Huit ans plus tard,

La nuit du dix-huitième anniversaire de Jimin et de son dragon, un bruit strident déchira le ciel, illuminant la montagne des damnés d'un éclair de feu. Le garçon aux cheveux blanc fut réveillé par une insupportable douleur à la nuque, à l'endroit exact où il avait senti le feu contre sa peau la première fois qu'il avait touché Haru.

La douleur était si forte, que Jimin ne put s'empêcher de hurler de douleur à s'en déchirer les cordes vocales. Son cri et le rugissement du dragon résonnèrent dans l'air, réveillant tous les animaux et les villageois des alentours.

Malgré son envie d'aider son maître, Haru ne put rien faire, lui aussi, dû endurer la douleur comme si elle venait de son propre corps. Ce fut à ce moment que les deux comprirent qu'ils étaient liés corps et âmes. Le lien était à présent scellé. À partir de cette nuit, ils ne feraient plus qu'un. Leurs pensées et leurs sentiments avaient fusionné, comme s'ils n'étaient qu'une seule et unique âme.

Dorénavant, si Jimin venait à périr, Haru disparaîtrait avec lui, et si le dragonnier perdait son dragon, sa mort emmènerait l'âme de ce dernier, laissant derrière lui, une coquille vide, sans but, sans vie. Voilà ce qu'était la vie des dragonniers, et Jimin venait d'en devenir un, avec toutes les responsabilités et les dangers que cela représentait.

Dix-huit printemps auparavant, à la capitale, l'oracle du roi avait senti la foudre qui s'était abattu sur terre. Elle annonçait l'éclosion d'un œuf de dragon, mais aussi d'un nouveau dragonnier. Cette nuit, ce même éclair venait à nouveau de frapper, et cette fois, ce fut la puissance de cet enfant perdu que l'oracle sentit au plus profond de son âme

Le lendemain, le roi Jeon fit venir cet être au don inconnu et extraordinaire, puis lui posa la même question que d'habitude.

— Dis moi Oracle, suis-je toujours l'homme le plus puissant d'Oragh ? demanda Jung-hwa avec assurance.

— Non, vous ne l'êtes plus, votre Majesté. Une menace plane au-dessus de votre couronne, annonça-t-il.

— Plait-il ? Quelle menace ? grogna le roi, sentant la colère et l'angoisse l'envahir.

— L'enfant du Dragon a atteint sa majorité. Il est en droit de réclamer la place qui lui revient grâce à son sang.

— JE SUIS LE ROI ! hurla Jung-hwa en envoyant valser sa coupe de vin à travers la pièce. JE NE LAISSERAI AUCUN BÂTARD PRENDRE MA PLACE !

— Ce n'est pas un bâtard, son sang est pur, du sang de dragon, répondit l'oracle, les mains croisées derrière son dos.

— C'est impossible ! Hae-soo n'a jamais eu d'enfant, son avorton en mort-né ! beugla le roi avec rage.

— L'enfant du Dragon est bien vivant et viendra reprendre sa place, le contredit l'homme toujours avec cette posture droite et remplie de confiance.

Le roi Jeon releva la tête et lui lança un regard assassin. L'homme ne dégageait aucune peur, aucune émotion face à la rage de son souverain. Les oracles étaient des êtres à part. Sans aucune identité, ces hommes étaient sans peur. Ils ne dégageaient aucune émotion et leur apparence était des plus effrayantes. Ils étaient de très grandes tailles avec une peau d'une blancheur à en faire pâlir les morts. Leurs joues creuses et leurs yeux cernés, leur donnaient un aspect cadavérique et repoussant, mais ce qui effrayait le plus les domestiques du palais, c'était leur regard dénué de couleur, tel un aveugle.

Lorsque Jeon Jung-hwa assassina le roi Park, il s'appropria son trône, mais également tout ce qui allait avec, l'Oracle en faisait partie.

— Je tuerai cet avorton avant qu'il n'atteigne Solérya, murmura le roi avec un sourire malsain sur les lèvres. À quoi ressemble-t-il ?

— L'enfant du Dragon à une chevelure de neige, des yeux de cristal et il porte la marque du feu, répondit l'oracle avec lassitude.

— Je le trouverai et je le tuerai, même si pour ça, je dois mettre à mort tous les blonds de ce continent ! jura Jung-hwa la mâchoire et les poings serrés.

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Dix ans s'étaient écoulés depuis que le prince héritier avait croisé la route de ce garçon aux cheveux blanc. Aujourd'hui, Jungkook était un adulte, mais il n'avait jamais oublié Jimin. Il n'avait pas oublié son visage pâle, ses yeux bleus envoûtants, ni même ses cheveux blancs qui le rendaient si angélique. Il apparaissait quelquefois dans ses rêves et Jungkook se demandait ce qu'il était devenu.

Avait-il survécu seul dans la forêt ? Avait-il croisé de nouveau la route de ses créatures ?

