𝑰𝒔𝒑𝒊𝒓𝒂𝒛𝒊𝒐𝒏𝒆




Venice, Italy





Le soleil, se cachant lentement sous la surface de la terre, laissait sa place à la lune qui était accompagnée par l'immense rideau noir recouverte de milliers de taches dorées. La mer de la ville frappait sur les côtes et les pontons qui séparaient l'eau des grands bâtiments dont l'architecture était d'une beauté frappante. Les lumières des lampadaires s'allumaient un à un et l'animation des bars n'était plus que la seule source de bruit des environs.



Ce soir là il faisait venteux. Un pinceau à la main, un jeune peintre tachait d'exprimer à la perfection les milliers de pensées qui nourrissaient son esprit. Chacun de ses gestes étaient calculés pour former l'harmonie parfaite qui constituerait la beauté de la toile.



Au plafond, seule une petite ampoule apportait de la lumière à l'endroit. La faible luminosité déployait les sens de l'homme qui se hâtait à sa tâche artistique.



Qu'est-ce qu'il peignait ? Rien. Tout et rien. Les paysages qu'il voyait à chacun de ses voyages en bateau, à pieds ou à vélo. Les hommes qui l'inspiraient dans la rue et dont il imaginait la vie quotidienne. Les femmes avec lesquelles il se laissait aller. Les couleurs qui se mélangeaient aux œuvres qu'il contemplait pendant des heures durant dans les musées de la ville qu'il habitait. Les animaux errant dans la petite allée devant son atelier ou suivant le cour lent de la mer.



Mais cette fois-ci il s'agissait d'une des femmes avec qui il avait couché. Ses mains coloraient son corps sur un tableau qui était encore vierge il y'a une ou deux heures. La femme était toujours endormie. Une couverture habillait une partie de son corps. L'autre était exposée à la merci du peintre qui ne ratait jamais l'occasion de retranscrire les courbes d'une jeune demoiselle. Son atelier en était remplie. Des œuvres de femmes nues tapissaient une grande partie des murs de la pièce.



Il aimait ça. Dessiner le plaisir qu'elle lui avait procuré comme souvenir. Il y'en avait une nouvelle chaque semaine. Elle pouvait rester une nuit ou plus selon les désirs de son hôte. Elle découvrait les locaux de l'homme qui la touchait de ses mains habiles quelques jours parfois avant de s'en aller pour ne plus jamais revenir.



La règle d'honneur de celui-ci était que, pour ne pas s'attacher inutilement à une personne sans intérêt, "les nuits, ou journées, qu'il devrait passer avec ne devrait pas se répéter plus de trois fois". Rien que cela.



Les paupières de la demoiselle originaire de Rome commençaient à légèrement s'ouvrir alors que l'artiste continuait de regarder de ses yeux passionnés le tableau devant lui. La jeune femme releva son bustier pour s'assoir doucement sur le matelas, amenant la couverture à sa poitrine pour la cacher. Elle regarda d'un rapide coup d'œil l'homme à côté du lit avant de détourner les yeux se remémorant la journée qu'il avait passé à boire et s'embrasser. Plutôt étrange de se réveiller de sa transe en pleine nuit quand on s'attendrait à le faire au petit matin.



"Bonsoir." Le visage ne regardant toujours pas son amante, sa voix grave prononçait ce petit mot.



"Bonsoir," Avait répondu plus timidement le modèle de l'artiste. "Avez-vous bien dormi ?"



"Très bien et vous ?"



"Eh bien, je ne pensais pas dormir autant. Surtout pas en pleine journée. Maintenant, le soleil a disparu dehors."



Le peintre rencontra les yeux de son modèle le temps d'un instant. D'une voix calme et douce il lui répondit "Excusez-moi, c'est de ma faute. J'ai insisté ce matin alors que vous étiez déjà bien assez épuisée après la nuit d'hier."



"Ce n'est rien." La femme serra davantage sa couverture autour d'elle et regarda ses genoux remontés vers sa poitrine. "J'ai.. beaucoup apprécié."



La fin de sa phrase n'avait été qu'un murmure qui s'était niché dans l'oreille de son interlocuteur. Un sourire se dessina sur le visage de ce dernier. Il regarda son amante qui timidement cachait son corps dans le fin drap blanc qui les avait couvert toute la journée. Ses longs cheveux bruns tombaient sur ses épaules nues et masquaient son visage. Sa main manucurée d'un vernis rouge écarlate agrippait le matelas. Elle semblait gênée. Cela le fit rire.



"Êtes-vous levé depuis longtemps?" La demande passa la barrière rosées et sucrées que formaient ses lèvres.



"Depuis quelques heures, oui." Reprenant son pinceau, l'attention du peintre se porta de nouveau sur sa toile. "Je n'ai pu m'empêcher de sortir ma palette lorsque je vous ai vu si apaisée sur ce lit. Excusez-moi de n'avoir pas demander votre permission."



