36.
☽
Jimin
« J'ai des vitamines dans mon sac, vous savez. Et il doit y avoir du jus d'orange ou du café au réfectoire. Vous voulez que j'aille vous en chercher ? »
Jennie est occupée à se faire épingler la silhouette par un styliste qui raccorde certains points de couture sur la robe qu'elle va porter lors d'une soirée qui se déroulera dans l'un des épisodes de Némésis, que nous tournons aujourd'hui.
Elle est debout en équilibre sur un plot, en plein milieu de la loge qui rassemble à la fois toutes les tenues présentes sur le tournage, diverses perruques aussi atypiques que magnifiques, ainsi que plusieurs teintes de maquillage.
Même si nous disposons de notre propre local, là où j'ai de nombreuses fois maquillé Jungkook, nous avons aussi cette salle qui est bien plus pratique lorsque nous nous occupons de plusieurs personnes à la fois.
« Non merci, je lui réponds poliment en étalant du blush sur les joues de Jungkook, dont l'aspect quelque peu terne fait écho à la courte nuit qu'on a passée. »
Ce dernier me fait les yeux ronds et fait ensuite claquer sa langue contre son palais en un signe réprobateur.
« Même si on sort ensemble, Park, on ne fait pas partie du même corps, je te ferais dire. Moi, j'en veux bien ! énonce Jungkook vers Jennie d'un ton pimpant, en me tirant la langue. »
Sa remarque fait rire la jeune femme et son corps a à peine le temps de tressauter, qu'elle se fait rapidement réprimander par le styliste qui valse autour d'elle.
Un mètre ruban entoure sa nuque et ses bras, et il tient entre ses lèvres une boule de mousse dans laquelle sont plantées une dizaine d'épingles à nourrice.
Avec son chapeau rond, ses dés à coudre au bout des doigts, et sa chemise extravagante aux couleurs écarlates, il me rappelle étrangement le chapelier dans Alice aux Pays des merveilles.
« D'accord, j'irais te chercher ça une fois que je serais libérée, déclare-t-elle en lui faisant un clin d'œil complice.
— Surtout, faites attention aux mouvements que vous allez faire, lui préconise l'homme en retravaillant l'ourlet en bas de la robe. »
Son accent italien roule sur sa langue quand il s'exprime. Jennie acquiesce sagement, tandis que je détaille avec attention le tissu qui met en avant les vallonnements harmonieux de sa silhouette.
De couleur vert pâle, décoré de turbans transparents, brodé de fils soyeux qui forment des petites fleurs au creux de sa taille et en haut de son buste, on dirait une princesse sortie tout droit d'un conte de fée.
Ses cheveux détachés et retravaillés par l'un de nos coiffeurs, forment une couronne de tresse sur le dessus de sa tête. Des barrettes en forme de papillons sont accrochées à ses mèches torsadées, et rendent le tout plus délicat, printanier.
Ses manches longues, créées dans une soie fine et élégante, rappellent les températures fraîches de Moscou, et rajoutent un petit plus qui complète avec grâce la toison aux tons vert lichen.
« Je ne savais pas que tu te mariais aujourd'hui, la charrie Jungkook, toujours assis près de moi. »
Son sourire détourne mon attention de Jennie. Je me perds sur la contemplation de sa bouche qui s'étire juste sous mes yeux, et reprend mon travail en me retenant de l'embrasser.
C'est une tâche très compliquée. On ne dirait pas comme ça, mais à ce stade, ça relève même de la torture la plus élaborée.
Non, je n'exagère pas. Ou peut-être un peu.
Et puis, ce n'est pas comme si nous n'avions pas passé la matinée à nous embrasser. Mais c'est plus fort que moi. Que nous.
Jungkook est un aimant auquel je ne cesse de m'accrocher. Mais j'ai aussi l'impression que dès l'instant où il m'a conté la totalité de son passé, quelque chose en lui s'est évaporé.
Il est plus léger, plus souriant, plus réactif à mes caresses, mes mots, mes gestes, même s'il l'était déjà avant. Mais cette fois, c'est décuplé.
Jungkook est heureux. Et ça ressent à travers son être entier.
Lorsque j'applique de l'highlighter sur le haut de ses pommettes, je sens ses doigts venir frôler mes hanches.
