son père est le patron, et lui l'aide souvent lors de ce genre de soirées.
Un faible hoquet lui échappe, et je sens aussitôt Athalia se crisper près de moi. Je n'ai pas le temps de pivoter dans sa direction, que je sens avant même de les voir, ses doigts qui viennent s'enrouler abruptement autour de mon avant-bras.
Elle le serre assez fort, et quand je tourne mon regard vers elle, j'aperçois les muscles de sa mâchoire se contracter légèrement. Ils tressautent sous sa peau, et j'imagine sans mal ses dents être serrées les unes contre les autres.
— Non mais... Ça va ! J'ai juste le hoquet !
Jenny appuie le dos de sa main contre ses lèvres en se fendant d'un faible sourire qui ne suffit pas à rassurer Athalia qui condense davantage sa prise autour de moi.
— Amusez-vous bien, on se voit plus tard.
Je n'attends pas la réponse de Jenny ou d'Adan, et m'empresse d'entraîner Athalia plus loin, vers le bruit des vagues, pour la faire penser à autre chose.
Et c'est au moment où nous nous éloignons, que j'entends la voix de la jeune femme souffler un faible — je crois que je vais vomir .
C'est très subtil, à peine perceptible. Je ne crois pas qu'Athalia l'ait entendue, mais ça me conforte encore plus dans mon idée de vouloir l'éloigner de tout ça.
Les planches en bois sous la plante de nos pieds grincent au fur et à mesure que nous quittons son étreinte lumineuse, pour nous enfoncer vers l'obscurité face à nous.
Seule la lune brille au milieu d'une vaste étendue couleur safre et nuageuse, qui donne un aspect cotonneux et apaisant à l'ambiance qui nous englobe.
L'odeur du sel marin nous percute de plein fouet à mesure que nous nous rapprochons du faible vrombissement des vagues qui viennent lécher le rivage, et lorsque nos semelles s'enfoncent dans le sable mou, Athalia me lâche le bras.
Je l'entends prendre de puissantes inspirations, tandis qu'elle s'éloigne vers la mer que je parviens légèrement à apercevoir grâce aux rayons argentés de l'astre céleste.
Mes pieds restent solidement plantés dans le sol, et mes iris la suivent du regard malgré les contours de sa silhouette qui sont peu à peu engloutis par les ténèbres environnantes.
Je ne préfère pas la suivre. Je sais désormais quand Athalia a besoin de temps pour elle, et je ne me risquerais pas à m'immiscer dans son intimité alors qu'elle a besoin d'être seule.
Les bruits de la soirée qui continue dans mon dos me parviennent de manière très atténuée, en vertu des mètres qui nous séparent désormais. Mais je ne m'en plains pas, au contraire. Je préfère être mille fois ici avec Athalia, que dans un endroit bondé où elle ne serait pas.
— J'arrive pas à... Merde...
Athalia pousse une plainte étouffée, avant de se laisser tomber au sol en respirant de plus en plus fort.
Mon corps réagit de lui-même et se précipite à ses côtés, brisant ainsi mes intentions précédentes dans une contradiction étonnante. Je laisse mes genoux percuter les grains de sable qui, réunis, forment un bloc uni, et lève mes mains dans l'optique de les poser sur ses épaules, avant de me stopper.
Une seconde s'écoule. Deux. Puis trois.
Elle lève son regard humide vers moi, reflet de toutes les étoiles qui gravitent autour de nous et qui tentent de s'imposer dans la toison qui serpente au-dessus de nos têtes.
Mes yeux s'enlisent aux siens dans une étreinte silencieuse dont nous seuls avons le secret. Mes lèvres s'assèchent malgré l'immensité d'eau mise à ma disposition, et je passe légèrement ma langue dessus au moment où Athalia acquiesce silencieusement.
Je ne perds pas un instant, et dans la minute qui suit, mes bras encerclent son corps, mon menton trouve refuge sur le dessus de sa tête, et mes doigts s'appuient contre la peau ferme de son dos.
Je la serre fort contre moi, jusqu'à ce que les tremblements de ses membres ne se mêlent aux miens. Jusqu'à ce que sa peur ne soit éteinte et étouffée par les mots que je lui murmure à l'oreille pour l'aider à se calmer. Jusqu'à ce que l'anxiété qui retire à ses joues toute couleur disparaisse.
Son visage trouve refuge dans mon cou, et elle laisse le bout de son nez venir frôler le grain de mon épiderme lorsqu'elle essaie de se mettre dans une position confortable.
