Cʜᴀᴘɪᴛʀᴇ 1 - ᴶᵒˢᵉᵖʰ - Été 1943
♫ : James Arthur - Train Wreck
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Chapitre 1
Point de vue de Joseph
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Je sais que les événements vont s'enchaîner rapidement mais je peux vous assurer qu'ils seront nombreux. Je crois que l'une de mes craintes c'est le manque de développement et par conséquent que les choses soient traitées trop brièvement.
N'hésitez pas à commenter, voter. J'aime connaître votre ressenti à fois à la fois pour être rassurée et pour m'améliorer.
Sur ce, bonne lecture !
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Été 1943.
J'ai voyagé pendant une éternité mais ce voyage n'a rien du rêve paradisiaque auquel on peut souvent penser.
J'ai passé plusieurs jours dans un wagon de marchandises scellé, entassé avec d'autres personnes, les plus inquiètes les unes que les autres. Les odeurs d'urine et d'excréments nauséabondes et le fait qu'il n'y ait aucune installation sanitaire en dehors d'un seau n'ont rien arrangé quant à notre condition. Sans eau ni nourriture malgré la chaleur intense d'été, beaucoup d'individus sont morts avant d'arriver à destination.
A notre arrivée, nous sommes accueillis par des gardes qui nous poussent violemment en dehors des wagons. Des chiens aboient à plusieurs reprises contre des personnes manquant de tomber en sortant. Ceux qui tentent de s'enfuir n'ont jamais réussi à atteindre leur objectif : ils ont été exécutés sur le champ lorsqu'ils se sont mis à courir pour s'échapper. Cet événement a choqué la plupart des transportés, moi y compris.
Plusieurs files sont effectuées : d'un côté les hommes et les femmes étant en âge et en capacité de travailler, de l'autre les mères avec leurs enfants et les personnes âgées. Je me retrouve dans la première queue. Lorsque c'est enfin mon tour, on me demande nom, prénom, âge, profession et raison d'arrestation. Je réponds sincèrement, ne voulant pas connaître le même sort que l'homme qui se fait battre à mort à quelques pas de moi. Ses cris résonnent toujours dans ma tête et je n'arrive pas à les oublier.
Dans une salle située à l'intérieur du camp, on nous a ensuite ordonné de nous déshabiller entièrement. Les hommes et les femmes ont été séparés à l'entrée mais cela n'en reste pas moins honteux et humiliant, brisant notre intimité. Nous nous sommes cachés avec les mains par pudeur. Nous avons ensuite été lavés, ou plutôt désinfectés, avant d'être complétement rasés et tondus pour éviter les propagations de maladies ou de poux. Le crâne rasé, j'enfile enfin la tenue que l'on me donne : elle est bleue et blanche rayée mais elle semble déjà avoir été portée auparavant.
Je fixe avec horreur le tatouage situé sur mon avant bras, correspondant à mon matricule. Ce nombre figure aussi sur mon uniforme de prisonnier, tout comme un triangle rouge à l'envers recouvert d'un triangle jaune, formant donc l'étoile de David.
Il fait déjà nuit alors après l'appel, on nous sépare en plusieurs groupes. Je suis affecté à un baraquement d'hommes, ici pour diverses raisons. Je peine à dormir, entassé dans un lit superposé en bois avec d'autres personnes.
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Le lendemain, après l'appel matinal qui a duré des heures et des heures, nous sommes conduits mon groupe et moi à notre futur travail.
Lorsqu'on arrive sur les lieux, d'autres sont déjà au boulot. Ce qui me marque le plus est l'extrême maigreur de certains mais aussi leur regard vide. Ils semblent morts de l'intérieur. Cela me terrifie énormément, à l'idée de devenir comme eux.
Lors du repas, je fixe avec horreur la faible portion qui sent terriblement mauvaise. Autour de moi, la plupart lèchent le récipient pour récupérer la dernière goutte.
