ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟙.𝟛


Le silence est roi désormais : elle a arrêté de bouger et de respirer, souhaitant d'abord me localiser avant de bondir sur moi. Je l'imite et dresse mes oreilles pointues, à l'affut du moindre bruit. Rien. Puis j'entrouvre la gueule, tentant de capter l'effluve la plus tenue qui pourrait se dégager d'elle.

Mais tout va très vite, ses griffes raclent le sol à quelques pas devant moi et la seconde d'après, ses crocs claquent à un poil de mon cou. Raté, elle a visiblement mal calculé ma position. Mais désormais, je sais tout d'elle et ne perds pas une seconde pour la mordre violemment à l'épaule. Un jappement lui échappe, un goût de rouille et de sel se répand sur mes papilles et un coup de griffe me déchire le flanc. La douleur envahit mes sens, cruelle et sans pitié, réduisant mon attention et ma vivacité. Le combat a enfin véritablement commencé.

Des touffes de poil volent, des crocs ripent contre des os, des griffes transpercent la chair. Nous tournoyons, grognons, lançons des coups de pattes plus ou moins griffus, complètement à l'aveuglette. Les coups d'Alma sont puissants, mais m'atteignent rarement. Elle est trop pressée, et se repose plus sur son instinct que sur ses sens. Elle enchaîne ses attaques à un rythme très soutenu, et je peine plus à me défendre qu'à contre-attaquer. Du moins dans un premier temps. Car lorsque je comprends la façon dont elle fonctionne, je prends petit à petit l'avantage sur ses coups. A plusieurs reprises, ma gueule se referme autour de son cou, mais elle parvient toujours à se dégager d'un mouvement de tête particulièrement puissant. J'intègre rapidement sa technique et alors que son corps percute violemment le mien pour me faire chuter, je m'agrippe à sa chair avec mes crocs. Le sang gicle, imbibant encore plus nos pelages poisseux, et sa douleur la déconcentre le temps qu'il me faut pour enserrer son cou de ma gueule. Puis je bloque sa tête avec mes pattes, et relâche tout mon poids sur elle. Dans le noir, Alma finit enfin au sol et pousse un long gémissement plaintif, visiblement assaillie par la douleur. Néanmoins, je la maintiens à terre, continuant de l'étouffer.

La bataille de nos auras commence et la mienne s'étend autour d'elle, l'écrasant encore plus que mon poids. Son aura affaiblie ne résiste pas longtemps et très vite, Alma la fait disparaître, signe de sa soumission. Elle m'a reconnue comme sa supérieure. A bout de force, je la relâche enfin et m'écarte lentement d'elle, toujours sous forme de louve.

L'obscurité s'en va soudainement lorsque des torches sont allumées dans la pièce abritant le jury. Mes yeux s'accommodent rapidement à la lumière et je les regarde prendre connaissance de la situation : peu importe les techniques employées, ils voient seulement le résultat. La langue pendante, j'attends leur verdict le temps qu'ils délibèrent.

Pendant ce temps, je n'ose tourner la tête vers mon ancienne adversaire, éprouvant une certaine répulsion à voir ce que je lui ai infligé. Jamais je ne me suis battue si violemment et sans pitié, et une vague de culpabilité m'assaille désormais. Je me suis véritablement déchaînée sur elle. Alors qu'elle baigne dans son sang – je le sens à l'odorat – les blessures qu'elle m'a infligées sont nettement moins profondes.

— Kiara, vous avez remporté cette épreuve. Vous avez vingt minutes de repos avant de commencer la suivante.

Il ne s'adresse pas à Alma, tout simplement car je l'entends demander à un collègue d'appeler les infirmiers. Je rebrousse chemin sans un regard en arrière, le pas légèrement claudiquant, et bloque toutes mes émotions et cette pensée entêtante qui me souffle qu'elle aussi avait envie de choisir sa voie. Je l'ai lu dans ses yeux.

