𝗣𝗼𝗶𝗻𝘁 𝗱𝗲 𝘃𝘂𝗲 𝗱𝗲 𝗥𝗲𝗺𝘂𝘀 𝗟𝘂𝗽𝗶𝗻.

Le repas achevé, Dumbledore demanda aux préfets-en-chef de ramener tous les élèves dans leurs dortoirs. Plusieurs des nouveaux élèves semblaient contrariés, ne souhaitant pas se faire enfermer dans leurs salles communes aussitôt après avoir mangé. Quelques enfants téméraires supplièrent même je-ne-sais-pas-trop-qui de visiter un peu le château avant d'aller dans leurs chambres – demande véhémentement refusée.

Nous marchâmes dans le couloir menant aux dortoirs, et je ne pouvais m'empêcher de regarder la décoration si particulière de Poudlard : tous les sorciers et sorcières, dans les cadres, nous souriaient comme si nous étions de très vieux amis à eux. Chez moi, les tableaux représentaient diverses créatures magiques plutôt grognonnes. Finalement, je n'eus pas le temps de m'extasier plus car la petite troupe des Gryffondor arriva aux dortoirs. Je cherchai le mien et constatai que je partagerais cet espace avec le garçon du repas, un ami à lui, ainsi qu'un autre garçon qui m'était encore inconnu. Sirius ouvrit la porte et la dénommé James y entra aussitôt. Je souris en les voyant si proches, alors même qu'ils ne se connaissaient que depuis ce matin. C'était étrange comme l'amitié peut parfois être quelque chose d'innée entre deux personnes.

Le jeune Potter lança une exclamation de stupeur, et j'entrai à mon tour dans le dortoir, intrigué par sa réaction. Sans le vouloir, je percutai Sirius au passage, toujours sur le pas de la porte, tandis que Peter entrait d'un air timide à ma suite. Ce pauvre enfant semblait vraiment dépassé par ce qui lui arrivait.

⸺ Oui, je dois bien avouer que ce n'est pas mal, souris-je en entrant dans la grande pièce.

⸺ Eh bien quoi ? Vous n'avez jamais vu de dortoir de votre vie ? nous taquina Sirius d'une voix aiguë.

Je ne sus pas vraiment quoi répondre à cela. Nous n'avions jamais vraiment pu prendre des vacances avec ma famille, à cause de mes transformations... et je savais pertinemment que mes disparitions mensuelles finiraient bien par mettre la puce à l'oreille des garçons. En tout cas, j'essaierais d'être discret, bien sûr, car je ne pouvais pas encore savoir qui était digne de confiance ou non. Pour l'instant, mes trois camarades (ou bien devrais-je les appeler « mes nouveaux amis » ? Je ne savais pas encore vraiment... qu'était-ce l'amitié, après tout ? Je n'avais jamais eu d'autres confidents que mes parents depuis mes cinq ans.) me semblaient sympathiques et dignes de confiance. Mais la vie m'avait appris à ne pas porter de jugement trop vite. 

⸺ C'est Poudlard, je te rappelle ! se défendit James, me ramenant désagréablement à la réalité.

Sirius et lui rirent de bon cœur. Je ne pus m'empêcher de ressentir une pointe de tristesse me transpercer lorsque je vis la connexion qui semblait lier ces deux-là. Ils semblaient se connaître depuis toujours ! Or, je savais bien que ce n'était pas le cas, mais, s'ils ne me l'avaient pas dit, sans nulle doute n'aurais-je jamais pu le deviner. Je souris, et je fus une nouvelle fois ramené à la réalité par le bruit de raclement que fit la valise de Peter sur le sol lorsqu'il la traîna jusqu'au lit le plus à gauche de la pièce, légèrement plus plongé dans la pénombre que les trois autres.

⸺ Je prends ce lit-là ! déclara-t-il de sa voix qui ressemblait étrangement à un couinement apeuré.

⸺ Très bien. Toi, James ? demanda Sirius Black en se tournant vers James Potter.

⸺ Je me mets à côté de Peter, répondit-il d'une voix remplie de fierté.

⸺ Très bien. J'aimerais bien me mettre à côté du mur, je n'apprécie pas trop la lumière. Ça te convient, Remus ?

