L'Uchiha ne savait comment se comporter avec Sakura. Il ne s'était écoulé que deux journées depuis leur baiser et pourtant, il avait l'impression d'avoir les méninges proches de l'explosion. Réfléchir devenait son quotidien. À son plus grand désarroi.
Il avait croisé la rose ce matin, en rendant visite à Kyra dans l'hôpital. Toujours aux côtés de Nihiko, elle l'avait habillé et s'était éclipsée pour lui apporter un cadeau quand il prenait quelques bouchées de son repas. Ça faisait maintenant deux ans qu'il résistait à son anémie aplastique. Sa peau d'une pâleur maladive, blême, son corps frêle et fragile, Nihiko endurait l'évolution de sa maladie, avec la peur de partir trop tôt. Il se fichait de mourir jeune, mais ça, c'était avant de rencontrer Sakura. Orphelin, avec aucune compagnie, la jeune femme s'était efforcée de lui créer un petit cocon tendre dans sa chambre. Les décorations multiples et colorées, passant du rouge, vert au bleu créaient une atmosphère de jeune adolescent plein de vie. Les lumières tamisées suspendues contre le mur en placo, derrière son lit, plongeaient le petit gamin dans une ambiance fêtarde le soir.
Sasuke en voyant ces scènes perdait toujours la voix. Sakura était d'une douceur à faire revenir les morts. Ses yeux tendres, ses sourires enchanteurs et son cœur en or. L'Uchiha se demandait parfois ce qu'il adviendrait d'eux s'il n'y avait pas eu la Grande Guerre. Est-ce qu'ils seraient ensemble ? Est-ce qu'il la mériterait ?
Non.
Il fronça les sourcils et reprit sa démarche, les épaules crispées. Il ne voulait pas se poser ce genre de questions. Ça n'en valait pas la peine. Son choix était fait. Sakura ne passerait pas avant sa mission. Elle serait son ultime sacrifice.
Les couloirs étroits se multipliaient. Sasuke sortait d'une conférence avec la chef du village, Tsunade. Elle lui avait conféré une mission plus qu'étrange. Il n'en comprenait pas le sens, mais il passa outre. Il discuterait avec Kyra ce soir pour en comprendre plus sur la situation à venir. S'il agissait de nouveau dans son dos, il risquait de se prendre le poing de la brune dans le visage. Kyra ne l'effrayait pas, mais il avait besoin de l'avoir de son côté. C'était une alliée potentielle et durable.
Détournant le regard, il franchit la dernière porte, et referma le battant en bois derrière lui, la tête remplie de pensées négatives. C'était le brouillis total dans son cerveau.
— Neji.
Portant ses yeux onyx droit devant lui, il observa la scène. Neji, grand brun à la chevelure longue et noire, se trouvait à quelques mètres de lui. Il était un de ses camarades lors de la Grande Guerre. Son ancien acolyte faisait face à Sakura, les poings crispés et blême de colère. Sasuke arqua un sourcil devant la scène. La fleur semblait mal-à-l'aise face à la réaction du brun, mais elle garda ses yeux verts d'eau fixés sur le noiraud, déterminée.
— Je pensais avoir été assez clair la dernière fois que l'on s'était vu.
Neji avait adressé ces paroles à la rose d'une voix bourrue, colérique. Dans ses yeux nacre, une lueur malsaine tournoyait. Sasuke voulait faire un pas vers l'avant pour comprendre ce qui se déroulait, mais une grande main posée contre son avant-bras le bloqua dans son mouvement. Lee le dévisageait, sa tête oscillant dans un avertissement muet. L'Uchiha comprit le message et reprit place, à distance de la discussion plus que froide entre Sakura et Neji.
— Je m'en rappelle parfaitement. Et rien ne m'empêche de te saluer, Neji. Maintenant, je vais m'en aller, si tu veux bien.
