𝐏𝐑𝐎𝐋𝐎𝐆𝐔𝐄

Depuis la triste mort de son père et les douloureux événements qui suivirent, Anastasia Flor faisait passer ses sentiments par de la colère. La tristesse et la douleur de son passé étaient dissimulées sous ces violentes crises de rage qu'elle avait constamment l'habitude de faire lorsqu'une chose ne lui plaisait pas. La jeune fille n'était pourtant pas de nature méchante, au contraire, sa douceur, sa timidité, et sa générosité - qualités gagnées de la part de son géniteur - étaient ses plus belles particularités. Et c'était ce qui donnait envie aux personnes de s'approcher de cette belle demoiselle à la beauté divine et de faire ample connaissance. Seulement, la vie n'avait jamais été tendre avec elle. Entre le décès tragique de son paternel - accident dans lequel elle se trouvait également - et les horribles actes de sa génitrice, l'adolescente paraissait déjà une vraie femme. Endurcie par le temps et les obstacles que l'on dressait sur son chemin, confiante malgré les rabaissements qu'elle pouvait subir, Ana avait décidément changée. La petite fille effrayée qu'elle avait un jour été, avant laissé place à cette future jeune femme au caractère bien trempé. D'ailleurs, ses camarades de classe, principalement Carl Hassen, avaient assisté aux conséquences de son agacement. Énerver une portugaise à demi-roumaine et norvégienne était une très mauvaise idée, le mélange de ces origines donnait un résultat explosif. Et cela, ce jeune homme à l'arrogance plus grande que la fortune de ses parents en avait prit conscience, malheureusement trop tard.

Toujours aussi remontée contre cet imbécile de riche, comme elle adorait le surnommer, l'originaire du Portugal referma sa porte d'entrée avec une violence qu'elle ignorait avoir. Ses petits bras ne devaient contenir que très peu de muscles, pourtant le vacarme que le battant venait de faire prouvait le contraire. Fière que ces heures de sport passées en salle servent à quelque chose, Anastasia sourit bêtement, avant de retrouver son air sérieux. Les sourcils adorablement froncés et le regard sombre, la jeune fille retira ses chaussures pour les ranger proprement à leur place. Son sac d'école noir quitta finalement son dos pour trouver sa place à quelques mètres des escaliers. Les écouteurs toujours enfoncés dans les oreilles, diffusant une musique de rap français qu'elle affectionnait particulièrement, la brune se dirigea vers la pièce principale de la grande demeure des Ioans. Espérant plus que tout que sa génitrice ne soit pas encore rentrée de son voyage d'affaires à l'autre bout de la planète, l'adolescente pénétra dans le salon. Malheureusement, ses prières étaient rarement écoutées, ce qui était le cas de cette journée qui semblait s'acharner sur la demoiselle.

Assise sur le luxueux canapé de la pièce à vivre, Katherine Olsen patientait avec lassitude l'arrivée de sa fille chérie. Entourée d'une famille très proche de son ancien mari décédé dans un accident de voiture - le même dans lequel elle avait failli perdre son unique enfant - la femme d'affaires paraissait ennuyée par les discussions. Son faux sourire et les roulements discrets de ses yeux parlaient bien pour elle. Moulée dans une robe sang au décolleté vertigineux et chaussée de ses talons de marque, la norvégienne semblait acquiescer à chaque informations ou nouvelles que les Gunnarsen lui donnaient. Renommée dans le monde entier, d'une part grâce à la popularité de son ex mais aussi de sa famille, la trentenaire n'en avait que faire des condoléances et des excuses pour la disparition de Jace Ribeiro Ioans, le père de sa progéniture. Mais pour pouvoir quitter le pays avant ce soir et dissimuler sous ses airs de veuve fraîchement fiancée le vrai monstre, Kath se devait de faire bonne figure, comme lui avait appris sa mère. L'ancienne mannequin avait des plans bien précis à réaliser et rien, pas même l'enfant qu'elle avait porté durant neuf mois, ne pouvait se mettre en travers de son chemin. Seulement, pour cela, elle devrait régler un léger problème : la plainte portée par une voisine trop curieuse. Cette dernière, ayant constaté ses nombreux déplacements à l'étranger et la solitude dans laquelle vivait Flor, avait appelé la police pour dénoncer cet acte. Heureusement, le futur homme de la milliardaire était un policier travaillant dans les services du village de Trofors. Et grâce à ses bons moyens de persuasion, elle avait su négocier avant qu'ils ne débarquent chez elle pour mettre la main sur la petite qui n'hésiterait pas deux fois à tout balancer sur les actions commises par sa sorcière de génitrice. Katherine devait impérativement éviter cela : que tout ne soit divulguer et que le passé refasse surface, car elle savait n'avoir aucune chance d'être libérée si tout venait à s'apprendre. La meilleure solution pour esquiver l'affaire était de donner de la compagnie à la propriétaire de la maison, pour faire taire le voisinage sur sa vie solitaire.

— Ma chérie, nous t'attendions ! s'écria Kath d'une voix aiguë, sonnant étrangement fausse.

Ne comprennant pas la raison pour laquelle ses deux idols se trouvaient dans son salon accompagnés de leur famille, Anastasia retira lentement ses écouteurs. Son regard interrogea silencieusement sa mère, sans obtenir de réponse. Mais elle s'en doutait déjà ! L'ancienne femme de son père ne lui répondrait que lorsque la situation serait la moins appropriée, pour la pousser à sortir de ses gonds et commettre l'irréparable. Seulement, la brunette d'un mètre septante-huit avait compris sa manière de fonctionner et s'attendait au pire à chaque instant, ce qui cassait l'effet de surprise que la nouvelle pouvait avoir sur sa personne.

