Chapitre 15 : Premiers remous


Quand les lumières s'éteignirent brusquement, Tsukaushi Naomasa sut immédiatement que quelque-chose se tramait. En un instant, il avait analysé tous les faits et tiré la déduction qui s'imposait :

Il était ciblé.

Par quelqu'un qui avait attendu que cet étage soit déserté, et qui passait à l'action alors que lui-même s'apprêtait à quitter les lieux.

Les pannes de courants ne se produisaient jamais dans un poste de police. Voilà pourquoi il pouvait affirmer que cette coupure d'électricité n'était pas l'œuvre du hasard.

Debout dans le bureau plongé dans l'obscurité, Naomasa glissa lentement la main dans sa poche et pianota sur son smartphone sans le sortir. Deux secondes lui suffirent pour envoyer un SOS à Eraser Head. Il était raisonnable de supposer que quiconque en avait après lui le savait sans-Alter.

- J'imagine que vous n'entendez pas ça souvent en tant que flic : mais levez les mains en l'air, lui enjoignit une voix narquoise.

Naomasa pivota vivement en direction de sa source tout en dégainant son automatique dans le même mouvement. Ses yeux s'accoutumaient tout juste à la pénombre. Les raies de lumière qui filtraient à travers les stores jetaient une lueur diffuse dans la pièce.

L'intruse se trouvait à quelques pas de lui, enveloppée d'obscurité. Sa silhouette était à peine discernable, mais son masque se détachait nettement contre l'ombre qui noyait sa figure. Le détective avait presque l'impression de voir flotter son mufle de félin métallique.

- Votre arme est inefficace contre moi,Tsukaushi Naomasa. Mais si ça peut vous rassurer, je n'en n'ai pas après vous.

Le protocole voulait qu'il l'arrête, or il sut d'instinct que c'était chose impossible en la situation. Si cette femme faisait aussi effrontément face au canon de son arme, il pouvait la croire sur parole lorsqu'elle disait ne pas craindre les balles. Sa seule option était donc de gagner du temps.

Encore six minutes trente-deux secondes.

Il décomptait mentalement le temps écoulé depuis l'envoie de son SOS.

- Vous avez besoin de moi, devina-t-il.

- Perspicace. Enfin, c'est votre job après tout.

L'intruse se tenait aussi immobile que lui. Seuls se mouvaient les reflets sur son masque lorsqu'elle parlait.

- Qu'est-ce que vous voulez ?

Cinq minutes quarante-six secondes.

D'un mouvement aussi fluide que vif, elle projeta un objet dans sa direction. Il l'attrapa au vol de sa main libre. Il s'agissait d'une clé USB.

- Votre portable, en premier lieu. Ainsi que votre trench. Et l'intégralité des fichiers numériques de toutes vos enquêtes en cours, sur cette clé.

Il déposa la clé sur son bureau pour tirer son smartphone de sa poche et le lui lancer. Elle s'en saisit avec autant d'aisance qu'il venait de le faire. Puis il prit le manteau qui reposait sur le dossier de sa chaise et l'expédia également à travers la pièce.

Quatre minutes cinquante-cinq secondes.

- Désolé, mais je ne peux pas répondre à votre dernière requête.

- Bien sûr que si vous pouvez. Vous avez tout intérêt.

Le ton jusqu'ici insolant et joueur s'était fait sec et menaçant.

- Je refuse.

Quatre minutes quatorze secondes.

Il sentit distinctement la tension augmenter d'un cran. Il avait bien conscience qu'il testait la résolution de l'intruse. Et si celle-ci était capable de la moindre hostilité, alors il venait de s'y exposer aussi témérairement qu'elle s'exposait au canon de son arme.

Un très bref moment, le masque et la figure derrière disparurent. Naomasa eut l'étrange impression que les nappes d'obscurité qui recouvraient le bureau s'étaient fluidifiées. L'instant d'après la femme se tenait à nouveau dans sa ligne de mire, comme si elle n'avait pas esquissé un geste.

Toutes les suspensions d'éclairages se décrochèrent simultanément du plafond pour s'écraser avec fracas sur le sol et les bureaux. Les tubes des néons éclatèrent à l'impact. Il inhala la poussière de plâtre qui lui rappa la gorge. Seule l'applique au-dessus de sa tête avait été épargnée. Il était maintenant cerné de verre brisé.