Rouge jusqu'aux oreilles, l'italienne sourit légèrement. "Ce n'est rien. Continuez."



Elle eu pour toute réponse, un "merci" soufflé doucement. Elle trouvait adorable qu'il s'excuse de l'avoir peinte dans son sommeil et qu'il la complimente comme il le faisait, cela lui procurait un bonheur incommensurable. Que c'était bon de savoir qu'on nous trouvait jolie. Un peintre qui plus est. Un rêve devenu réalité : qu'un homme talentueux mette passion et dévotion dans toutes tâches qui seraient de près ou de loin liées à elle. Elle était heureuse d'être tombé sur lui.



Cependant, la jeune femme faisait preuve de bien de naïveté. C'était cela que pensait le jeune homme en recommençant à s'attarder sur sa création. Le sourire niais qu'il lui offrait était un faux sans l'ombre d'aucun doute. Comment ne l'avait-elle pas remarqué ? Elle avait accepté si facilement de coucher avec lui. Après deux trois verres et des phrases toutes faites sorties de la tête d'un homme ne cherchant qu'à assouvir ses désirs. Elle pensait qu'il l'avait peinte car elle était devenue sa muse. Sottise.



La vérité était toute autre. Il avait perdu l'inspiration depuis un moment déjà. Rien à part des corps nus ne lui donnait l'envie de dessiner, peindre, sculpter. Voilà la raison seule pour laquelle il la baratinait de ses phrases poétiques et de ses sourires enjôleurs. Il ne voulait qu'exprimer son art. Qu'en à sa muse, voila des années qu'il n'en trouvait plus.



Alors qu'il arrivait à la fin de sa création, il remontait les yeux le long du corps de la romane. Il voulait détailler le plus possible sur son tableau les parties intimes de la jeune femme. Mais celle-ci lui cachait tout. Il lui fallait plus que ses souvenirs des heures précédentes.



"Ne me cachez pas votre peau, s'il vous plaît. Elle est ravissante. J'aimerai la voir et la peindre."



Même si la manière de le dire était belle et douce, il n'en semblait pas moins pervers aux oreilles de la femme. Elle aimait cela. Les joues en feu, elle abaissa sa couverture qui dévoila sa poitrine.



"Montrez m'en plus."



Le drap était parterre. Complètement nue devant son amant, la brune se sentit honteuse. Mais la honte se changeait en excitation lorsque que des mots remplis de sous-entendus et de compliments sortaient joliment de la bouche de l'artiste. Il la mettait en confiance à sa manière.







L'obscurité de la nuit, le soleil totalement disparu, les recouvrait presque déjà entièrement et la petite ampoule au plafond n'éclairait que le corps réel et le corps transmit à la toile. Celle-ci était enfin terminée.



Signalant à son modèle qu'il avait terminé, il rangea sa palette de peinture et se leva. Il s'en alla dans la cuisine pour nettoyer ses pinceaux. L'eau sur ses mains se tintaient de la dernière couleur qui avait utilisé sur sa toile. Il revint dans la chambre un fin stylo noir à la main. Rapidement il imposa au bas de son œuvre une petite signature : "Kim Taehyung." Pas besoin de plus d'artifice. Son nom suffit amplement.



Ses yeux scrutèrent une dernière fois l'expression de son art face à lui et il soupira peu satisfait. Ce n'était toujours pas la toile qui le motiverait de nouveau à dessiner, peindre ou encore sculpter. Il ne ressentait plus cette profonde envie d'exprimer sa passion. Quelle comble qu'un artiste comme lui ne doive se forcer à faire ce dans quoi il excelle.



Taehyung soupira et prit le paquet de cigarettes sur la table de chevet de son lit et s'en alla sur le ponton arrière de sa maison. Il faisait nuit noire à l'extérieur et il ne voyait rien. Il alluma le bâton de nicotine, l'amena à ses lèvres et en remplit ses poumons. En expirant la fumée toxique de son corps il espérait sortir le quelconque problème qui bloquait son inspiration. Il avait besoin de faire ressortir sa passion. Sa part de lui qui refusait de se manifester.




"Tout va bien ?" La petite voix fatiguée de la romaine se glissait dans les oreilles de Taehyung.



Lui qui trouvait cette voix particulièrement charmante il y'a vingt-quatre heures à peine la trouvait à présent laide et agaçante. Il ne voulait qu'une chose : qu'elle s'en aille. Qu'elle aille écarter les jambes chez un autre peintre qui sera sûrement ravi de peindre les formes de son corps.



"J'ai besoin de rester seul." Cracha aisément le peintre.



La jeune fille fronça les sourcils au ton de celui-ci. Lui qui avait tendrement parlé avec elle pendant des heures durant semblait agacé à présent. Avait-elle agit de façon mauvaise ? Pourquoi était-il distant avec elle alors qu'il y'a quelques minutes il était doux et câlin. Que signifiait se retournement de situation.