C'est délicat, volatile. Une caresse fragile.
Il continue de discuter avec Jennie, sans mesurer la tempérance de son geste. S'il savait que je me faisais violence pour éviter de fondre sur sa bouche pour le priver de toute particule d'oxygène, je ne sais pas s'il jouerait autant avec le feu qu'en cet instant.
Enfin si, je le sais.
Jungkook peut se montrer aussi joueur et déterminé que moi quand il veut.
« Ne fais pas ça. »
Ses mots sortent d'entre mes lèvres pincées avec plus de virulence que je ne l'aurais souhaité. Je me suis exprimé dans un souffle, pourtant, j'ai l'impression d'avoir parlé à voix haute tant mon esprit bourdonne d'envie.
Jennie continue de nous détailler le menu du réfectoire, et je me demande bien d'ailleurs comment elle l'a aussi bien retenu.
Mais ce questionnement passe au second plan quand Jungkook tourne son regard vers moi, et que son sourire s'élargit avec une pointe de malice.
« Ne pas faire quoi ? répète-t-il sur le même ton réprobateur que je viens d'employer.
— Ne m'imite pas. Et ne me provoque pas, avec tes mains.
— Je te provoque avec mes mains ? renchérit-il d'une voix innocente, en me faisant les yeux doux. »
Bon sang.
« Jungkook, je l'avertis d'un ton dur, peu crédible, qui semble prêt à se briser sous la secousse de n'importe quelle caresse.
— Jimin. »
Il soutient mon regard, les yeux plus perçants et pénétrants que ceux d'un félin.
C'est fou comme se confier sur certaines choses peut être très, très, libérateur.
« Jennie ? »
La jeune femme se joint à nous d'un ton curieux, et je laisse échapper un éclat de rire en secouant la tête.
Jungkook, amusé, ne tarde pas à me rejoindre, et observe Jennie quand celle-ci descend de sa mini estrade avec l'aide du styliste.
« Désolée, c'était plus fort que moi, annonce-t-elle dans un sourire en regardant, avec une attention et un émerveillement non dissimulés, la robe qui coule le long de son corps. J'ai hâte de tourner cet épisode. »
Elle tournoie légèrement sur elle-même, le sourire aux lèvres, les cheveux dans le vent. Avec leur nouvelle couleur ébène, ils se marient à merveille avec la teinte pâle de la robe.
« Et toi ? Tu vas porter quoi pour ce ''bal'' ? j'interroge Jungkook en essayant de me dérober à son toucher. »
Sa bouche se retrousse, enjouée. Malgré tout, il consent à être raisonnable, et laisse tomber ses mains le long de mes cuisses, prenant le temps de les frôler malgré le tissu de mon jean.
Son geste m'arrache des frissons impulsifs, et avant qu'il ne descende trop bas, il redevient sérieux, et dépose ses paumes à plat sur les siennes, l'air de rien.
Il affiche une expression sage et chaste sur ses traits, mais le scintillement mutin qui peuple ses iris me laisse assez bien entrevoir le fond de sa pensée.
« Tu verras d'ici quelques minutes. C'est une surprise, me dit-il en fermant un œil quand j'y passe la peau rebondie de mon index pour lui appliquer un fard à paupières nude.
— Hm. »
Je hoche la tête, concentré. Du moins, j'essaie.
Mes doigts frôlent les joues de Jungkook, et le voir clore les yeux sous mon geste me procure un frémissement de bien-être. J'aime voir son corps réagir, même à la plus infime de mes caresses.
J'aime voir l'effet que je lui fais.
Nous continuons cette séance maquillage en discutant du programme de la journée autour de plusieurs verres de jus d'orange. J'ai finalement changé d'avis. Et je dois bien avouer qu'en plus d'être très rafraîchissante, cette boisson fait du bien au moral.
Une fois Jungkook fin prêt, il se lève pour s'approcher du portique où sont disposés tous les costumes utilisés dans la série pour les grandes occasions.
Il en tire une imposante housse noire, opaque, qu'il tient à bout de bras. Je l'observe faire, curieux, malgré mes mains qui rangent certaines de mes affaires dans ma trousse à maquillage.
