Chapitre 25 : L'héroïne aux ailes d'argent
Le vrombissement de son téléphone réveilla Ryoka en sursaut et elle tressaillit en ouvrant brusquement les yeux. Elle avait le nez enfouit dans un oreiller dont elle reconnut aussitôt l'odeur. C'était celle de l'appartement d'Hisae.
Sa panique initiale reflua aussitôt. La jeune femme lâcha un geignement enroué alors que les élancements dans son dos s'éveillaient à leur tour. L'esprit noyé dans un brouillard de fatigue et de douleur, elle se positionna précautionneusement sur le flanc, attrapa son portable, et loucha un instant devant l'écran avant de parvenir à déchiffrer l'appelant au travers de sa vision brouillée.
- Du nouveaux ? Demanda-t-elle d'une voix rauque sitôt qu'elle eut décroché.
- Oui, le gamin s'est pointé à mon bar, il est désolé, et il veut rentrer chez sa maman, répondit cyniquement Kuze.
- Je t'emmerde.
- Oh toi, t'as la voix de quelqu'un qui a dérouillé. L'humeur aussi.
Pour toute réponse, Ryoka grogna en se frottant les yeux. Elle entendit le barman souffler une bouffée de sa cigarette à l'autre bout du fil. L'espace d'un instant, elle parvint sans mal à se le représenter, avec ses cheveux poivre et sel attachés en queue de cheval sur sa nuque, et les manches de sa chemise pourpre roulées sur ses bras couverts de tatouages.
- Ton héro m'a contacté, lâcha-t-il.
La jeune femme roula des yeux face à la boutade, mais se tendit insensiblement sous ses draps.
- Il vaut causer, reprit le barman. Pas par mon intermédiaire, en face à face. J'ai voulu l'envoyer chier mais il menace de lancer un avis de recherche.
Elle émit un rire jaune. S'il savait qu'on se croise tous les jours...
Néanmoins l'ultimatum était inutile. Après les événements de la veille, Ryoka comptait bien avoir une discussion avec Eraser Head. Il y avait des choses qu'elle devait absolument clarifier si elle ne voulait pas qu'il se retourne complètement contre elle.
- J'arrange une rencontre, alors ? S'enquit Kuze face à son silence.
Elle se redressa sur son lit. Le mouvement perfora son dos de douleur et elle siffla entre ses dents malgré elle. La voix du barman se teinta de sollicitude :
- Eh, Chaton, tout va bien ?
Depuis qu'il avait réalisé qu'il avait affaire à la fille de la précédente Cheshire, il ne l'appelait plus que par ce surnom ironique. Leurs rapports avaient rapidement franchit les bornes qui délimitaient d'ordinaire ses relations avec ses clients. Aucun d'eux n'en disaient rien, mais elle savait qu'elle avait le droit à un traitement de faveur, et qu'elle n'avait qu'à demander pour qu'il lui accorde beaucoup plus que ce qu'il concédait à n'importe qui d'autre. En fait, sans que la jeune femme ne l'eut seulement cherché, il adoptait parfois une attitude quasi-paternelle avec elle.
Et Ryoka ne se faisait aucune illusion sur la raison de ce privilège. Lui et Kaori, la mère de Ryoka et d'Akira, avaient été amants avant qu'elle ne rencontre leur père. Si Kuze n'était guère un sentimental romantique, il avait cependant toujours conservé une part d'affection pour Cheshire. C'était par respect pour ce brin d'attachement qu'il supportait aujourd'hui sa fille.
- Ouais, ouais, c'est rien. Pour Eraser Head, ne t'embête pas, je m'en occupe. Merci, Kuze, écourta-t-elle l'appel avant de raccrocher.
Elle s'extirpa de ses draps et alla écarter le rideau de la fenêtre. La pluie diluvienne avait tombée toute la nuit et ne semblait pas prête à prendre du répit. Ses gênes félins chiffonnés par l'humidité ambiante tissèrent une torpeur pesante dans sa tête et ses membres. Combattant l'envie d'aller se pelotonner sous la chaleur de sa couette, elle se rendit dans la salle de bain pour prendre une douche et changer les compresses qui couvraient ses blessures.
