Chapitre 42 : L'enclenchement du décompte


https://youtu.be/dnpfqAb4JWM


La réunion se tint au même Izakaya que la fois précédente, et Ryoka pressentit qu'ils en feraient rapidement une habitude. Elle arriva cette fois avant Eraser Head, s'installa à la table du détective Tsukauchi, et défia son mutisme renfrogné et ses œillades antagoniques en l'abreuvant de railleries et de futilités jusqu'à ce que le héros les eut rejoint. Si se réunir au Fish bones & Lemon peel afin de regrouper leurs informations signifiait avoir l'opportunité de voir l'enseignant porter une chemise, Ryoka était partante pour des sessions hebdomadaires. Elle ricana par-devers elle en songeant qu'elle ne se contentait ordinairement pas de si peu lorsqu'elle s'entichait d'un homme.

Par décision tacite, elle fut la première à faire son compte rendu. La veille, elle avait finalement rencontré Tara Bruja, la contrebandière brésilienne, qui lui avait livré tous les renseignements dont elle disposait à propos de Kubo. Or ceux-ci laissaient présager bien pire que ce qu'elle aurait pu soupçonner.

- La bande de Kubo est dans le collimateur de la Ligue des Vilains, annonça Ryoka de but en blanc. La seule chose qui retient la Ligue de passer à l'assaut pour le moment, c'est apparemment l'inégalité des effectifs. Kubo est dans la course depuis plus longtemps, il a un régiment de vilains sous ses ordres, alors que Shigaraki n'est pas encore en position de gaspiller des ressources.

La nouvelle fut accueillie avec un saisissement alarmé qui tranchait contre l'atmosphère pétillante et grasse de boissons mousseuses et de viande caramélisée. Un pli soucieux se creusa entre les sourcils froncés du détective, tandis que la physionomie de Shõta s'obscurcissait. La jeune femme le vit se masser distraitement le coude. D'après les récits de la 1-A sur l'attaque du SCA, l'Alter du chef de la Ligue lui avait pelé l'articulation à vif, se souvint-elle. Le ressouvenir qui le traversait à cet instant devait frôler l'insoutenable.

- Tu as pu obtenir des informations sur la Ligue ? S'étonna Tsukauchi.

- Non, c'est tout ce que je sais. Dans le milieu tout le monde attend la confrontation comme la prochaine rencontre sportive, c'est pour ça que Taru Bruja était au courant, mais personne ne sait rien de leurs membres, de leur localisation, ou de leurs activités.

- Comme si la situation était pas assez compliquée comme ça, maugréa le héros. On n'a aucun moyen de confirmer s'ils savent qu'il y a un élève de U.A dans la bande de Kubo, mais si c'est le cas, Akira risque de faire parti des cibles prioritaires.

Les occupants de la table voisine entrechoquèrent leurs chopes avec un «kampai !» sonore qui retentit comme une fausse note aux oreilles de Ryoka. La liste de tous ceux dont elle avait à protéger son cadet ne cessait de s'allonger. Le protéger de Kubo, le protéger des héros, de la police, et maintenant de rien de moins que la Ligue des Vilains. Comment pouvait-elle espérer en venir à bout ?

- Si on veut garder cette affaire discrète et sous contrôle, il faut intervenir avant que Shigaraki ne fasse son premier coup, décréta le détective.

- Sauf qu'on ne peut pas savoir où et quand ça arrivera, rétorqua-t-elle aigrement.

Elle n'avait que trop conscience de l'improductivité de sa remarque, cependant ses nerfs crissaient depuis son entretien avec Tara Bruja. Un compte à rebours s'était mis en marche au fond de son esprit, s'égrenant inéluctablement sans la moindre indication du temps dont elle disposait encore avant qu'il ne s'achève.

À côté d'elle, Shõta reposa sa bière. Son avant-bras se déposa près du sien sur la table, le dos de sa main frôlant la sienne, en un geste de cette communication particulière qui s'était établie entre eux.

- Et à moins d'être extrêmement chanceux, on ne le saura pas avant le jour J, affirma-t-il. Le meilleur scénario qu'on puisse envisager, c'est d'être prévenu par un indic dès le début de l'affrontement, et de rappliquer immédiatement.