Jennie est occupée de son côté à vider le fond de la bouteille de jus entamée, et Marco... À moins que ça ne soit Manetto ? Marolo ?
Je fronce les sourcils, perplexe d'avoir oublié son prénom aussi vite. Il me semblait pourtant qu'il avait une appellation similaire au nom d'un alcool.
« Si vous avez besoin d'aide, fait d'ailleurs ce dernier en pointant Jungkook qui disparaît derrière un imposant paravent avec sa housse plus grande que lui, n'hésitez pas. »
Une seconde s'écoule.
Puis une deuxième. Une troisième.
Jungkook réapparaît derrière le paravent immaculé. Sa tête dépasse sur le côté, tandis qu'il semble sincèrement considérer la proposition qu'on vient de lui faire. Même de là où je me trouve, je peux apercevoir le cheminement de ses pensées qui naviguent dans ses yeux.
« Je... »
Il hésite. Ses dents viennent tirailler discrètement ses lèvres. Personne ne peut vraiment le voir, mais moi, j'y parviens.
Non pas parce que je suis plus près de lui, mais parce que mordre ses lèvres est un geste que je rêve de faire depuis que nous sommes entrés au studio.
Ok, on se reprend. Où est-ce que j'ai mis la palette de fard à paupières ?
Je me distrais autrement, et attrape la palette en question posée en équilibre sur le coin de l'une des commodes où sont disposés de grands miroirs entourés de leds blanches.
« Oui, c'est d'accord. »
Je me fige, les doigts en suspens. Lentement, mes iris pivotent vers ceux de Jungkook. Même si je ne la vois pas parfaitement, je sais que Jennie, plus loin derrière moi, vient d'avoir une réaction similaire à la mienne.
Un sentiment de fierté indescriptible s'empare de moi, et j'espère que Jungkook le voit, qu'il le sait, lorsqu'il noie ses yeux dans les miens.
Il esquisse un léger sourire entendu, avant de re-disparaître derrière les pans du paravent.
Ce fut bref, rapide, mais notre échange a suffi. Il sait ainsi que je suis fier de ce qu'il vient de faire.
Jennie me lance un petit coup d'œil pour vérifier qu'on pense bien la même chose, et quand j'acquiesce, elle sourit.
Je souris aussi, et même le styliste laisse apparaître une imposante esquisse sur le bas de son visage quand Jungkook lui demande poliment de venir l'aider.
« Mama ! Ti sta bene !* s'écrie-t-il dans sa langue natale lorsqu'il passe derrière ce qui m'empêche d'apercevoir Jungkook. » (*Ça vous va à ravir !)
Ils restent un long moment tous les deux derrière à converser gaiement, si bien que je finis par m'asseoir sur un tabouret face à l'un des miroirs.
Jennie me demande une ou deux fois si je peux retoucher certaines choses sur son visage, ce à quoi je réponds positivement. Ça me permet ainsi de m'occuper en attendant de voir ce que Jungkook nous réserve.
Mais quand il sort enfin du couvert immaculé du panneau derrière lequel il se change, je me félicite de ne pas être en train, sur le moment, de retoucher le visage de Jennie.
J'aurais bien failli lui crever un œil si ça avait été le cas.
Jungkook est beau. Non. Magnifique, attrayant, sublime, gracieux. Sexy, aussi. Et il existe encore tant d'adjectifs que j'aimerais lui attribuer.
Je me force pourtant à cligner des yeux, à reprendre une inspiration pour m'ancrer de nouveau à la réalité. Mes billes claires parcourent sa silhouette épurée.
Il porte un gilet de costume noir, sans manches, décoré par un alignement parfait en son centre de six boutons dorés qui reflètent l'éclat des néons au-dessus de nos têtes. Une chemise blanche est présente sous son gilet, et permet aux deux couleurs de se mélanger à la perfection pour créer un contraste saisissant.
Une montre à gousset est rangée dans l'une de ses poches, laissant la chaîne dorée scintiller discrètement sur le tissu du gilet. Son pantalon est fait de la même étoffe, et un harnais chevauche également ses épaules. Les boucles des sangles métalliques ressortent, elles aussi, sous la lumière.
Il est à couper le souffle.
Réellement.