Une serviette enroulée autour de sa poitrine, la jeune femme effaça du plat de la main la buée qui couvrait le miroir afin d'y observer son reflet. Elle avait les traits tirés, et la fatigue ternissait l'éclat de ses yeux. En temps normal, du far à paupière, de l'eye-liner, du rouge à lèvre et une touche de parfum auraient contribué à rehausser son moral. Or, ce matin, c'était à Eizan Takeru que Cheshire devait céder sa place. Que ce soit de jour ou de nuit, Ryoka n'avait pas beaucoup l'occasion d'être elle-même ces derniers temps.
Elle glissa les doigts dans sa crête de cheveux violets afin de les arranger, et s'adressa un sourire dans la glace.
- Aller, tu vas pouvoir faire chier ton prof pour te calmer les nerfs.
- - -
Katsuki ne se priva pas de manifester son agacement lorsque Seki parut enfin à la station, gravissant au pas de course les marches menant au quai. Elle s'arrêta à sa hauteur, essoufflée.
- T'es en retard ! Qu'est-ce que t'as foutu ?
- T'étais pas obligé de m'attendre, répliqua-t-elle en secouant son parapluie tout ruisselant.
- Non, confirma-t-il, c'était à Deku de le faire ! Mais cet enfoiré s'est déjà barré.
Seki écarta d'un doigt les mèches ondulées par l'humidité qui lui tombaient sur la figure tout en lui adressant un regard étonné.
- Je sais aller au lycée toute seule, je te signal, fit-elle remarquer.
- Et comment tu comptes gérer les groupies ?
- Quelles groupies ?
Le train survint alors dans un sifflement de freins et des crépitements d'électricité. Les deux lycéens s'engouffrèrent dans la rame pour se tasser parmi les autres voyageurs. Il ne fallut pas longtemps pour que se produise exactement ce que le blond avait anticipé. Leurs uniformes bien trop reconnaissables dénotaient au milieu de tout ce monde. Ils se virent ainsi apostrophés de toute part.
- Eh, U.A ! Plus Ultra !
- C'est les gamins du festival !
- Je vous ai suivi à la télé !
Seki entreprit alors la très vaine tentative de se faire oublier derrière le dos de Katsuki. Il lui jeta une œillade incendiaire par-dessus son épaule. Qu'est-ce que je te disais !
C'est de toi qu'ils parlent ! Lut-il dans ses yeux lilas alors qu'elle faisait un petit mouvement de tête pour le désigner. En prêtant attention aux interpellations, il réalisa que son nom était de fait sur toutes les lèvres. Certains trouvaient même très spirituel de lui balancer des blagues de mauvais goûts comme quoi il était «de la bombe» et qu'il avait «tout explosé». L'envie le démangeait effectivement de faire sauter quelque-chose, là maintenant tout de suite.
Néanmoins, ces mêmes abrutis étaient parfaitement incapables de remettre Seki. Il les entendait s'interroger à son sujet, cherchant à se remémorer son Alter et son classement. Il songea que s'il elle décidait brusquement de déployer ses ailes et de leur faire littéralement de l'air, peut-être ne l'oublieraient-il plus si facilement.
Une minorité de l'attention générale s'étant concentrée sur elle, Seki se renfrogna et se blottit un peu plus derrière le blond. L'effet d'exiguïté et le resserrement de la foule autours d'eux la pressèrent davantage contre lui, de sorte qu'il devinait des rondeurs distinctives à travers leurs blazers.
- Au final c'est toi qui attires l'attention sur moi, râla-t-elle dans un souffle qui lui chatouilla la nuque.
Les muscles raidis, Katsuki trouva soudain très difficile de diriger ses pensées sur autre chose que le contact et la présence dans son dos. Il fut brusquement ramené à la visite de Seki deux jours plutôt. Une visite qui l'avait laissé la tête bourdonnante de ce qu'il venait d'apprendre et de ce qu'il s'était produit. De ce qu'un geste irréfléchi avait bouleversé en lui.
Le souvenir de ce moment était encore vivide dans sa mémoire. Au début, il n'avait pourtant aucune arrière-pensée. Seki était Seki de part ses cicatrices, ces stigmates porteuses d'une histoire et d'une identité qu'elle ne lui avait jamais livré jusqu'ici. Alors qu'ils étaient si familiers qu'ils en étaient sans gêne l'un avec l'autre, Seki avait instauré là une limite qu'elle ne lui avait jamais laissé franchir.
