C H A P I T R E 𝟷 𝟽



Bakugou Katsuki n'était pas vraiment le type de gars à laisser ses émotions le tourmenter.

Il n'avait pas de mal à se séparer de ce qui devait sortir, à ce qui devait rester en lui à jamais. Toutefois, en ce moment, un trop plein de sentiments venait l'envahir. Une surcharge qui l'empêchait de faire son tri habituel. Il y avait des intrusions plus récentes, causées par cet abruti de Kirishima. Et d'autres plus anciennes, qu'il réussirait sûrement à gérer sans problèmes s'il ne se sentait pas asphyxié dans une spirale dont il était le seul à ressentir l'ampleur.

Ses autres plus anciennes étaient pour la plupart alimentées par sa mère.

Par ses mots et leur dispute.

Parfois, il lui arrivait de pleurer lorsqu'il s'embrouillait avec elle.

Il avait beau répéter que ses paroles ne l'affectaient pas — qu'elles ne l'atteignaient pas, sa gorge s'asséchait toujours un moment ou l'autre. Un jour, deux semaines, ou même quatre mois plus tard, les mots revenaient à chaque fois poignarder son cerveau le bouffant de l'intérieur jusqu'à qu'il craque.

Tandis qu'il se mordait la lèvre jusque sentir le goût réconfortant du sang, son menton tremblait affreusement et ses pupilles finissaient toujours par se baigner de larme lamentable. Toutefois, plus il grandissait, moins ses larmes ressemblaient à un flot amassé de tristesse et de peine.

Maintenant juste deux ou trois douloureusement chaudes dévalaient son visage. Tandis que la rancoeur dominée de plus en plus ses actions.

— Sur tous les mômes de la Terre il fallait que j'tombe sur le plus ingrat de tous !

Katsuki ne savait pas s'il détestait sa mère, mais il savait que si on lui apprenait un jour qu'elle avait fini par crever qu'il ne pleurerait pas.

— Tu oses revenir ici après tout ce qui s'est passé ! Sans la moindre excuse ?! À quel point je t'ai mal éduqué ?!

Parfois, il se demandait si on avait pas incrusté une puce à tous les gosses du monde, avec pour simple commande d'être plus indulgent avec les parents. Pour lui, c'était la seule explication plausible. Pour quelle putain d'autre raison la plupart, dont lui-même, attendrait toujours quelques choses de ces êtres humains qu'ils pensaient qu'on leur devait le monde parce qu'on était sorti d'un de leur bide ?

Par amour ?

Juste des conneries.

— J'te parle, Katsuki !

Cette scène lui rappelait la première fois qu'il avait fugué de chez lui, à treize ans. Sa mère l'encourageait ironiquement à faire son sac, pensant certainement que lui parlait ainsi lui ferait douter de son choix, alors que cela le confortait juste dans sa décision. Son père positionnait entre eux, comme toujours, prenant le parti de personne, mais les suppliant de juste prendre le temps de discuter calmement. Et lui, de son côté, balançant n'importe quoi dans son sac, pressé à l'idée de sortir de cette piaule, enfoncer ses écouteurs, et enfin entendre autre chose que les hurlements hystérique de sa mère.

Si on omettait le passage où il avait malheureusement croisé Shindo et ses merdeux de potes, qu'ils l'avaient tabassé et pété son vélo, ça avait été un bon jour. Une très bonne journée.

Il s'était senti enfin respirer.

Il était presque sûr que ses premières vraies disputes avec sa mère avait été dû à cause de lui, à cause de Shindo. « D'où viennent tes blessures ? » « Qu'est-ce que tu me caches ? » « Pourquoi est-ce que tu ne nous dis jamais rien ? » « Tu t'es encore bagarré ? »

Avec le temps toutes ces questions s'étaient muées en quelque chose de moins supportable, plus poignant. « Tu nous mérites vraiment pas ! » « J'me demandait si on ne t'as pas échangé à la naissance ! » « Qu'est-ce que j'vais faire de toi Katsuki ?! »

Le jour où tout avait vraiment commencé à dérailler, fut lorsqu'il avait fini par avouer tous ce qu'il subissait au collège.

Sa mère avait dit un truc du genre : « C'est une blague ? Tu joues au délinquant mais tu te fais harceler ? C'est pour ça que je t'ai dit de rester tranquille. »

Il ne se rappelait pas qu'est-ce qu'il avait répondu, mais il pourrait encore décrire cette sensation qui lui avait incendié l'œsophage. Il avait tellement regretté se confier, que se souvenir lui broyait encore l'intérieur.

