𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 ¹¹ : « Qui est Loren Gray ? »

De retour à la demeure des Gunnarsen, Anastasia ne prit pas la peine de saluer et remercier ses deux gardes du corps. Elle se précipita vers l'intérieur de la maison, faisant abstraction de son mal de ventre et du froid qui lui glaçait les jambes malgré son jeans. La douleur de la blessure par balle commençait à prendre de plus en plus d'ampleur, il lui fallait donc ses médicaments et tout de suite. À l'intérieur, la brunette ne s'arrêta pas pour retirer ses bottes ni son manteau, elle n'y arriverait pas de toute manière. Rien que le fait de monter les escaliers lui donnait l'impression d'être plantée de partout par les milliers de petits coûteux bien affûtés, alors se pencher en avant pour faire glisser la fermeture Éclair de ses chaussures semblait être mission impossible. C'est donc vers Anne, qui était la seule à détenir les cachets contre cette vilaine souffrance, que la jeune fille se précipita, lui demandant où elle avait rangé les boîtes prescrites par son médecin traitant. La mère de famille s'empressa de lui tendre les comprimés, ainsi qu'un verre d'eau, jaugeant du regard l'état dans lequel se trouvait la demoiselle. Une grimace déformait ses traits angélique, signe que son supplice était intense et presque plus supportable. Pourtant, ce genre de mal-être, elle connaissait bien, avec un passé aussi tragique.

— Ana, ma belle, s'inquiéta la blonde, face aux yeux presque larmoyants de son invitée. Tu es sûre que ça va ?

N'ayant pas encore la force d'ouvrir la bouche après le trajet douloureux qu'elle venait de faire, Flor se contenta d'hocher de la tête. Ses pupilles étaient closes et sa respiration erratique, signes évidents de sa souffrance physique.

— Tu as passé l'après-midi entière à l'extérieur, tu ferais mieux d'aller te reposer un peu. Le dîner n'est pas encore prêt de toute façon.

— Toute l'après-midi ? souffla la jeune femme, en observant l'horloge de la cuisine.

J'ai passé autant de temps chez Jackson ? se demanda-t-elle intérieurement, peinant à y croire.

— Oui, vous avez raison, Anne. Je vais aller m'allonger un moment.

Avant de disparaitre de la pièce ouverte sur le salon et la salle à manger, elle désigna du menton les sacs d'école éparpillés au pied du canapé. Et interrogea la maman, espérant autant une réponse positive que négative :

— Les garçons sont déjà rentrés ?

— Oui, ils sont rentrés plus tôt que prévu, répondit cette dernière. Leur professeur d'histoire était absent, d'après leurs dires.

— D'accord, merci beaucoup, Anne, remercia-t-elle, avant de tourner les talons.

— Oh, Ana !

La portugaise s'arrêta au pas de la porte et se retourna vers la femme de Erik, attendant que cette dernière ne parle. Un sourire en coin naquit sur les lèvres de la dame et son regard pétilla de malice.

— Martinus doit être dans sa chambre, au cas où.

Avec un faux air étonné et un rictus qui se voulait être un sourire heureux, Flor reprit sa route avec lenteur, veillant à éviter les gestes brusques. Elle en avait assez fait pour la journée et si elle pouvait esquiver une nuit de souffrance à nouveau, rien ne la rendrait plus joyeuse. La brune se mit à monter les marches unes à unes, une main sur le côté gauche de son ventre. Encore quelques centimètres et la balle aurait touché sa hanche fatalement. Chaque mouvement de son corps lui arrachait un gémissement de douleur. C'était un véritable supplice d'endurer ça depuis une bonne semaine, mais elle tenait bon et faisait son possible pour oublier la présence d'une cicatrice en plus sur son torse. En arrivant finalement à l'étage, elle rejoignit l'antre secret de son dragon. Ce dernier, installé confortablement sur la chaise de son bureau, jouait de nombreux accords au piano, créant ainsi une douce mélodie qui ravi les oreilles de la demoiselle. Quand le bruit de la poignée de la porte l'atteignit, le blondinet se retourna et son visage s'illumina en voyant, face à lui, la fille avec laquelle il passait de merveilleuses nuits. Aussitôt, il s'écria joyeusement :

— Tigresa ! Quand je suis rentré, tu avais pris la fuite.

La dernière phrase fit rouler des yeux la demi-roumaine et Tinus lui lança un regard désapprobateur. Étrangement, le norvégien avait eu la même réaction, il y a deux jours, quand en l'aidant à sortir de la voiture, elle lui avait assuré pouvoir marcher seule. Pourquoi ce simple geste le mettait dans tous ses états ? Ce n'est pas comme si elle avait tué quelqu'un, non plus. Essayait-il de lui faire passer un message avec son allure qui se voulait intimidante ? Décidément, le jeune homme devait se calmer sur son visionnage de Cinquantes Nuances de Grey, parce que son imitation de Christian Grey était minable, pensa Anastasia, intérieurement et amusée par sa propre imagination qui risquerait de partir très loin si elle n'y mettait pas un terme.

