𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 ¹⁹ : « Préparations du mariage. »
Après son court séjour à l'hôpital, Katherine Olsen obtint finalement l'accord de son médecin pour sortir. La trentenaire venait de passer presque une semaine entière dans une chambre dénudée de couleur avec un personnel incompétent selon elle. C'était inadmissible pour une personne aussi importante qu'elle d'être traitée de la sorte. À part crier et vociférer des menaces à l'encontre des employés, la mère d'Anastasia avait aussi put profiter du calme, malgré les « bip » incessants des machines, pour travailler sur des dossiers de l'entreprise. Mais être clouée à un lit n'était pas bon quand on avait autant de chose à régler. Notamment les préparatifs de son futur et deuxième mariage, cette fois-ci avec le Lieutenant Thompson. Il lui restait encore à vérifier le lieu de la cérémonie, discuter avec le prêtre, préparer les invitations à faire envoyer, se trouver une seconde robe de mariée et décorer l'endroit. Une tonne de choses à faire et une seule femme pour tout organiser avec des abrutis dans les pattes qui ne savent pas comment faire leur propre boulot comme il se doit. Mais son union avec Mario n'était pas le seul problème que Kath devait impérativement gérer. Non, il avait aussi son défunt époux qui jouait à cache-cache dans la nature et dont on ne trouvait la planque actuelle. Et cette stupide progéniture qui faisait des siennes en allant voir son amant pour le menacer d'accepter son pacte. Cette créature abominable qui était sortie de son ventre lui donnait une de ces envies de meurtres ! Une discussion s'imposait ou plutôt une nouvelle scéance. Cela faisait un bout de temps que l'adolescente n'était pas passée faire un tour au sous-sol, dans cette pièce dont la porte n'avait pas de nom - celle qui avait attisé la curiosité de Martinus quand il cherchait Ana. Il était temps de réapprendre la leçon à la demoiselle. Peut-être que quelques coups de ceintures serraient suffisant ? Ou encore les coups de poing ? Voire les brûlures de cigarettes ? Toutes ces tortures étaient un régal pour la mère et elle ne s'en passerait pas.
« — Je sais, Carl, dit-elle au téléphone. Mais ça ne sert strictement à rien de paniquer pour si peu.
— Tu rigoles, j'espère ? s'indigna brusquement son interlocuteur. Elle a menacé de mettre fin à ma réputation et me dénoncer aux flics ! Comment veux-tu que je reste clame ?
— Espèce d'abruti, personne ne croira une gamine folle à lier ! Elle n'a aucune preuve de ce qu'elle avance, comment va-t-elle faire pour faire couler ton business, hein ? Je t'en prie explique-moi. »
Un soupir lasse résonna dans le combiné.
« — Tu as probablement raison, Kath. J'en fais des tonnes pour si peu.
— Contente que tu aies retrouvé la raison, déclara froidement la norvégienne. Et ne t'inquiètes pas pour cela, je vais lui faire passer l'envie de se mêler de mes affaires à cette petite garce. »
Sans laisser le temps à Holland d'en placer une, Katherine raccrocha. Elle afficha une moue dégoutée, en insultant mentalement son amant. Qu'est-ce qu'il pouvait être naïf et véritablement idiot par moment ! Selon la femme d'affaires, cela en devenait presque une maladie grave qu'il se devait de rapidement soigner au risque de l'empirer. Gracieusement, l'ancienne mannequin délaissa ses pensées à propos de Carl et reprit sa vérification sur l'avancement des préparatifs. Lorsqu'elle remarqua un membre du personnel déposer un vase sur la table appartenant aux invités, la trentenaire vit rouge et se précipita pour arracher l'objet des mains de la petite rousse. Aussitôt, elle hurla :
— Non ! Ce bouquet de fleur va sur la table principale ! Les blanches vont sur celles des invités ! Mais quelle bande d'incompétents m'a-t-elle fourni pour préparer mon mariage !
La brune continua à rager, laissant un flot d'insultes modérées quitter sa boucher maquillée d'un rouge électrique. Ses talons claquèrent avec violence sur le sol carrelé en marbre orangé, signe évident de son mécontentement. Elle reprit son inspection de la grande salle de réception de l'hôtel cinq étoiles réservé pour « le grandiose événement de l'année » - selon elle-même, passant les moindres détails au peigne fin. La perfection était presque une obsession pour la trentenaire. Son éducation stricte s'était résumée à chercher à être meilleure que les autres, à montrer sa réussite, à porter fièrement son nom de famille, à se sentir supérieure aux autres et à ne laisser personne la dominer. Être parfaite était, est et sera toujours sa priorité numéro une. C'était une des raisons qui avaient fait succomber Jace qui, à l'époque, cherchait à la sortir de ce cercle vicieux. Malheureusement, toutes ces années de dénigrement de la part de sa mère avaient fait naître de graves problèmes dans la tête de Kath. La folie meurtrière faisait désormais partie d'elle, c'était dans ses gènes et rien ne pourrait y changer cela. Nombreux enfants maltraités dans leur enfance finissent par reproduire les seules choses que l'on leur a appris sur leur descendance et c'est une bien triste réalité.