Il avait jeté un coup d'œil à son père qui ne l'avait pas adressé un regard, comme incapable de lui dire quoique se soit, noyé comme lui par les paroles culpabilisantes de Mitsuki. Katsuki s'était levé pendant qu'ils avaient fini par discuter entre eux de son cas, comme si il n'était plus là. Sa mère avait même remis en doute sa parole, et son père ne l'avait pas vraiment défendu. Il avait fini par rejoindre le garage. Et le cendré pouvait encore sentir l'odeur atroce de l'essence de la vieille voiture de son père. Il avait ouvrit la boîte à outils, avait saisi un cutter, et avait rejoint sa chambre calmement.

Ce fut la première fois qu'il se scarifia.

Et ça lui avait fait drôlement du bien.

— Retires-moi tes écouteurs immédiatement ! J'suis entrain de te parler merde !

Oui, et ça faisait genre dix putain de minutes qu'elle paillait pour un rien. Il n'avait pas atterri ici pour l'écouter gueuler les mêmes conneries, mais juste pour prendre quelques fringues de quoi ne plus porter le même slibard deux jours d'affilée.

C'était fou cette répulsion. Il saignait déjà des oreilles, il se sentait oppresser à peine après avoir mis les pieds ici. Écrasé par des mots qui ne devraient même plus l'affecter.

— Mitsuki, s'il te plaît...

Il ne put s'empêcher d'adresser un regard mauvais à son père qui tentait de contenir sa tarée de femme. Rien de tous ça serait entrain de se passer, s'il ne lui avait pas menti en lui disant qu'elle était absente. Mais, non, ce con voulait tout arranger. Son paternel était un abruti fini, un naïf qui croyait dur comme fer que tous finissaient par se résoudre. Un pauvre débile qui pensait que les happy endings n'étaient pas juste réserver aux écrans.

Ça faisait longtemps que tout était fini, complètement brisé.

— Katsuki, s'il te plaît !

Là, il était déjà loin de sa baraque, mais son père l'avait rattrapé. C'est ce qu'il faisait toujours lorsqu'il sortait en trombe.

Le cendré s'arrêta, enlevant un de ses écouteurs. Il se tourna vers son père, déglutissant difficilement. Il avait une satanée boule dans la gorge. C'était horrible.

— Quoi ?

Masuru ouvrit la bouche comme pour dire un million de choses, mais rien en sortit. À la place, il prit les deux mains de son fils. Ses doigts tremblaient. C'était horrible.

— J-je suis désolé...j'aimerai tellement que ça s'arrange entre toi et ta mère...

Il serra encore plus fort ses mains. Derrière ses lunettes, se dissimulaient son regard peiné. Et à sa voix qui frissonnait à chacun de ses mots, on comprenait à quel point il luttait pour ne pas fondre en larmes.

C'était horrible.

Toutefois, Katsuki retira ses doigts de celui de son père pour mettre sa capuche, puis les enfonçait dans ses poches. Masaru en profita pour essuyer une larme qui s'échappa de son œil brun, et sortit son portefeuille.

— Je sais que tu ne veux pas prendre mon argent, mais je m'inquiète pour toi...où est ce que tu dors ?

— Chez Neito.

— Vraiment ?

Les yeux de son père brillaient encore. Horrible.

— Ouais.

— D'où viennent tes blessures ? Tu n'en avais pas autant la dernière fois.

Les yeux de Masaru parcouraient son visage éraflé de partout, où quelques pansements traînaient. Katsuki le remarqua, tirant sur sa capuche. Il enfonça encore plus dans ses poches ses mains dont il sentait le sang enfler ses bandages.

— C'est rien.

— Katsuki...

— C'est rien, j'te dis, le blond éleva la voix.

Masaru hocha la tête promptement. Il avait l'air tellement désemparé que Katsuki se demandait s'il faisait parfois des reproches à sa mère quand il n'était pas dans le coin. Ou, au contraire, s'il l'avait juste la même tronche en rentrant, en faisant comprendre silencieusement à sa femme que c'était bien lui le problème.

— Prends ça.

Il s'empara de la main de son fils pour mettre des billets au creux de sa main. Les siennes tremblaient encore. Katsuki ne pouvait vraiment plus le supporter. Il remit alors ses écouteurs, poursuivant son avancée, sans dire un mot de plus à son père.