— C'est dommage que je n'aie pas mon casque... All of me aurait été incroyable à écouter ici.
Je sens la commissure de ses lèvres s'étirer contre ma gorge tant elle est près de moi, et sans le contrôler, je resserre l'emprise de mes doigts dans son dos, comme pour me raccrocher au moment que nous sommes en train de partager.
Même si nous avons presque une position similaire à celle que nous avions cette nuit, il n'en reste pas moins que mes émotions en sont toujours autant décuplées.
Mon cœur tambourine fort dans ma cage thoracique, et je m'oblige à me concentrer sur l'odeur que portent les cheveux d'Athalia pour ne pas compter le nombre de pulsations qu'il fait à la seconde.
— Je dois dire que je suis assez d'accord.
Athalia me souffle sa réponse du bout des lèvres, et déjà, je constate qu'elle ne tremble plus. Sa respiration semble, elle aussi, s'être régulée, même si elle est toujours un peu sifflante et erratique.
— Assez ? je réplique en haussant un faux sourcil strict et inquisiteur.
— Il manque des bougies, argumente-t-elle en appuyant sa joue contre mes clavicules. Et du violon.
— Un orchestre aussi, tant que tu y es, je déclare en levant le regard vers le ciel.
— Bonne idée.
Un rire sincère sort d'entre mes lèvres quand elle dit ça d'une voix enjouée, et je rebaisse mes yeux dans sa direction, admirant son doux visage en-dessous du mien, qui baigne dans la lumière spectrale de la lune.
Elle souligne les traits les plus marqués de son visage, tandis que l'obscurité assombrit les autres, lui donnant ainsi un aspect à la fois adulte et juvénile, qui marque la beauté de son faciès, ainsi que sa délicatesse.
Je résiste à la tentation de laisser la pulpe de mes doigts courir sur sa joue pour en dessiner le contour de sa pommette, et détourne le regard vers l'océan plus loin, pour éviter de faire quelque chose que nous pourrions regretter par la suite.
Mon ventre se creuse à cette agréable réflexion, mais je la chasse en essayant de penser à autre chose.
Seulement, Athalia n'a pas l'air de cet avis-là quand elle se redresse entre mes bras, me forçant à détourner mon regard du ciel qui pétille au-dessus de nos têtes.
— Tu sais, commence-t-elle en laissant ses pupilles se mélanger aux miennes pour s'accaparer toute mon attention, bien qu'elle ne l'ait déjà.
Elle l'a depuis même un bon moment. Je crois qu'elle l'a toujours eue.
— Je ne sais pas trop comment formuler ça, mais... Grâce à toi, grâce à ta présence, ton attention, ta bienveillance envers moi, j'en oublie parfois ma maladie.
Ses mots parviennent à mes oreilles telle une mélodie divine, et je m'autorise à sourire lorsque je vois le haut de ses joues se colorer légèrement, malgré le peu de luminosité que nous possédons.
— Arrête, Alexeï.
La voix emplie de faibles reproches, Athalia plisse les yeux pour me jeter un regard accusateur. Elle me sonde comme si je venais de commettre un crime irréparable, et c'est à mon tour de froncer les sourcils.
— Quoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ?
— Tu le sais très bien, rétorque-t-elle.
Son air incriminant finit par me faire rire, et je hausse les épaules en resserrant ma prise autour de son torse.
— Pas du tout.
— Tu mens, énonce-t-elle d'une voix ferme, les paupières toujours plissées.
Je me demande comment elle arrive encore à me voir à travers ses yeux à moitié fermés. Son tempérament m'amuse, et j'approche lentement mes lèvres de son front pour y frôler sa peau avec délicatesse.
La crispation de son corps s'atténue presque aussitôt, m'apprenant qu'elle n'était pas tout à fait détendue depuis la crise qu'elle a faite il y a quelques minutes.
Prendre conscience qu'elle est un peu plus relaxée me rassure, et je reste ainsi collé contre elle, ma bouche pressée sur son front, et mon nez appuyé contre le haut de sa tête.
— Tu parles de mon sourire. C'est lui qui te déstabilise, pas vrai ?
Athalia reste silencieuse pendant plusieurs minutes, mais finit par acquiescer en me soufflant que je sais très bien ce que je fais.
Sa réplique augmente le sourire plein de fierté qui étire mes lèvres, et je remonte mes doigts à la naissance de sa nuque, à la frontière où les petits cheveux à l'arrière de sa tête viennent chatouiller le col de sa chemise.
