chapitre trente-sept

CHARLES ET MATTEO PARTAIENT demain pour l'Azerbaïdjan et l'un comme l'autre avaient hâte. Pas de peur, pas de frayeur quelconque, juste une certaine appréhension, ce qui est logique. Néanmoins, le monégasque savait que cela ne pouvait que bien se passer. Auparavant, tout le monde l'avait soutenu. Alors pourquoi cela changerait en quelques grands prix ? Voilà deux mois que les événements de Melbourne avaient eu lieu et jamais les pilotes n'avaient été aussi proches lors des saisons de formule un. Mis à part Lance Stroll, tout le monde discutait avec tout le monde, se chariait, parvenait à différencier la bataille sur la piste et en dehors. Même Lewis s'était un peu plus ouvert aux autres, lui qui aimait particulièrement rester dans sa bulle.

Le brun recevait des sifflets quand il prenait les pôles position, mais il n'y faisait plus réellement attention. Les messages sur les réseaux sociaux ? Encore moins. Ses séances de psychologie plutôt rapprochées -environ deux par semaines quand il n'était pas en déplacement- avaient fortement changé sa vision de voir les choses. Charles se demandait comment en si peu de temps, on avait pu modifier sa façon de penser, sa façon de se voir. Mais il était très reconnaissant de ce psychologue qui l'épaulait depuis plus d'un mois. C'était presque... une sorte de remède miracle. Même si les séances étaient loin d'être terminées, le pilote était fier d'avoir déjà pu avancer autant. Notamment sur sa sexualité, ce qui était une bonne chose. Il avait d'ailleurs dit à Matteo qu'il se considérait comme pansexuel et le blond l'avait tout simplement félicité d'être parvenu à mettre un mot sur comment il se sentait vis-à-vis de ses amours, ce qui lui importait tant.

Aujourd'hui, avant d'aller à Baku, Charles allait présenter Matteo à sa famille. Il avait hâte que sa mère et ses frères découvrent l'homme incroyable qu'il était, mais évidemment, il était effrayé. Qu'on ne l'apprécie pas alors que lui l'aime plus que tout, et bien d'autres facteurs. Le monégasque était plus anxieux que le blond qui riait même du premier alors qu'ils se trouvaient dans l'ascenseur pour rejoindre le domicile de Pascale, dans lequel tout le monde les attendait. L'italien pressa sa main dans celle du pilote qui souffla longuement. Tant de stress pour si peu, finalement.

- Je te trouve bien serein pour quelqu'un qui va rencontrer ma famille, riait Charles en attendant que les portes s'ouvrent.

- Tu m'as toujours dit qu'elle était exceptionnelle et ouverte d'esprit, alors pourquoi paniquer ?

- Parce que mon petit frère a deux neurones qui se battent en duel ? Le monégasque adorait charier Arthur pour se détendre, et c'est ce qu'il fait avant de toquer à la porte de l'appartement.

Pascale ouvrit au bout de quelques minuscules secondes, toute souriante et accueillante. Cela donnait l'impression qu'elle attendait depuis longtemps derrière la porte.

- Les enfants comme je suis contente de vous voir ! Enchantée je suis Pascale, la mère de Charles, débuta la mère à l'attention de Matteo, qui se présenta à son tour, poliment.

- Pourquoi j'ai l'impression que tu attendais qu'on arrive derrière la porte ? demanda le brun en souriant.

- Parce que ça fait dix minutes qu'elle patiente, rétorqua Arthur en se moquant, arrachant le rire de tous.

- Arthur tais-toi ! Pas possible, aussi idiot que son père, marmonna la seule femme présente.

Matteo se rendit dans le salon pour aller se présenter aux frères du pilote, tandis que Charles suivit sa mère jusque dans sa cuisine.

- Alors ? Comment tu le trouves ?

- Charlie ça fait deux minutes qu'il est là, je ne peux pas émettre un avis directement ! Ne sois pas si stressé, va rejoindre tes frères, tout va bien se passer.

Le monégasque souffla en abdiquant. C'est vrai qu'il était vraiment paniqué mais il devait prendre sur lui et prétendre qu'il était confiant de présenter quelqu'un à sa famille -alors que c'était la pire étape selon lui dans un couple-. En arrivant dans le salon, il sourit en apercevant son compagnon discuter avec son frère aîné et son cadet.

- Je comprends pas ce que tu fais avec lui, il est vraiment con et- aïe ! Arthur râla en frottant sa main contre son crâne, que son frère venait de frapper.