Fait attention ! Il ne l'avait pas attendu mais c'était sûr qu'il le lui avait dit.



✧✦✧



— J'dormirai pas dans ta piaule alors que des gens vont baiser dans la chambre d'à côté.

Bakugou errait dans la ville tel un spectre. Il se sentait vidé de l'intérieur, une mollesse audacieuse accaparant ses muscles. Sans réelle destination, il se baladait plus ou moins au gré des coins d'ombres qu'il dénichait ; alors que les rayons du soleil de plus en plus fort le défiait de retirer son sweat à capuche. Mais il préférait mourir de chaud dedans que s'en séparer.

Mourir...

L'idée lui plaisait pas mal.

— C'est dans la tienne qui vont baiser si tu viens pas ! Monoma gueula dans ses oreilles.

Pour la dixième fois depuis le début de leur conversation, Bakugou était tenté de lui raccrocher au nez. Il passa sa main sur son visage morflé, écoutant son ami déblatéraient encore et encore. Monoma le tapait autant sur le système, que le soleil fouettait sa nuque.

— J'viens pas, il répéta.

— Et ou tu vas dormir ? cette fois-ci c'était Shinso qui parlait, au parc de la ville comme au début de la semaine ?

Si cette enflure avait été en face de lui, Bakugou lui aurait fait un doigt.

— Ta gueule.

— Toi ferme là, Monoma reprit son portable, t'as un sérieux soucis, on te propose un logement confortable mais tu veux jouer ton tarzan. On a du te ramener de force dans la voiture pour t'empêcher dormir à la belle étoile.

Bakugou entendit Shinso rire à ce souvenir récent, mais lui ça ne l'amusait pas vraiment.

— C'est quoi ton putain de problème ?

Il détestait se sentir dépendant des autres, c'était ça le putain de problème. Même si ce rouler des joints après la fermeture avec Aizawa avait été une activité plutôt sympa, c'était aussi pour cette raison qu'il s'était vite tiré du Plus Ultra.

— C'est bon, me les casse pas, j'viendrais...

Et juste après leur conversation, il comptait vraiment aller chez Neito. Il était à peine 19 heures, à cette heure là, personne ne devrait encore se trouver à cette fête de merde. Alors il aurait fait le stock de bouffe, piqué l'ordi de ce con, pissé trois fois avant que cette foutue soirée démarre, et s'enfermé dans sa chambre pour être coupé du monde pour au moins le lendemain.

Mais il croisa Kirishima.

À l'autre bout de la rue, il faisait le sens inverse et avait la tête baissée sur son portable. Sa casquette cachée un peu trop ses cheveux, alors Bakugou dû se reprendre à deux fois pour être sûr qu'il s'agissait bien de lui. Pendant une seconde, il fut bénit que cette abruti ne l'ait pas remarqué. Cette journée n'avait pas été aussi merdique après tout. Cependant, sans même réfléchir, il avait fini statique sur le trottoir, sa tête se tournant à mesure que le rouquin s'éloignait.

La seconde d'après, Bakugou s'était mis à faire demi tour pour le suivre.

Et la seconde suivante, le stopper dans sa stupidité.



✧✦✧



Peut-être que Kirishima avait été légèrement impulsif sur ce coup là ?

Légèrement.

Rien de trop excessif.

— Fais un pas de plus, j'te tue moi-même.

Mais que ce soit monsieur je-vis-pour-la-bagarre qui l'arrête. C'était vraiment le monde à l'envers.

— Et ferme là, Bakugou menaça.

Le rouquin obtempéra sans que ça soit nécessaire au blond de se répéter, son esprit était de toute façon trop concentré sur les doigts de Bakugou qui couvraient ses abdos. Il avait été obligé de toucher ici pour l'attraper ?

Le cendré ôta sa main de la figure du rouquin, et décrocha également la prise qu'il avait en dessous de son teeshirt. Kirishima eut enfin l'impression de pouvoir de nouveau respirer, mais n'eut même pas le temps de reprendre son souffle que le blond lui saisit le poignet pour l'éloigner des deux autres ados, le faisant lâcher la brique dans sa main par la même occasion.

Traîné de force, le carmin se demandait quelle tête Katsuki pouvait bien faire sous la capuche de son gros hoodie noir. Ça faisait combien temps qu'il l'observait ? Et pourquoi il l'arrêtait ? Est-ce qu'il avait au moins vu que c'était Shindo là bas ?