Lorsque l'intruse reprit la parole, sa voix pourtant neutre était aussi glaçante que la menace qu'elle proféra :

- Je peux faire la même chose à cet immeuble entier. Vous êtes peut-être le dernier à cet étage, mais il vous reste des collègues au rez-de-chaussé, pas vrai ?

Bien sûr, un commissariat n'était jamais désert.

Trois minutes vingt-sept secondes.

Gagner du temps. C'était tout ce qu'il pouvait faire. Mais sans en avoir l'air.

Naomasa déploya un à un les doigts qui enserraient la crosse de son pistolet, et mains bien en évidence, le déposa lentement au sol. Il se tourna ensuite vers son ordinateur, qu'il ralluma en bénissant pour la première fois l'obsolescence de la machine et sa longueur au démarrage.

Deux minutes quarante-et-une secondes.

L'écran s'illumina, jetant son halo bleu sur le bureau. Le détective se décala de sorte que son dos masquait le jeu de ses doigts sur le clavier lorsqu'il entra son mot de passe.

La voix vibrante de l'intruse s'éleva juste à sa gauche, lui faisant crisper les épaules.

- Même pas un fond d'écran, hein ? Railla-t-elle lorsque le bureau s'afficha.

De toute évidence, son Alter lui permettait de se déplacer avec une grande célérité et sans produire le moindre son. Il se demanda fugitivement s'il dépendait de l'absence de lumière. Quoiqu'il n'avait aucun moyen d'en produire afin de vérifier sa théorie.

- Qu'est-ce que vous êtes ? Un vilain ? Une justicière ? S'enquit-il en insérant la clé dans le support.

- Vous savez que rien ne m'oblige à vous répondre ?

- Donc vous n'avez aucune déclaration ?

Il dut taper une nouvelle fois son mot de passe afin d'autoriser la lecture de la clé. La recherche de virus s'effectua aussitôt. Trop rapidement.

- Une seule, lâcha l'intruse.

Une minute dix-sept secondes.

Naomasa s'efforça d'observer le plus grand calme. Les petits cheveux sur sa nuque se hérissèrent lorsqu'il réalisa que la femme s'était encore une fois déplacée et se trouvait juste derrière lui.

- Je suis là.

Elle avait prononcé ces trois mots en détachant chaque syllabe, le timbre aussi rauque qu'un feulement de panthère.

Soixante secondes.

Le détective mit un premier fichier sur la clé, tapa une troisième fois ses authentifications afin de valider le transfert, et regarda la barre de progression se remplir.

- Qu'est-ce que ça veut dire ?

Quarante huit secondes.

- Vous n'avez pas besoin de le savoir.

Il passa au second fichier, répétant le même processus. Puis au suivant. Et au suivant. Et au suivant.

Dix secondes.

- Finalement, commença-t-il en arrachant la clé. Je vais garder ça.

Huit.

L'intruse laissa tomber le manteau qu'elle tenait sur son bras. Il y eut un claquement sec dans l'air, un reflet de métal, et une lame fleurit dans sa main. Elle ne lui laissa pas l'opportunité de se saisir de son arme et fondit sur lui.

Six.

Il leva un bras pour parer le tranchant d'acier qui s'abattait sur sa tête, mais fut surprit de sentir un froid mordre son autre main. Ses doigts s'ouvrirent sous le vif élancement qui accompagna l'écoulement de sang brûlant.

C'était la clé qu'elle voulait !

Cinq.

Aussitôt qu'elle l'eut récupéré, l'a femme recula, les tessons de verre crissant sous ses semelles.

Quatre.

Naomasa n'eut que le temps d'écarquiller les yeux lorsqu'il réalisa qu'elle s'était emparé de son automatique et le braquait sur lui. Les quatre détonations qui suivirent lui firent instinctivement fermer les yeux. Il sentit l'intruse le frôler comme un courant d'air, puis il fit volte-face en l'entendant se jeter contre la fenêtre sur laquelle elle venait de tirer.

- - -

L'adrénaline afflua dans ses veines lorsque le verre vola en éclat sous son poids et qu'elle se retrouva dans le vide, à plusieurs mètres au-dessus de la chaussée, des éclats tournoyants tout autour d'elle.

Ryoka exécuta un retournement en pleine chute, et tomba les bras en croix dans les buissons touffus des plates bornes aménagées au pied de l'édifice. La réception fut plus rude que dans un filet de sécurité, mais elle était saine et sauve. Du coin de l'œil, elle crut repérer une silhouette accroupit sur l'angle d'un immeuble voisin. Cependant le temps qu'elle se remît sur ses pieds, l'individu avait disparu.