Il me faut bien deux minutes pour comprendre que ma respiration s'est coupée dans ma gorge à l'instant même où il est apparu. J'entends d'ailleurs Jennie rire de la situation.
Mais sa voix passe rapidement au second plan quand Jungkook se rapproche peu à peu de moi. J'aurais presque envie de partir en courant, trop inquiet à l'idée de le toucher et de le fissurer.
Ses cheveux sombres sont plaqués en arrière, et forment une rivière ébène qui coule le long de sa tête, pour aller s'échouer dans sa nuque. Son regard profond est dégagé, et ses yeux ont l'air ainsi plus pénétrants, embrasés, fermes.
Il n'a même pas besoin de la fausse cigarette qu'il tient entre ses doigts pour ressembler au mafieux dont tout le monde semble fou amoureux sur les écrans.
Il est captivant.
« Quelqu'un peut apporter un masque à oxygène à Jimin ? demande-t-il innocemment, en venant se poster face à moi. Je crois qu'il va bientôt s'évanouir.
— Oh, mais toi. »
Il me sourit d'un amusement non dissimulé, et il ne m'en faut pas plus. Ça fait plus d'une heure que j'en rêve, je ne peux pas résister davantage.
Mes mains viennent percuter ses joues, en douceur, et ce sont bientôt nos deux paires de lèvres qui se mouvent l'une contre l'autre.
Je me moque que Jennie et le styliste, dont je ne me rappelle plus du prénom, nous observent dans un coin de la pièce. Je me moque de l'endroit où nous nous trouvons.
Il n'y a que la pression du torse de Jungkook contre le mien qui compte. Que le goût de ses lèvres qui se mélange au mien, et nos nez qui ne cessent de se frotter l'un à l'autre quand nous changeons nos têtes de position.
Ses dents viennent, à un moment, tirailler ma bouche de manière délicieuse, et je refoule violemment le gémissement qui monte dans ma gorge en posant fermement mes mains sur ses hanches pour le stopper.
Il soupire, marmonne faiblement quelque chose d'inaudible, avant de se séparer de moi, le souffle tremblant.
Les yeux humides d'un désir qu'on ne cesse de refouler, je l'observe réajuster son gilet que j'ai froissé en le serrant entre mes paumes, et me passe une main nerveuse dans les cheveux en toussotant.
Jennie fait mine de regarder sa robe dans le miroir, tandis que le styliste organise ses aiguilles par couleur sur son support en mousse.
« Ça va, vous n'avez jamais vu deux personnes s'embrasser ? je tente d'une voix amusée, en sentant mon cœur tambouriner toujours aussi fort dans mes oreilles.
— Sì sì ! »
L'italien rit en me lançant un regard entendu, avant de rassembler ses affaires pour les déposer dans un coin de la pièce.
Jungkook le suit du regard, et relève ensuite la tête vers l'horloge accrochée au-dessus de la porte en acquiesçant pour lui-même.
« On devrait y aller si on ne veut pas que Sayn nous tue. »
Jennie sourit en attrapant le textile soyeux de sa robe pour la relever à l'avant, et marcher sans s'entraver dedans. Ainsi, elle a vraiment l'air d'une mariée qui serait en train de se diriger vers l'autel.
Je jette un regard en biais à Jungkook, attiré par sa langue qui humidifie ses lèvres, et quand nos pupilles se croisent, je détourne rapidement la tête pour faire mine de rien en sortant de la salle.
Il rit dans mon dos, et m'emboîte le pas pour que nous puissions regagner ensemble le plateau principal.
Jennie et le styliste marchent devant nous, et à l'abri de leurs regards, j'en profite pour laisser ma main frôler furtivement celle de Jungkook.
Pendus le long de nos cuisses, nos doigts se taquinent en de diverses caresses volatiles. Mon pouce tente de s'accrocher de temps à autre à la peau fine du dos de sa main, mais il fait exprès de se dérober au dernier moment pour que je rencontre le vide.
Je le vois sourire en coin au bout de la troisième fois, et viens lui pincer gentiment la cuisse en levant les yeux au ciel.
Mais il m'arrête dans mon geste de lui-même, bougeant sa main en quelques secondes pour qu'elle vienne entièrement s'enrouler autour de mon pouce, et m'empêcher tout mouvement.