- Tu sais si tu n'en veux pas, tu peux toujours me le donner, propose un jeune homme d'une trentaine d'années assis à côté de moi, mais je te conseille de manger tout parce que tu ne survivras pas longtemps sinon, me conseille-t-il.
Je reste muet et commence à manger. La soupe est liquide - de l'eau - avec quelques légumes pourris qui flottent à la surface. Le café est tout aussi infâme, ce qui m'arrache une grimace. Seul le maigre bout de pain console mon estomac.
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Le surlendemain, à l'heure du déjeuner, j'assiste à une terrible scène. Un jeune homme s'est fait voler sa ration par d'autres, apparemment plus forts que lui. Par élan de solidarité, je me lève d'un pas décidé et m'approche de lui avant de lui tendre mon pain. Il semble assez surpris, hésite quelques secondes avant de l'attraper et s'éloigner rapidement avec sans un mot.
C'est lorsque je retourne à ma place que je remarque que tout le monde me dévisage. Mal à l'aise, je baisse les yeux et termine de manger ma soupe.
- Tu n'aurais pas dû faire ça, dit le trentenaire qui m'a parlé la veille.
- Pourquoi ? Demandé-je en levant les yeux pour le regarder.
- Parce qu'ici, il n'y a que très peu d'entraide. C'est chacun pour soi si on veut survivre... Et puis au lieu d'aider un de ses cochons, il aurait mieux fallu que tu donnes ton pain à quelqu'un d'autre.
Je fronce les sourcils à l'attente de cette insulte, tiquant légèrement.
- Je... Mais il s'était fait voler sa nourriture et ce n'était pas juste. Qu'a-t-il fait au juste pour être traité ainsi par les autres ?
- C'est un triangle rose, la plus basse catégorie du camp. Ils sont considérés comme les plus inférieurs, encore plus que nous, les juifs.
- Le triangle rose ? Posé-je la question, sans comprendre la signification des triangles roses.
- Rose pour les pédés. Ils sont ici pour leur déviance. En général, ils sont séparés des autres pour éviter de nous contaminer et de nous pervertir à notre tour. Un conseil, reste loin d'eux, ça t'évitera, à tort, d'être considéré comme eux.
J'ai un petit pincement au cœur lorsqu'il me dit cela, même si je ne sais pas pourquoi.
- Après, il y a d'autres triangles : rouge pour les prisonniers politiques, vert pour les criminels, bleu pour les apatrides, violet pour les témoins de Jéhovah, brun pour les tziganes et noir pour les asociaux...
Personnellement, je suis juif et résistant, d'où mon triangle rouge à l'envers recouvert d'un triangle jaune, formant l'étoile de David. Celui à côté de moi porte simplement une étoile juive.
- Comment est-ce que tu t'appelles ?
- Ce n'est pas la peine de le savoir. Tu dois oublier ton identité ici. Les Allemands ne doivent jamais savoir que tu te fais appeler par ton prénom. Tu n'es plus qu'un numéro sur une longue liste, m'explique-t-il. Rentre-toi ça dans le crâne.
***
Les jours suivants ont été durs. Le travail quotidien de douze heures, le manque de nourriture et de sommeil ont commencé à affecter ma santé, comme beaucoup d'autres.
J'ai rapidement compris que je ne peux compter sur personne et que je devais me débrouiller seul ; surtout que l'on se fait réprimander la plupart du temps lorsqu'on discute entre nous et que l'on s'y fait surprendre par un garde.
J'ai peur de mourir. Pire, j'ai de plus en plus peur de devenir un squelette mort de l'intérieur. J'ai appris à me taire et à subir mais mon regard en dit long sur ce que je pense de tout cela : au fond de moi, je ne me laisse pas faire face à cette situation atroce.
J'ai l'espoir de survivre.
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Alors, comment avez-vous trouvé ce chapitre ?
Phrase du jour : "Et puis aider un de ses cochons, il aurait mieux fallu que tu donnes ton pain à quelqu'un d'autre."
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