Le brun lui bloquait la route et au prix d'un grand effort, il se décala pour lui céder le passage. Sakura garda une moue crispée tout au long de sa traversée pour le dépasser, les yeux figés. Mais ce qui tarauda le plus l'Uchiha fut la réaction de Neji. Les poings serrés à s'en blanchir les jointures, la bouche entrouverte, à respirer par-à-coup et les yeux ombrageux de colère, mais surtout de peur, voilà ce que renvoyait le brun à la longue chevelure.
Il était terrifié.
Il ne fallut que cinq secondes pour qu'il décampe à toute vitesse, sans un regard en arrière, le feu aux fesses.
— Qu'est-ce qui se passe entre ces deux-là ? demanda Sasuke en se retournant vers Lee.
Mais il avait disparu, suivant les pas de la fleur, aussi silencieux qu'une tombe.
Elle s'activait, passant dans sa chambre, emportant trousses médicales, vêtements de rechange, effets personnels, cordes et armes. Puis se déshabillant à la va-vite, elle se munie de ses habits de mission spéciale. Son t-shirt noir moulant, aux nombreuses pochettes dans le bas de son dos et sous ses avant-bras, était plus que pratique. Elle y dissimula des couteaux, shuriken et des petits ninja-tô. Ses sabres mis en place, elle enfila une veste ample noire, à l'insigne miniature de fleur blanche et rose. Elle était si minuscule que personne dans l'entourage de la rose ne connaissait son existence.
Sakura se disait chaque fois qu'elle revêtait cette veste que son destin avait toujours été tracé, depuis toute jeune. Et ses pensées obscures ne faisaient que se multiplier suite à cette constatation.
La jeune femme détourna le regard, agacée. Elle n'avait pas de temps à perdre. Se focalisant sur ses tâches à suivre, elle continua de s'habiller. Le gilet, aux nombreux renflements, était renforcé d'un matériel de cuir, avec une coque si épaisse que les kunai ne pouvaient le transpercer. Elle y ajouta encore des armes de tout genre. Même s'il s'agissait d'une fausse mission et qu'elle avait dû attendre trois jours avant de partir, elle se munie de son arsenal le plus complet. Son pantalon noir aux nombreuses attaches de cuir l'encombrait, mais son matériel de soin se trouvait contre ses cuisses et elle ne pouvait s'en détacher. Se penchant vers l'avant pour parfaire son armement, elle faufila dans ses bottines noires des couteaux aux bouts effilés.
Un dernier passage dans la cuisine plus tard pour empocher sacs de provision et gourde d'eau, et elle était fin prête. Il ne lui manquait que ses deux nouveaux Katana, qu'elle disposa contre le dos de sa veste. La capuche mise en place, elle franchit la porte de son appartement, en se demandant si elle le reverrait de sitôt.
Elle souffla, irritée par ses réflexions intérieures. Elle reviendrait.
Et bientôt, se promit-elle.
Lee l'attendait, affalé contre le rempart de son entrée.
— Vous en prenez du temps, vous les filles ! J'ai cru que je passerais toute la nuit à t'attendre.
Sakura lui donna un coup contre la tête et son ami ne fit même pas l'effort de geindre. Cet imbécile était hilare.
— Bon la voilà ma Sakura ! Elle avait disparu ces derniers jours, ça m'inquiétait.
— À force de me faire courser par un imbécile, mon humeur se dégrade, qu'est-ce que tu veux ?
— Hé ! répliqua Lee, outré.
Il lui tapota la hanche, les yeux de nouveau brillants.
— Ça fait longtemps qu'on n'a pas eu de mission ensemble, j'ai hâte !
Un sourire flotta sur les lèvres de la rose en retour.
— Moi aussi.
Ils s'échangèrent une petite accolade et rejoignirent Temari, à l'entrée du village du feu. Konoha resplendissait ce soir, avec les lumières par centaine des villageois. Sakura promena son regard au loin, croisant des yeux l'ancien quartier des Uchiha et avala sa salive de travers. Partir de Konoha lui ferait un grand bien. Et s'éloigner du brun aussi. Bien qu'à son retour, elle doive le coller aux basquettes et tenter des approches. La séduction, ce n'était pas son fort, et pourtant Tsunade lui avait suggéré d'en faire de même. Qu'avait-elle en tête, bon sang ?