Je baisse les yeux sur cet étrange méli-mélo que forment nos doigts, et laisse mes lèvres s'étirer bêtement.
« T'as vraiment cinq ans, je souffle à Jungkook quand la largeur du plafond du plateau central du studio se dévoile au-dessus de nos têtes.
— Tu peux parler, toi. »
Un léger gloussement m'échappe au moment où nous rejoignons Sayn qui se tient debout, au milieu de la pièce, sur une chaise en plastique.
Malgré son corps assez frêle, le siège de la chaise semble se tordre un peu sous son poids à cause du fin matériau dans lequel il a été construit.
Isaac, l'agent de Jungkook, se tient non loin de là, toujours dans son costume très propre, très sérieux, les bras croisés sur sa poitrine, et une Rolex autour du poignet.
« Tu crois qu'il met un pyjama le soir pour dormir, ou il dort même en costume pour être prêt pour le lendemain ? je demande à Jungkook d'une voix faible, nos doigts toujours entremêlés près de nos cuisses.
— Très bonne question, je me suis toujours juré de le découvrir avant de mourir. »
On échange des sourires complices, tandis que Sayn mordille entre ses dents le bout d'un crayon à papier qu'il fait rouler entre son pouce et son index.
Il a les yeux figés sur la feuille qu'il tient à hauteur de son nez, et les plis qui creusent sa peau entre ses yeux indiquent qu'il est soucieux quant à ce qu'il a face à lui.
« Tu m'as bien dit que Jungkook n'avait rien de prévu à cette date, n'est-ce pas ? s'enquiert-il auprès d'Isaac. »
Ce dernier laisse ses joues se gonfler suite au soupir monumental qu'il essaie de refouler, et garde son visage fermé lorsqu'il répond à Sayn d'un ton où pointe un certain agacement.
« Pour la sixième fois, no-
— D'accord. Et Jennie, Mickael, May, et Emeric non plus ? »
Je contiens tant bien que mal le rire qui me chatouille la gorge quand j'aperçois l'expression d'Isaac.
Il a l'air blasé, mais à la fois agacé et las. C'est un étrange mélange. Comme s'il était à deux doigts de tourner les talons pour rentrer chez lui, et qu'en même temps, il aurait aimé secouer Sayn comme un prunier.
C'est très étrange de le voir ainsi, lui qui est d'habitude si droit, sérieux, conventionné, rigoureux.
« J'ai vu avec les agents de ceux que tu as cités, prononce lentement Isaac en resserrant ses bras sur son buste. »
Ses muscles se contractent sous le tissu de sa chemise. Il prend son temps pour s'exprimer, et captive ainsi toute l'attention de Sayn qui finit par lâcher sa feuille du regard.
« Ils sont tous libres, oui. Mais Jungkook ne pourra pas rester longtemps là-bas, il a des shootings de prévu. Harper's Bazaar veut le voir pour qu'il puisse faire la une de l'un de leur magazine.
— Ça ne durera qu'un jour ou deux, tout au plus. C'est Warner Bros qui organise ça, je ne peux pas refuser, indique Sayn en gribouillant plusieurs choses sur son morceau de papier. »
Il se remet ensuite bien droit, et cale sa feuille sous son aisselle en glissant son crayon à papier sur son oreille pour libérer ses mains.
« Bien, s'il vous plaît ! »
Il tape ses paumes l'une contre l'autre pour attirer l'attention de ceux présents sur le plateau qui sont en train de finir d'agencer les décors.
D'autres arrangent au dernier moment les mèches de quelques acteurs et actrices, si bien qu'une jeune femme, en tenue de cascadeuse, entre dans mon champ de vision avec une coiffeuse dans son dos qui termine de lui faire ses tresses.
« Dans deux jours, une convention pour la série est organisée à New-York, clame Sayn, même si plusieurs personnes se joignent à notre groupe en cours de route. Cette convention s'étale sur un week-end, et va se dérouler comme celle que nous avons faite l'année dernière, lors de la promotion de la saison une. »
Jungkook hoche positivement la tête près de moi, nos doigts toujours noués les uns aux autres.