Ryoka dirigea un regard grave vers le détective.

- Mais dans cette situation...

- Je serai contraint de mobiliser les forces d'interventions et l'appui des héros, confirma-t-il. Si l'occasion d'appréhender Shigaraki Tomura se présente, je ne peux pas la laisser passer.

La jeune femme sentit les commissures de ses lèvres s'étirer en un sourire sans joie. D'une façon où d'une autre, tout arrivait à terme. Qu'ils réussissent à récupérer Akira avant ou après l'attaque de Shigaraki, l'issue était la même : ce n'était plus qu'une question de semaine, de mois peut-être, avant qu'elle ne soit arrêtée et incarcérée.

Son frère serait sauvé, et elle aurait tout perdu dans le procédé.

Je pourrai m'échapper, songea-t-elle. Mon Alter est le parfait outils d'évasion. Je pourrai m'échapper, quitter le Japon...

Elle sentit soudain le regard de Shõta sur elle, et tourna la tête pour le voir la scruter d'un air qui n'était pas tout à fait du reproche, ni tout à fait de la préoccupation, comme s'il savait exactement quelles réflexions la traversaient. Elle afficha alors sa mine la plus impassible, et s'enquit :

- Vous avez trouvé le jeune de la photo, détective ?

La figure de Tsukauchi s'assombrit, signe que les nouvelles qu'il avait à leur communiquer n'étaient pas plus réjouissantes que les siennes.

- Oui, c'était un lycéen de 17 ans scolarisé dans un établissement privé, et fils d'une famille de dirigeants d'une grande entreprise : Hisato Jin. Je suis désolé, il est décédé il y a un an.

Le cœur de Ryoka se comprima violemment. Tout ce qu'elle savait de Hisato, c'était que son frère était complètement mordu de lui. Elle savait combien il lui était précieux, combien Akira avait besoin de lui. Combien le perdre avait dû le dévaster.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Interrogea-t-elle d'une voix sans timbre.

- Il s'est suicidé.

- Alors il y a peu de chances que sa mort est quelque-chose à voir avec l'affaire, conclut la part la plus rationnelle d'elle-même.

L'autre, la part la plus impétueuse, écumait de rage, de frustration et d'impuissance, criait à l'injustice, se lamentait pour son frère, se fustigeait de n'avoir jamais rien su et jamais rien fait. Elle replia les doigts pour dissimuler l'infime tremblement de ses mains. Chaque trille des sonnettes appelant les serveurs lui portait sur le système.

- Non, admit Tsukauchi. J'ai été interroger son père, et il ne connaissait même pas le nom d'Akira.

L'air était trop enfumé, trop surchauffé. Ryoka commençait à suffoquer.

- Donc on en a terminé ici pour aujourd'hui, lâcha-t-elle abruptement.

- À priori, répondit le détective d'un ton légèrement désemparé.

Elle se leva dans un raclement de chaise, s'appuyant du plat des mains sur la table, sous les yeux consternés des deux hommes.

- Bien. À la prochaine.

Son blouson en cuir sur le bras, elle longea le comptoir jusqu'à la sortie. L'air nocturne était tiède et stagnant, insuffisant à dissiper l'âpre sentiment qui s'était cristallisé entre ses côtes, qui s'agrégeait dans ses bronches et gênait sa respiration.

Les terrasses pleines des établissements lui apparaissaient brouillées, et elle ne put dire si c'était parce que ses paupières s'étaient embuées, ou parce que des vertiges commençaient à lui faire tourner la tête.

- Tu ne récites pas tes vers ? Fit remarquer une voix d'un ton entendu.

- Je fais pas une crise ! Protesta la jeune femme en se retournant vers le héros, qui l'avait suivi dehors.

Cependant le souffle qu'il lui fallut pour riposter épuisa ses poumons, et elle toussa, incapable de reprendre haleine. Luttant pour prendre une inspiration, elle leva un doigt impératif à l'adresse du brun, refusant qu'il use de son Alter.