Aussi, quand elle lui avait annoncé la guérison partielle de ses cicatrices, cela avait été comme la concrétisation de cette multitude de changements par lesquelles il la voyait passer depuis quelques temps sans rien comprendre. Il avait réclamé de le voir de ses propres yeux, exactement comme lorsqu'il l'avait rencontré huit ans auparavant.
C'est là qu'il avait été pris au dépourvu. Parce qu'il n'avait pas vraiment eu conscience de ce qu'il faisait avant de toucher sa peau nue de ses doigts, avant d'inhaler son odeur éthérée, d'une douceur délicieuse, qui lui évoquait le jasmin et la framboise. La joue caressée par ses mèches soyeuses, il avait été perturbé par l'émoi singulier auquel il était en proie. La radiation puissante dans sa poitrine et le noyau de chaleur logé dans son ventre étaient d'un tout autre type que ceux qui l'animaient d'ordinaire.
Sous sa paume, la hanche de la jeune fille était fraîche, douce et souple ; et sous des doigts, les infimes renflements l'assuraient que les marques étaient toujours là, que Seki était toujours Seki.
La Seki sans égale parmi tous ceux que Katsuki ait jamais fréquenté. Car si quelqu'un avait été sa camarade, c'était bien elle. Enfant, quoiqu'il fasse, quoiqu'il dise, elle ne chouinait pas, ne souriait pas niaisement, ne chialait pas comme une môme, ne gloussait pas comme une idiote, ne piquait pas de crises. Elle pouvait encaisser n'importe quoi, et ne courrait pas ses réfugier dans les jupes des adultes dès que le moindre problème survenait. Quand tous adulaient le gosse prodige qu'il était et s'extasiaient pour un oui ou pour un non, Seki ne se laissait pas facilement émouvoir, et n'était impressionnée que par ses exploits les plus notables.
Ce jour-là, elle était en face de lui, et il s'était laissé aller contre elle en se demandant à quel point encore Seki allait-elle changer.
- - -
Lorsque Katsuki et moi arrivâmes en classe, toute la 1-A exultait d'avoir rencontré la même gloire que nous sur le trajet. L'arrivée d'Aizawa, débarrassé de ses plâtres et de ses bandages, ajouta une nouvelle note de réjouissance à l'ambiance générale.
Lorsqu'il nous annonça sans préambules que le cours d'aujourd'hui serait consacré aux choix de nos noms de Héros, la classe explosa d'une clameur excitée. Une fois qu'il eut ramené le calme, notre professeur nous parla des recrutements de deuxième et troisième année par les héros pro, avant d'afficher au tableau la liste des élèves s'étant vus adresser des offres.
Étant-donné que je ne m'attendais absolument pas à être du nombre, mon cœur fit un bond lorsque mon nom s'inscrivit bon dernier, avec un total d'une seule proposition. On m'a quand-même remarqué ?! Qui ?
Même aux rediffusions du Championnat, je n'apparaissais jamais à l'écran, si ce n'était quelques brèves fractions de seconde en arrière plan.
Partagée entre l'affolement et la fierté, je ne fus ramenée à l'instant présent que par le braillement soudain de Katsuki suite à une remarque de Sero.
Aizawa nous annonça ensuite que nous participerions tous à des stages, ce qui nous rappela à l'ordre du jour : les noms de codes.
Toute rayonnante et suave, Midnight fit son entrée, manifestement enchantée de prendre le relais de son collègue. Elle distribua des piles d'ardoises, et je m'en servis une avant de faire passer le reste à Katsuki. A présent que nous étions tous pleinement conscients de l'importance du moment pour notre carrière, une certaine pression tomba dans la salle.
Chacun s'absorba dans ses réflexions. Seuls les couinements des pointes de feutres sur les surfaces des ardoises troublaient le silence. Je restai interdite devant ce rectangle blanc.
Il me fallait encore une fois prendre un nouveau nom. Seulement, celui-ci ne viendrait pas effacer les précédents. Comme un coup décisif de marteau sur le fer rougeoyant, il sera déterminant de l'identité que je me battais pour forger.
J'avais déjà réfléchi à la question avec Izuku lorsque ma mémoire ne m'était pas encore complètement revenue. Je niais encore de toute mon âme celle que j'avais été. Depuis, tant de chamboulements étaient survenus en si peu de temps, que toutes les idées que nous avions eu ne convenaient plus. J'étais déjà différente de celle que j'étais il y a encore quelques mois.
