- Qu'est-ce que je fous?

Katsuki, marmonnant dans sa barbe, se posait réellement la question. On était samedi, samedi matin, la journée venait de débuter, et à la place de l'entraînement intensif qu'il s'acharnait à enchaîner chaque weekend, il se trouvait à patienter devant l'entrée de l'internat, une mousse de buée prenant forme à chacune de ses respirations. A l'attendre, elle.

La voix aiguë de la coupable de ses ruminements fit son apparition. Ochako lui avait lancé un grand " Désolée de t'avoir fait attendre ! " tout en traversant précipitamment les portes, embarrassée de découvrir que le jeune homme se trouvait déjà là.

- Tu comptais me faire poireauter là longtemps ?!

- Mais non mais..

La brunette afficha un air navré. Elle avait redressé ses cheveux en un petit chignon, couronnés par un bandeau rose qui disproportionnait sa figure de gamine avec ses inlassables pommettes bonbons, probablement pour empêcher la brise matinale de la gêner au cours de leur quête. C'était vraiment étrange de l'aviser sans son uniforme ou costume de super héroïne, vêtue d'une simple veste en jean.. très similaire à celle qu'il portait actuellement, un pull de la même teinte que son bandeau et un basique jean noir, tenant fermement son petit sac qui devait regorger de trucs inutiles.

- T'as vu nos vestes? On est assortit ! remarqua-t-elle, réellement surprise.

- Ta gueule.

- Tu pourrais être un peu moins de mauvais poil, grogna-t-elle, c'est pour notre ami qu'on est là.

- M'en fou de votre soirée de merde.

Tandis qu'ils ébauchaient leur marche vers le centre-ville à un rythme de pas soutenu pour se réchauffer ( la journée était étonnamment froide en vue des journées précédentes où la chaleur étouffante les avaient tenus en otage, mais ce n'était pas pour déplaire à la jeune fille ) - et sûrement pour Katsuki d'en finir - Ochako lui jeta une œillade soucieuse.

- Tu ne comptes pas venir?

Le grand blond lâcha un " tch " sans pour autant lui adresser une réponse. Même s'il tentait de s'échapper de leur fête ridicule, Pikachu et tête de citron, alias Denki et Sero, le feront chier pour qu'il se joigne à eux malgré ses protestations, il était donc parfaitement conscient de la soirée qu'il allait devoir supporter, avec tous ces abrutis finis.

Ochako esquissa un sourire. Elle avait absolument tout imaginé pour cette journée qui se devait d'être commune aux autres, mais jamais au grand jamais elle n'aurait osé émettre la pensée de passer un tête à tête avec l'explosif en quête d'un cadeau pour Kirishima. C'était Mina qui lui en avait attribué la charge, certes, elle devait initialement tout bonnement questionner Katsuki sur une idée de présent, mais elle ignorait que la rosée se retrouverait trop préoccupée par ses préparatifs pour se rendre en ville elle-même.

La brunette s'était retrouvé bien embêtée, elle avait beau s'être proposé pour en avoir la tâche, elle ignorait tout de la pointure du garçon du jour, des couleurs qu'il était susceptible de favoriser, de à quoi même ressemblait le modèle ou encore où se les dénicher. Aucune de ses camarades féminines n'était assez proche de Kirishima pour être au fait de tous ces détails, si ce n'est peut-être Mina, qui à ce qu'elle connaissait de leur relation, était une sorte de ses amies de collège, et du côté masculin, il n'y avait que Denki et Katsuki qui étaient apte à l'informer de tout cela. La soirée étant tenue à l'ordre professionnel dans le cas de Denki, aucun autre choix ne s''était offert à elle.

Elle s'était donc levée de bonne heure - non sans mal - , s'était débarbouillée le visage et avait lavé ses dents bien alignées, puis une fois son esprit un peu moins embrumé, elle avait rejoint l'explosif dans son espèce de jardin secret, dont elle connaissait désormais la localisation. Elle ne se sentait plus vraiment mal à l'aise avec lui depuis hier soir, elle commençait à cerner le personnage. Il était encore dans ce petit coin, avec son imposant sac de boxe attaché à ce gigantesque arbre, il l'avait repéré par ses petits pas précipités et lui avait, une fois n'est pas coutume, hurlé dessus, en lui demandant par mille injures ce qu'elle était revenue foutre ici, clamant que ce n'était pas un spectacle.

Tentant de le calmer, elle lui avait exposé la situation, tâchant de paraître clair : sa présence lui était indispensable pour qu'elle ne se trompe pas complètement et que le final soit totalement gâché par sa faute à elle, alors que tous les autres se donnaient du mal. En se repassant la scène, elle culpabilisa, s'estimant, avec réflexion, mesquine, c'était presque comme lui affirmer " si le cadeau est pourrit c'est de ta faute, pas la mienne ", mais cela partait de bonnes intention, et le grand blond ne lui en avait pas tenu rigueur. A la suite de ses explications, il s'était quelque peu calmé. Ochako en était certaine: le jeune homme avait beau jouer le rôle de l'associable, il tenait, plus qu'il ne l'avouerait jamais, à Kirishima qui l'ouvrait un peu vers les autres, même s'il ne le désirait pas forcément.