- Ça... hhh... va, articula-t-elle entre deux hoquets.

Shõta la rejoignit sous l'enseigne de papier suspendue au coin de l'Izakaya. Le seul rougeoiement qui se refléta dans ses iris d'encre était dû au halo de la lanterne au-dessus de leurs têtes. Épaules voûtées, buste penché en avant, Ryoka ferma les yeux, s'astreignant à dominer son accès d'angoisse.

La comptine ne marcherait pas, cette fois-ci. Car chaque vers lui rappelait Akira, et Akira était l'œil du cyclone qui la ravageait. Elle plissa fortement les paupières, son pouls battant frénétiquement à ses oreilles.

Juste quand elle allait se résoudre à désintégrer tout son corps en particules de fumée pour échapper tant à la gravité qu'à la sensation térébrante dans sa poitrine ; pour se délivrer, l'espace d'un moment, des contraintes qui l'écartelaient, une main se posa entre ses omoplates.

- Du calme. Inspire, lui enjoignit le brun à côté d'elle.

Sa réaction fut comme l'activation d'une mécanique physiologique jusque-là ignorée d'elle. Toutes ses perceptions convergèrent vers le contact. Elle devint consciente au plus haut degré du point dans son dos qui répandait un courant lénifiant dans tout son être. Maintenue intacte par la pression de cette paume au travers de son tee-shirt, elle rouvrit les yeux en même temps qu'elle prenait une inhalation soudaine. Puis elle expira lentement en se redressant, ses mèches violettes asymétriques lui glissant sur le visage. Shõta ôta sa main de son dos alors qu'elle pivotait pour lui faire face.

Un contact. C'était tout ce qu'il avait fallu pour endiguer sa crise. La jeune femme prit une autre profonde inspiration, dégageant ses cheveux de son front pour les repousser en arrière sur son crâne. S'il s'était agi de n'importe qui d'autre, un tel geste n'aurait jamais suffi. Voilà l'ampleur de ce que le héros représentait pour elle. Il était l'incarnation de l'anathème qui la menaçait, toute raison voudrait qu'elle le fuit, qu'elle se tienne aussi loin que possible de lui, quand elle avait le sentiment viscéral qu'elle ne serait mieux nul part qu'à ses côtés.

Comme il la fixait toujours avec cet air de muette improbation et d'inquisition, Ryoka désigna l'intérieur du bar d'un signe de tête.

- Tu devrais y retourner avant que Tsukauchi se fasse encore des idées, railla-t-elle en s'arrachant un sourire.

Sans attendre de réponse, elle se détourna et se dirigea vers l'espace de stationnement pour deux roues où elle avait laissé sa roadster.

- Tu pourrais obtenir une remise de peine, lâcha Shõta derrière elle. Avec une attestation de ma part.

La jeune femme émit un renâclement aigre. S'appliquant à lui tourner le dos, elle passa son blouson par-dessus ses épaules, et l'enfila d'un mouvement fluide.

- Et faire deux ans et demi au lieu de trois ? Répliqua-t-elle caustiquement. Tu réalises que c'est pas vraiment une consolation ?

- Ça, tu aurais peut-être dû y penser avant d'enfiler le masque.

Offusquée, elle fit volte-face, doigt accusateur pointé vers lui.

- Et peut-être que si tu avais mieux fait ton job, j'aurais pas eu à le faire ! S'exclama-t-elle dans une bouffée de révolte.

Un tressaillement passa sur la physionomie du brun, puis ses yeux prirent la dureté du silex.

- Tu choisis mal ton moment pour commencer à lâcher pied.

Ryoka eut un rire à mi-chemin entre le dédain et la rebuffade.

- C'est ce que tu crois ? Quand est-ce que je t'ai donné l'impression que j'étais du genre à reculer, Eraser ?

- Je sais très bien que tu ne reculeras devant rien, mais c'est exactement le problème, rétorqua-t-il. Tu es trop émotionnellement impliquée dans cette affaire, et j'ai déjà vu ce que ça donne, quand tu agis en fonction de tes émotions.