Comme il lui avait promis, Jungkook n'avait parlé de lui à personne. Lorsqu'il était retourné au palais, il avait dit à ses parents qu'il était simplement tombé. Il se souvenait encore du visage de sa mère quand il était réapparu. La déception, voilà l'émotion qui ornait son visage à ce moment-là. Elle avait été déçue qu'il ait survécu, car comme elle l'avait si bien dit, les Dieux auraient dû l'emmener avec son frère jumeau. Son père l'avait cru, il n'avait pas posé plus de questions, mais il était juste soulagé que son héritier soit rentré sain et sauf.

Malgré l'avertissement de Jimin, le prince était retourné plusieurs fois dans la forêt dans l'espoir de revoir ce garçon qui hantait ses pensées, mais il ne l'avait jamais revu. Depuis ce jour, le prince vivait avec ce secret , et comme il l'avait promis, il l'emporterait dans sa tombe. 

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Royaume du Sud
Solérya, capitale

— Votre Altesse, appela une voix.

Jungkook se tourna vers la personne qui venait d'entrer dans ses appartements. Il fit face à l'une de ses domestiques, elle se tenait à quelques pas du bain dans lequel il était installé depuis plusieurs minutes.

— Qui y a-t-il Faï ? demanda-t-il avec un sourire.

— Le roi vous demande.

— Dis à mon père que tu ne m'as pas trouvé.

— Je ne peux pas faire cela, votre Altesse, sa majesté me châtierai pour ne pas avoir répondu à sa requête, éluda la jolie rousse d'une voix tremblante.

Jungkook soupira et plaqua ses cheveux mouillés en arrière. Il regarda une dernière fois par la grande fenêtre qui donnait sur la forêt, puis son attention se porta à nouveau vers la jeune femme qui était toujours inclinée.

— C'est bon, redresse-toi, soupira-t-il de façon lasse. Nous avons grandi ensemble, je t'ai déjà dit que tu peux laisser tomber les formalités quand nous sommes seuls.

— Pardonnez-moi, murmura-t-elle en se redressant.

Ses yeux verts croisèrent le regard noir de Jungkook et la jeune femme déglutit. Ils avaient toujours été amis, depuis leur plus tendre enfance, mais à mesure que le prince devenait un homme, leur amitié avait évolué vers une attirance physique. Cela rendait leurs échanges difficiles, surtout pour la jeune femme qui avait du mal à calmer les battements de son cœur. Elle savait que si le roi venait à apprendre qu'ils entretenaient une relation charnelle, il la ferait pendre sans la moindre hésitation, et ce, même si sa famille servait les rois depuis plusieurs générations.

— Mon père t'a-t-il dit ce qu'il me voulait ? demanda Jungkook en sortant de la baignoire.

— N-non, bredouilla la jeune femme en regardant le corps nu du prince. Il m'a simplement dit de venir vous chercher. Il vous attend dans la salle du trône.

En détournant le regard, elle prit un grand tissu qui se trouvait sur le lit et le donna au prince pour qu'il se recouvre. Un rire amusé quitta les lèvres de Jungkook lorsqu'il remarqua ses joues rougies.

— Tu rougis alors que ce n'est pas la première fois que tu me vois nu, le taquina Jungkook en se positionnant devant elle.

— Ne dites pas cela à voix haute ! implora la jeune femme en venant plaquer sa main sur la bouche du brun. Si quelqu'un venait à vous entendre, ce serait la fin pour moi, mais aussi pour toute ma famille. Votre père me ferait pendre dans la seconde.

Jungkook embrassa sa paume avant de la retirer avec douceur de sa bouche.

— Je ne laisserai jamais personne te faire du mal, même pas mon père, promit le prince.

— Vous ne pouvez rien faire contre le roi.

Sa voix était aussi basse qu'un murmure et son visage dégageait une tristesse qui tordait les tripes de Jungkook. Il n'était pas amoureux de Faï, mais il tenait énormément à elle. Au-delà du plaisir charnel qu'ils se donnaient mutuellement, la rouquine était la seule personne qui le connaissait vraiment et qui l'aimait pour ce qu'il était, et non parce qu'il était Jeon Jungkook, le prince héritier.

Voulant réconforter son amie, Jungkook fit un pas en avant et l'enlaça rapidement. Il déposa un baiser sur son front et resta ainsi quelques secondes. Ce fut la jeune femme qui le repoussa légèrement.

— Vous devriez vous vêtir, il ne faut pas que vous attrapiez froid, l'invita-t-elle en allant chercher ses vêtements.

— Pourquoi tiens-tu tant à garder cette formalité entre nous ? ricana Jungkook en la suivant du regard.

— Parce que vous êtes le prince, et moi votre domestique, votre Altesse, répondit Faï en lui donnant ses habits.

Jungkook fronça les sourcils face au ton distant, presque froid de la jeune femme. Avait-il fait quelque chose de mal ? Pourquoi était-elle si froide avec lui ? Puisqu'elle souhaitait maintenir ces formalités entre eux, il respecterait sa décision.

— Très bien, tu peux disposer. Dit à mon père que je viendrai le rejoindre dans quelques minutes, ordonna Jungkook de façon détachée.