— Qu'est-ce que tu fais là ? il ne put s'empêcher de demander alors, chuchotant tout de même.

— Ferme la, la ferme, tais-toi ! Bakugou aboya.

Il serrait tellement fort le poignet de Kirishima qu'il était sûr que ses doigts étaient entrain de marquer la surface de sa peau. Visiblement, le plan abattre Shindo n'était pas à son goût.

— Calme-toi, l'autre ado répliqua dans un soupir, tu me dis de me taire mais tu gueules comme un ivrogne.

Le carmin, toujours un peu à cran, tourna juste la tête pour s'assurer que les deux garçons ne les avaient pas entendu, souciant le moins du monde que le blond était au bord de l'implosion.

Bakugou le conduisit jusqu'à l'autre extrémité de la ruelle, n'oubliant pas de marmonner une litanie d'injure à l'autre adolescent. Il se sentait d'un coup comme un volcan prêt à exploser à tout moment. Il ne comprenait pas vraiment, mais l'idée que Kirishima se confronte à Shindo le mettait dans tous ses états. Ça lui nouait l'estomac.

— T'allais faire quoi là ? il lui lâcha l'articulation pour le pousser contre la façade, et me sort pas un de tes trucs bidons parce que j'vais vraiment finir par te tuer.

Le seconde leva juste les yeux vers lui, ne comprenant même pas pourquoi Bakugou était aussi vénère. Il déglutit malgré lui, rencontrant son regard furieux.

Ses épis blonds, aplatis sous sa capuche, paraissaient plus longues sur son visage balafré de partout. Il avait des pansements collés sur le nez et le menton, et une plaie rouge sur ses lèvres naturellement rosés. Il s'était encore battu ? Il avait suffit à Kirishima pour le remarquer pour que ça soit son unique préoccupation. Ça faisait à peine une semaine depuis qu'il s'était vu. Qu'est-ce qu'il avait bien pu foutre en sept fichus jours ?

— Rien...il répondit.

Le mensonge était inutile, mais la question de Bakugou n'aidait pas. À son avis qu'est-ce qu'il s'apprêtait à faire là ? Avouez ce que Shindo avait dit pourrait lui permettre d'endurcir sa défense, mais ça empirait sûrement juste les choses d'un autre côté, alors Kirishima ne rajouta rien.

Le cendré se rapprocha encore de lui, passant sa langue sur ses lippes. Ses doigts crispés sur le bras du roux, il prit une sévère inspiration. Inflexible, le plus jeune l'observait juste lutter contre lui-même. Et peut-être qu'à l'instant ou il vit les yeux du blond se voilaient d'un sentiment méconnaissable, qu'il comprit que ça n'avait pas été son idée la plus brillante d'avoir tenté tabasser Shindo.

— J'suis...désolé, il marmonna.

Le seconde avait répliqué ça avec tellement sincérité qu'il fut le premier surpris. Bakugou enleva un peu de cette aigreur dans ses yeux, peut-être lui aussi un peu étonné, et finit par lui lâcher le bras.

— J'suis pas cette enflure de Deku, remets ton nez dans mes affaires j'te bute.

Kirishima grommela un truc se rapprochant de « okay s'tu veux mec », acquiesçant tel un gosse réprimandé, sachant pertinemment qu'il remettrait encore son nez dans ses affaires, comme il avait toujours eu l'habitude de le faire. Bakugou se sépara enfin de lui, pas très convaincu de la réponse, mais s'en contentant.

— Qu'est-ce que tu t'es fait ? le rouquin tenta.

Le cendré ne répondit pas, s'adossant contre le côté ombragé de la façade. Il ressemblait à un genre de vampire avec sa peau blafarde, ses veines bleutées, et son délire à cacher sa peau du soleil en pleine été.

— Arrête de m'ignorer !

— Ça te regarde pas ! Et me pose plus de question putain.

— Okay...

Eijiro roula presque des yeux, saoulé du mutisme navrant de Katsuki. Celui-ci l'ignora même s'il avait bien senti l'impatience du carmin. Il inspecta de ses yeux perçants juste s'ils s'étaient assez écartés des deux ploucs apparemment obsédés par lui. En réalité, il aurait bien aimé éclater la gueule de Yo. Le timing était presque trop parfait, jouissif. Et étrangement, s'il n'avait pas passé une sale journée, peut-être bien qu'il aurait prit plaisir à le défigurer une deuxième fois. Mais passez ses nerfs sur un handicapé ne lui plaisait malheureusement pas trop. L'acharnement c'était pas vraiment son truc.