Dans la foule de personnes qui se mouvaient pour rendre l'endroit impeccable, une seule se démarquait des autres. Vêtue d'une magnifique robe fleurie qui mettait en avant son teint clair et ses yeux d'une couleur unique accompagnée par une jacquette en cuir noire, ainsi que des bottines à talons, la jeune fille organisait la table des buffets avec minutie, connaissait pertinemment les attentes de sa sorcière de génitrice. L'adolescente avait fait honneur de sa présence aux préparatifs de la célébration et s'était proposée pour aider le personnel dans les tâches simples à réaliser. Le regard de la norvégienne tomba sur sa fille et un sourire carnassier naquit sur ses lèvres. C'était le moment de mettre son plan à exécution et d'aller lui parler. Avec cette élégance propre à elle-même, Olsen s'approcha de la portugaise, se mettant dans la peau d'une mère inquiète et proche de son enfant. Ce qui était très loin d'être le cas.
— Ana, ma chérie ! s'exclama-t-elle faussement joyeuse de la voir encore en vie, tapant dans ses mains. Comment vas-tu, ma fille ?
— Mère, répondit cette dernière, sans daigner relever les yeux de son travail. Je vais parfaitement bien et toi ?
— Je te remercie de t'inquiéter. J'ai passé une semaine épouvantable, c'était horrible -
— J'espère que ce séjour à l'hôpital n'a pas trop affecté quelques neurones déjà rares, la coupa la fille de seize ans, n'en ayant rien à faire de ses jours passés dans cette chambre blanche. Ça serait bête de devenir encore plus dégénérée qu'à la normale.
Un sourire forcé prit place sur les lèvres de Katherine qui cherchait à donner l'image d'une conversation calme et familiale. C'était loin d'être le cas : l'une avait clairement envie de sauter à la gorge de l'autre et l'autre avait pour souhait d'enterrer vivante l'une. Une vraie bataille qui risquerait de très mal se finir, mais fortement nécessaire.
— Ne t'en fais pour cela, ma chérie. Aucun risque.
— Justement, je ne m'en fais pas. J'en ai, comme on le dit, strictement rien à foutre de ton état actuel, mère.
Flora insista sur le dernier mot de sa phrase. Ce synonyme de « maman » sonnait totalement faux, il n'aurait jamais dû être attribué à une femme telle que celle-ci. Elle ne méritait pas ce privilège d'avoir porté un enfant, pas après toutes les horreurs commises dans sa vie.
— Quelle vulgarité, je ne t'ai pas élevé ainsi, Ana, s'indigna Katherine, une main sur sa poitrine juste au niveau du cœur.
— C'est simple, ce n'est pas toi qui m'a élevé, répliqua aussitôt l'étudiante, en la regardant droit dans les yeux, délaissant sa tâche. Ça, c'était le travail de papa, pas le tien. Tu n'es avais rien à faire de ta gosse.
— Peu importe ! mit-elle fin à cet échange houleux. Je suis là en paix pour te demander une faveur.
— Tu n'es jamais là en paix, Katherine.
Jamais, pensa l'étudiante. Ce serait bien trop beau que tu viennes te taper la discussion avec ta fille. D'ailleurs, c'est déjà étrange que tu te rappelles de moi.
— Comme cela fait longtemps que nous n'avons pas passé un moment ensemble, rien que toutes les deux, j'ai pensé que l'on pourrait... Enfin que tu pourrais venir avec moi et m'aider à choisir ma robe de mariée. Et on profiterait pour acheter la tienne. Tu auras vraiment le choix dans cette boutique, elle est géniale.
— Ah oui ? ricana l'adolescente, en tapant des ongles sur la table. Un moment entre mère et fille, c'est cela ?
Pour simple réponse, Katherine hocha la tête. Une lueur étrangère passa dans son regard, mais l'amie des jumeaux Gunnarsen ne s'en formalisa pas plus que ça.
— Après tant d'années, tu te rappelles que tu as une fille... continua Anastasia, avant de lâcher un rire. Celle-là, c'est la meilleure que tu m'aies jamais faite ! Une journée shopping, toi et moi ? Magnifique, franchement ! Continue comme ça, Kath, tu t'améliores niveau mensonge menaçant.
— Je... Je ne comprends pas, Ana, souffla l'ancienne mannequin, dépitée par le flot de paroles que l'on lui lançait à la figure.