— Bien votre Altesse, répliqua la jeune femme en s'inclinant de nouveau avant de quitter la pièce.

Une fois présentable, Jungkook quitta ses appartements pour se rendre dans la salle du trône où le roi l'attendait. Il traversa le château, saluant les domestiques et les gardes qu'il croisait sur sa route. Lorsqu'il arriva devant les immenses portes en bois, le prince prit une grande inspiration pour se donner du courage. Il se demandait bien ce que son géniteur lui voulait.

Depuis deux ans, son père agissait étrangement. Il était obsédé par un homme et désirait le retrouver à tout prix. Il avait déployé une partie de son armée dans tous les villages du sud pour le retrouver, mais jusqu'à maintenant, aucun ne semblait être celui qu'il recherchait. Jungkook l'entendait parfois hurler de colère à travers les murs du palais, l'obligeant à remettre en question son état psychologique. Était-il en train de perdre la tête ? Cette personne était-elle réelle ou était-ce un mirage créé par l'esprit d'un homme paranoïaque et dérangé ?

Après quelques secondes posté devant les portes, le prince poussa ces dernières et entra dans la salle. Son regard se posa d'abord sur son père, assis sur le trône, ses yeux vides et cernés de fatigue le regardaient déjà. Comme d'habitude, son conseiller se tenait à sa gauche, debout près de son souverain, il le dévisageait également. Enfin, vint le tour de Namjoon, sous-commandant de l'armée du Soleil et qui, à une époque, avait été l'un de ses meilleurs amis.

Namjoon, Yoongi et Jungkook était un trio inséparable lorsqu'ils étaient enfants. Ils furent séparés lorsque Yoongi alla vivre au palais de l'Est, suite au décès brutal de ses parents alors qu'il n'avait que douze ans. À sa majorité, Namjoon était devenu le sous commandant de l'armée, s'éloignant ainsi de Jungkook qui était de cinq ans son cadet.

Aujourd'hui, les deux hommes étaient presque devenus de parfaits étrangers, au plus grand regret de Jungkook qui, une nouvelle fois, s'était retrouvé seul.

— Vous m'avez demandé ? fit Jungkook en s'inclinant devant le roi.

— Oui, j'ai du travail pour toi.

— Pour moi ? Suis-je devenu l'un de vos serviteurs sans le savoir ? demanda le prince avec une pointe d'audace.

— Serais-tu devenu sourd en plus d'être insolent ?

— Non père, mon ouïe fonctionne à merveille, pour ce qui est de mon insolence, il me semble que je la tiens de vous, enfin, c'est ce que mère disait, répondit l'héritier, un rictus aux lèvres.

— Je te conseille de faire attention à tes paroles mon garçon, n'oublie pas que tu t'adresses à ton roi, intervint le conseiller d'un ton autoritaire.

— Sauf votre respect Han, je me passerai bien de vos conseils et je ne suis pas votre garçon, rétorqua Jungkook sur le même ton.

— Suffit ! ordonna le roi.

Le temps où Jungkook avait peur de son père ou de Han était révolu. Le prince était devenu un homme. Du haut de ses dix-huit ans, Jungkook avait une carrure imposante. Son entraînement au combat durant ses dix dernières années l'avait rendu fort et lui avait donné une confiance en lui sans faille.

— Tu vas te rendre dans les terres du Nord, annonça le roi.

— Pourquoi ? interrogea Jungkook.

— L'homme que je recherche n'a pas encore été retrouvé. Notre armée a fouillé tout le pays, s'il n'est pas ici, il est forcément dans un autre royaume.

— N'est-ce pas là le travail du sous-commandant de répondre à vos attentes, Père ? demanda le prince en regardant Namjoon.

— Namjoon ira avec quelques hommes dans le royaume de l'Est et Nalem ira à l'Ouest, expliqua Jung-hwa.

— Puis-je savoir pourquoi vous désirez tant retrouver cet homme ?

— Cela ne te regarde pas ! cria subitement le roi. Tout ce que tu as besoin de savoir c'est qu'il est un danger pour nous tous et qu'il doit être enfermé.

— Un danger ? Pour qui ? Pour vous ? Pour le royaume ou pour la couronne ? Comment un seul homme peut-il être un danger alors que vous possédez l'armée la plus puissante d'Oragh ? insista Jungkook malgré le regard noir de son père.

— Cesse de poser des questions ! somma le souverain en se levant précipitamment. Je suis ton roi et je t'ordonne de me ramener cet homme !

Le ton de sa voix était dur et sans appel. Aucune négociation n'était possible , et même si Jungkook ne craignait plus son père, il savait qu'il irait jeter sa frustration sur quelqu'un d'autre et il refusait que quelqu'un soit battu par sa faute.

— À vos ordres votre Majesté, fini par concéder Jungkook avec dédain. Puis-je savoir à quoi il ressemble ?

— Il a les cheveux blancs, un regard de cristal et il porte une marque de naissance à la nuque qui ressemble à des flammes, énuméra Han d'un ton neutre.