Chaque fois que je pensais tenir une idée, je n'avais pas le temps de tracer le premier kanji que je changeais aussitôt d'avis. La question amenait inévitablement une introspection scrupuleuse.
Qui je suis ? Qui je veux être ?
Tout tenait dans un nom. Quelques caractères.
Je vais en avoir la migraine.
J'optai alors pour un brain-storming d'écriture automatique. Mon feutre jusqu'ici immobile fut prit de frénésie et traça la flopée de mots qui me venaient à l'esprit.
Vent Foudre Plume Ailes Tornade Tempête Cicatrice Orage Éclair Sang Moitié Ciel Nuage Montagne Shoto Main Flamme Brise Bourrasque Enfler Puissance Mort Seule Fragment Voler Aigle Plongeon Secret Izuku Espoir Obstacle Katsuki Victoire Vérité Identité Arashi Katagiri Argenté
La voix de Midnight annonçant que les premiers à avoir terminé pouvaient à présent présenter leur idée me tira de mon absorption. Je ne relevai pas la tête quand Aoyama monta sur l'estrade. Mes yeux restaient accrochés par les derniers mots du pêle-mêle de kanjis.
Le nom venait de s'imposer à moi comme une évidence.
J'effaçai les dizaines de caractères de mon ardoise pour écrire avec application ceux qui les conjuguaient tous, ceux qui définissaient la moi passée, présente, et future. Mon cœur palpitait de contentement, chaque trait noir sur la surface blanche marquait ma résolution renouvelée.
Je ne me portai pas volontaire immédiatement pour passer devant la classe, voulant garder un peu pour moi ce nouveau titre. J'en profitai donc pour découvrir ceux de mes camarades avec curiosité.
Quand Mina descendit de l'estrade après que Midnight eut contesté sa proposition de nom de code, je lui adressai une moue de solidarité à laquelle elle répondit en tirant la langue. Tsuyu, Eijiro, et Kyoka passèrent à leur tour devant la classe avant que je ne me décide à me lever.
Je me postai derrière le bureau, lus une dernière fois mon ardoise, puis la révélai en déclamant :
- L'héroïne aux ailes argentées : Silver Storm.
Mes yeux se rivèrent d'eux-même à ceux de Shoto, le seul ici qui comprendrait pleinement le sens de ce nom. Ses sourcils se haussèrent de surprise, et son regard me confirma qu'il saisissait la référence.
- Puissant et distingué ! Commenta Midnight, indiquant ainsi son approbation.
Ainsi baptisée, je quittai l'estrade. En retournant à ma place je scrutai le visage de Katsuki, curieuse de connaître son avis. Je me rembrunis en découvrant qu'il arborait toujours la mine grincheuse à laquelle j'avais droit depuis la station.
Cependant, comme je m'asseyais, il posa nonchalamment son coude sur son pupitre pour me présenter son poing. Ravie, je le cognai du mien en exultant intérieurement. Le blond étira alors un sourire en coin appréciateur, les yeux pétillants d'un féroce éclat de fierté. Il validait.
Le défilé au-devant de la classe se poursuivit. Bien évidemment, les noms de codes qu'il me tardait le plus de découvrir étaient ceux de mon frère, de Shoto et de Katsuki. Si les deux premiers eurent le mérite de me surprendre, le blond provoqua mon hilarité. Je me mordis l'intérieur de la joue pour n'en rien montrer, mais mon expression devait me trahir, car il m'asséna un coup d'ardoise sur le crâne en retournant à sa place.
Autant le terme «explosion» coulait de source, et celui de «meurtre» ne m'étonnait pas non plus, autant celui de «roi» était assez mégalomane. Il m'envoya paître lorsque je le lui fis remarquer, mais parut plus ou moins prendre en compte ma remarque puisqu'il remplaça ensuite «King» par «Lord». Une once d'humilité qui ne fut pas suffisante pour Midnight.
Lorsque la fin du cours sonna, Aizawa se réveilla de son somme pour distribuer les fiches de propositions de stage. Je reçus la mienne la gorge nouée d'appréhension, et la parcourus rapidement. Le nom du héros professionnel dont j'avais retenu l'attention me sauta aux yeux.
Je me retournai et me penchai sur le côté pour m'adresser à mon frère en brandissant ma feuille :
- Izu, j'ai Hawks !