— Tu ne comprends pas ? siffla l'adolescente, un voile de colère prenant place sur son visage angélique. Qu'est-ce que tu ne comprends pas, Katherine ? C'est un non. À quoi t'attendais-tu ? À ce que j'accepte sans rechigner, sans me poser de questions, sans réfléchir parce que je serais probablement trop heureuse que tu te souviennes de mon existence ? Ça c'était avant, quand j'étais encore certaine de pouvoir trouver ne serait-ce qu'une once de compassion et d'amour en toi. Mais j'ai compris que tu n'étais plus rien qu'un monstre sans cœur qui fait souffrir pour son propre plaisir. Si tu cherchais à me tromper avec tes mensonges pour me forcer à descendre au sous-sol et attendre ma sentence, c'est perdu d'avance. Je ne suis plus cette petite gamine naïve qui se laisse faire sans se battre, ce temps-là est terminé. Alors tes « sortie à deux », tes « journée shopping entre mère et fille », tes « dîners en famille » et j'en passe, tu peux te les garder pour ne pas être plus vulgaire que cela. J'ai arrêté d'avoir peur de toi, au moment même où tu as tenté de me noyer, après la mort de papa.
Sur ces paroles poignantes qui eurent l'effet de troubler sa génitrice, Flor tourna les talons. Un « c'est pour ton bien, Ana » atteignit ses oreilles et l'arrêta dans sa marche. Aussitôt, la jeune fille revint sur ses pas pour se poster face à sa bourrelle.
— Je suis vraiment désolée que ta mère t'ait fait souffrir à ce point et je t'assure que j'ai cherché à te pardonner, à trouver une excuse face à tes agissements. Mais j'ai pris conscience que tu étais un cas perdu d'avance et que les mots ne résoudraient plus rien à ton état. Alors j'ai laissé tomber, je ne veux plus te sauver de tes démons. Au contraire, je voudrais qu'ils te dévorent et te fassent disparaître de ma vie pour l'éternité. Sache que tu peux essayer autant que tu le veux, tu peux me faire mal autant que tu le souhaites, jamais et je répète, jamais, je ne serais comme toi. Plutôt mourir que de ressembler à un monstre qui bat sa propre fille. Et je crois qu'il serait préférable que je n'ajoute rien à ta... Supposition merdique.
Ana partit définitivement, laissant Olsen perdue dans ses pensées et plongée dans une sorte de transe. Ça lui arrivait souvent d'être dans un autre monde, en pleine réflexion sur ses erreurs passées et ses actes horribles à venir. Elle cherchait constamment à savoir ce qu'il y avait de mal dans ses gestes, car dans sa tête, cela sonnait juste. L'épouse du défunt Jace Ribeiro Ioans ne voyait pas le mal, on lui avait appris à seulement voir le bien, n'importe où, n'importe quand et dans n'importe quelle manière d'agir. Frapper était normale, noyer était merveilleux, tuer était dans sa nature, insulter était reproduire l'éducation de sa mère, brûler était parfait, battre était atteindre un niveau de supériorité totale. Tout ce qui pouvait faire souffrir une personne, faisait le bonheur de Kath, car pour cette dernière, elle sauvait sa victime d'une triste vie. Alors que c'était tout l'inverse.
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Après avoir vérifié si la porte du bureau de son père était bien fermée, Anastasia traversa le long couloir, en direction de sa chambre. Il était plus de 22h00 du soir, la nuit était tombée depuis longtemps dans le village. Haut dans le ciel, la lune pleine brillait de mille feux et les étoiles scintillaient comme pour montrer que ceux partis là-haut veillaient sur ceux d'en bas. Pour la jeune femme, cela voulait signifier qu'il était l'heure pour elle de se mettre au lit, ce qu'elle s'apprêtait d'ailleurs à faire. Les préparatifs s'étant éternisé car la veille sorcière n'aimait rien de ce que lui proposaient les décorateurs, c'est plus fatiguée que jamais que la brunette écarta les draps du matelas. Raccompagnée en voiture par José et Taylor, la portugaise avait pu arriver avant sa génitrice, ce qui lui laissait largement le temps de se préparer, avant de s'enfermer pour de bon dans sa zone de confort. Du moins, c'est ce que Flor pensait.
Soudainement, des bruits de pas que l'on cherche à rendre discret attirèrent son attention et une présence se fit sentir derrière son dos. Certaine qu'il s'agissait encore d'un des larbins de Katherine, l'étudiante se prépara mentalement à devoir faire tomber un autre ancien militaire reconverti du balcon. Mais à peine eut-elle le temps de se retourner lentement qu'un violent coup lui fut porter à la tête et brusquement, la demoiselle s'effondra au sol, un filet de sang coulant de sa tempe. Elle aperçut les pieds d'une personne qu'elle connaissait que trop bien, puis les ténèbres l'aspirèrent.
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𝐉'𝐞𝐬𝐩è𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐜𝐞 𝐜𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐚𝐮𝐫𝐚 𝐩𝐥𝐮.
𝐍'𝐡é𝐬𝐢𝐭𝐞𝐳 𝐩𝐚𝐬 à 𝐦𝐞 𝐝𝐢𝐫𝐞 𝐬𝐢 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐭𝐫𝐨𝐮𝐯𝐞𝐳 𝐝𝐞𝐬 𝐟𝐚𝐮𝐭𝐞𝐬 𝐝'𝐨𝐫𝐭𝐡𝐨𝐠𝐫𝐚𝐩𝐡𝐞.
Claudia M.T.C
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