— Bon, tu as raison. Je le fais exprès. Mais je t'en prie, continue, je ne sourirai plus pour ne pas te déconcentrer, je lui murmure en me mordillant la joue pour respecter la promesse que je viens de lui faire.
Mais c'est plutôt une tâche ardue, puisque savoir que mon sourire plaît autant à Athalia me rends plus heureux que je ne l'aurais pensé.
— Je voulais juste te dire que quand je suis avec toi, déblatère-t-elle assez vite comme si elle craignait de ne plus avoir la force de le faire ensuite, je me sens mieux. Je le sens au fond de moi. Même si je fais pas mal de rechutes, tu m'as ouvert les portes d'un nouveau monde, Alexeï. Un monde où s'y mélange un nombre incalculable de carnations, de possibilités, et non pas juste un avenir sombre que formait le mien avant que je ne te rencontre.
Sa respiration tremble contre la chair découverte de mon cou, et m'envoie un important frisson qui hérisse les poils de mes bras et me réchauffe le bas du ventre.
Je reste muet, incapable de la couper dans sa confidence vive et profonde. Ce qu'elle dit, là, me touche de façon très intense.
Elle s'ouvre une nouvelle fois à moi, là, sous les étoiles, sous le ciel nu, sous la lune qui nous baigne de sa douce présence silencieuse. Athalia se dépareille de la carapace qu'elle s'est forgée pour se livrer à moi.
— Mon émétophobie est toujours là, mais quand je suis avec toi, j'y pense bien moins qu'avant.
Je la serre davantage contre moi pour l'encourager à poursuivre, et laisse mon cœur se remplir du parfum naturel que dégage sa peau.
— Avant, quand je me levais chaque matin, il n'y avait que ça qui obscurcissait mon esprit. J'y pensais à longueur de temps. Maintenant, quand je me lève..., elle s'arrête un court instant, et nous sommes si proches que je sens l'humidité de sa langue frôler ma peau quand elle la passe sur ses lèvres pour les humidifier. Je ne pense qu'à toi, et toi seul.
Seul le léger vent frais qui caresse mon visage et le bas de mes chevilles découvertes par mon pantalon me permet de me rendre compte que je suis bel et bien toujours vivant.
J'ai cru être foudroyé lorsque l'émotion que vient de me promulguer la confession d'Athalia m'ébranle.
Mon cœur bat à tout rompre, tandis qu'un sentiment de plénitude intense m'enveloppe tout entier. J'ai l'impression de flotter. Que le temps s'est arrêté.
Je n'entends plus le bruit de la mer, celui de la fête dans notre dos, ou même la voix d'Athalia qui continue de s'exprimer. Elle semble plus faible, plus timide. Je crois qu'elle continue de se confier, mais je n'ai plus vraiment la tête à ça.
Je ne sais pas ce qu'il m'arrive.
Une chaleur nouvelle court sous ma peau, ma poitrine devient lourde, mon sourire se fait plus grand encore, et une délicieuse tension me crispe de manière exquise l'estomac.
J'entends mon pouls contre ma tempe. C'est à peine si je perçois ma propre voix quand j'interpelle Athalia, la coupant dans ce qu'elle est en train de dire.
— Athalia.
Mon souffle frémit au gré du courage qui s'empare de mon esprit. Je baisse les pupilles vers les siennes, et l'observe être intriguée quant à mon interpellation.
Je la fixe droit dans les yeux, les doigts ancrés au tissu de sa chemise, comme pour m'assurer qu'elle est belle et bien réelle.
La brise fait virevolter les délicates mèches posées sur son front, et je les dégage doucement du bout de l'un de mes index, en laissant cette fois-ci mon doigt descendre le long de sa joue.
Je me suis retenu tout à l'heure, mais l'appel de sa peau est bien trop fort désormais.
Elle tressaille sous mon toucher, et clôt légèrement ses paupières. J'ai l'impression qu'elle savoure mes gestes attentionnés. Alors, je continue.
Je fais glisser la pulpe de mon doigt le long de sa pommette, puis m'attarde sur le léger rebondissement de sa joue ronde, avant de descendre sur le dessin de sa mâchoire.
Ma main tressaute face à mes propres gestes lorsque je prends conscience que nous sommes en train de vivre un moment plus intime que tous ceux que nous avions vécus jusqu'à présent.
Je sens que nous y sommes. Que c'est le moment de lui parler de tous les non-dits que je garde depuis tout ce temps au fond de moi.