Sakura inspira pour se donner du courage, tremblante et tourna le dos au village.
La fleur avait eu peu de missions depuis la Grande Guerre. Elle se sentait excitée, mais un mal-être enflait dans son ventre. Elle n'en comprenait pas le sens, comme si tout son corps lui criait qu'elle faisait le mauvais choix. Devait-elle tourner le dos aux ordres de Tsunade et revenir sur ses pas pour découvrir qui était les traîtres, de sa propre initiative ?
Le doute s'empara d'elle et l'impression d'un danger imminent s'alourdit dans l'air. Puis, elle comprit. La dernière fois qu'elle avait été en mission, l'horreur en avait résulté. Et la mort. C'était de sa faute.
Sakura déglutit et se força à mouver ses doigts, qui s'étaient figés sous ses réflexions.
— Tu as compris, Rosette ?
Elle tourna la tête vers Lee, qui l'observait aux aguets, et cliqua des yeux pour se reprendre.
— Je disais que Gaara se trouve déjà à la base d'observation et que nous devons le rejoindre dans les prochaines heures. Nous n'aurons donc pas de halte.
— Sept heures de course, calcula Temari d'une petite voix. Vous avez tout votre matériel ?
Ils hochèrent la tête dans un commun accord.
Sakura, toujours dans l'excès avec ses entraînements, savait que sept heures de course sans fin serait d'un laxisme énorme. Sa nervosité retomba et bientôt, son esprit s'égrena de pensées irritantes. Gaara était partie trois jours plutôt, juste après l'entrevue de nuit avec Tsunade pour rejoindre Suna. Mais la mission de Suna n'était qu'un leurre. La destination de leur mission était le QG entre leurs deux villages pour observer les entrées et sorties de ceux-ci. Quand Tsunade opèrera pour démasquer les traîtres, les mouvements de foule seront nombreux. Et la possibilité que d'autres scélérats face leur entrée était grande. Il était donc de leur devoir de servir cette fonction d'observation. Les risques d'attaques étaient faibles, mais pas irrecevables. La kunoichi le gardait bien en tête.
Seulement, son esprit la taraudait. Sakura savait bien qu'ils s'étaient éloignés de la source du problème et ce, pour une raison. Elle ne devait connaître l'identité des judas. Et la fleur en éprouvait une grande contrariété.
Est-ce que ces amis étaient en danger ? Est-ce qu'il était bon qu'elle parte de Konoha lorsque l'action se déroulaient dans les prochains jours ?
Sakura s'en agrippa la capuche, à force de cogiter, sous l'œil attentif de Lee. Il lui posa une main protectrice sur l'épaule.
— Ne t'en fait pas, on rentrera bientôt. Et nos amis seront en sécurité. Rien ne leur arrivera.
Sakura hocha la tête en retour, peu convaincue. Temari restait silencieuse, observant la forêt qui s'étendait sous leurs yeux. Elle aussi laissait une personne qu'elle chérissait derrière elle, Shikamaru, son copain. Mais ils reviendraient.
Sakura s'en persuada. Une sueur froide roula contre son dos et ses membres se tendirent, à l'écoute.
— Tout ira bien, chuchota-t-elle.
Et Sakura ne sut si elle adressait ses paroles réconfortantes pour ses amis ou pour elle-même.
Sécurisés, ils l'étaient. Calmes, ils le resteraient. Mais là dehors, entre les remparts de Konoha... le danger courrait et Sakura n'éprouvait aucun apaisement à s'en éloigner. Elle se convainc du contraire. Ils faisaient bien.
Et tout se déroulera comme prévu. Sans entorse. Et sans blessé.
Elle sourit et fit le premier pas, encourageant ses compères à en faire de même. Ironique comme situation, car Sakura était le plus grand danger pour ses amis et personne ne s'en doutait. Son secret restait enfoui.
Mais pour combien de temps ?
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