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Jungkook

Mes ongles sont tant enfoncés dans mes paumes à cause du stress qui alourdit mes mouvements, qu'ils laissent des traces sur ma peau lorsque je tente de desserrer mes doigts pour les détendre.

Ma gorge, elle, de son côté, est tellement sèche, que je n'ose pas parler, par peur qu'un croassement ne s'en échappe à la place de la tonalité de ma voix.

« C'est impensable ! Vous ne pouvez pas le laisser traverser l'aéroport avec seulement deux gardes du corps ! s'époumone Ivan au téléphone depuis une bonne dizaine de minutes maintenant, tandis que nous sommes assis avec Jimin à l'arrière de la voiture.

— Trois, le corrige d'ailleurs ce dernier en fixant d'un œil mauvais les murs grisâtres du parking sous-terrain, comme s'il s'apprêtait à voir surgir à n'importe quel moment certains de mes fans. »

Sa remarque me fait sourire, et même Ivan installé derrière le volant, interrompt un moment son monologue pour laisser transparaître son amusement.

« C'est très gentil Jimin, mais tu es mon maquilleur, pas mon garde du corps. Tu n'as pas été entraîné pour ce genre de chose, je déclare en me retenant de rire face à son air déterminé, malgré la lourde boule d'anxiété qui encombre mon ventre.

— Ah oui ? réplique-t-il simplement. C'est ce qu'on va voir. »

Il se craque les doigts pour accompagner ses propos, tandis qu'en arrière-fond, Ivan continue de se battre avec l'une des sociétés de mon agence qui prend en charge ma sécurité.

« Vous plaisantez ?! Avez-vous seulement vu l'attroupement dans le hall de l'aéroport ? »

La discussion n'a pas l'air de se finaliser comme nous l'espérons, et cela fait encore plus monter en moi la jauge de stress que je parvenais jusque-là à maîtriser.

J'essaie déjà de ne pas penser, avec difficulté, au fait que je ne sais pas où se trouvent les toilettes, et savoir que des centaines de mes fans m'attendent au-dessus de nos têtes ne m'aide pas à être totalement apaisé.

« Sans déconner, ils sont payés une blinde pour assurer ta sécurité ! Ils sont obligés de t'envoyer d'autres gardes du corps, s'agace Jimin en grognant. »

Je hoche vaguement la tête, concentré sur plusieurs choses à la fois, et triture les coutures de mon cargo en sentant mon souffle s'emballer de plus en plus quand je comprends, au travers du ton que prend soudain Ivan, que personne d'autre ne viendra.

« Vot on kozel !* »
(Quel connard ! en russe)

Il raccroche brusquement, et balance son téléphone sur le siège passager en me lançant ensuite un regard désolé via le rétroviseur, malgré la ride de colère qui lui barre le front.

« Je suis désolé Jungkook, je...

— Ce n'est pas de ta faute, Ivan. Tu as fait tout ton possible pour m'aider, et je t'en suis reconnaissant. »

Je lui souris malgré mes lèvres pincées, et attrape ensuite de quoi me couvrir les cheveux, les yeux, et le bas du visage en enfilant un masque en tissu, qui sert principalement pour la pollution.

Ce n'est pas la première fois que je dois subir ce genre de situation. Je déteste ça, mais je parviendrai à y faire face. Et puis en cas de problème, Jimin et Ivan ne seront pas très loin derrière moi.

« Isaac ne peut rien faire ? me questionne Jimin, en attrapant son manteau qu'il avait déposé à côté de lui, après être monté dans la voiture. »

Il l'enfile avec précaution, tandis que je secoue la tête et fais glisser la fermeture Éclair de ma doudoune jusqu'en haut.

« Non, il est déjà dans l'avion avec le reste de la production. On est les derniers, je lui indique en lui lançant un regard mi-amusé, mi-empli de reproches. Mais ce n'est pas étonnant puisque c'est ce qui se passe quand on se réveille en retard, hein Jimin ? »

Il fait la sourde oreille en tournant son regard vers le paysage terne du parking de l'autre côté de la vitre, avant de me bousculer gentiment quand je lui enfonce mes doigts dans les côtes pour attirer son attention.

« Ton matelas est trop confortable aussi, proteste-t-il en chassant les attaques répétées de mes mains envers sa personne. »

Nous finissons par rire après un moment face au ridicule de la situation, puis j'acquiesce en concédant qu'il a raison.