Finalement, après une longue négociation où Katsuki lui informa qu'elle l'emmerdait un bon nombre de fois, il finit par craquer devant les yeux noisettes implorants de la jeune fille qui ne le quittaient pas et ses maintes protestations sur l'importance de sa présence, tout en lui informant qu'elle lui devait dorénavant deux services, un pour l'information de la veille, et deux pour cette journée où il se plaignait de se coltiner un être humain autre que son meilleur ami. Elle avait accepté sans hésiter.

- Tu sais, ça fera plaisir à Kirishima si tu viens! insista-t-elle. Je pourrais même lui dire que t'as choisis le cadea..

- Tu fais ça et je te bute, la coupa-t-il, sec.

- Compris, fit elle en s'esclaffant, moqueuse.

Il l'observa rire tout en remontant le col de son sweater. Il s'était munit d'un bonnet moutarde que sa mère lui avait refourgué il y a longtemps de ça, avec un simple pull blanc et un large pantalon beige. Plus jamais il ne retoucherait à ces horribles jeans serrés que le super héro à coutures lui avait infligé durant son stage, se promit-il.

Ils prirent le bus, plutôt désert à cette heure-là, lui dans un demi-silence et un demi-hurlement, elle dans ses réflexions et remarques habituelles, de plus en plus à l'aise, comme si elle discutait simplement avec Izuku et Tenya, même si les réactions étaient souvent opposées à celles de ses deux amis.

- Tu aurais pu aider Mina pour la cuisine, elle m'a dit qu'elle préparait un vrai festin ! conversait-elle, enjouée.

- Et pourquoi je ferais ça au juste?!

- Bah t'es doué en cuisine, j'ai vu au au camp cet été..

Elle mâcha ses derniers mots. Katsuki, à l'annonce du camp d'été, s'était subitement tendu, les poings pressés, les sourcils davantage froncés qu'à son habitude. Elle se traita intérieurement d'idiote. Parler de tout ce qui s'était passé il y a quelques semaines avec ne devait absolument pas être agréable pour le jeune homme, même si elle n'avait pas vraiment abordé le sujet. Mais curieusement, il sembla faire l'impasse sur ce mauvais souvenir et se détendit, en lui lançant:

- Comme si j'avais que ça à foutre tiens!

Elle esquissa un sourire.

- Dommage.

- T'as qu'à le faire toi-même, grincha-t-il.

- Héhé, j'aimerai bien, mais je ne suis pas très forte en cuisine, avoua-t-elle, enroulant une des mèches qu'elle avait laissé hors de son chignon autour de son doigt.

- T'es une merde, ricana-t-il. Même un parfait abruti peut cuisiner.

- Peuuuh ! Elle lui tira la langue.

Le jeune homme maintenu son sourire quelques instants devant le comportement bon enfant de la brunette. Cette dernière se sentit rougir. Jamais elle n'aurait été capable d'imaginer que le sourire de Katsuki puisse être aussi doux, n'ayant toujours entrevu que les "démoniaques", ou celui qui lui souhaitait bon courage avant l'épreuve de mathématique, qui ressemblait à une version apaisée de ceux-là. A la suite de cette scène, celle de leur confrontation lui revint en mémoire. Elle l'avait presque oublié ! Le plus troublant n'étant pas son compliment, trop bon pour être sortit de sa bouche, mais la manière dont, de ses larges mains, il avait caressé la sienne, blessée.

- T'es encore malade? la questionna-t-il soudainement.

Elle capta qu'il faisait référence à la teinte qui devait orner ses joues et secoua violemment la tête pour répondre par la négative. N'importe quoi. Avec un peu de chance, cette scène n'était qu'un stupide rêve qui lui était apparu lors d'une nuit où la maladie parcourait ses cellules.

- Tu pourrais peut-être m'apprendre à cuisiner alors, proposa-t-elle ensuite.

- Meurt!

- Mais quoi??

- Ta gueule.

- Le chemin n'est plus très long pour que tu te mette à me surnommer "Deku" à ce rythme, elle gonfla ses joues, boudeuse.

- N'importe quoi..

Il esquissa de nouveau un sourire et souffla par le nez aux dires de la jeune fille. Elle avait beau essayer de se convaincre que Katsuki était incapable d'être agréable ou digne d'une attention comme celle qui avait succédé leur duel, plus les moments où ils discutaient se multipliaient, plus son esprit semblait installer l'impression de l'inverse total chez elle.