En entendant la description donnée par le conseiller de son père, le cœur de Jungkook loupa un battement avant de commencer à battre plus vite et plus fort dans sa cage thoracique. Cheveux blancs, regard de cristal. Jimin. Ce fut la première personne à qui le prince pensa.

— Impossible, murmura Jungkook.

Non, cela ne pouvait pas être lui, il n'avait pas vu de marque de naissance et il ne pourrait pas être l'homme qui menaçait le royaume. Jimin vivait dans la forêt et visiblement seul, alors comment serait-il une menace ? Non, cela devait être quelqu'un d'autre.

— Tu partiras dans quelques heures. Ton cheval est déjà sellé, déclara le roi. Ne reviens pas avant d'avoir de l'avoir trouvé.

Ses dernières paroles étaient glaciales et débordantes de menace. Jungkook comprit que son père n'autoriserait aucune erreur. Il s'inclina et quitta la salle du trône sans rien ajouter. Peu importe qu'il soit d'accord ou non, il n'avait pas le choix. Dans quelques heures, il partirait pour les terres du Nord à la recherche d'un homme dont il ne connaissait même pas le visage.

À la place, le cœur de Jungkook désirait retrouver ce petit garçon aux cheveux blanc qu'il n'avait jamais pu oublier.

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Royaume du Nord,
Village de Sahran

Reclus au fin fond du pays, le village de Sahran était de coutume calme et à part quelques ivrognes, les villageois ne rencontraient jamais de problème. Pourtant, aujourd'hui, durant ce premier jour l'automne, un individu à la chevelure de neige venait perturber cette tranquillité.

— AU VOLEUR ! ARRÊTEZ CE VOLEUR ! hurla un homme à bout de souffle.

— Cause toujours gros lard, ricana Jimin en continuant de courir.

Il slalomait entre les villageois, s'excusant lorsqu'il heurtait quelqu'un alors qu'il traversait la bourgade. Habitué à l'environnement sauvage de la montagne, il était très facile pour Jimin de cavaler à travers les rues et les différents obstacles pour échapper à ses poursuivants. Tandis qu'il tournait à l'angle d'une ruelle, il se retrouva soudain pris au piège dans une allée sans issue. Avant que les traqueurs n'arrivent, Jimin enfila sa capuche et son foulard pour cacher son visage. Lorsqu'il entendit leurs pas se précipiter vers lui, il se tourna pour leur faire face. Ils étaient trois, un rouquin, un brun dodu et le dernier, qui était le plus petit des trois, avait une vilaine balafre qui barrait son visage.

— Tu ne peux plus nous échapper ! déclara le plus gros des hommes avec un rire vainqueur.

— Je ne cherchais pas à m'enfuir. Je faisais simplement un peu d'exercice.

— Sais-tu ce qu'on fait au voleur ici ? demanda le rouquin.

— Non, mais je suis sûr que vous allez me le dire, rétorqua Jimin avec insolence.

— On leur coupe les mains ! répondit le plus petit.

— Aïe, n'est-ce pas là une punition trop sévère pour quelques pièces d'or ?

— En plus d'être un voleur, tu es un tricheur ! l'accusa le dodu.

— Ce sont là de grandes qualités de vie, mon ami ! se moqua Jimin. Et je n'ai pas triché, vous êtes simplement mauvais aux cartes.

— Menteur ! cria le balafré en lançant son couteau en direction de Jimin.

Il esquiva la lame avec une facilité déconcertante, laissant les trois hommes stupéfaits.

— Bon, ce n'est pas tout messieurs, mais je suis attendu, annonça Jimin.

— Où crois-tu aller ? demanda le rouquin en s'approchant.

– Je suis un voleur, mais vous, vous êtes sourds, insulta le dragonnier avec lassitude. Je suis lassé de jouer à ce jeu, à la revoyure !

À peine ses mots eurent quitté ses lèvres, Jimin brandit son arc qu'il avait caché sous sa cape et décocha une première flèche qui alla se loger directement dans la cuisse du plus gros. Il tira ensuite une deuxième dans le pied du rouquin, puis lorsque le plus petit se jeta sur lui, il le frappa avec force avec le revers de son arme.

Sans perdre le temps et avec un éclat de rire amusé, Jimin escalada le grand mur et sauta de l'autre côté pour se retrouver hors du village. Il se mit à courir en direction de la forêt en riant à gorge déployée, encore une fois, son agilité et sa rapidité l'avait sortie du pétrin.

Le soleil se couchait déjà lorsque Jimin atteignit la montagne. Haru ne vivait plus avec lui, il était devenu si grand qu'il lui était maintenant impossible d'entrer dans la grotte. Jimin se sentait souvent seul alors, il passait le plus clair de son temps dans la forêt avec les animaux.

Après avoir escaladé la montagne, Jimin alluma un feu et vida son sac. S'il s'était rendu dans le village de Sahran, c'était pour se trouver quelque chose à se mettre sous la dent et surtout, il lui fallait de nouveau habits. Sa pauvre cape tombait en lambeaux, sans parler de son pantalon et de sa chemise, qui malgré le lavage n'avaient plus jamais retrouvé leurs couleurs d'origine.