Au lieu de seulement passer son vendredi soir chez moi, Jimin est finalement resté tout le week-end, et même si nous ne partageons pas la même chambre, les matelas sont les mêmes pour toutes les pièces à coucher que je possède. Il doit y en avoir sept au total.

Sans compter l'immense cuisine, le salon, la piscine intérieure et le jacuzzi, la salle de sport, les cinq salles de bain, le dressing, le jardin, et les balcons qui habillent le reste de la demeure.

Quelquefois, en parler me rend mal à l'aise puisque je sais que beaucoup n'ont pas la chance de posséder ce genre de maison, ni d'avoir de maison tout court.

Voilà pourquoi je fais souvent des dons pour aider ceux qui sont démunis et qui sont dans le besoin. Je trouve ça important, de lutter contre la précarité.

« Nous sommes prêts. »

Le talkie-walkie que possède Ivan grésille quand il nous retranscrit les paroles de mon garde du corps, qui s'adresse à nous de l'autre côté du combiné.

Avec Gill, mon second agent de sécurité, ils se trouvent tous deux à la sortie en haut des escaliers du parking souterrain, prêts à nous escorter dans le hall de l'aéroport pour atteindre notre porte d'embarquement.

Ivan leur indique que nous arrivons d'ici quelques minutes, puis tel un seul homme, nous quittons la tranquillité et la sécurité de la voiture avec Jimin.

Il sort le premier, et me tient la porte pour que je le rejoigne, le regard plus adouci que lorsqu'il voulait s'en prendre à l'agence qui s'occupe de ma sécurité.

Je le remercie et me lève de mon siège en humidifiant mes lèvres d'un geste lent.

J'ai l'impression de me déplacer au ralenti lorsque j'époussette machinalement mon pantalon, plus stressé que jamais après avoir accepté qu'hormis mes deux gardes du corps habituels, personne d'autre ne se présentera.

Le souffle enraillé, je peine à déglutir et fourre mes mains tremblantes au fond des poches de mon manteau. Je tiraille entre mes doigts les fils des coutures qui se trouvent à l'intérieur, au moment où je viens me mettre près de Jimin.

Il laisse son regard traîner sur moi, puis il me demande si ça va d'un ton plus faible, pendant qu'Ivan sort lui aussi du véhicule en arrangeant les pans de son manteau qui lui descendent aux genoux.

« Je... »

Avant de dire à voix haute ce qui me tracasse depuis que nous nous sommes garés sur le parking de l'aéroport, je prends soudain conscience que désormais, je suis plus enclin à m'ouvrir à Jimin.

Je n'ai plus envie de me cacher derrière des hésitations, et de fausses excuses pour camoufler mon réel mal-être.

Ça m'épuise plus que mon émétophobie en elle-même, parfois. J'ai envie qu'il sache.

Peut-être pas tout, pas encore, mais au moins certaines choses pour que je n'ai plus à endurer ça tout seul.

« Je ne sais pas où sont les toilettes, je murmure du bout des lèvres après quelques secondes. Ça m'angoisse. »

Je me mordille l'intérieur de la joue, inquiet qu'il puisse rire de la futilité de la situation, même si je sais que ce n'est pas son genre.

Mais on ne sait jamais. Beaucoup de personnes n'agissent pas comme nous pensions qu'elles le feraient. Et d'un autre côté, nous ne pouvons ni les blâmer, ni être en colère parce qu'elles n'adoptent pas les comportements que nous aurions aimé qu'elles aient.

Si nous sommes déçus la plupart du temps, c'est seulement parce que nos attentes à nous sont trop élevées. Parce que nous plaçons de l'espoir, des convictions, de l'optimisme, dans des individus qui ne le méritent pas.

Mais contre toute attente, Jimin hoche simplement la tête dans ma direction, et me couvre d'un regard empli de compréhension.

« Je vais les chercher, reste ici, d'accord ? Ça ira ? »

Il pose ses yeux, recouverts légèrement par ses mèches qui adoucissent son regard, sur moi, et sourit en me caressant le dessus de la tête avec sa main.

Mon corps ne se crispe plus à chacun de ses contacts, habitué à sa présence et à sa bienveillance, et c'est à mon tour d'acquiescer, mes iris sombrant, nus, dans les siens.

« Parfait. Je fais au plus vite. »

Lorsqu'il s'éloigne en indiquant à Ivan de veiller sur moi en son absence, je laisse un léger sourire fleurir sur mes lèvres. Une délicate chaleur éclos dans mon ventre, telle la naissance d'un bourgeon sous les rayons printaniers du soleil.