Contrairement à Shindo.

— Dis moi juste si y'a des chances que tu finis mort dans un ravin, que je m'y prépare.

— Ferme là.

— Tu ressembles à rien mec, c'est ton choix si tu veux pas de moi dans tes pattes, mais fais au moins semblant de ne pas avoir besoin d'aide.

— Va te faire foutre, Kirishima.

Katsuki discerna ce brin de condescendance dans le ton du rouquin qu'il ne lui ressemblait pas. Il aurait pu s'en offenser, ou s'en moquer de ce soudain tempérament mais il n'était d'humeur ni pour l'un, ni pour l'autre. Et il était toute façon trop occupé à cogiter sur pourquoi cet imbécile a tenté de se faire Shindo. Il avait pété un boulon ou quoi ?

Le blond ne le pensait même pas capable de faire un truc pareil. Lorsqu'il avait observé ce crétin, il n'avait même pas vu ce chien de Shindo. Et de toute façon, que ça soit lui ou quiconque, Kirishima était le genre de type à toujours éviter le conflit, à tenter de calmer les tensions et faire d'autres trucs de merde dans ce genre. Il était comme un de ses mecs dotés d'ailes horriblement blanches, et de cercles volants aveuglants.

Un putain d'ange.

Katsuki se venait à se demander si ce qui tenait entre Eijiro et lui, n'était pas un peu similaire à la relation ce qu'il entretenait avec sa mère. Un fil qui retenait l'autre malgré toutes les merdes. Lui aussi avait une puce intégrée.

Y'avait pas d'autre explication.

Il se laissa glisser au sol, profitant la fraîcheur de la ruelle pour se libérer de ses pensées. Tellement minuscule qu'elle échappait au règne de l'été. Kirishima fit de même avec nonchalance.

Avec deux de ses doigts, le seconde fit rentrer par le col de l'air dans son teeshirt. Lui avait extrêmement chaud. Trop d'émotion traversée en peu de temps. De son côté, le cendré, tentait de s'allumer une clope. Ses longs doigts tremblaient vachement, et les bandages qu'ils les recouvraient étaient rougeâtres.

Qu'est-ce qu'il avait bien pu faire encore ? Une semaine d'exclusion, et il se remettait à défoncer tous ce qui bougent. Eijiro tourna la tête vers la débouchée de la rue, pas mal loin maintenant, comme pour laisser à Katsuki de l'intimité pendant qu'il galérait avec sa cigarette. Les sourcils froncés, le seconde avait une soudaine envie de le sermonner (même si le blond n'écoutera sûrement pas la moitié).

Maintenant qu'il était avec Bakugou, le rouquin la sentait bien. Cette fichue frustration. Cette sensation d'être à la fois proche de lui, mais également très loin. À des millions de kilomètre. C'est pour ça qu'ils ne se comprenaient pas. Une pièce était manquante, ou de trop. Quelque chose perturbait leur relation.

— T'es qu'un con, vraiment, Katsuki déclara.

— Et toi t'es chelou, vraiment, Eijiro enchaîna.

Il entoura ses jambes avec ses bras. Et reprit enfin calmement le contrôle de sa respiration, la tête basse pour ne pas inspirer le tabac dans l'air.

— T'es toujours trop bizarre mec, il poursuivit avec sérieux, tu travailles pour la mafia ou quoi ? Et j'trouve que tu fais pas assez attention à toi pour un narcissique.

— Ta gueule, le blond grogna, lui faisant un faible coup de coude.

— Pourquoi tu m'as arrêté ? Eijiro changea de ton, j'pensais que ça serait ton kiffe de me voir me battre. Surtout contre Shindo...

— Je te l'ai expliqué y'a deux minutes pourquoi.

— Oui, mais la dernière fois tu m'avais déjà proposé de-

— J'me foutais ta gueule.

— Oui, mais-

— J'en sais rien, et on s'en fout.

Kirishima resta quelques secondes interdit, ses yeux figés sur des fleurs asséchées et à moitié piétinées, avant de soupirer :

— Je m'en fous pas, moi.

Bakugou lui jeta un coup d'œil, un drôle de sourire étirant cette fois-ci ses lèvres. Plus il passait du temps avec ce con, plus il commençait à se résigner. À croire que se coltiner Kirishima était sa punition divine.