Il était parvenu à voler quelques fruits à un marchand et une bourse remplie de pièces d'or à un ivrogne pendant une partie de Gwent. Jimin ne savait pas jouer à ce jeu de cartes, en revanche ce qu'il savait faire, c'était voler. Il n'était pas fier de ce don, mais lorsqu'on grandit dans la forêt sans parents ni aucun adulte pour subvenir à nos besoins, le mode de vie s'impose de lui-même.

Qu'as-tu volé cette fois ?

— Pourquoi ai-je l'impression que tu me juges Haru ? lança Jimin en roulant des yeux.

Parce que tu vas finir par te faire tuer.

— J'ai besoin de manger et de vêtements. Je n'ai fait de mal à personne que je sache.

Le dragonnier soupira en quittant la grotte. Haru l'avait vraiment réprimander et il détestait cela, cela ne faisait qu'augmenter le sentiment de tristesse qui noyait déjà son cœur. C'était facile pour lui, il avait seulement besoin de voler au-dessus d'un troupeau pour dérober des moutons et les dévorer vivants, mais Jimin lui devait se débrouiller pour se nourrir. Plus les années passaient, plus le gibier se faisait rare. Les villageois étaient de plus en plus gourmands et tuaient de plus en plus d'animaux. Si ce n'étaient pas les hommes, les rapaces se chargeaient de dévorer les pauvres bêtes qui croisaient leurs routes.

Lorsqu'il arriva sur la terre ferme, Jimin marcha jusqu'à la source chaude et retira ses vêtements pour entrer dans l'eau. Sans même avoir besoin de se retourner, il sentit son dragon s'approcher jusqu'à ce que ce dernier ne se pose sur le sol, à quelques mètres de lui.

Pourquoi es-tu triste ?

— Demain, c'est l'anniversaire de ma mère, déclara Jimin en dénouant la longue tresse de ses cheveux.

Nous pourrions lui rendre visite si tu le souhaites.

Jimin s'immobilisa lorsqu'il entendit les paroles de son dragon. Lui rendre visite. Le garçon ne savait même pas où ses pauvres parents avaient été enterrés, ni même s'ils l'avaient été. Peut-être que les rapaces les avaient entièrement dévorés. Peut-être qu'il ne restait plus rien à enterrer. Jimin n'était jamais retourné dans son village natal. En réalité, il n'avait plus jamais quitté la forêt des Damnés. Il avait promis à ses parents de ne faire confiance à personne et de ne pas se retourner, alors c'était ce qu'il faisait.

— Tu sais bien que je ne peux pas, murmura Jimin en regardant son reflet dans l'eau.

Pourquoi ? Tu es un adulte maintenant.

— Peut-être, mais je n'y retournerai pas !

Tu es destiné à quelque chose de plus grand, Jimin, nous ne pouvons pas vivre éternellement cachés dans cette forêt.

— Et pourquoi pas ? Je suis destiné à quoi ? Tu me répètes cela depuis des années et rien ne change. Je suis petit, frêle et...

Tu es un dragonnier, c'est ça qui te rend spéciale.

— C'est ça, soupira tristement le garçon. Je te l'ai déjà dit, je suis juste Jimin, un orphelin qui a échappé aux rapaces grâce au sacrifice de ses parents. Je ne suis pas spécial, j'ai juste eu de la chance.

Haru ne répondit plus rien, il avait senti que son maître venait de se renfermer, alors il avança sa grande tête et posa délicatement cette dernière sur l'épaule du garçon. Jimin le regarda du coin de l'œil et se pencha sur le côté pour sentir la peau de son dragon contre la sienne.

Bercé par la respiration de la créature et le bruit de la nature qui l'entourait, Jimin tomba dans un profond sommeil, ignorant que sa destinée se rapprochait de lui à grand pas.

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Chemin des Damnés

Vingt jours s'étaient écoulés depuis que Jungkook avait quitté la capitale. Ils avaient chevauché pour atteindre le plus rapidement possible leur destination. Lorsqu'ils avaient traversé le premier village en brandissant l'étendard du roi, les paysans les avaient accueillis avec méfiance.

Jungkook avait commencé ses recherches en interrogeant les villageois de tous les hameaux qu'il avait traversé. Aucun homme, qui correspondait à la description de l'oracle, n'avait de tache de naissance. Agacé, Jungkook et ses hommes étaient à présent sur le chemin des Damnés, ils se dirigeaient vers le prochain village afin de continuer les recherches.

— Savez-vous pourquoi mon père cherche cet homme ? demanda Jungkook à l'attention de Hansel.

— Non, votre Altesse. Votre père ne nous a pas donné ses raisons, répondit l'homme sans regarder le prince.

Hansel était le plus âgé de tous ces compagnons de voyage, c'était lui qui avait appris à Jungkook l'art du combat à l'épée. C'était un excellent professeur, sévère, mais juste.

Chevauchant dans le silence, Jungkook regardait le ciel s'assombrir de minute en minute. Le soleil s'était couché et voyager de nuit était dangereux. Il devait s'arrêter dans un coin tranquille s'il ne voulait pas risquer de croiser des bandits ou pire, des rapaces.