- «Trop émotionnellement impliquée» ? Répéta-t-elle avec une hargne suffoquée. On parle de mon putain de frère ! Mon frère, qui est sous l'emprise d'un malade depuis bientôt un an, qui risque de perdre la tête à cause de son Alter, et qui s'expose à une condamnation à mort au lieu de devenir le héros qu'il voulait être !

Une brûlure s'était diffusée dans sa cornée alors qu'elle haussait le ton. Elle sentait ses prunelles flamber d'une colère à laquelle elle refusait de donner libre-court depuis trop longtemps.

Shõta se rapprocha si près d'elle que ses yeux noirs dardés dans les siens reflétaient la lueur d'or de ses pupilles.

- Et c'est pour ça qu'on fait tout pour le sauver, martela-t-il d'un ton plus tempérant que réprobateur. On y est presque. Mais en tant que héros, mon job, c'est d'être préparé au pire tout en assurant le meilleur dénouement possible. En l'occurrence : sauver ton frère, sans mettre davantage en péril ta vie ou ton avenir.

La proximité du brun et ses inflexions profondes étaient déjà en train de prendre l'ascendant sur elle. Le frémissement électrique qu'il déclenchait si souvent chez elle lui dévala l'épine dorsal, apaisant la violence furieuse avec laquelle battait son pouls.

La jeune femme recula instinctivement d'un pas, ses reins rencontrant le cadre de sa moto, afin de se soustraire à l'effet qu'il produisait sur elle.

- On est les enfants de Terminal et de Cheshire, lui rappela-t-elle d'un ton sombre et factuel. On a du gène de Vilain. Il n'y a pas de meilleur dénouement possible pour les gens comme nous. Pas sans prix, et quelqu'un va devoir le payer, alors prépare-toi à ça, héros.

Elle entreprit ensuite de déverrouiller son antivol en esquivant obstinément le regard de Shõta, le rangea dans la top case fixée au porte-bagage, puis enfourcha sa roadster, mit le contact, et démarra le moteur. Un ronronnement sec et nerveux s'éleva.

Le brun posa la main sur le guidon avant qu'elle ne relève la béquille, amenant son visage à la hauteur du sien.

- Tu peux dire ce que tu veux, je crois pas que tu y sois réellement préparée non plus, Ryoka. Sinon tu serais jamais venu demander mon aide.

Ryoka serra les mâchoires pour s'empêcher de trahir la moindre expression. D'un mouvement du poignet, elle fit vrombir son moteur afin d'obliger le héros à reculer. Conscient comme elle qu'il n'y avait plus rien à ajouter, Shõta lui décocha un dernier regard appuyé avant de retourner au Fish bones et Lemon peel tandis que la jeune femme manœuvrait hors de la place, puis lançait sa bécane sur le bitume.

- - -

Ce fut dans un ondoiement d'air surchauffé qu'Amaterasu se posa plus brutalement que nécessaire sur le gazon impeccablement entretenu, tardant à révoquer ses ailes dont le rayonnement incandescent carbonisa un cercle de verdure autour d'elle.

Hors d'haleine, elle se tint dans la cendre et la fumée, ses mèches blondes échappées de sa longue queue de cheval collant à ses joues moites de sueur, le sang en ébullition, la peau mordue par la fournaise au point d'être intégralement pigmentée de cuisants érythèmes.

Lorsqu'elle fut certaine qu'elle pouvait mettre un pied devant l'autre sans que les fulgurances qui lui perçaient l'épiderme la fassent grimacer, la jeune femme se dirigea vers l'onéreuse villa contemporaine qui était sa demeure depuis quelques mois.

Spacieuse maison cubique construite au milieu d'un vaste terrain ceint d'un écran de végétation et de murs truffés de dispositifs de surveillance, dotée d'un garage à bateaux ouvert sur le lac au bord duquel elle se dressait, l'habitation respirait un luxe exorbitant. Il ne fallait rien de moins pour réaffirmer la place du Clan dans la société, aussi la structure en acier blanc, aux ouvertures de verre panoramiques, et aux surfaces de béton et de minéral, n'était esthétique que par son articulation parfaitement technique et fonctionnelle.