J'inspire lentement pour tenter de calmer les battements frénétiques de mon cœur, et tourne le regard vers Ivan quand celui-ci se rapproche de moi.

Il fixe le mur derrière lequel Jimin vient de disparaître, et automatiquement, je laisse mon attention s'y porter aussi, comme si ça pouvait le faire revenir.

« Il est bien ce garçon, déclare mon chauffeur après quelques secondes, en me lançant un petit coup d'œil. »

Ces mots me sortent de ma contemplation, et je lui rends son regard en m'appuyant contre la carrosserie de la voiture.

Je croise les bras sur mon torse et hausse ensuite les épaules, avant de sentir le haut de mes joues chauffer quand j'aperçois le sourire malicieux qu'il me renvoie.

« Il fait bien son travail, je réponds d'une voix candide, en baissant les yeux vers mes chaussures pour faire mine de ne pas comprendre de quoi il parle.

— Il en fait même plus que ce qu'il ne devrait, persiste Ivan sans me lâcher du regard. Rares sont ceux qui se préoccupent autant des gens avec qui ils travaillent. Et qui prennent autant soin d'eux. »

Je hoche vaguement la tête en regardant ailleurs, ne sachant pas quoi répondre sans trahir mes propres pensées.

C'est ça l'inconvénient de toujours travailler avec les mêmes personnes. C'est que vient un moment où ils nous connaissent si bien, qu'on ne peut plus rien leur cacher.

Mais comme si Jimin avait perçu ma nouvelle détresse, il réapparaît devant nous, la démarche toujours aussi nonchalante, en m'annonçant que les toilettes se trouvent sur le palier principal.

Je le remercie du bout des lèvres, reconnaissant et soulagé, alors que nous nous échangeons un petit regard avec Ivan.

Mais nous ne sommes pas aussi discrets que nous le pensions, puisque Jimin hausse un sourcil en nous dévisageant de manière suspicieuse.

« Qu'est-ce qu'il y a ? nous questionne-t-il en approchant ses mains de ses lèvres pour souffler dedans et tenter de se réchauffer. »

Ivan secoue la tête avec véhémence pour toute réponse, et vient m'aider à descendre nos valises du coffre en voyant que je m'y emploie avec difficulté, étant donné la lourdeur de la mienne.

Je regrette d'avoir pris plus de pulls que nécessaire. Jimin avait raison, ça me fait mal de l'admettre.

Pourquoi faut-il que je sois aussi têtu ?

« On devrait se dépêcher maintenant, on a assez perdu de temps, déclare Ivan d'un ton assez ferme en jetant un regard à la montre luxueuse qui entoure son poignet. »

Jimin acquiesce, et vient ensuite nous donner un coup de main pour qu'on aille plus vite.

Après quelques minutes, nous nous retrouvons enfin à l'entrée de l'immense hall de l'aéroport.

Ce n'est pas l'entrée privée des célébrités. Une boule d'appréhension naît dans ma trachée quand j'avise plus loin des personnes qui attendent leur vol dans les espaces dédiés, ou qui gardent le nez en l'air vers les écrans géants pour voir où en sont leurs avions.

Des boutiques sont disposées le long de l'allée principale, et les grandes baies vitrées implantées dans les murs permettent à leurs éclairages d'illuminer aisément tout le fourmillement à l'intérieur de l'aéroport.

Mais malgré mon impatience de prendre l'avion pour atterrir en Croatie, je me stoppe bien vite à l'entente des cris de mes fans qui doivent se trouver plus loin dans le bâtiment, près des portiques de sécurité.

C'est là que je le sens. Que ça monte. C'est instantané.

C'est si singulier, habituel, et pourtant je ne m'y suis toujours pas fait. Comme si c'était nouveau à chaque fois.

Un ballonnement désagréable achève de dissiper l'excitation que je ressentais jusqu'alors, et m'envoie un profond sentiment de malaise qui se répand dans tous mes membres.

L'heure de mon vol a dû fuiter, comme c'est le cas presque à chaque fois que je voyage.

Nerveux, je me pince l'intérieur des joues avec mes dents lorsque leurs hurlements d'impatience me parviennent, telles les violentes pulsations d'un tambour.