La sonnerie du bus leur annoncèrent leur arrêt pour le centre commercial. Ils se redressèrent tous les deux, pressés de se dégourdir les jambes après une demie-heure de trajet assis. Ochako se laissa guider par la marche assurée du grand blond qui avait l'air de savoir parfaitement où se rendre, elle n'osait donc poser de questions, pour ne pas perdre de temps. Avec un peu de chance, ils seraient de retour pour midi, et elle pourrait s'adonner à d'autres activités avant que l'heure de cette soirée d'anniversaire ne sonne. Elle serra un peu plus fermement le petit sac qu'elle avait apporté.

Il contenait toutes les participations en vue du cadeau, mais rien que le don de Momo suffirait à faire plier bagage à la boutique, elle en était certaine, encore abasourdie des montagnes de billets que l'élégante brune lui avait offert en guise de remerciement pour se charger de tout cela. Mais bon, cette dernière avait la particularité d'avoir le cœur sur la main, cela devait simplement lui faire plaisir autant qu'à Ochako de célébrer Kirishima ce soir. Elle avait évoqué la possibilité de tout simplement se servir de son alter pour créer la paire de chaussure qu'ils leur fallait, mais Momo avait expressément refusé, ne souhaitant pas nuire à l'économie. La brunette émit un discret rictus en réfléchissant à ce qu'elle aurait pu accomplir avec un alter de création. Elle en aurait immédiatement profiter pour venir en aide aux difficultés financières de ses parents !

- Bakugou.. commença-t-elle, un peu à la traîne car le garçon avançait rapidement.

- Quoi?

- ç'aurait été quoi, ton alter idéal?

Il freina légèrement sa course en s'apercevant que la jeune fille courait presque derrière lui, puis encra ses yeux rouges ardents dans les siens.

- C'est quoi cette question? cracha-t-il.

- Je sais pas, ria-t-elle, je réfléchissais juste aux possibilités incroyables de l'alter de Momo. Tu imagines ? Elle a tout ce qu'elle veux! C'est génial! se réjouissait innocemment Ochako.

- C'est qui Momo?

Elle leva les yeux aux ciels.

- Celle qui a l'alter Création, idiot.

- Tu veux que je te tue?!

- Mais ça fait plus de trois mois qu'on est en classe ensemble ! Tu connais mon prénom au moins?

Après tout, les seuls moyens qu'il employait pour la désigner étaient des surnoms, comme " tête d'oeuf " " Miss gravité " ( au moins il parvenait à se souvenir de son alter à elle ) ou parfois simplement " tête ronde ".

- Je suis pas un abruti finit, Ochako..

Il avait énoncé son prénom en accentuant la prononciation de chaque syllabe, lentement de sa voix caverneuse, pour lui faire enregistrer l'information, tout en s'approchant un peu plus de son visage, ayant brutalement cessé de marcher. La brunette retint son souffle, confondue par cette proximité soudaine, et discerna l'origine de l'effervescence qui lui traversait les joues, une fois de plus. Katsuki mit fin à cette scène en faisant volte face pour reprendre sa route, comme si de rien n'était.

- Tu m'appelles par mon prénom directement? Espèce d'impoli! le taquina-t-elle en le rattrapant.

- La ferme tête d'œuf, un faible sourire naquit au coin de ses lèvres.

« Il fait des supers soldes sur les sourires aujourd'hui? » cogita-t-elle.

- Et alors? Tu ne m'as pas répondu.

- T'avais dis quoi déjà? marmonna Katsuki.

- Pfff, soupira-t-elle, quel alter serait l'idéal pour toi?

- Le mien est parfait, pas besoin de le changer, affirma-t-il, fier.

- Quelle confiance..

- C'est pas avec un alter de création que je peux me battre facilement, ajouta-t-il, un air sadique prenant place.

- Tu veux juste te bagarrer? le questionna-t-elle, vraiment intéressée.

- Non, juste être le numéro 1.

La jeune fille analysa le regard du jeune homme. Il ne plaisantait pas, et la détermination totale qu'il introduisait dans le ton de cette phrase pourtant si simple imposait presque des frissons de respect.  C'est vrai que depuis leur première rencontre, Katsuki affichait sans gêne son désir de réussir, plus que n'importe qui. Plus même que Izuku, parfois, notamment lorsqu'il avait prononcé ces mêmes mots aux championnat de Yuei. Et il avait tenu son pari, pour le moment, en plus !

- C'est là, l'informa Katsuki, se stoppant devant une boutique aux affiches publicitaires sportives trônant sur les vitrines.

Ochako s'apprêtait à pénétrer à l'intérieur à ses côtés lorsqu'une main inconnue la stoppa net dans son action.

~~

Et voilà pour le chapitre 6 ! Je l'ai réécris quelques fois, jamais satisfaite..

J'avais hâte de faire plus de dialogue entre les deux chouchous, cette sortie est idéale ^^

N'hésitez pas à me donner avis ou critiques, je prend tout ^^

Je vous embrasse !