— Nous devrions établir le campement pour la nuit, conseilla Jungkook en regardant les environs.

— Nous pouvons encore continuer, le contredit l'un des hommes.

— La forêt et ses chemins sont dangereux la nuit.

— Avez-vous peur des fantômes votre Altesse ? se moqua l'homme.

Jungkook fronça les sourcils devant l'insolence de cet individu. A-t-il oublié à qui il s'adressait ?

— Surveille tes paroles Sam ! le réprimanda Hansel. N'oublie pas que tu t'adresses à ton prince ! Tu lui dois le respect tout comme à son père ! La prochaine fois, je te ferai couper la langue !

Sam avala difficilement sa salive et hocha la tête. Suivant les ordres du prince, les sept hommes établirent le campement sur le bord de la route, ils allumèrent le feu et Hansel fit griller de la viande pour leurs dîners. L'ambiance était pesante au campement, Jungkook savait pertinemment que c'était dû à sa présence, alors il décida de se retirer pour que les six hommes puissent se détendre.

— Bonne nuit messieurs, annonça Jungkook en se levant.

— Dormez bien votre Altesse, si vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas. Nous monterons la garde à tour de rôle.

— Merci Hansel, pensez à vous reposer également.

Le prince se retira dans sa hutte de fortune et s'allongea sur les peaux qui avaient été disposées sur le sol. Il n'avait pas sommeil, il voulait simplement se retrouver seul pour réfléchir. Il était arrivé depuis deux jours maintenant, il avait déjà visité trois grands villages et toujours aucune trace de l'inconnu qui obsédait le roi. Allait-il le trouver ? Existait-il réellement ? Malgré cette mission, Jungkook ne pensait qu'à une chose, Jimin. Il était seulement à quelques lieues de l'endroit où il avait rencontré le garçon aux cheveux blanc.

— Es-tu vivant ? Est-ce que tu vas bien ? se murmura Jungkook en regardant la cicatrice sur la paume de sa main.

Cet homme ne quittait pas son esprit une seule seconde, parfois la nuit, il voyait ses yeux de cristal, mais aussi ces créatures répugnantes et horribles qu'il avait vues ce jour-là. Il avait parlé de ces monstres à son père, mais il n'avait eu que faire de ses histoires. Jungkook espérait qu'il fasse quelque chose, qu'ils les combattent, mais rien n'a été fait.

— Le prince Jungkook pense que le roi veut simplement emprisonner l'homme que l'on recherche ? demanda l'un des hommes qui était installé au coin du feu.

Lorsqu'il entendit son nom, Jungkook se redressa et tendit l'oreille.

— Baisse d'un ton imbécile, s'il nous entend nous sommes fichus. Le roi tient à le garder dans l'ignorance.

Jungkook reconnut la voix de Hansel.

— Pourquoi ? Si cet homme est réellement un danger pour la couronne, il comprendra et puis il doit déjà dormir.

— Le prince a toujours réfléchi avec son cœur. Il ne comprendrait pas pourquoi son père agit ainsi, déclara Hansel

Jungkook fronça les sourcils, de quoi ces hommes parlaient-ils ? Qu'est-ce qu'il ne savait pas ? Qu'est-ce qu'il ne comprendrait pas ?

— C'est un faiblard, cracha Sam. Il n'aura jamais les épaules pour être roi.

— Je t'ai déjà dit de surveiller ton langage, le sermonna Hansel d'un ton autoritaire.

— Je suis sûr que le prince sera un bon roi, intervint un autre homme.

Jungkook regarda à travers sa hutte et reconnut la chevelure rousse d'Asar, d'un de ses gardes.

— Tu parles, s'il n'est pas foutu de tuer un homme, comment pourrait-il être un bon roi.

— Tu penses que le massacre de tous ses hommes était justifié ? demanda Asar offusqué.

— Oui, répondit Sam en prenant une gorgée de sa boisson

— Tu réfléchis lorsque tu parles ? s'emporta le rouquin. Pour toi, le massacre de cinquante hommes était justifié ? Tout ça parce qu'ils avaient les cheveux blancs et les yeux bleus ? Quel idiot tu fais ! Si tu avais eu la malchance de venir au monde avec ces attraits physiques, tu aurais fini au bout d'une corde, et cela, même si tu ne portais pas cette marque, qui est la seule chose qui nous permette d'identifier cet individu.

Le cœur de Jungkook loupa un battement lorsqu'il comprit le sens des paroles Asar. Son père n'avait pas seulement envoyé ses hommes chercher cet inconnu, il avait ordonné la mise à mort de toutes ces personnes.

Abasourdi, le prince tituba en arrière jusqu'à tomber sur les fesses, créant un bruit qui attira l'attention des gardes qui étaient assis près du feu. Les larmes ruisselaient sur son visage sans qu'il puisse les retenir. Il ne voulait pas croire ce qu'il venait d'entendre. Son père avait mis à mort tous ces innocents sans aucune raison. Comment avait-il pu faire ça ?