"Ai-je mal agis envers vous ?"



"Non. Tu m'as simplement était inutile." Adieu le langage de galanterie et le jeu de vouvoiement débile. Place au Taehyung qui n'en as rien à faire.



"Quoi ? Qu'est-ce que vous racontez ?"



"J'ai besoin de quelqu'un pour me redonner envie de créer. Ce n'est pas toi." Il inspira une autre bouffée de toxine.



"Vous aviez dis que j'étais votre muse." Elle tremblait. Taehyung n'aurait su dire si cela était du au froid du dehors ou au fait qu'elle se rendait compte de la bêtise dont elle avait fait preuve. "Vous vous êtes moquez de moi."



"Tu t'es moquée de toi seule. Croire que tu es ma muse ? T'es vraiment stupide. On est pas dans un disney, princesse."



Choquée et humiliée, la jeune femme s'en alla chercher ses affaires et quitta l'atelier du peintre le laissant fumer et rire d'elle. Rien ne servait de rester et d'écouter plus longtemps sa grossièreté.



Elle se sentait idiote et naïve. C'était trop beau pour être vrai. Comment avait-elle pu imaginer une seconde que cela serait le début d'une longue aventure. Elle n'avait été que l'objet d'un désir pervers que voulait assouvir un homme. Elle espérait que jamais il ne l'a trouverait cette foutue inspiration.



La jeune femme soupira lorsqu'elle se rendit compte qu'une représentation nue d'elle trônait fièrement dans la chambre du peintre. Tant pis ! Qu'il la garde. Peut-être un jour se rendra-t-il compte qu'il n'a pas le droit de traiter ainsi une personne.



Taehyung écrasa son mégot sur le sol avant de donner un coup de pied dedans et de l'envoyer dans le fleuve qui passait derrière sa terrasse. Il souffla, frustré. On aurait ou penser que ce sentiment était dû au départ dramatique de la jeune femme et qu'il s'en voulait mais il s'en foutait. Il ne pensait qu'à lui-même et là, tout de suite, il ne supportait pas qu'une tentative de plus ne soit que déception. Cela le rendait malade.



L'art était sa passion. Ne plus être capable de le pratiquer était comme couper son lien avec l'oxygène de ce monde et sa réalité. Il voulait exprimer sa créativité. Mais celle-ci l'avait abandonné.



De plus, sur une page de son agenda figurait la date la plus importante prévue de toute sa carrière. Une galerie d'art voulait exposé ses œuvres. Quoi de plus beau que cela ? Rien. Rien n'était comparable au bonheur qu'il ressentait en imaginant ses toiles, ses dessins, ses sculptures à la vue de tous pendant des semaines. C'était un rêve qui devenait réalité.



Mais alors qu'il volait parmi les anges et manifestait sa joie, on lui coupa les ailes. Plus rien n'était à la hauteur de ses anciens travaux. Comment était-ce arrivé ? Chaque petit détails de la vie l'inspirait habituellement alors comment celle-ci avait-elle pu s'évanouir sans prévenir ?



Soupirant, le jeune homme passa une main dans sa noire chevelure. Il avait besoin de sortir boire un verre. Il se faisait tard mais il se devait de changer d'environnement. Il ne voulait pas rester un instant de plus dans son atelier remplis de ses œuvres dont il n'arrivait toujours pas à recréer la perfection.



Il monta à l'étage, la où se trouvait réellement sa demeure. Il n'aimait pas y aller souvent. Il préférait de loin rester au rez-de-chaussée à peindre pendant des heures. Il avait tout ce dont il avait besoin à ce niveau là. Une pièce désignée à son art qui servait aussi de chambre avec un lit dans un coin de la pièce, une cuisine et une petite salle de bain. Mais il était bien obligé de monter pour prendre quelques affaires de temps en temps.



L'étage était bien plus grand que le petit atelier du niveau en dessous. Chaque pièce avez son utilité propre et était décoré dans le style du peintre. Couleurs chaudes et ambiance chaleureuse étaient à l'honneur.



Il prit sur la table basse de son salon son portefeuille et son téléphone. Il songea à téléphoner à ses amis mais se résigna. Il avait besoin d'être seul. Complètement. Même s'il se retrouverait entouré de dizaines de personnes dans un bar bondé. Sa veste sur les épaules, un paquet de cigarettes dans l'une des poches, Taehyung sortit de chez lui.



A son grand regret, le chemin ne fut pas long du tout. Il avait à peine traversé deux rues qu'il était déjà arrivé. Il savait par habitude que le bar n'était pas loin mais quand même avait espéré faire une longue promenade avant de s'enivrer à en perdre la raison. Mais il était arrivé devant le bar.



Et il comptait bien boire jusqu'à l'aube.



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