— Mini-Gunnarsen ! dit-elle sur le même ton, mais avec un air de lassitude. Quel non plaisir de te revoir ! Tu auras dû rester à l'école, tu n'aurais manqué à personne. Et je n'ai pas pris la fuite, comme tu le dis, je suis sortie.

— Où ? demanda-t-il curieusement, en l'observant intensément, comme à son habitude.

— De quoi je me mêle, blondinet, gronda l'adolescente, le fusillant du regard, ce qui eu l'effet d'agrandir le sourire de ce dernier.

En retirant sa veste, Ana grimaça et regretta aussitôt son geste. Ses dents emprisonnèrent sa lèvre inférieure, retenant un cri de douleur qui, malgré elle, s'échappa et alerta Martinus. Ce dernier bondit de sa chaise et se précipita vers son amie, dans l'intention de l'aider à se dévêtir. Délicatement, le jeune homme attrapa les bords du manteau et le fit glisser sur les frêles épaules de sa colocataire. Le vêtement dévoila peu à peu les bras de la brunette emprisonnés dans la dentelle blanche de son pull. Dire qu'elle était magnifique avec cette tenue était bien faible pour décrire sa vraie beauté. Flora frisonna au contact de ses doigts sur sa nuque et qui caressaient sa peau à travers le tissu de son haut. Une fois à l'aise, la portugaise s'éloigna de quelques pas, ne supportant plus la douce torture qu'il lui faisait subir et le fait d'être collée complètement à son torse, en sentant son souffle sur son cou. Premièrement, car tout en lui lui faisait beaucoup trop d'effet pour qu'elle supporte sa présence aussi longtemps à ses côtés et deuxièmement, car la proximité physique avec les autres était encore trop difficile pour elle. Surtout avec les garçons.

— Anastasia, tu n'aurais pas dû sortir, la réprimanda Tinus.

— J'avais une course à faire, répondit-t-elle, en prenant place sur le lit double place pour retirer ses chaussures.

Le simple fait de s'asseoir lui valu un élancement violent, mais quand elle se plia en deux pour atteindre ses pieds, le choc fut pire. Lentement, la fille de Jace et Katherine se redressa, se concentrant sur sa respiration saccadée. Elle força les larmes de douleur à disparaitre pour ne pas qu'elles coulent sur ses joues rougies par le froid du pays.

— Je vais le faire pour toi.

Tinus se baissa à sa hauteur, un genou à terre. Avec précaution, il prit son pied droit dans ses mains, avant de faire descendre la fermeture Éclair de sa bottine et de la retirer. Le chanteur refit la même chose pour la gauche, prenant garde à ne pas blesser sa belle. Puis lentement, son visage se releva vers elle. Leur iris se connectèrent ensemble pour ne plus se lâcher. C'était tellement hypnotisant et la sensation chaude qui grandissait dans leur ventres était plus qu'agréable. Aucun des deux ne souhaitait rompre le lien qui semblait s'intensifier au fil des secondes qui s'écoulait. La main du blond remonta le long de sa jambe, lui donnant d'horribles frisons qui ne la dérangèrent pas plus que ça. Au contraire, c'était un contact intense et bon. Ses doigts continuèrent leur course sur son bras qu'elle avait déposé sur sa cuisse, le long de son épaule, sur son cou, sur sa mâchoire pour finir sur sa joue. Son pouce se pressa sur sa pommette qu'il caressa affectueusement. Flora se laissa faire, pour la première fois de sa vie. Elle ferma même les yeux au contact de sa peau sur la sienne, profitant au maximum de tout cela. C'était si inhabituel pour elle, mais affreusement délicieux qu'elle ne protesta pas quand il vint toucher ses lèvres. Automatiquement, sa tête se pencha vers lui pour augmenter la proximité entre leur corps.

— Merci, souffla l'adolescente, en réouvrant les yeux sur les pupilles chocolat de son nouvel ami.

— Je t'en prie, poupée.

Martinus se redressa avec une lenteur presque prédatrice. Son index releva la tête d'Anastasia vers lui, approchant son visage du sien le plus possible. Leur souffles se mêlèrent ensemble. Leurs lèvres étaient à un millimètre de se toucher, mais aucun n'osa aller plus loin sans le consentement de l'autre. Cette attraction était beaucoup trop intense pour eux, pourtant les deux jeunes n'y mirent pas fin, appréciant la tension qui s'était mise à régner dans la pièce. Le norvégien continua d'avancer jusqu'à elle et la brunette se laissait un peu plus glisser sur les draps du lit pour finir totalement couchée dessus. Ses mains entourèrent les biceps du blondinet, cherchant à garder un maximum de proximité et ses jambes se relevèrent pour emprisonner le bassin de son ami. Ce dernier fit glisser ses doigts sur la cuisse gauche de la demoiselle, toujours avec cette lenteur insoutenable.