J'ai l'impression de ne plus savoir respirer lorsque je saisis, avec la plus grande des attentions, son menton entre mon pouce et mon index.
Mon geste lui fait de nouveau ouvrir les yeux, et elle se contente de chercher mon regard pour amarrer ses iris aux miens.
Hésitant, je mets quelques secondes avant de rapprocher mon visage du sien, et de laisser mon pouce venir doucement glisser sur sa lèvre inférieure.
Son souffle se coupe entre nos lèvres, et nous sommes si près l'un de l'autre que, lorsqu'un frisson la parcourt à la suite de ma caresse, je le sens glisser contre mes propres membres.
Pourtant, je continue de découvrir ses lèvres à l'aide de mon doigt, et sens le monde autour de nous et l'oxygène qui circule dans l'air disparaître au fur et à mesure que les secondes s'écoulent.
— Athalia.
Je répète son prénom, le laisse rouler sur ma langue et ricocher contre le bout de son nez qui se trouve si près du mien, que nous respirons l'air qu'expire l'autre.
Athalia peine à garder les yeux ouverts, et hoche lentement la tête, les doigts crispés sur mon propre haut, au niveau de mes clavicules.
Je crains pendant un instant d'être allé trop loin, et qu'elle cherche à me repousser, mais je comprends bien vite que c'est tout l'inverse.
Elle fait pression sur mon vêtement pour que je puisse rester contre elle, voire même que je me rapproche davantage.
— Est-ce que... Je peux t'embrasser ?
Ma demande sort d'entre mes lèvres tel un chuchotement à peine audible, et je réalise l'envergure de ma requête lorsque les yeux d'Athalia s'agrandissent sous la surprise.
Ses pupilles s'enfoncent au fond des miennes, et j'appuie une énième fois mon front contre le haut de sa tête pour réaffirmer notre étreinte.
Je ne la quitte pas des yeux, pas même lorsque je prends l'initiative de retracer les courbes de l'arête de son nez du bout du mien.
Un tremblement la traverse, sa respiration déraille contre moi, alors que son regard fait désormais des allers-retours entre mes lèvres et mes pupilles gorgées d'un sentiment nouveau.
— Oui.
Les battements de mon cœur se décuplent, et j'attends quelques instants, par peur d'avoir mal compris.
Le temps semble s'arrêter, s'étirant et se rallongeant pour nous englober dans une bulle que personne ne peut percer.
— Tu es bien sûre de...
— Je t'en supplie Alexeï.
Sa plainte percute mes lèvres lorsqu'elle la gémit presque entre l'espace ridicule qui nous sépare, et qui nous empêche de franchir la plus impétueuse de nos limites.
Ma peau se met soudain à bourdonner comme si tout un essaim voulait en sortir. Comme si elle était parcourue de centaines de décharges électriques, alors qu'une chaleur vibrante et écrasante s'empare de mon torse.
J'approche alors un peu plus ma bouche de la sienne, d'un geste volatil, nuageux, prêt à imploser quand ma chair sensible rencontrera la sienne qui semble aussi juteuse que la plus belle des framboises.
Je sens son odeur s'insinuer directement dans mes narines quand je suis tout près, et c'est si bon de sentir ses effluves floraux de façon aussi prononcée, que je pourrais me contenter de ça.
Mais mon cœur en veut plus. J'en veux plus.
Alors, lentement, je laisse tomber la dernière chaîne qui m'entrave à la réalité et saisis son visage entre mes paumes brûlantes pour venir emboîter, pour la toute première fois, nos deux paires de lèvres l'une dans l'autre.
C'est le baiser le plus doux de toute ma vie.
Ma bouche glisse sur la sienne, telle une caresse éphémère et humide, comme si Athalia était faite de la plus précieuse des porcelaines.
Je dessine le contour de ses lèvres, inspire son souffle qui devient erratique, et frôle ses joues de mes doigts, les paupières fermées.
De délicieux frissons se répandent dans mon corps, tandis que des battements similaires à ceux des ailes d'un volatile vrombissent dans mon ventre et ma cage thoracique.
Comme si une nuée de papillons voulait en sortir.
Athalia saisit davantage mon haut dans ses mains tremblantes, et aplatit sa poitrine à mon torse en entrouvrant faiblement les lèvres.
J'en profite alors pour approfondir le baiser que nous échangeons, qui a plus des airs d'une caresse remplie de tendresse. Mais malgré toute cette douceur, mon âme est ébranlée, étourdie, empoignée, comme jamais elle ne l'a été auparavant.
