Cʜᴀᴘɪᴛʀᴇ 7 - ᴬᶰᵈʳᵉ́ - Automne 1943
♫ : Molchat doma - Sudno
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Chapitre 7
Point de vue d'André
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Automne 1943.
Les mois passent. Mon corps a énormément maigri. Je ne mange pas à ma fin. Je ne dors pas assez. J'ai mal partout. Je manque de force. Comme tout le monde ici finalement...
Je veille toujours sur Jo. Même s'il est toujours à mes côtés, nous ne parlons pas beaucoup.
Je suis convoqué dans le bureau de Friedrich Weimer. Je quitte le travail forcé pour m'y rendre immédiatement. A l'intérieur, il est assis - presque allongé - sur un fauteuil qui a l'air confortable, les pieds croisés et posés sur la table. Je sais déjà ce qui m'attend.
— Tu connais la chanson. Déshabille-toi.
Le regard vide, je commence à déboutonner ma chemise, obéissant. Lorsque c'est entièrement fait, il m'ordonne de me pencher sur le bureau. Ensuite, il se lève, fait le tour pour me rejoindre et se place derrière moi. Je ferme les yeux et essaye de penser à autre chose lorsque j'entends qu'il baisse son pantalon et qu'il me prend violemment.
J'aurais préféré ne jamais y aller mais je n'ai aucun moyen pour éviter cela. Ma démarche est boiteuse lorsque je reviens vers les autres mais je fais mine de rien. Je vois la lueur d'inquiétude présente dans les yeux de mon frère et je sais qu'il a compris ce qu'il s'est passé.
Ce n'est ni la première ni la dernière fois que cela arrive. Ils répriment nos actes homosexuels et pourtant certains d'entre eux satisfont leurs envies sur nous. Soit disant c'est pour nous soigner et nous dégoûter ; je n'y crois pas un mot. Je pense qu'ils n'assument pas leur attirance homosexuelle.
La première fois que c'est arrivé au camp, je l'ai supplié. J'ai hurlé. J'ai pleuré. Il a aimé me voir souffrir et il me semble même que cela l'a excité de me voir ainsi. Mon esprit a rapidement fait le vide pour me permettre d'oublier, le temps que cela finisse. Depuis, je n'ai jamais plus essayé de me débattre et je me contente de rester silencieux en subissant, bien que ses coups de reins deviennent toujours de plus en plus brutaux pour se venger de mon mutisme.
— André tu... Commence Joseph.
— Cela ne te regarde pas. Laisse-moi tranquille.
Joseph semble peiné par ma réponse aussi sèche et se détourne pour continuer à travailler. Je n'ai pas envie d'en parler, bien trop honteux. Je me sens souillé. J'ai envie de disparaître.
***
Après cela, Joseph m'a évité et ne m'a pas adressé la parole, boudant véritablement contre moi.
Au bout de quelques jours, je décide d'aller discuter avec lui lors du déjeuner pour nous réconcilier.
— Ne m'en veux pas, Joseph...
Il ne répond pas.
— Tu sais, ce n'est pas facile tout ça...
— Mais comment tu peux les laisser te faire ça ?! Crie-t-il un peu trop fort.
Je regarde autour de nous tandis que je plaque ma main sur sa bouche quelques instants pour lui signifier d'être plus discret. Heureusement, personne ne fait attention à nous.
— Si je veux survivre, il faut que je fasse profil bas.
— Oui mais pourquoi tu portes un triangle rose ? Et comment ils ont su... ?
Je soupire et souris tristement.
— Je ne sais pas comment ils l'ont appris... Enfin si, je pense que c'est lui qui m'a dénoncé.
— Qui ça ?
— Le lieutenant Jäden Wagner.
— Mais pourquoi et comment ? Me questionne-t-il, les yeux écarquillés, visiblement surpris par ma réponse.
— Lui et moi... Enfin... Il était le seul à le savoir et lorsque j'ai été arrêté, on m'a avoué la raison de mon arrestation... J'ai vite fait le lien.
— Et ça fait longtemps que tu... ?
— Que j'aime les hommes ? Oui, je m'en suis aperçu durant l'adolescence. J'ai renié mon attirance au début mais j'ai fini par céder assez tôt... Mais je ne suis pas malade, Jo, je te le promets.
***
Un matin, durant l'appel, on nous annonce que certains vont être transférés ailleurs. Mon nom fait partie de la liste, enfin mon numéro.
Mon frère est triste et s'inquiète pour moi. Je le rassure comme je peux même si au fond de moi je suis terrifié parce que je ne sais pas ce qu'il va m'arriver et que je souhaite pas quitter mon frère. Néanmoins, je ne peux pas m'y opposer.
Lors de la séparation, Joseph m'enlace brièvement. Au moins, pour une fois, ceux qui s'en vont ont la possibilité de se dire rapidement au revoir.
— Je n'ai pas envie que tu partes. Tu vas me manquer.
— Je sais mais je n'ai pas le choix. Prends soin de toi, Jo.
Friedrich Weimer se tient non loin de nous et rit de manière sadique.
— Ne t'en fais pas, je prendrai soin de ton frère en ton absence. Je m'en occuperai personnellement, me promet-il fièrement avec un clin d'œil rempli de sous-entendus.
Je lui envoie un regard terrifié et cela semble lui plaire.
— C'est dommage, tu ne seras plus là pour le protéger...
— Ne faites pas cela, je vous en prie... Quémandé-je.
Je suis poussé vers l'arrière du véhicule pour que j'y monte, tout comme d'autres détenus. Je regarde une dernière fois Joseph pour lui envoyer tout mon courage avant de m'exécuter. Je me promets intérieurement que cela ne sera pas la dernière fois que nous nous voyions.
Lorsque le convoi démarre, je me mets à penser à l'endroit où on me conduit et à ce qu'y m'attends. J'espère qu'ils ne nous conduisent pas littéralement à la mort, même si le camp en est l'un des moyens.
***
Le véhicule a roulé si longtemps que j'en ai perdu le fil. À l'arrivée, nous sommes accueillis de nuit et nous sommes conduits, après l'appel, à un bloc.
Nous nous retrouvons mélangés à des anciens prisonniers ; ces derniers dorment déjà. Je me contente de me glisser dans un endroit vide pour m'endormir.
Le lendemain matin, je me fais la remarque qu'il y a très peu de triangles roses. Nous sommes mélangés avec les autres, même si ces derniers nous excluent et s'éloignent facilement de nous. Je n'ai pas la gale, bon sang !
Un visage familier m'attire le regard. Pourtant, ce premier semble si changé... Cependant, je n'ai pas l'opportunité de lui parler immédiatement puisque les gardes nous surveillent plus que nécessaire.
Je ne comprends pas la raison de sa présence ici. Pourquoi est-il détenu et porte-t-il un triangle rose s'il m'a piégé ?
Durant le chemin pour aller travailler, j'en profite pour me glisser à ses côtés pour discuter avec lui, tout du moins essayer.
— Jäden... l'appelé-je pour attirer son attention.
Il ne daigne même pas me regarder. Son visage semble vide d'expression, tel un zombie.
— Jäden... C'est moi, André... continué-je.
Aucun regard. Aucune parole. Je le prends mal et me tais.
Pourquoi ne veut-il pas me parler ?
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Qu'en avez-vous pensé ? Pourquoi Jäden réagit ainsi à votre avis ?
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