— Laisse-moi te présenter Anne et Erik, les parents de Emma, Marcus et Martinus, continua Katherine. Ce sont des amis de longues date de ton père.

À l'évocation du surnom utilisé, Ana serra fermement la mâchoire, sous le regard malicieux de sa mère. Cette dernière savait très bien que le simple fait de prononcer le mot « papa » faisait remonter énormément de bons comme de mauvais souvenirs dans l'esprit de l'adolescente, mais elle en profitait. Car la faire souffrir était son passe-temps préféré, pour une raison bien précise dont seul Jace, lui-même, connaissait. Malheureusement, cet homme n'était plus là pour protéger sa fille des griffes de cette vilaine sorcière.

— Nous avons beaucoup entendu parler de toi, et nous sommes ravis de faire ta connaissance, sourit affectueusement la prénommée Gerd-Anne.

— Bonjour, répondit la jeune fille, sans grande conviction.

Prenant place sur le fauteuil le plus éloigné que possible de l'emplacement exact où se trouvait l'ancienne mannequin, Ana s'y installa confortablement. Pas le moins du monde intéressée par la discussion qui devait probablement être portée sur sa personne, l'adolescente se concentra sur les notifications qui illuminaient son écran. Les doigts pianotant diverses réponses aux quelques commentaires reçus sous sa nouvelle publication Instagram, la future jeune femme se sentit soudainement épiée. Persuadée qu'il s'agissait de sa mère et d'une de ses idiotes tentatives d'intimidation, elle n'y prêta pas grande attention. Seulement, le regard insistant que l'on portait sur elle paraissait lui brûler la peau, au point de la faire rougir. Certaine que le coupable n'arrêterait pas, la brune releva les yeux de son téléphone portable, à la recherche de sa prochaine victime à intimider. C'était une de ses manières préférées d'agir, un moyen d'effrayer facilement les inconnus pour qu'ils cessent leur petit manège. Malheureusement, le fautif de sa gêne n'était autre que le cadet des jumeaux, un adversaire qui semblait refuser de stopper son observation, même sous les éclairs qui brillaient dans les pupilles de Anastasia.

Depuis l'entrée presque spectaculaire de cette dernière, Martinus Gunnarsen n'avait pu quitter des yeux sa future colocataire. Persuadé qu'il aurait à passer les prochaines semaines avec une bimbo arrogante et maquillée des pieds à la tête, il était bien surpris de faire face à une jeune fille naturelle qui paraissait dotée d'un fort caractère. De longs cheveux bruns qui donnait envie d'y glisser les doigts, une peau brillante de douceur, des courbes sensuelles à faire damner un saint dissimulées sous une couche de vêtements foncés, un regard sombre totalement hypnotisant, et des lèvres rosées appelant au péché qu'il rêvait bien de commettre. Une parfaite déesse tombée du ciel, une délicieuse créature. Certainement bien loin du type féminin que le chanteur avait en tête, mais avec qui il avait soudain pour souhait de faire ample connaissance.

Perdus dans leurs pensées respectives, les deux adolescents sursautèrent lorsque Katherine frappa dans ses mains, brisant le court de la conversation. La femme d'affaires, ayant remarqué l'échange de regard - celui meurtrier de sa fille et appréciateur de son invité - qui se produisait sous son nez, s'était portée volontaire pour briser l'instant chargé d'électricité. Elle comptait balancer la bombe, histoire de monter le vrai visage angélique de sa progéniture à la famille Gunnarsen. Peut-être prendraient-ils conscience que la victime de toute cette mascarade n'était autre qu'elle-même et que Anastasia Flor était le monstre.

— Bien ! Maintenant que ma fille chérie est rentrée de son école privée, je tenais à lui annoncer la nouvelle.

Flora s'attendait au pire. Sa mère avait toujours eu recours à des techniques douteuses pour la mettre dans une colère sourde et la pousser à bout. Et même si la portugaise ne réagissait que très peu lorsque Kath lui balançait une autre bombe en pleine figure, elle ne pouvait que redouter la suite. Parce qu'une chose était de donner l'information qui mettait en péril son calme, une autre était l'impact que risquait d'avoir sa réaction sur sa génitrice. Si Ana réagissait ou s'énervait, l'ancienne mannequin ne disait rien, en revanche, si elle ne faisait rien, l'ex-femme de Jace se vengeait. D'une manière très violente, presque mortelle.

— Comme les voisins s'inquiètent pour ta sécurité, même si le choix de rester seule ici te reviens, je ne peux laisser passer ça, reprit la norvégienne. Donc, après réflexion, j'ai pris la décision de te faire vivre en colocation avec les jumeaux Gunnarsen. Étant donné que leur parents partent en voyage important, ils resteront avec toi, jusqu'à leur retour.

Un lourd silence s'installa, suite à la nouvelle. L'unique fille des Ioans ne bougea d'un pouce, les yeux rivés dans ceux de sa sorcière de mère. Sa vie venait définitivement d'être, à nouveau, bouleversée, alors qu'elle recommençait lentement à reprendre des couleurs. Vivre avec cette femme était déjà une torture, mais de là à partager la demeure avec deux autres personnes, qui plus est des hommes ! Ça ne pourrait pas être pire.

— N'est-ce pas génial ?!

— Fantastique ! s'exclama Anastasia, les dents serrés et un faux sourire sur les lèvres.

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𝐉'𝐞𝐬𝐩è𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐜𝐞 𝐜𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐚𝐮𝐫𝐚 𝐩𝐥𝐮.

Claudia M.T.C

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