Amaterasu traversait l'un des patio agrémenté de fruitiers exotiques et d'une fontaine murale, lorsque son jumeau l'intercepta. Ses yeux gris passèrent sur les bras et la face rouges de sa sœur. Il rentra les pouces dans la ceinture de son pantalon, et la fixa d'un air qui se passait de mots pour exprimer ses reproches .

La blonde passa devant lui avec humeur, puis monta les deux marches qui donnait sur l'un des espaces de vie contemporain et épuré.

- La salle de bain c'est par-là, lança son frère après elle en désignant la direction opposée du pouce.

- Je vais au dojo, rétorqua-t-elle.

Tsukuyomi pressa le pas derrière elle en s'exclamant :

- Tu es rouge écrevisse, la nuance au-dessus c'est le seuil critique !

Elle ne daigna même pas rouler des yeux. Une main l'arrêta alors par l'épaule, lui faisant réprimer un sifflement de douleur.

- Je te rappelle qu'on a des invités ce soir, Ama. Tu t'entraînes depuis ce matin, fais une pause. C'est même pas toi qui vas faire la démonstration.

La jeune femme saisit son poignet pour rejeter son bras avec un geste d'emportement.

- Je m'en tape de la démonstration ! Fous-moi la paix, Tsuki !

- D'accord, bousille-toi la santé si c'est ce que tu veux, jeta-t-il, sarcastique. Mais si tu t'imagines que la pression que tu te mets en ce-moment vas te faire progresser, tu te mets le doigts dans l'œil jusqu'au coude !

Amaterasu lâcha un reniflement de dédain rancunier, et reprit la direction de la seule pièce à caractère traditionnelle de la villa, passant devant la salle à manger que le personnel dressait en préparation de la réception.

Des heures de pratique laborieuse plus tard, appuyée sur la céramique grise du meuble sous-lavabo de la salle de bain, la blonde croisa son regard fourbu dans le miroir. Dans son visage lisse aux traits mûrs, au nez droit et à la bouche fine, ses yeux avaient une forme plus effilés que ceux de sa demi-cousine, mais possédaient l'exacte même couleur pervenche.

Ses entrailles se tordirent, comme infiltrées d'acide. Elle s'observa, dénombrant les avantages dont elle bénéficiait sur Arashi. Sa physionomie arborait cette dignité et cette élégance qu'elle admirait tant chez sa tante. Elle était plus grande, plus étoffée, comme les démontraient ses épaules nerveuses, ses bras musclés, sa silhouette découplée. Elle possédait en outre un Alter à la puissance de destruction imparable, et était au surplus dévouée au Clan, dont elle s'était toujours acharnée à remplir les attentes. Jamais elle n'hésitait, jamais elle ne vacillait. Jamais n'avait-elle commit la moindre faute.

Elle n'avait rien d'un échec.

Son faciès se brouilla de fureur. Pourquoi alors, le Clan n'avait-il plus à la bouche que le nom de celle qui avait transgressé tant de leurs codes et règles, qui avait déserté son rang, et avait si médiocrement développé son potentiel ?

Elle n'avait pas sué sang et eau, elle n'avait pas enduré tant d'épreuves, de peine et de misère en serrant les dents, sans la moindre plainte ni velléité de renoncement, pour se faire supplanter aujourd'hui par une ratée qui avait choisi d'être dorlotée en guise d'éducation, et choyée en guise de formation.

Son poing partit comme une flèche pour frapper son reflet, lequel se fractura en morceaux sous ses phalanges, les craquelures acérées lui cisaillant la peau. Les éclats pointus se décollèrent, plurent sur la vasque et s'y fracassèrent.

Alertée par le bruit, une employée de maison entra, avisa la blonde nue devant le lavabo plein de débris de verre éclaboussés de gouttelettes écarlates, et poussa une exclamation étouffée. Amaterasu se laissa jeter un peignoir sur les épaules, mais lorsque la femme tenta de lui prendre le poignet pour examiner sa blessure, sa rage éclata.

- NE ME TOUCHE PAS ! Rugit-elle en assenant un revers de main sanglant dans la face de l'infortunée.