- Merci de me défendre Lorenzo, remercia le pilote alors que Pascale ordonnait à ses fils d'arrêter de faire les pitres pour passer à table.

Une fois attablés, Charles était un peu moins anxieux. Il voyait Matteo se familiariser de plus en plus avec l'humour bancal d'Arthur, le sérieux de Lorenzo et la curiosité de Pascale. Ils parlaient de tout et de rien alors que le pilote les observait, silencieux certes, mais heureux. Il repensait surtout à tout le chemin parcouru. Jamais il n'aurait un jour pensé présenter un homme en tant que compagnon à sa famille et pourtant, le voici. Au final, le reste du repas s'était super bien passé, le blond avait énormément parlé et sympathisé avec toute la famille Leclerc, pour le plus grand bonheur du brun dont le stress s'était automatiquement envolé au fil du temps.

Le repas s'était d'ailleurs prolongé puisqu'ils avaient passé tout l'après-midi ensemble, et ce fut Charles qui coupa court à tout cela car leurs valises pour Baku étaient loin d'être terminées -voire même... pas commencées-. Pascale retourna déposer la vaisselle dans sa cuisine et, discrètement, le monégasque suivit sa mère alors que l'italien disait au-revoir aux deux autres frères, riant encore ensemble. À l'abri d'oreilles indiscrètes, le jeune pilote pressa sa mère, qui avait un sourire moqueur sur le visage, pour lui demander enfin le verdict de cette longue journée.

- Je ne savais pas qu'il existait un gendre idéal, avoua-t-elle alors.

Le brun soupira de soulagement en prenant sa mère dans ses bras pour une immense étreinte, dont il avait éperdument besoin. Jamais il n'avait été si apaisé d'entendre ces mots tout droit sortis de la bouche de la femme qui avait un avis plus qu'important pour lui. Et dans ces conditions, Charles se considérait comme le plus heureux des Hommes.

•••

La chaleur frappait l'Azerbaïdjan. Il faisait déjà près de trente degrés à dix heures du matin, et les deux amants souffraient de cette haute température. Surtout qu'ici, il n'y avait que la climatisation dans les hospitalités de chaque écurie, et aussi dans l'hôtel. Hôtel duquel Charles n'avait pour le moment pas envie de bouger. Nous étions vendredi, jour des essais libres et surtout premier jour de Matteo sur le circuit, donc dans le paddock. À la vue de quiconque. Peut-être que personne ne les remarquera. Peut-être que tout le monde fera attention à eux. Peut-être que tous vont se douter qu'ils sortent ensemble. Ou non. Malgré de gros progrès ces dernières semaines, les vieux démons du monégasque revenaient à l'approche de la lourde échéance. Le blond tentait en vain de rassurer le brun, et le temps tournait : il ne fallait pas qu'ils soient en retard.

- Je te promets que tout ira bien Charles, y'a aucune raison pour que ça se passe mal.

- Imagine ça se passe comme à Monaco, sauf que là c'est toi qu'on frappe ?

- Il n'arrivera rien de tout ça. La sécurité a été renforcée spécialement pour cette raison. Allez, on va y aller, tu vas retrouver Pierre et tous les pilotes que tu dois me présenter, ça sera encore plus simple qu'il y a trois jours avec ta famille.

- Ok, ok. On y va, se motiva Charles en se levant du lit pour quitter la chambre d'hôtel. Le circuit était proche.

Plus le temps s'écoulait, plus le monégasque semblait nerveux. Il inspira et expira profondément pour se calmer, et en garant la voiture sur le parking, il essaya de faire le vide dans son esprit, alors que Matteo réajustait le col de sa chemise, les premiers boutons ouverts, remettait ses lunettes de soleil sur le bout de son nez et vérifiait l'état de ses cheveux. Ils sortirent de la voiture et Charles salua quelques membres de l'écurie qui étaient présents en même temps sur ce parking. Ils se dirigèrent sans un mot vers l'entrée du paddock. Le pilote avait peur, mais discrètement, l'italien posa une main dans son dos en lui murmurant que tout allait bien se passer. Ils bippèrent leur pass et les voilà à l'intérieur. Le blond sourit fièrement à son brun.

- Tu vois ? Personne ne se préocuppe de nous.

- CHARLIE ! interpella soudainement une fois que le monégasque ne connaissait que trop bien.

- Hey calamar, comment tu vas ? ils se firent une légère accolade, et le normand se tourna vers le nouveau venu ici.