« Il n'y a rien de particulier à dire là-dessus. Les acteurs et actrices qui y assisteront s'exprimeront sur scène devant les fans, qui eux leur poseront des questions. Ensuite, il y aura des séances photos pour ceux qui ont acheté le pass VIP. Vous avez des questions ? »
Quelqu'un à l'avant demande s'ils auront le temps sur les deux jours de visiter un peu New-York, ce à quoi le réalisateur répond négativement.
« Non, le timing va être très serré. Après, vous gérez vos temps de pause comme vous le souhaitez, mais avec le jet lag et la convention en elle-même, je vous conseille de garder votre énergie, conclut Sayn en servant un sourire allégé à la petite assemblée à ses pieds. »
Des têtes acquiescent, des chuchotements s'élèvent, les gens commencent à bouger, excités par la perspective de ce petit voyage, même si beaucoup n'y seront pas conviés.
Elle rassemble un nombre restreint de personnes, et la plupart du temps, seulement les acteurs principaux d'une série ou d'un film.
Sayn de son côté, esquisse un mouvement pour descendre de sa chaise, pensant que la discussion est close. Mais avant que nous ne puissions entamer la journée de tournage, une voix intriguée, et à la fois remplie de reproches, s'élève du fond du brouhaha.
« Ce sont toujours les mêmes qui vont à la convention ? »
Sayn, dont la mine perplexe trahit son incrédulité, essaie d'apercevoir la personne qui vient de parler, maintenant qu'il est à hauteur de tout le monde.
Finalement, ses yeux se posent en même temps que les miens sur un jeune homme dans le fond de la pièce, que j'ai déjà aperçu en tant que figurant sur le plateau.
« Hé bien, non. Cette fois-ci, il y a May et Emeric en plus. On ne peut pas faire venir tout le monde, argue Sayn en laissant ses lèvres s'étirer. Les fois dernières, il n'y avait que les trois personnages principaux, mais petit à petit, le cercle s'agrandit au fil des épisodes, même si ça reste assez limité.
— C'est bien ça le problème, contre le garçon en roulant des épaules dans la foule pour s'avancer. Jungkook, Jennie et Mickael ne portent pas le succès de la série à eux seuls sur leurs épaules ! Nous aussi, on la fait vivre.
— Excuse-moi, mais tu es ? »
Mon ton est assez cinglant, je dois bien le reconnaître. De même que ma posture.
J'ai lâché les doigts de Jungkook pour me tourner vers le jeune homme, les mains au fond des poches de mon jean, les sourcils haussés d'une nonchalance non feinte.
Jungkook me lance un regard surpris suite à ma prise de parole soudaine. Je le sens s'appuyer sur mon bras et réchauffer la chair abritée sous mes vêtements.
Mais je l'ignore, concentré sur l'homme plus loin qui plisse les yeux face à moi, avant de redresser les épaules et de bomber le torse pour se donner un petit air.
Mais un air de quoi ? Il me rappelle l'influenceuse de l'after le soir où j'ai rencontré Jungkook. Il fait 1m60 les bras levés, mais se permet de relever le menton lorsqu'il s'adresse à moi comme si je n'étais qu'un vulgaire déchet.
C'est d'un ridicule étourdissant.
J'en rirais bien si l'ambiance de la salle n'était pas devenue aussi sérieuse et tendue.
« Je suis figurant, moi. Je ne passe pas mon temps dans les coulisses, je participe à la vie de la série ! Donc j'ai le droit de...
— Oui donc en fait, tu sers juste de visse à l'édifice, j'acquiesce pour moi-même en pinçant les lèvres. Tu es remplaçable. Si tu n'étais plus là, ça ne changerait strictement rien au reste. Ta présence n'est pas fondamentale. Elle est même, pour ainsi dire, insignifiante.
— Jim. »
Le ton qu'emploie Jungkook pour me signifier que j'ai dépassé les bornes ne suffit pas à me faire prendre conscience que je devrais cesser toute discussion avec ce genre de personne.
Je ne sais pas pourquoi je m'emporte autant, et surtout en si peu de temps. Enfin, si, pour être honnête, je crois qu'au fond, je le sais.
Malgré certaines de mes suppositions déjà faites sur les récents évènements, je ne peux pas m'empêcher de penser que ce garçon est peut-être celui qui, depuis plusieurs mois, ne cesse de balancer des photos et des informations personnelles de Jungkook sur les réseaux sociaux.