Puis Athalia laisse sa tête se tourner, et tomber davantage sur son épaule. Et c'est à ce moment précis que tout change.
Ce qu'elle m'offre là est bien plus profond et puissant que cet échange pur et délicat que nous venons d'avoir.
Bon sang, qu'est-ce qu'elle vient de faire avec sa langue là, au juste ?
On finit par se séparer, le souffle court, tremblant d'un millier de petites secousses frénétiques qui pulsent en rythme avec nos cœurs émotionnés.
J'ai du mal à apercevoir son regard, car nous sommes si proches que mon corps fait de l'ombre au sien.
Ma poitrine se soulève à intervalles irréguliers contre la sienne, et je raffermis ma prise sur ses joues en laissant mes doigts glisser vers ses mèches sombres. Je les enfouis à l'intérieur, et presse son front contre le mien en ayant un large sourire sur les lèvres.
Nous nous regardons comme si nous nous voyons pour la première fois. Comme si notre monde se résumait désormais à celui de l'autre.
— Depuis le temps que j'en rêvais.
Ses propres mots, chuchotés comme s'ils étaient l'un des péchés capitaux, me tirent légèrement de mon état léthargique.
Je la fixe, à la fois surpris, et à la fois heureux de l'entendre se confier ainsi. Je n'aurais jamais pensé qu'Athalia voulait à ce point la même chose que moi.
Ses pupilles sont dilatées, et elle tremble encore par moment entre mes bras qui ne peuvent se résoudre à la lâcher.
Encore un exemple qui témoigne de sa sensibilité. Sensibilité que je me ferai un plaisir de choyer, surtout en la voyant réagir aussi bien à chacun de mes gestes, aussi subtils soient-ils.
— Pourquoi on n'a pas fait ça avant, je murmure en écrasant tendrement le bout de mon nez contre le sien.
C'est à son tour de sourire quand elle me sent faire, et je ressens bientôt la chaleur de ses doigts se diffuser dans ma nuque lorsqu'elle les fait glisser contre.
— Parce que... J'avais peur.
— Peur ? je souffle, intrigué, en me redressant de quelques centimètres.
Je ne la quitte pas des yeux, tandis qu'elle hoche lentement la tête. Ses dents viennent tirailler ses lèvres en un geste nerveux, et je m'empresse de venir caresser sa joue pour la rassurer.
— Beaucoup de personnes disent qu'on ressent quelque chose de tellement fort quand on embrasse pour la première fois quelqu'un qu'on apprécie, qu'on peut en devenir malade. Alors, j'avais peur de vomir, me confie-t-elle d'une voix faible, en osant à peine me regarder.
— Hey, chaton.
D'un simple jeu à l'aide de mon majeur et de mon index, je relève son visage vers le mien, et viens déposer un tendre baiser sur la bande de peau entre ses deux yeux.
Ses mains se détendent autour des mèches à l'arrière de ma tête, et elle expire faiblement avant de replonger son regard dans le mien.
— Chacun réagit différemment. C'est vrai qu'on ressent quelque chose de très fort qui peut effrayer, mais regarde, tu vas très bien. Tu vas très bien, Athalia. Et je suis là, je lui assure dans un doux sourire. Je t'en fais la promesse, tu n'affronteras plus jamais ça seule.
Elle acquiesce timidement, et revient d'elle-même se blottir contre mon torse.
Nous sommes toujours recroquevillés l'un contre l'autre sur le sable humide de la plage, mais c'est à ce jour devenu la plus belle position à mes yeux.
Je ne me suis jamais senti aussi bien que blotti contre le corps de la personne que j'estime le plus en ce monde.
— Elle est où, à votre avis ? C'est pas elle, là-bas ? Regarde sur Twitter pour vérifier si on est au bon endroit !
Je n'ai pas besoin de les voir pour savoir de quoi il s'agit. Et le corps d'Athalia qui se crispe violemment entre mes bras m'apprend qu'elle les a entendus aussi.
Je n'aurais jamais cru que j'aurais été tiré de ce moment hors du temps que nous venions de partager avec Athalia, de cette façon-là.
— Merde, non.
Elle jure d'une voix basse, et se décolle de moi pour se redresser avec précaution.
Je me lève à sa suite et jette un regard par-dessus mon épaule en constatant qu'un groupe d'une dizaine de jeunes est prostré près de la fin de la terrasse en bois.
Ils restent dans la lumière et le contour de leur silhouette se dessine à travers les rayons lumineux de cette dernière.