***

Avant-dernière épreuve. On m'a laissé mettre des bandages autour de mon bras entaillé par Raïs et autour de la cuisse que m'a déchirée Alma. Voilà un des seuls désavantages de notre forme lupine : le moindre dommage infligé à notre corps sous une de nos formes est conservé lors de notre transformation.

Depuis mon combat avec Alma, j'ai également dû choisir de nouveaux vêtements – les précédents ayant été déchirés – et refaire ma tresse. Je suis comme neuve, pour ainsi dire. Je me suis battue tous les jours pendant treize ans, sauf quelques exceptions, et sais gérer la fatigue : j'ai les muscles pour.

— Kiara O, m'appelle-t-on pour la énième fois de la journée.

Je m'empresse de pénétrer dans la salle du rez-de-chaussée, illuminée par le soleil de fin d'après-midi. C'est une salle spacieuse occupée par plusieurs autres groupes de combattants. Elle sent l'humidité et la sueur, le sang et la douleur. Les bruits des coups emplissent l'atmosphère, au même titre que les grognements, les gémissements et les halètements. De façon plus diffuse, la colère et la détermination animent également cette pièce, échauffant mon sang, mon corps et mon esprit. A en croire les droites qui fusent, les bras tordus en clef de bras et les corps maintenus au sol, l'épreuve suivante est le combat à mains nues. L'épreuve qui sans surprise fait le plus défaut aux femmes. Le seul avantage est que tous les coups sont permis.

On me conduit jusqu'au jury situé près d'un carré de combat, sur lequel m'attend déjà un homme immense. Les muscles saillants de son torse et de ses épaules sont prêts à déchirer sa tunique visiblement trop juste, et son cou de taureau me fait déglutir. C'est lorsque je remonte les yeux vers son visage que je le reconnais. Ce regard presque turquoise surmonté de cheveux cendrés n'est autre que Zeri, un gars qui traînait avec Alek et moi il y a très longtemps, lorsque nous étions à l'orphelinat. Je me souviens de lui comme d'un garçon plutôt posé et calme, gentil aussi. Qu'est-il devenu depuis ? Je ne pourrai certainement pas juger de ça lors de ce combat car il ne retiendra pas ses coups, et me paraîtra ainsi très antipathique. Mais il fait comme tout le monde, c'est le principe.

Néanmoins, il me fait un petit sourire lorsque je pose mes pieds sur le tapis de quatre mètres sur quatre délimité par des cordes. Celui que je lui renvoie est crispé, et un rictus de compassion tord ses lèvres. Je ne perds pas de temps à lui répondre et reporte mon attention sur le jury qui me suit depuis tout à l'heure, accompagné du jury de Zeri. L'homme aux cheveux grisonnants de tout à l'heure prend de nouveau la parole :

— Bien, passons désormais aux instructions : celui qui est mis à terre perd et celui qui reste debout est vainqueur. Nous vous souhaitons bonne chance, vous pouvez commencer.

Mon attention s'était déjà fixée sur Zeri au préalable, alors je n'ai aucun mal à esquiver le poing qu'il m'envoie vers la figure. Je profite de ce geste pour me jeter sur lui et lui envoyer un vicieux coup de coude dans le ventre. Mais il avait contracté ses abdos si bien que je ne parviens ni à lui faire mal, ni à lui couper le souffle. Au lieu de ça, il agrippe ma tresse et alors que je pousse un hurlement de douleur, il m'écarte violemment de lui, me projetant vers les limites du carré. Je fais des moulinets avec mes bras pour tenter de garder mon équilibre et me rattrape de justesse aux cordes du carré. Il avance rapidement vers moi, et j'évite de justesse un nouveau crochet qu'il tente de m'assener. Ses mouvements sont vifs et précis malgré sa carrure, et il ne retient pas ses coups. Si dans un premier temps il ne parvient pas à m'atteindre, il comprend rapidement comme je fonctionne – esquive puis attaque – et profite de mes attaques pour me devancer et m'assener des coups de pieds et de poings d'une intensité redoutable.