Je sais bien que ce genre de comportement est assez récurrent malheureusement quand on est célèbre, car si des personnes de notre entourage ne s'en chargent pas, la presse le fait très bien toute seule.
Mais j'ai cependant remarqué que toutes ces choses que Jungkook subit constamment, viennent surtout du même compte anonyme sur Twitter.
Et si c'était ce garçon ? Il aurait le mobile pour agir ; il ne semble pas aimer Jungkook. Il a même l'air de détester le fait que lui et les autres soient autant mis en avant. Tout sur son visage transpire la haine et le dégoût. Il a l'air fatigué de vivre dans l'ombre des autres.
« Je sais que je suis figurant. Je pense que je n'ai pas besoin qu'on me le rappelle. J'aimerais simplement pouvoir moi aussi me rendre à ce genre d'événements. »
Sa voix se tarit. Je ne sais pas si c'est à cause de ce que je dégage, et des paroles que je viens de lui énoncer, ou si c'est parce que les agents de sécurité de Jungkook se sont rapprochés dans notre dos.
Ils sont si discrets, que j'en viens souvent à les oublier, alors qu'ils sont quasiment en permanence avec nous.
« Bon, ne t'en fais pas, finit par acquiescer Sayn en venant poser une main réconfortante sur l'épaule du garçon toujours tourné en ma direction. Si tu souhaites venir, je m'arrangerai. Mais prends bien en compte que tu seras dans les coulisses pour suivre la convention. Je ne peux pas te mettre sur la scène avec les autr...
— Oh merci ! Oui oui, je le sais ! »
Habité d'une joie soudaine qu'il ne peut refouler, le jeune garçon serre la main que Sayn ne lui tendait pas, et la secoue de haut en bas, un immense sourire sur les lèvres.
Il a l'air d'avoir complètement oublié notre altercation, alors que mes yeux sont toujours plissés suite aux troubles qui s'épaississent dans mon esprit.
Car si ce n'est pas lui l'auteur de tous ces méfaits concernant Jungkook, c'est peut-être la deuxième hypothèse que je m'étais faite. À savoir...
« Allez, arrête ça. On dirait une vieille prune avec ton front tout plissé. »
Jungkook se colle contre moi, un bras autour de mes hanches, la main sur mon ventre. Il le caresse en des mouvements peu précis, jusqu'à ce que je cligne des yeux pour tourner mon regard vers le sien.
« C'est juste... Tu devrais faire attention à ceux qui t'entourent. »
Il lève un peu les yeux au ciel, comme si j'exagérais, et je comprends que pour aujourd'hui, cette conversation n'ira pas plus loin. Jungkook est bien trop pris dans les maillons du bonheur que lui procure le voyage à venir.
Alors je décide de lâcherprise aussi, et en oublie mes pensées, mes doutes, ma méfiance, mais aussi mes maigres affirmations, aussi futiles soient-elles.
« Tu sais ce qu'elle te dit la prune ridée ? j'argue en haussant un sourcil. »
Il rit près de mon oreille, son souffle s'échoue dans mon cou. J'achève de me tourner entièrement vers lui, et lie nos doigts ensemble entre l'espace qui nous sépare.
Son sourire est si lumineux qu'il pourrait éclairer une ville entière.
« On va à New-York, Jimin ! New-York ! Toi et moi ! s'écrie-t-il, le regard pétillant. »
Sa bonne humeur est contagieuse. Je sens la commissure de mes lèvres s'étirer elle aussi, au moment où la forme rebondie de ma bouche vient s'unir au bout de son nez.
« Oui chaton. New-York. »
Mais malgré les éclats de joie de Jungkook qui se joignent aux miens, je ne peux éradiquer les idées qui me traversent, nées de l'amertume qui entachent mes pensées.
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Hiiiiiii j'ai hâte des prochains chapitres ! J'espère que vous allez bien, j'ai l'impression que ça fait une éternité ! Je suis méga occupée en ce moment alors encore une fois, je m'excuse pour mon inactivité :(
Et ne me dites pas que ce n'est pas grave, je veux quand même m'excuser !
Je vous aime fooort prenez soin de vous mes trésors, c'est important !
- Vee
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