Chapitre 25 : S H O O T

« Qu'est-ce qu'il y a ? » Demande le châtain en voyant que je le dévisage sans rien dire.

Je secoue la tête et détourne les yeux.

« Des haricots au beurre, ça te va ? »

« Ouais, pour tout te dire, je pourrais manger un beuf tellement j'ai faim, alors n'importe quoi me contentera. » Sourit Andrea en s'asseillant à même le sol devant la table basse pentant que je mets le saladier dans le four à micro-ondes.

« Dit Éos, tout à l'heure je m'enuyais un peu, et comme tu m'avais dit que je pouvais prendre ton ordi pour regarder un film, bah c'est ce que j'ai voulu faire, sauf que je suis tombé sur des photos que tu avais prises. Tu ne me les avais jamais montrées... »

Je me crispe. Le micro-ondes sonne, et j'apporte le plat à table.

« Je les trouves jolies, et je me demandais si tu pourrais, un jour, quand tu auras le temps, m'apprendre. J'ai toujours voulu savoir faire de belles photos. »

« Je n'en prends plus. » Déclaré-je simplement, entre deux bouchées.

« Quoi ? Mais pourquoi ? » S'estomaque Andrea, manquant de recracher son verre d'eau.

Je hausse les épaules.

« J'n'ai jamais été vraiment passionné, je faisais ça pour faire passer le temps. »

« Mais Éos ! Tu te rends pas compte que tu as un talent fou ! Tu n'as as le droit de le laisser tomber, certains seraient prêts à tout pour avoir ne serait-ce qu'une once de ton talent. »

« Et bien moi je leur donnerais volontiers parce qu'un talent comme tu le dis est inutile tant que l'on a pas l'inspiration pour pouvoir l'exploiter. »

« Prends-moi. »

C'est mon tour de cracher le contenu de mon verre, réellement pour ma part.

« Quoi ? » M'étranglé-je.

Qu'est-ce qui ne va pas chez lui pour lancer des trucs pareils ?

« En photo. Prends-moi en photo. Je serais ton modèle. Ta muse si tu préfères. »

Immédiatement mes joues s'empourprent, honteux d'avoir pensé ce à quoi j'ai pensé alors que le garçon en face de moi ne parlait que de photographie, mais je ne peux empêcher la partie irrationelle de mon cerveau d'être tout de même un peu déçue.

Amis bordel, amis ! Qu'est-ce qu'il y a de dur à retenir là-dedans ?

« Je ne sais même pas ce que j'ai fait de mon appareil photo. »

Mensonge.

« Oh aller, ton apprat' est pas bien grand, je suis sûr que l'on peut rapidement le trouver ! Et au pire même ton portable fera l'affaire.» S'entousiasme le châtain.

« Andrea, j'ai pas envie. »

Ayant fini son assiette, il se lève et va s'installer sur mon lit. Sous mes yeux incompréhensifs, il enlève son pyjama pour se retrouver simplement en boxer entre mes draps qu'il remonte lentement contre son torse finement musclé. Il plante son regard dans le mien -et à ce moment j'aurais juré qu'il avait un talent inné pour poser- il souffle :

« Tu es sûr, parce que moi j'ai pas mal envie de prendre la pose. Et je sais que tu aimes faire des photos de moi, tu en as pas mal dans ton ordi. Puis ça fait un an que j'ai eut accès à aucun de mes réseaux sociaux, alors tu peux au moins me faire une nouvelle photo de profil pour que je les mettes à jour. »

« Tu fais chier. Vraiment. » Rouspété-je en me levant, essayant tant que je pouvais de détourner les yeux de son corps d'éphèbe à moitié nu dans mon lit.

Je m'enferme dans la salle de bain et me laisse glisser contre la porte.

Putain je commence à vraiment croire qu'il veut ma mort ! A moins que ce ne soit une sorte de pénitence que l'on m'envoie, c'est ça, la vie s'obstinne à me faire payer pour mes erreurs ?

Quelques coups retentissent sur la porte puis la voix douce d'Andrea s'élève.

« Éos ? Je suis désolé. J'ai été trop loin, j'suis con. »

Je lève les yeux et tombe sur une boite en carton posée sur une étagère entre deux serviettes.

« Oh et puis merde ! »

Je me lève, ouvre la boite et en ressors mon appareil photo. Je monte l'objectif et insert la carte SD puis déverrouille la porte et lance au châtain qui attendait devant, un air désolé au visage :

« Ok, juste quelques photos, va t'installer."

Imméditement, un petit sourire mutain prend place sur ses lèvres alors qu'il retrourne sur le lit, s'allongeant entre les draps blancs. Et bordel depuis le temps que je rêvais de pouvoir le prendre en photo, un vrai shooting, pas les rares photos que j'arrivais à prendre discrêtement à son insu.

« Faut que je me mette comment ? »

Une fois de plus il passait de totalement assuré à complètement inconfiant et timide.

« J'en sais rien, c'est toi qui veut des photos. »

« Ouais mais... J'ai jamais fais ça... »

Je ris un instant et pose l'appareil photo sur la table de nuit avant de m'approcher d'Andrea. Je pose une main sur sa cheville, laissant courir ma main sur son épiderme douce.

« Viens par-là. Ouais, comme ça, un peu plus à gauche. » Le guidé-je.

Et sans cesse je me répéte en mon fort intérieur :

Qu'est-ce que je fais, bordel, qu'est-ce que je fais... C'est pas dieu possible d'être aussi con.

Comme si le prendre en photo à moitier nu allait m'aider à me rentrer dans le crâne que nous ne sommes plus qu'amis désormais...

« Regarde vers moi. »

« Comme ça ? »

« Ouais, super, magnifique. »

Et les rougeurs qui prennent place sur ses joues furent le premier cliché que je pris.

« Dit Éos, tu crois qu'on pourra redevenir comme avant, nous deux ? »

« Comme avant ? C'est-à-dire, j'ai peur de ne pas comprendre... »

« Je suis toujours amoureux de toi, tu le sais ça ? »

Un blanc s'installe et je suis pétrifié. Je ne sais que lui dire. Et comme d'habitude, je choisis la fuite comme échappatoire, tel le lâche que je semble finalement être.

"Tourne un peu la tête à gauche. Regarde au loin, par la fenêtre."

Et ainsi je n'avais plus à supporter son regard interrogateur, presque suppliant sur moi.

Il se plia à ma demande avec un léger soupir, résigné.

Son corps pâle entre mes draps blancs m'appelait, réveillant en moi des sensations que je tentais de maintenir enfouies depuis un an. Alors je coupe court à cette séance photo, de toute façon il est déjà tard.

"C'est tout pour ce soir. Couches-toi, je vais prendre une douche." Soufflé-je au châtain en passant à coté du lit, sans un regard, pour rejoindre la salle de bain, m'éloignant ainsi de le tentation qu'il représentait.

Andrea bâille avant de remonter l'édredon sur lui et de se coucher. Je m'enferme dans la salle de bain, pour la seconde fois de la soirée, encore plus perdu.

Andrea me manque, j'en aurais presque les larmes aux yeux. C'est comme si l'avoir proche de moi exacerbait ce sentiment de manque, le rendant encore plus poignant que quand il était de l'autre côté de l'Atlantique.

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