Ses yeux verts sapin s'écarquillèrent tandis que son visage s'illuminait d'un sourire. Je me levai pour venir poser la fiche sur sa table. J'avais beau les respecter profondément, je ne vouais d'adoration particulière à aucun des Héros. En revanche, Hawks m'intriguait au plus haut point et, du fait de son Alter, constituait pour moi un modèle.
- C'est génial, Eiko-Chan ! Il n'avait jamais pris de stagiaire avant ! S'enthousiasma Izuku. C'est pile le responsable de stage qu'il te fallait !
Il entreprit alors de ressasser toutes les informations qu'il avait concilié à son sujet. Bien qu'en vérité, je n'en ignorais presque aucune, mon frère s'étant toujours fait une joie de comparer mon Alter à celui de Hawks depuis que je le lui avais révélé.
- Midoriya, interpella une voix profonde derrière nous.
- Oui ? Répondîmes-nous de concert en nous retournant.
Ce qui eut pour effet de légèrement troubler Tokoyami, dont les yeux de rapace s'étrécirent avant qu'il ne précise :
- Eiko Midoriya, tu as reçu une proposition de Hawks ?
Je confirmai d'un signe de tête, et il désigna sa fiche en déclarant :
- Moi aussi.
Piquée d'intérêt, je laissai Izuku - qui échangeait à présent avec Ochaco et Tsuyu - pour rejoindre Tokoyami.
- Tu as reçu pleins d'autres offres, fis-je remarquer. Tu penses accepter celle de Hawks ?
- C'est le héro le plus haut classé qui m'ait fait une proposition. Je me demande ce qu'il nous veut...
- D'après Izu, c'est la première fois qu'il prend des stagiaires, lui rapportai-je.
- Vraiment ? Dit-il en croisant les bras.
Son front se plissa de ce qui semblait être un froncement de sourcil, et il parut se plonger dans ses réflexions. Je compris que la discussion s'arrêtait là, et tournai la tête vers Shoto, qui fixait sombrement sa fiche. Je migrai alors vers son bureau.
- «Silver Storm» ? Releva-t-il en insistant sur l'adjectif.
- «Shoto», répliquai-je.
Ma réponse laconique lui fit lever les yeux vers moi. Nous étions tous les deux conscients des raisons sous-jacentes à nos choix de noms de codes, mais ce n'était ni le lieu ni le moment pour en parler.
- Tu fais quoi après les cours ? S'enquit-il avec détachement.
- Rien.
- Ok.
Puisque nous nous étions entendus et que le cours suivant n'allait pas tarder à débuter, je me détournai pour retourner à ma place. A mon passage, Mineta piailla, les yeux exorbités :
- C'était quoi cette manière trop frigide de vous donner rendez-vous ?! Est-ce qu'il y aurait une romance de glace dans cette classe ?
Bien qu'irritée par sa voix suraiguë, je choisis de l'ignorer, puisque le reste de la classe était de toute façon focalisé sur le sujet des stades et que personne ne le prenait jamais vraiment au sérieux.
- Qu'est-ce qu'il jacte l'avorton ? M'interpella Katsuki alors que je m'asseyais.
Je reculai ma chaise de ma table pour la rapprocher de la sienne.
- Il se fait des films. Tu sais chez quel Héro tu vas faire ton stage, alors ?
- Un bien classé, répondit-il d'un ton d'évidence. Toi vu ta tronche tu vas accepter l'offre de Hawks ?
- Oui, et Tokoyami sera peut-être avec moi.
Il se fendit d'un sourire goguenard.
- Vous allez être trois p...
- Si tu dis «pigeons»..., l'interrompis-je dans un sifflement d'avertissement.
- J'allais dire piafs !
- - -
Shota prit place face au principal, ignorant la tasse de thé que ce dernier avait poussé vers lui. Sans en rien montrer, il s'interrogeait sur ce que pouvait bien lui vouloir Nezu, puisqu'il lui avait déjà fait son rapport -en taisant l'implication de Cheshire- concernant les événements de la veille. Suzuki Akira et ses deux compagnons lui avaient échappé au moyen de deux motos qui les attendaient à l'extérieur, et il avait été dans l'incapacité de les rattraper. Un échec qu'il digérait très mal, d'autant plus qu'il était convaincu que si sa condition n'avait pas été aussi diminuée par son récent combat au CSA, les choses se seraient déroulée autrement.