Sa question resta pendant un instant en suspend dans mon esprit, me rappelant que ne rien leur dire était un choix de sécurité qui risquait de me compliquer la vie. Cherchant le meilleur mensonge qui me venant à l'esprit, je m'écriai d'abord avec véhémence :

⸺ Non !

Je relevai la tête, réalisant que j'avais sûrement répondu avec beaucoup d'intensité. Je me justifiai aussitôt par un mensonge pathétique – et surtout ridicule :

⸺ Enfin... cela peut paraître bête, mais... j'ai peur du noir.

Je baissai la tête pour reprendre mon souffle. Je mentais si mal ! Oh, et puis pourquoi je me prenais autant la tête ? Je commençais à croire que je devenais parano ! Comment pourraient-ils penser immédiatement que j'étais un monstre lycanthrope ? Oh, mais c'était si évident quand on y pensait... pourquoi avais-je accepté la proposition de Dumbledore lorsqu'il était venu me parler de Poudlard ? Il était évident que tout le monde me haïrait dès que mon secret serait révélé – et ça ne serait pas long au vu de mon incapacité flagrante à mentir pour mon propre bien.

Sirius posa sa main sur mon épaule et me rassura : cela ne le dérangeait pas de prendre le lit sous la fenêtre. Je m'en trouvai quelque peu rassuré.

⸺ Ne t'inquiète pas, je comprends. Cela ne me dérange pas de prendre le lit du centre. J'aurai la lumière de la lune pour m'éclairer si je veux bricoler un quelconque gadget.

La lumière de la lune. Même si ce n'était pas volontaire et absolument indépendant de sa volonté, ces mots me firent peur. Pour éviter de fondre en larmes à cause de la panique, je grognai, puis j'essayai de passer à un autre sujet :

⸺ Tu bricoles des gadgets ? Tu es bricoleur ?

Sirius me regarda, hilare.

⸺ Pas vraiment, mais disons que je manie bien la mise en fiole de produits pouvant... disons... créer une légère explosion et effrayer une bonne quantité d'élèves innocents ne sachant pas quelle est la source du bruit.

Il rit, et son amusement clair et joyeux m'arracha un sourire. Je ne pus m'empêcher de le trouver beau quand il était heureux : son visage malicieux s'enlevait de son expression pour laisser place à ses yeux pétillants. Il avait beau être jeune, je pouvais très bien deviner ce à quoi il ressemblerait plus tard : il aurait le cœur de nombreuses filles, pour sûr. Mais une partie de sa phrase me rappela à l'ordre :

⸺ Je vois. Je n'ai jamais fait ce genre de choses, je ne suis pas du genre rebelle. Mais j'admets que cela peut être drôle.

Remus Lupin et ses leçons contradictoires : faire la leçon à ses nouveaux amis avant de les encourager. J'étais décidément le pire des idiots.

⸺ Tu n'es pas du genre rebelle ? s'indigna faussement – du moins je l'espère – James. Oh, crois-moi, ça va changer ! Tu vas nous aider, pas vrai ?

⸺ Je ne sais pas. Du moins, je ferais mieux de vous garder à l'œil et de vous rappeler les limites. Oui, oui, il y a des limites. Une petite blague, je veux bien, mais faire voler des flacons remplis de bave de Scroutt à Pétard avant de les déverser sur la tête des élèves ou des professeurs, c'est non !

Oups, j'espérais ne pas leur avoir donné d'idées de farces à base de bave... Beurk !

⸺ On croirait entendre mon père ! s'écria James en levant les yeux au ciel. Ennuyeux, Remus. De la bave de Scroutt à Pétard ? Crois-moi, nous pouvons faire bien mieux ! Je vais t'apprendre, moi ce qu'est que vraiment faire des blagues drôles ! Je serai ton Mentor. Sirius m'aidera. Et toi, Peter ?

Peter sursauta, puis adressa à James une grimace étrange. Le pauvre semblait impressionné par les deux grandes gueules qu'étaient Black et Potter.

⸺ Heu... Je vous aiderai dans vos blagues, si vous le souhaitez.