- Matteo, cool de te revoir et encore plus ici !Les pilotes ne parlent que de toi Charles, tout le monde veut rencontrer Matteo, parce qu'il se pourrait que j'ai vendu la mèche à tout le monde... vous avez la côte ici. Seb et Lewis n'attendent que vous !

- Pourtant y'a rien d'exceptionnel...

- Tu les connais, faut faire plaisir à papy et mamie, les trois hommes explosaient de rire à la phrase sortie par le rouennais. Bon je vous laisse, j'ai à faire. Matteo, profite bien, la découverte c'est toujours un bon moment.

L'italien le remercia et Pierre disparut aussi vite qu'il était arrivé. Les deux hommes reprirent leur route vers l'hospitalité de Ferrari en parlant de tout et de rien. Charles était beaucoup plus détendu grâce à l'intervention de son meilleur ami. Sur la route, ils croisèrent George, Lando et Alex, alors le monégasque présenta poliment son compagnon à ses amis qui l'accueillèrent chaleureusement. Pas de Lewis ou de Sebastian en vue, alors ils entrèrent dans le motorhome de la Scuderia, où Carlos et sa compagne Isabel se tenaient déjà, discutant dans leur langue natal. Le premier vit son coéquipier arriver et sourit en s'approchant de lui pour lui serrer la main.

Les présentations continuèrent jusqu'à ce que les deux pilotes ne partent en debrief avec l'écurie. Matteo se retrouvait un peu perdu dans l'immensité de l'espace, mais heureusement, Isabel l'aidait à se repérer, habituée au site.

- Charles ne t'a pas dit combien de temps durait le debrief ?

- Pas du tout.

- Eh bien il dure une heure, et généralement c'est au même horaire pour toutes les team. Ça te dit de faire un tour dans le paddock ? Je te présenterai aux autres copines des pilotes !

- Oh eh bien... d'accord !

- Tu verras, c'est un peu un gang, rit-elle légèrement. On a les mêmes craintes, et on était carrément perdue au début, alors ça rapproche. Et bien évidemment, tu es le bienvenu !

Matteo suivit la compagne de Carlos, très enthousiasmé par son côté chaleureux et généreux. Il adorait ce genre de personnes et ne pouvait pas rêver mieux comme début de matinée. Les deux adultes se baladèrent dans le paddock, et croisèrent sur leur chemin Carmen, la compagne de George, puis Luisa, la compagne de Lando. Tous les quatre, ils discutaient de tout et de rien, apprenant surtout à découvrir le nouvel arrivant.

- Donc c'est ta première fois ici ? demanda la portugaise avec un immense sourire aux lèvres.

- Officiellement oui, avant c'était compliqué pour me faire venir dans le paddock, avec tout ce qui se passe...

- On a suivi tout ce qui s'est déroulé durant les derniers week-ends, c'est vraiment immonde, grimaça Carmen. J'espère que ça va s'améliorer au fil du temps.

- J'espère aussi, en tout cas pour le moment Charles s'en fiche alors c'est le plus important.

- C'est fou, on le connaît pour certaines depuis des années et on aurait pas imaginé qu'il termine avec un homme, commença Isabel. Pardon ça doit être super maladroit ! Ce que je veux dire c'est que la plupart des personnes avec qui j'en ai déjà parlé ont découvert qui tout cela à l'adolescence, et Charles lui ce n'est que maintenant, c'est ce que je voulais dire.

- Ne t'excuse pas ! sourit l'italien, habitué à ces paroles maladroites mais loin d'être malsaines. En fait le truc c'est qu'il n'y a pas vraiment d'âge. Des fois c'est juste quelque chose de passionnel, puis beaucoup aussi sont dans le déni malheureusement.

- En tout cas j'espère que la FIA arrêtera d'envoyer les pilotes dans des pays où l'homosexualité est un crime, parce que le nombre de grands prix augmente et je trouve ça lamentable, fit Carmen.

- L'argent, soupira Matteo avant que les filles n'abordent un autre sujet de conversation.

L'italien était très heureux d'avoir fait leur connaissance. Il n'avait pas énormément d'amies, mis à part Giada, alors des présences féminines dans son entourage ne lui déplaisait pas, bien au contraire.

•••

j'avais vraiment envie d'intégrer les personnes un peu maladroites à l'image d'isabel dans ce chapitre, parce que je pense que beaucoup doivent être dans ce cas, ahah !
samedi, dernier chapitre, et mardi, épilogue :/
mais dimanche... ;)

AUGUST.

-alcools

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