Le dossier placé sur la table basse devant le principal avait retenu l'attention de Shota dès son entrée dans le bureau, cependant il dut endurer les babillages typique du rongeur avant que celui-ci ne se décide à lui en révéler le contenu. Il en tira alors la fiche d'un Vilain surnommé Terminal, sous la photo duquel était inscrit le statut : «décédé».
- Tu te souviens de lui ? S'enquit Nezu.
Il dut fouiller dans sa mémoire pour aller chercher les informations relatives à Terminal. L'affaire remontait à une dizaine d'année, et il n'avait pas été mandaté pour s'en occuper.
- Oui, répondit-il. Yoshihide Omura. Il a tué deux héros et plusieurs civils en préférant se donner la mort plutôt que d'être écroué. Son Alter consistait à...
Il s'interrompit, assommé sous le coup d'une subite lucidité. Le poids de la fatigue accumulée la veille s'évanouit brusquement. Le martèlement de la pluie contre les carreaux lui parvint soudain comme de très loin. Incapable de détacher ses yeux du portrait, il marmonna :
- C'est pas vrai...
La ressemblance physique se limitait strictement à la couleur de cheveux. En revanche, les Alters étaient si semblables qu'il se fustigea mentalement pour ne pas avoir établi la connexion plus tôt.
- Effectivement, confirma le principal. Eizan Takeru est très probablement l'enfant illégitime de Yoshihide Omura.
L'esprit de Shota fonctionnait maintenant à plein régime. Il se passa une main sur la mâchoire. Non, c'est peut-être bien pire que ça...
Parce que cette mise en lumière connectait à présent Takeru à Cheshire.
Omura se faisait appeler Terminal parce que la fumée noire en laquelle il se changeait pouvait détériorer n'importe quelle matière jusqu'au stade terminal.
Eizan Takeru se changeait en fumée grâce à son Alter Smog.
Et partout où Cheshire apparaissait, des marques de désagrégation extrême indiquaient l'utilisation d'un Alter corrosif.
C'était bien assez pour présumer un lien de parenté entre eux. Mais s'il était possible de les relier tous deux à Omura, cela n'expliquait toujours pas le cas d'Akira Suzuki. Rien ne corrélait entre Takeru et lui.
Shota expira avec lassitude. Combien de milliers d'autres mystères gravitaient encore autour de Cheshire ? Il repoussa la réflexion afin de se focaliser sur l'intéressé du jour.
- Et donc ? Encouragea-t-il le principal à poursuivre.
- Tu es le seul enseignant à m'avoir alerté au sujet de Takeru. Il se trouve que tu avais raison : ce petit se trouve dans une situation assez exceptionnelle. Nous devons nous en occuper, mais en toute discrétion. Je ne veux pas le ségréguer par rapport aux autres élèves.
- Mais il ne faut pas non plus en faire un autre Suzuki.
- Exactement. C'est pourquoi j'aimerais que tu t'en charges. Tu as été le plus attentif jusqu'à présent, et comme Vlad est son professeur principal, il ne peut pas consacrer plus d'attention à l'un des élèves de la 1-B qu'aux autres.
- J'ai aussi une classe à superviser, lui rappela Shota.
Néanmoins il ne protestait que pour la forme. Obtenir l'aval du principal l'arrangeait plus qu'autre-chose.
Nezu sirota bruyamment sa boisson, puis lui adressa un sourire entendu derrière le rebord de sa tasse :
- Alors ça tombe bien qu'elle parte bientôt en stage et que tu n'en n'ais plus la responsabilité pendant une semaine.
- - -
Je vous préviens, c'est le début des emmerdes pour Eiko et Ryoka ! J'ai vraiment hâte d'écrire les stages, parce qu'ils vont être très importants pour leur développement !
En terme de qualité, je suis moyennement satisfaite de ce chapitre. Je savais ce que je voulais niveau contenu, mais j'ai eu un mal fou à l'écrire !
Pour ceux qui ont reçu ma notification, vous savez cette idée que j'ai eu pour speeder le Cheshead ? Je vais la faire ! Elle arrivera au prochain chapitre ! La dernière scène de celui-ci est déjà un gros indice, une idée ce qu'il va se passer ? ;)
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