Elle n'eut que le temps d'exécuter un pas avant que son instinct ne déclenchât une alarme en elle. Il y eut un sifflement dans l'air, et la jeune femme eut l'heureux réflexe de se jeter sur le côté. Les bandes de captures d'Eraser Head claquèrent à l'endroit où elle se trouvait une fraction de seconde auparavant.

- S'infiltrer seule dans un commissariat. Plutôt osé, commenta le héros de son éternelle voix traînante.

Et dans sa bouche «osé» sonnait comme «inconscient».

L'envie chatouillait Ryoka de prendre sa petite revanche pour la manière imbuvable dont il la traitait au lycée, mais elle estima qu'il n'en valait pas la peine. Pas quand les conséquences de ses actions impacteraient directement Akira.

Alors elle se contenta de lui décocher un sourire facétieux avant de s'élancer en courant dans la rue pour s'engouffrer dans la première venelle qui se présentait. Il suffisait que Aizawa la perde de vue, et elle lui échapperait. Tout en bondissant par-dessus les sacs poubelles abandonnés dans l'allée sordide, elle se tenait prête à activer son Alter aussitôt qu'elle le sentirait débloqué.

Elle bifurqua sur sa gauche, les yeux balayant le sommet des immeubles entre lesquels elle se faufilait. Aucun écho de pas ne résonnait derrière elle. Eraser Head la poursuivait donc depuis les toits. Elle prit à droite une première fois, puis une deuxième, sans avoir la moindre idée de l'itinéraire qu'elle empruntait. Elle improviserait avec le terrain qui se présenterait.

Une impasse. Ryoka poursuivit sans faiblir l'allure, bondit, prit appui d'un pied contre le rempart de béton, rebondit contre le mur du bâtiment, propulsa sa main, agrippa le faîte et lança ses jambes de l'autre côté de la cloison.

Les rubans épais la cerclèrent alors qu'elle retombait. Les doigts de la jeune femme se muèrent d'eux-même pour projeter son balisong en l'air. Elle fut ficelée en un clin d'œil avec une force qui rompit sa stabilité, alors que, dans le même temps, elle rattrapait le manche entre ses dents. Elle s'écrasa sur le flanc avec un grognement, mais ne perdit pas prise sur son arme.

- C'est finit, commenta Eraser Head.

Il se tenait à deux pas d'elle, avant-bras croisés, tenant fermement les bandes entre ses mains.

Oh que non ! Pensa-t-elle férocement.

Il avait commis une grosse erreur en ne ligotant que ses bras. Ryoka se remit sur ses pieds sans manifester le moindre signe de combativité. Puis elle bondit, exécutant le saut périlleux le plus vif et le plus puissant dont elle avait la maîtrise, par la seul force de ses jambes. Elle se réceptionna, genoux fléchis, juste devant le héros et se redressa, plus preste qu'un serpent, son couteau papillon toujours serré entre ses mâchoires, pour tailler en direction de la gorge de son adversaire.

Le brusque mouvement de recul que fut forcé d'exécuter Aizawa fit se délacer les rubans qui lui comprimaient le buste. Sitôt que ses mains furent libre, Ryoka arma la première du balisong, et plongea la deuxième dans l'un des étuis de sa ceinture.

Le jet lacrymogène qu'elle projeta dans les yeux du héros constitua finalement une vengeance ô combien satisfaisante. Il recula contre le mur, aveuglé, ses lunettes relevées pour pouvoir frotter ses yeux de sa paume.

La jeune femme lâcha un rire goguenard, puis se mua en un nuage de fumée qui fila par les conduits d'aération de l'immeuble. Le temps qu'Eraser Head recouvre la vue, elle serait déjà loin.

- - -

Ce fut au début de la deuxième heure de cours que l'idée fusa. J'eus les cinquante minutes suivantes pour y réfléchir, puis dès que sonna la pause de la matinée, je me retournai vers Katsuki.

- On pourrait demander l'autorisation d'utiliser le gymnase, suggérai-je.

Il fallut un moment au blond pour saisir ce que je venais de lui dire. Non pas parce qu'il ne savait pas de quoi je parlais, mais parce que le cours d'anglais de Present Mic l'ennuyait au point qu'il se mettait à somnoler, la tête dans son bras, feignant de prendre des notes.

- Tu as la marque de ta manche sur la joue, fis-je remarquer en pointant du doigt les lignes rouges que les plis du tissu avaient imprimé sur sa peau.