Mais heureusement, plusieurs minutes sont passées depuis que nous sommes arrivés face à la mer, et quelques nuages recouvrent désormais la lune, enfonçant davantage l'endroit dans l'obscurité.
Qu'est-ce que c'est que ce bordel ? Comment savent-ils qu'Athalia se trouve ici ?
— Alexeï.
Athalia me presse en chuchotant mon prénom du bout des lèvres, et j'acquiesce vaguement sans parvenir à détacher mon regard de tous ces adolescents.
Comment peut-on venir traquer une personne à presque une heure du matin en tout état d'esprit ?
Mais je m'oblige à chasser mes interrogations quand je les entends dire qu'ils comptent venir nous voir pour nous demander si on n'aurait pas vu Saïtovna Athalia.
Je manque de rire jaune. Qu'ils essaient seulement de s'approcher, pour voir.
Athalia me saisit alors le bras, et me tire discrètement vers des escaliers enfoncés dans le mur plus loin, qui borde les pourtours de la plage.
La distance me paraît inatteignable. Du moins, nous n'arriverons pas aux escaliers sans que le groupe dans notre dos ne nous démasque. Ils semblent bien trop déterminés à venir nous voir.
— On court.
Mes iris cherchent ceux d'Athalia, et parviennent à les trouver malgré les ténèbres qui nous englobent. Elle a l'air sérieuse quand elle me dit ça, mais pendant quelques secondes, je manque sincèrement de me mettre à rire.
On ne va quand même pas se mettre à courir pour échapper à une bande d'adolescents mal élevés, si ?
Mais les cris stridents qui résonnent soudainement derrière mes épaules suffisent à me donner le carburant nécessaire qui me permet de me précipiter sur le sable fin aux côtés d'Athalia.
Je n'arrive pas à croire que je sois vraiment en train de faire ça, cette situation me semble si ridicule !
— Athalia !! Athalia !!!
Le groupe nous talonne de peu, je peux presque sentir le sable qu'ils renvoient sur mes propres chaussures tant ils sont proches.
Je veille cependant à toujours rester derrière Athalia, histoire de pouvoir assurer ses arrières.
— Athalia, hé !! Athalia !
Ils continuent de la héler comme si c'était un chien, et un léger grondement de colère m'échappe quand j'aperçois notre voiture au loin.
Je suis à deux doigts de me retourner pour leur renvoyer leur comportement malsain à la figure, mais la sécurité d'Athalia vaut bien plus qu'une seconde d'animosité.
— Grimpe !
Je lui ouvre la portière arrière sans réfléchir, et la referme précipitamment en voyant que le groupe ne s'arrête pas. Je monte de mon côté sur le siège passager en me jetant sur le moelleux du coussin, et verrouille aussitôt l'intérieur du véhicule, mon souffle tremblant ricochant dans l'air qui nous entoure.
Mon cœur bat à tout rompre, alors que les personnes de l'autre côté de la voiture se collent contre les vitres une fois arrivés à notre hauteur. Ils tambourinent contre à l'aide de leurs mains, alors qu'Athalia les regarde, terrifiée.
Elle s'enfonce dans le siège dans son dos, et détourne le regard quand les flashs des téléphones de ceux qui nous ont poursuivis s'appuient contre le vitrage pour tenter de nous filmer à l'intérieur.
— Bon sang, mais ils n'ont aucune limite ! Attache-toi chaton.
Athalia me fixe comme si elle ne me voyait pas, les mains tremblantes. Ses yeux semblent à des années-lumière de l'instant présent, mais après un moment, elle finit cependant par s'attacher sur la banquette arrière, tandis que je me tords de mon côté pour atterrir sur le siège conducteur.
Je peine à démarrer, l'adrénaline et la rancœur faisant encore pulser chacun de mes gestes.
Je les entends continuer d'hurler et de frapper les vitres, alors instinctivement, j'appuie avec force sur le klaxon avant de démarrer en trombe, une fois que je suis bien certain qu'ils se sont un peu écartés de la voiture.
Je roule sans m'arrêter, regrettant plus que tout de ne pas avoir accepté qu'un garde du corps nous accompagne, ou même Maxim.
Mais surtout, je veille bien à jeter toutes les cinq secondes des coups d'œil à Athalia dans le rétroviseur, voyant qu'elle est devenue plus pâle que précédemment.
Son état m'inquiète. Je souhaite plus que tout la ramener dans un environnement qu'elle connaît et qui la rassure, alors sans attendre, je franchis les limites, et presse un peu plus la pédale de l'accélérateur.
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