— Tu ne sais pas à quelle point tu es désirable, Anastasia, souffla-t-il.

— Martinus... soupira l'étudiante, en le voyant s'approcher encore plus de ses lèvres.

— Je sais, ma belle, je sais. Je rêve de t'embrasser depuis que t'es rentrée chez toi, ce jour-là, et que tu me lançais ce regard affreusement sexy.

— Qu'est-ce que tu attends pour le faire, alors ?

— Non, sourit malicieusement le fils d'Erik et Anne. Ce serait beaucoup trop simple.

Tinus plongea son visage dans le cou de la jeune femme qui se cambra, en sentant les lèvres de son colocataire sur sa peau. Un gémissement lui échappa malencontreusement quand il eut la bonne idée d'embrasser son point le point le plus sensible chez elle, presque vers l'épaule. Sa tête bascula en arrière et elle rechercha de l'air, se sentant fondre sous la bouche du blondinet. Ce dernier déposa une série de baiser le long de sa mâchoire, avant de revenir sur ce qu'il désirait vraiment, sans pour autant s'en emparer.

— Tinus...

— Chuut, souffla-t-il, en caressant du pouce sa lèvre inférieure qu'elle mordit aussitôt. Tu es beaucoup trop belle, poupée, surtout dans cet état rien que pour moi.

Soudainement, la porte de la chambre s'ouvrit et Martinus sauta du lit, remettant de l'ordre dans ses cheveux, ainsi que dans ses vêtements. Ana relâcha les draps qu'elle serrait dans ses poings et se redressa avec précaution pour ne pas réveiller sa blessure qui paraissait s'être calmée. Ou était-ce jusque la présence de l'adolescent qui lui fait tout oublier. Marcus passa sa tête dans l'encadrement de l'entrée, jaugeant les deux du regard. L'aîné des jumeaux plissa des yeux, en voyant la gêne présente qui venait de s'installer dès son arrivée et un sourire en coin naquit sur ses lèvres. Son frère lui fit signe de se taire et pour une fois, le nouvel arrivant obéit.

— Je suis terriblement navré de déranger votre moment intense de discussion, mais j'aurais besoin de mon petit frère adoré pour une minute. Je te le rends tout de suite, Ana.

Attablés depuis une vingtaine de minutes, la famille et leur invitée dînaient dans la bonne humeur. Les parents de chaque côté de la table, Marcus et Emma côte à côte face à Anastasia et Martinus. Ces derniers ne pipaient mot, mais les regards échangés en disaient long sur leur état actuel : une immense frustration de ne pas avoir pu terminer ce qu'ils avaient commencé.

— Ana, appela la dernière de la famille. Tu peux me passer le saladier, s'il te plaît ?

Cette dernière s'exécuta, avec un sourire adorable qui illumina son visage angélique, pour le plus grand plaisir de Tinus qui se rinça l'œil.

— Oh, maman ! s'exclama Marcus. Demain, avec les gars, on va chez Loren.

— Demain ? répéta Anne. Mais les garçons, vous devez préparer vos affaires pour le voyage.

— D'ailleurs, maintenant que tu en parles, chérie, j'ai pensé que nous pourrions proposer à Ana de nous accompagner, proposa Erik. Ça serait un moyen de décompresser des évènements de ces derniers temps et de lui montrer votre talent sur scène. Qu'est-ce que vous en dites ?

— Ouais ! Ce serait top que tu viennes, Ana ! Tu verras l'horreur qu'est mon frère sur scène.

— Horreur ? s'indigna ce dernier. Tu parles, tu es le plus nul de nous deux !

Dans son coin, dévorant sa frite, Flora ricana. Elle s'amusa des chamailleries entre les deux frères. C'était très amusant à regarder.

— Qui est Loren ? demanda soudainement Emma.

— Gray. Loren Gray, répondit Marcus.

— Ok, mais ça ne me dit toujours pas qui elle est...

— C'est... commença Tinus, avant d'être brusquement coupé par Ana.

— Ma cousine.

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𝐉'𝐞𝐬𝐩è𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐜𝐞 𝐜𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐚𝐮𝐫𝐚 𝐩𝐥𝐮.
𝐍'𝐡é𝐬𝐢𝐭𝐞𝐳 𝐩𝐚𝐬 à 𝐦𝐞 𝐝𝐢𝐫𝐞 𝐬𝐢 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐭𝐫𝐨𝐮𝐯𝐞𝐳 𝐝𝐞𝐬 𝐟𝐚𝐮𝐭𝐞𝐬 𝐝'𝐨𝐫𝐭𝐡𝐨𝐠𝐫𝐚𝐩𝐡𝐞.

Claudia M.T.C

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