Bon, bon. Je pense que je devrai les rappeler à l'ordre de temps en temps.

⸺ Merci, Peter ! s'écria à son tour Sirius, décidément pas décidé à me donner un coup de main, tandis que James nous pointait du doigt un à un, l'air amusé :

⸺ Bien, alors, nous avons : Peter, l'élève apprenti désireux d'apprendre. Remus, celui qui doit apprendre à se détendre, alias le sage du groupe qui jouera le rôle de nos parents et nous rappellera lorsque nous allons trop loin. Sirius, Mentor Certifié en Méfaits Amusants, et moi, le plus grand Mentor Certifié en Méfaits Amusant de tous les temps, mais aussi le plus beau, le plus talentueux et le plus savant du groupe.

⸺ Le plus modeste, également, sans vouloir importuner le Grand James Potter avec une qualité ayant moins d'importance que lui, ris-je, amusé.

⸺ C'est drôle, Remus, j'ai le souvenir de lui avoir dit exactement la même chose lors de notre rencontre ! dit à mi-voix aussitôt Sirius en reposant sa main sur mon épaule.

⸺ Je croyais que nous étions amis, Sirius ? s'indigna James de façon un peu trop exagérée. Oh ! Le héros Parfait, trahi par son ami sans-cœur !

Je ne pus retenir un rire devant tant de drame, puis Sirius bailla et s'étira.

⸺ Ouais, et bien, ledit ami sans-cœur va aller se coucher ! Je suis épuisé... en grande partie à cause de James qui ne s'arrête pas de sauter dans tous les sens !

Nous rîmes tous, et James continua son rôle dramatique :

⸺ Oh, Sirius, tu m'en veux ? Je ne pensais pas ce que je te disais, je ne mérite pas que tu me fasses la tête ! Je suis bien trop parfait pour cela ! Vous aussi, vous êtes parfaits, Peter et Remus, toi aussi, Sirius ! Même si vous ne m'arriverez jamais à la cheville en termes de parfaitude !

⸺ Une personne réellement parfaite sait que l'on dit perfection et non parfaitude, James, fis-je remarquer du tac au tac.

Nous eûmes tous un rire amusé, et je sentis une main se poser sur mon épaule : Sirius me souriait, l'air hilare.

⸺ Je sens qu'on va bien s'entendre, Rem' !

Nous éclatâmes de rire, nous échangeâmes quelques banalités avant de retrouver nos lits pour une bonne nuit de sommeil.

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Le lendemain matin, j'ouvris doucement les yeux tandis que les premiers rayons du soleil venaient me réchauffer le visage.

Sans plus attendre, je repoussai les couvertures et je m'habillai le plus rapidement possible, content à l'idée de notre première journée de cours. Je criai ensuite :

⸺ Debout ! Hé, réveillez-vous !

Peter sursauta et quitta son lit le plus rapidement possible pour s'habiller. Je levai les yeux au ciel en voyant James et Sirius se renfoncer dans leurs couvertures. Après plusieurs encouragements de ma part, James finit par se lever, encore à moitié endormi. Cependant, Sirius resta couché.

⸺ Hé, Sirius, debout ! On a cours !

Il se redressa, puis grogna et se recoucha. Sans trop réfléchir, je montai sur son matelas puis je m'installai sur ses genoux. Je le secouai vivement pour le réveiller.

⸺ Sirius, debout !

Exaspéré, il se releva vivement et me faisant signe de descendre, ce que je fis. Il se leva et se mis debout, tandis que je lui adressais le plus beau de tous mes sourires. Il attrapa son uniforme et ferma les rideaux de son lit pour se changer.

Quand il sortit, je lui lançai un regard perplexe.

⸺ Quoi ?

⸺ Tes cheveux...

Il me sourit, ce qui me remplit de joie, puis se recoiffa vite fait. Nous descendîmes en riant pour aller déjeuner.

« Le premier jour passa, puis un autre. Nous étions heureux et insouciants, tels les petits enfants que nous étions encore. Je ne m'imaginais pas qu'un obstacle compliqué allait se dresser entre moi et un de mes nouveaux amis... mais ça, je le constaterais plus tard. Pour le moment, j'allais découvrir Poudlard. »