Vraiment, qu'est-ce qu'il devait faire pour qu'il lui foute la paix ?

Une partie de lui aimerait se dire qu'enterrer ce débile dans un trou paumé serait la solution. Mais peut-être qu'éviter de le suivre dans la rue, arrêtez de penser à sa sale gueule lorsqu'il n'était pas démolit par les paroles de sa mère, ou entrain de prendre son pied à frapper n'importe qui serait plus simple.

Ça pourrait être un bon début.

Mais c'était trop tard maintenant. L'intrusion s'était trop immiscée dans sa tête, il ne pouvait décidément plus échapper à ce supplice. Bakugou ne s'en plaignait du moins pas, il ne s'en plaignait plus. Avoir la tête de Kirishima dans son crâne était moins pénible à endurer que le disque dur ou il était minutieusement intégré les paroles les plus cruelles de sa daronne.

Kirishima se tourna, rencontrant les yeux rubis de Bakugou qui le tourmentait depuis des mois. Ce rictus chelou qu'il affichait à chaque fois qu'il était enflammé d'une drôle d'envie le narguait également. Le carmin fit la moue s'attendant à entendre une vanne splendide et méchante qui lui serait généreusement dédicacée. Mais le cendré ouvrit la bouche pour lui dire :

— On va dire que c'est parce que j'te déteste pas.

Le temps d'un instant les mots de Katsuki flottèrent dans l'air comme un écho, tel ce résidu de nicotine qu'il venait de rejeter de ses lèvres. Malgré la voix quelque peu trépignante et moins assuré qui les avait accompagnés, ses paroles crachées avaient été étonnement franches.

Le rouge fut ébahit quelques secondes, ne comprenant définitivement pas qu'est-ce que ses paroles fichaient avec ce sourire exécrable. Mais Katsuki se leva, et avança comme pour fuir ses propres mots, retirant son rictus dans un même temps.

— Maintenant si je refais un truc dans ce style, t'as ta réponse. Donc me repose plus jamais la question.

Eijiro hocha la tête, se mordant la lèvre pour ne pas sourire bêtement. Il ne le déteste pas. Okay, peut-être qu'il avait jugé trop vite la valeur de ses quatre petits mots. Il ne s'attendait pas à ce qu'il le lui répète une seconde fois.

Le visage du rouge se déforma de son sourire mal dissimulé, pendant que ses pieds suivaient aveuglément Katsuki. Là, comme ça, ses joues douloureusement étirées par cette euphorie inopinée, et ses doutes un peu atténués, il savait qu'il aurait pu le suivre jusqu'au bout du monde.

Ils sortirent enfin de la rue, agressés par cette chaleur joviale, le rouquin remit bien en place sa casquette, et Bakugou affronta le soleil plus par obligation que bravoure. Il tapota sur sa cigarette, faisant chuter la cendre, glissa de nouveau un coup d'œil à Kirishima qui souriait encore, et demanda d'une voix agitée :

— Tu viens à la fête de Neito ?

Ne croyant pas ce qu'il venait d'entendre, le rouge pivota sa tête tellement fort que ça aurait pu lui provoquer un torticolis. Les yeux ronds, du regard il demanda à Bakugou de se répéter. Mais ça avait l'air d'être sa dernière volonté, alors Kirishima enchaîna maladroitement par :

— Euh...non...enfin, j'suis pas trop sûr.

Ce n'était pas la peine de rappeler qui n'avait absolument pas prévu de prendre part à cette événement. Mais si Bakagou tenait à ce qu'il vienne...

— J'participerai pas à ce truc de merde.

— Ah okay.

Pourquoi il lui demande si c'est pour dire ça ? Kirishima massa sa nuque, ses espoirs anéantis en une réplique.

— Mais si tu viens...

Kirishima tendit de nouveau l'oreille, la tête impassible par peur d'être bousillé par une nouvelle vague de déception. Bakugou passa sa langue sur ses dents, un jolie rictus pas très rassurant prenant possession de ses lippes. Ses yeux s'éclairèrent aussi à la foulée. Le rouquin eut peur de reconnaître cette grimace vicieuse qu'il arborait quand une idée affreuse et sadique lui passait par la tête.











— ...Appelle-moi.

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J'ai beaucoup aimé écrire les mommy issues de Bakugou lol

J'espère que chap vous a plu !

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