Tsukuyomi entra en trombe, lui saisit les bras et les lui croisa sur la poitrine en l'écartant de la domestique et des bris pointus jonchant le sol alors qu'elle se débattait.

- LÂCHE-MOI ! Écuma-t-elle en vain.

- Sors, dit-il à la femme. Toutes nos excuses. Tu as vingt-quatre heure de congé.

- Tsuki, je te jure ! Fulmina sa jumelle.

Elle était cependant toujours éreintée de son entraînement, et perdit rapidement l'énergie de se démener contre sa poigne. Tsukuyomi termina de la maîtriser en apposant son front contre le sien, mêlant ses mèches de jais aux siennes, encore humides. Des gouttes chaudes et rouges perlaient des coupures qui émaillaient les poings d'Amaterasu pour rouler lentement, ruisselant sur ses doigts de son jumeau. Sans écarter sa tête de la sienne, il attrapa une serviette afin d'épancher le sang à petits tamponnements délicats sur les plaies.

- Je la laisserai pas tout nous prendre, Tsuki, souffla-t-elle. Je la laisserai jamais l'emporter.

- Moi non plus, jura-t-il. Jamais.

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Lorsque Giran se glissa sur le fauteuil en face des leurs, Akira donna une pression de la main à celle de Vitaly, entrelacée à la sienne sous la table, puis la lâcha. Il y eut une bref mais scrupuleuse examination mutuelle tandis que le quadragénaire s'installait, puis celui-ci s'alluma une cigarette et les noya dans un nuage pestilentiel de nicotine avant de pointer le jeune homme de sa braise fumante.

- Je t'ai vu quand j'ai rencontré ton boss, mais on a jamais été présenté.

Ce fut bien évidemment Vitaly qui se chargea de répondre. Akira attendit qu'elle eut donné leurs identités et expliqué sa condition sans lâcher l'homme d'affaire véreux du regard. Celui-ci les fixa ensuite pensivement tandis qu'il tirait une bouffée, qu'il recracha alors qu'il écrasait sa clope à demi-consumée dans le cendrier. Une fois qu'il eut les mains libre, ils eurent la surprise de le voir répondre en signant.

- Et donc, quel message je dois transmettre à la Ligue des Vilains ?

À côté de lui, la jeune fille eut un tressaillement nerveux d'étonnement. En prenant contact avec Giran, ni l'un ni l'autre n'avait précisé la raison de leur demande d'entrevue. L'homme grisonnant lâcha un rire qu'Akira n'entendit pas, mais qui fit étinceler sa dent d'or.

- Deux membres de l'organisation de Kubo qui viennent me trouver en toute discrétion dans le climat d'hostilité actuel, ça laisse pas beaucoup de doutes sur vos motivation, gamins.

Le cœur du brun se mit à battre plus fort contre ses côtes. Pas de peur, non, le flot que chaque palpitation faisait courir dans ses veines n'avait rien de froid ni d'inhibiteur. Son sang circulait au contraire impétueusement, charriant une ardeur infléchissable. Ses griffes s'allongèrent alors qu'il signait sa réponse :

- On a une proposition à faire à quiconque dirige la Ligue




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Un chapitre courts, comme annoncé, mais ça me permet d'éviter de vous faire patienter des mois entre chaque parution. ^^

J'ai terminé de mettre en place tout ce dont j'avais besoin pour la suite, on va pouvoir retourner à l'intrigue originelle de MHA dans les prochains chapitres, avec le camp d'été qui approche !

Eiko revient dans le prochain chapitre !

Je me rends compte en écrivant Ama et Tsuki qu'ils mériteraient pas mal de développement, j'écrirai donc peut-être sur eux dans mon recueil de bonus.

L'ost de début de chapitre est de Blake Neely, qui compose pour beaucoup de série et qui produit vraiment des perles, comme ce morceau-ci (indépendamment du fait que vous suivez Supergirl ou non), qui correspond exactement à tout ce que j'ai prévu pour la suite de Twist et que je vous recommande donc d'écouter au moins une fois !

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