La douleur m'handicape rapidement : je parviens de moins en moins à m'écarter de la trajectoire de ses membres. Fatalement, le coup tant redouté survient et je me prends ses phalanges bien sous le menton, me faisant décoller. Je réattéris miraculeusement sur mes pieds pendant qu'un goût métallique envahit ma bouche. Néanmoins, je chancelle, des points noirs envahissant mon champ de vision. Le combat semble s'arrêter et j'observe Zeri me regarder, attendant de voir si je suis encore en état.

Nous nous fixons en silence pendant de longues secondes, et je pars comme un boulet de canon. Tête baissée, je lui rentre la tête la première dans le ventre, lui coupant brusquement la respiration. Mais un de ses bras s'agrippe autour de mon cou, me maintenant contre lui et sa tunique en lin imbibée de sueur. Puis ses muscles se contractent, pressant ma trachée et me faisant suffoquer. Sans aucune pitié ni compassion, je plante mes ongles dans ses bras pour le faire lâcher, si fort que je sens son sang dégouliner le long de mes doigts. Un son étranglé lui échappe, et sentant l'air commencé à me manquer, je tente un dernier mouvement. Ma jambe droite s'enroule derrière ses genoux par la gauche et brusquement, je tire le tout vers moi, lui faisant perdre l'équilibre.

Mais il avait senti le coup venir et s'agrippe à moi pour s'empêcher de tomber. Tout son poids repose sur moi désormais, un poids que j'aurai du mal à soulever très longtemps, surtout que je commence à être exténuée par cette journée de combat. Mes jambes flageolent et alors que notre position ne va pas se maintenir encore très longtemps, c'est dans un dernier sursaut que je lui donne un coup avec l'arrière de ma tête. Je le cueille en plein menton, et un cri s'échappe de nos lèvres en même temps. Il finit à genoux, et enfin libérée de son étreinte, je ne perds pas mon temps : je lui envoie un puissant coup de genoux en pleine tête. Un craquement retentit et ses yeux papillonnent vers moi, perdus et près de rejoindre l'inconscience.

Un long moment de flottement s'ensuit, avant qu'il ne crache un morceau de dent au sol, blanche au milieu de sa salive rendue rouge par le sang. Une seconde plus tard, il s'effondre au sol, inconscient. Je grimace, me reprochant désormais de l'avoir frappé si fort, et m'agenouille à ses côtés pour le tourner sur le flanc. Pendant que le jury me déclare victorieuse, je m'applique à tenter de le ramener parmi nous. Heureusement, les infirmiers arrivent rapidement et le prennent en charge, me laissant un moment de répit. Malheureusement, celui-ci ne dure pas car les examinateurs me pressent ensuite de rejoindre l'arène 7 pour l'épreuve finale.

Sur le chemin, j'avale presque toute l'eau de ma gourde et garde le reste pour asperger mon visage sur lequel s'étalent de jolis hématomes. Je dois sûrement faire peur à voir, avec mon visage luisant de sueur, mes cheveux débraillés et le sang qui macule ma peau et ma tunique. Mais cela n'a que peu d'importance au vu de ce qui va se jouer lors de cette dernière épreuve : mon ticket pour l'armée.

Bien le bonjour ! Tout d'abord, je tiens vraiment à m'excuser de ma longue absence, c'est le début de la prépa alors j'avais pas mal de choses à faire, en plus mon ordi a eu des petits soucis et j'ai vraiment eu peur d'avoir perdu des pages... Mais tout s'est arrangé !

Deuxième point : j'ai conscience que le début de l'histoire est long, il ne se passe pas grand chose mais je pense quand même qu'il permet de poser le cadre de l'histoire... Encore un petit chapitre et c'est fini ! Je compte sur vous !

N'hésitez surtout pas à me faire part de vos retours !

⚡️Que pensez-vous de Kiara après tout ça ?

🌟 Selon vous, réussira-t-elle ?

Je vous embrasse.

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