Et si passer aux toilettes juste avant pour que je puisse me laver les mains m'a apporté un certain apaisement, maintenant que je perçois en termes de décibels la foule qui attend la moindre de mes apparitions, toute mon inquiétude revient à la charge.

« Jungkook, je serais toujours derrière toi, d'accord ? »

Jimin s'approche de moi en passant entre Gill et Charles, les deux hommes qui s'apprêtent à assurer le bon fonctionnement de ma traversée jusqu'à l'avion.

Je tourne ma tête dans sa direction en lâchant du regard le sol lisse et brillant du hall, et acquiesce distraitement en sentant une boule se glisser de nouveau dans ma gorge.

Ce n'est pas le moment de paniquer Jungkook. Ça va aller.

J'inspire durement, et essaie de rendre mon regard plus affirmé en serrant avec force la anse de ma valise entre mes doigts pour me raccrocher à quelque chose de réel et ainsi, tenter de sortir de mes pensées pesantes.

« C'est bon, on peut y aller, je leur indique puisqu'ils attendent tous mon approbation. »

Ivan et Jimin hochent la tête, ainsi que les deux vigiles qui nous escortent, puis tandis que les deux premiers restent dans mon dos, les deux autres se mettent de chaque côté de moi pour bien m'encadrer.

J'avance alors d'un pas tranquille pour ne pas paraître pressé et attirer les regards sur moi, mais en réalité, ma tête baissée, mon masque en tissu, et mes lunettes de soleil s'en chargent très bien pour moi.

J'ai décidé de les porter pour éviter d'avoir une tête affreuse sur les photos qui circuleront sur Internet d'ici quelques minutes, mais également pour ne pas que mon anxiété et mon malaise ne se voient sur mes traits.

Je n'ai pas envie d'essuyer de nouvelles critiques lorsque j'arriverai en Croatie. J'ai envie de profiter de mon séjour comme il se doit.

« C'est bien, on continue comme ça. »

J'acquiesce lorsque Gill me souffle ces quelques mots, et continue d'avancer en gardant la même démarche. Je ne fais même pas attention à ce qui m'entoure, trop focalisé sur mes pieds qui foulent le sol lustré et poli.

Quand je m'enfonce de plus en plus dans le hall de l'aéroport dans le but d'atteindre les portiques de sécurité, je ne pense qu'au moment où je m'installerais dans l'avion, en sécurité.

Je regrette de ne pas pouvoir sentir Jimin à mes côtés. Car je sais que d'habitude, la seule vision de sa silhouette près de moi suffit à dénouer le nœud qui s'est logé dans ma poitrine.

« Regardez !! Jungkook est là ! JUNGKOOK !!!! »

Un hurlement strident hérisse tous les poils de mon corps, et bientôt, il est accompagné de centaines de trépignements qui font effroyablement trembler le sol du bâtiment.

Je suis sur le point de défaillir, complètement nu et démuni face à cette vague de personnes qui ne va pas tarder à déferler sur moi.

Mais avant même que je n'aie pu esquisser le moindre geste, Jimin vient se planter à côté de moi en enroulant avec une douceur inouïe son bras autour du mien.

Il me lance un regard à la fois assuré et intangible, et continue d'avancer malgré les regards épineux que lui lancent mes deux gardes du corps.

Mais je n'en ai que faire. Là, tout de suite, je suis incapable de penser à autre chose qu'à tous mes fans qui sont en train de débouler vers moi.

Je les vois jaillir de loin, comme un puissant raz-de-marée prêt à tout engloutir sur son passage, et seule la force de Jimin permet à mes jambes de ne pas rester figées sur place.

« Quoi qu'il arrive Jungkook, je ne te lâcherai pas. Je serais avec toi du début à la fin, je te le promets. »

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Je suis vraiment horrible de vous laisser sur cette fin-là, mais j'ai déjà fait pire si ça peut vous rassurer (ou pas 😬)

J'ai juste trooop hâte d'arriver sur les chapitres en Croatie, et oui je vais dire ça à la fin de chaque chapitre ! Qui va m'en empêcher de toute manière ? 🤨

J'espère que ce double update vous aura plus, envoyez des ondes positives à Jungkook s'il vous plaît parce que là le pauvre je le malmène... 🥲

En tout cas, sachez que je vous aime fort, je vous envoie également plein de belles ondes pour la semaine qui arrive (quitte à ne pas arriver à m'en envoyer à moi ahah), et je vous dis à dimanche prochain ! 🤍

Prenez soin de vous !

- Vee