— Votre Altesse ? appela Hansel avec prudence.

Jungkook ne répondit rien, il était incapable de parler. Sa gorge était nouée, ses membres paralysés. Il se sentait coupable. Pourquoi se sentait-il ainsi ? Ce n'était pas lui qui avait assassiné ces hommes.

— Votre Altesse est-ce que tout va bien ? demanda l'aîné en ouvrant la hutte du prince.

Lorsqu'il vit les yeux écarquillés et humides du prince, l'homme comprit qu'il les avait entendu. Il savait ce que son propre père avait fait.

— Vous m'avez menti, l'accusa Jungkook d'une voix brisée.

— Je ne pouvais pas vous dire la vérité. Votre père nous l'avait interdit, se justifia Hansel.

Jungkook ne voulait pas entendre ça. Il se leva d'un bond et sortit en trombe de la tente pour mettre le plus de distance possible entre lui et ses hommes. Jamais il n'aiderait son père à commettre un tel massacre.

— Jungkook où allez-vous ? demanda Hansel en voyant le prince se diriger vers son cheval.

— Loin de vous ! Il est hors de question que j'aide mon père à commettre de telles horreurs !

— Je vous avais dit qu'il était faible, se moqua Sam alors que Jungkook passait derrière lui.

Cette fois c'en était trop, le prince sortit son épée et la plaqua contre la gorge de l'homme qui se jouait de lui.

— Je ne suis pas capable de tuer un homme, tu dis ? La seule chose qui me retient de te couper la tête, c'est que ton sang risque d'ameuter des monstres pires que toi.

— Voyez-vous ça. Vous parlez de ces monstres qui vous ont soi-disant attaqué lorsque vous étiez enfant ? ricana Sam.

— Soi-disant ? Serais-tu en train de me traiter de menteur ?

Jungkook colla davantage sa lame contre la gorge de l'homme, l'obligeant à se lever.

— Je n'oserais pas, mais c'est ce que votre père à fait non ?

Jungkook s'apprêtait à répondre lorsqu'il entendit un craquement qui provenait de la forêt. Il regarda Hansel qui lui fit signe de ne pas bouger en levant la main. Les deux hommes observèrent rapidement les horizons et un deuxième mouvement se fit entendre. Quoi que ce soit, cette chose se déplaçait rapidement.

— Quoi ? demande Sam quand il vit la mine sérieuse de Jungkook et de son supérieur.

— La ferme ! ordonna Jungkook dans un murmure.

De nouveau, du mouvement attira l'attention du prince et lorsqu'un grognement parvint de l'obscurité de la forêt accompagnée d'une odeur de pourriture, le cœur de Jungkook loupa un battement. Ce grognement et cette odeur, jamais, il ne l'oubliera.

— Ne bougez plus, imposa Jungkook à voix basse.

— Pensez-vous réellement que nous allons croire à cette histoire de mons-

Sans même que Jungkook ait le temps de bouger, l'un des monstres bondit sur eux, plantant directement ses crocs dans la gorge de Sam.

Le poids de la bête fit tomber les deux hommes. Les hurlements de douleur de Sam résonnaient dans le campement. Il se débattait de toutes ses forces alors que le rapace déchiquetait son corps à coup de griffes et de crocs.

— Jungkook attention ! cria Hansel.

Le prince tourna la tête juste à temps pour voir l'une de ses créatures bondir sur lui. Il plaça sa lame devant son visage pour se protéger de la bête. Son épée s'enfonça dans sa gueule, découpant sa peau, mais la créature ne reculait pas. Elle s'acharnait, ne souhaitant qu'une seule chose, dévorer sa proie. Elle désirait sentir sa chair entre ses crocs et son sang coulait dans sa gueule.

Autour de lui, les hommes hurlaient de terreur et de douleur. Les rapaces avaient saccagé leur campement, faisant couler le sang de ceux qui s'y trouvaient. L'héritier regarda autour de lui, à la recherche de quelqu'un qui pourrait l'aider, mais Hansel était en train de se battre contre deux monstres. Sam ne bougeait plus, Asar était en train de perdre le combat et les trois autres étaient déjà morts. Leurs corps étaient en train d'être déchiquetés par ces monstres affamés.

— Merde ! grogna Jungkook en repoussant la bête.

La bave et le sang du rapace coulaient le long de sa lame. L'odeur de pourriture et de chair en décomposition avait pollué l'air, rendant l'atmosphère fétide. Alors qu'elle continuait de s'empaler contre l'épée du prince, les griffes de la créature déchiraient ses vêtements et la peau de ses bras, le faisant crier de douleur.

Face à la volonté que la créature avait de le dévorer, une idée traversa son esprit. Il fit appel à toute sa force et poussa son épée jusqu'à ce que sa lame tranche la peau de la créature, coupant ainsi sa tête en deux.

La carcasse du monstre s'écroula sur le prince qui se dégagea rapidement. Il se leva d'un bond et courut jusqu'au Hansel qui était à terre se débattant encore avec une des bêtes. D'un coup sec et précis, Jungkook abattit son épée et décapita le rapace qui s'écroula sur son aîné. Il se dépêcha de dégager le cadavre du monstre pour aider Hansel à se mettre sur pied.

— Hansel ! lança Jungkook en tirant l'homme pour le mettre sur pied.

Le concerné gémit de douleur et se mit à tousser en tenant son abdomen. Jungkook retira la main de son aîné et ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il vit la plaie béante qui se trouvait sur l'estomac de l'autre homme.

— Êtes-vous blessé ? demanda Hansel en toussant.

— Non je... je n'ai rien, menti Jungkook en ignorant la douleur dans ses bras. Il faut qu'on te sorte d'ici, tu as besoin d'un guérisseur.

Un nouvel hurlement de douleur attira l'attention de Jungkook, il pivota vers le cri juste au moment où un rapace frappa l'un des hommes, arrachant la moitié de son visage, avant de se jeter sur lui et d'y planter ses crocs.

Tous ses hommes étaient morts, il ne restait plus que Hansel et lui. Il devait partir maintenant, pendant que les créatures étaient occupées avec leur proie.

— Monte sur mon cheval, murmura Jungkook en reculant vers Hansel.

— Hors de question, mon devoir est de vous protéger votre Altesse.

— Je t'ordonne de monter sur ce cheval ! s'énerva le prince.

Hansel grogna de douleur et avança jusqu'au seul cheval qui avait survécu à l'assaut. Jungkook essayait de se déplacer en faisant le moins de bruit possible, les rapaces semblaient l'ignorer. Il était presque sûr que le sang de la bête qui recouvrait ses vêtements dissimulait sa propre odeur.

Alors qu'il avait presque atteint son cheval, une brise vint de nouveau caresser sa peau meurtrie, libérant une odeur de sang qui attira l'attention des rapaces.

Jungkook s'immobilisa lorsque l'un des monstres lève la tête pour renifler l'air. Ses yeux injectés de sang ne tardèrent pas à tomber sur le corps blessé de l'héritier. Dans un mouvement lent, la créature se redressa et un rugissement effroyable quitta sa gorge.

Le prince était paralysé par la peur et la douleur. Il voyait la bête avancer vers lui, mais son corps ne lui obéissait plus. Il entendait la voix de Hansel lui crier de bouger, mais il en était incapable. Lorsque le rapace bondit avec la ferme intention de la dévorer, il vit son aîné se jeter devant lui pour le protéger. Les dents du monstre s'enfoncèrent dans sa gorge avant de le mutiler sous ses yeux.

— NON ! hurla Jungkook.

Il s'apprêtait à se servir de son épée lorsqu'il fut poussé en arrière par Hansel qui venait d'user de ses dernières forces pour l'écarter. Jungkook tituba en arrière et trébucha sur un cadavre avant de tomber en arrière. Une douleur déchirante explosa dans son crâne quand sa tête heurta violemment le sol. Sa vision devint floue et ses oreilles commencèrent à bourdonner. Il entendait les créatures dévorer le corps de son aîné, ses os se briser sous leurs crocs. Il voulait se relever pour les tuer, mais il n'y arrivait pas. Son corps tout entier était engourdi par la chute et ses blessures, il tentait de reprendre son esprit, mais l'obscurité le gagnait de plus en plus.

Avant de sombrer dans la pénombre, le regard du prince se posa sur Hansel. Ses yeux sans vie et injectés de sang le regardaient. Jungkook aurait juré qu'il pouvait y voir toute la peur et la douleur que l'homme avait ressenti avant de partir.

— Je suis désolé, murmura Jungkook en sentant les larmes couler sur sa peau.

Ses paupières lourdes se fermaient sans qu'il puisse les contrôler, mais alors qu'il était sur le point de basculer dans l'inconscience, un rugissement bestiale fendit l'air. Il parvint à ouvrir de nouveau les yeux, juste assez pour voir des flammes dévastatrices s'abattre sur les rapaces, les réduisant instantanément en cendres.

Une créature avec des grandes ailes se posa brutalement sur le sol, faisant vibrer la terre sous son corps. Jungkook crut être pris d'une hallucination lorsqu'il vit une personne descendre du dos de la bête. Sa vision n'était pas nette, mais Jungkook pouvait voir par sa corpulence qu'il s'agissait d'un homme.

L'inconnu regarda autour de lui avant de faire signe à sa monture de rester immobile. Ses yeux se posèrent ensuite sur Jungkook qui gémissait de douleur en tentant de se relever. Il s'approcha du prince qui tendit sa main vers lui, ce dernier l'attrapa puis il l'observa durant quelques secondes. Son pouce caressa la cicatrice qui se trouvait sur sa paume et un petit rire résonna dans les oreilles du prince.

— On dirait que je viens encore de sauver la vie du bébé pleurnichard, déclara l'homme en retirant la capuche qui jusque-là dissimulait son visage.

Le cœur de Jungkook cessa de battre durant quelques secondes lorsqu'il reconnut ce regard perçant qu'il n'avait jamais pu oublier. C'était lui, il l'avait retrouvé.