- La ferme, marmonna-t-il.

Il se passa une main sur la mâchoire, puis ajouta :

- Ok pour le gymnase.

Un soupir mal étouffé se fit entendre derrière lui. Le blond pivota aussitôt vers mon frère pour lui crier au visage :

- T'as quelque-chose à dire, Deku de mes deux ?!

Au lieu de paniquer et de se mettre à transpirer nerveusement, Izuku se fendit d'un sourire contrit.

- Non, c'est juste que je ne pensais pas que vous aviez gardé cette habitude, se justifia-t-il.

- Tch ! Fut tout ce que Katsuki répliqua en se retournant vers son pupitre, menton dans la paume.

Un sourire involontaire avait dû se former sur mes lèvres, car son expression se teinta soudain d'une roguerie qui s'était récemment raréfiée chez lui. Il pérora à mon attention :

- Te réjouis pas trop vite : je vais te démolir !

- Pas sûr, rétorquai-je. Là on va pouvoir utiliser nos Alters.

- Justement !

Derrière le blond, mon frère écrasa son front contre sa table en se prenant la tête dans les mains. En suivant machinalement son geste, mes yeux furent captés par un autre regard, dardé sur moi depuis le fond de la classe.

Shoto resta de marbre quand je le remarquai. Il m'avait salué lorsque nous étions arrivés dans la salle, mais ne semblait toujours pas vouloir m'accorder davantage de considération qu'au reste de la classe. Notre discussion de la veille m'avait néanmoins fait prendre conscience qu'il ne savait pas plus que moi comment aborder cette situation aussi inattendue que déstabilisante. Il nous faudrait à tous les deux un temps d'adaptation.

- Ah ! Salut, coéquipière ! Lança soudain une voix depuis la porte.

Dans le couloir, Takeru m'adressa un signe de la main auquel je répondis, puis il poursuivit son chemin en direction de sa propre classe.

- Depuis quand elle te cause, elle ? S'irrita Katsuki.

Il n'avait vraisemblablement pas oublié le fait que Takeru l'ait raillé le jour de l'examen d'entrée, ni digéré que le Première B avait vu juste.

- C'est un mec, corrigeai-je une nouvelle fois.

- On dirait pas.

- Il a pas de poitrine.

- T'en a pas tellement non plus, ça fait pas de toi un mec !

- Katchan ! S'offusqua mon frère.

- Bon il va arrêter d'intervenir, le nerd ?!

- Vous êtes juste devant-moi !

L'arrivée de Midnight mit fin à leur début d'altercation. J'étais d'ordinaire plutôt attentive en cours, mais ce jour-ci, j'éprouvais le plus grand-mal à me concentrer. Nous étions le vingt avril, soit la date d'anniversaire de Katsuki. Il ne se souciait plus de le fêter collectivement depuis la primaire, ayant évidé son cercle d'amis en entrant au collège. Si une connaissance le lui souhaitait, il s'irritait et quelque-chose dans le périmètre avait de fortes chances d'exploser. Toutefois, ces trois dernières années, il n'avait jamais failli à respecter une coutume qui nous était propre : celle de disputer un match au cours de la journée.

La tradition s'était instaurée d'elle-même, trois ans plus tôt. Le blond me blâmait parce que je lui avait souhaité son anniversaire publiquement, et je lui en voulais parce que toutes ces traditions étaient déjà trop compliquées pour qu'il les embrouille davantage. Au moins les choses étaient-elles plus simples avec Izuku : je le lui fêtais au réveil, je l'embrassais sur la joue, n'importe-quel présent lui faisait plaisir -surtout si ça avait un quelconque rapport avec All Might, et puis c'était tout. Dans un coin de la cours de récréation, Katsuki et moi nous étions livrés à notre échanges de coups habituels afin de régler nos comptes. Sauf que nous ne nous étions pas arrêtés. Nous avions poursuivi, frappant plus fort, tentant des prises, comme si nous disputions un match d'entraînement.

Et nos avions remis ça les deux années suivantes.

- - -

Nous n'eûmes aucun mal à obtenir l'autorisation de rester après les cours pour s'entraîner au gymnase. Nous nous y retrouvâmes donc après avoir enfilé nos tenues de sports – Aizawa avait refusé que nous portions nos costumes – et déposâmes nos sacs près de l'entrée.

En guise d'échauffement, nous échangeâmes quelques frappes, puis sans nous concerter, nous nous séparâmes pour aller prendre position à quelques pas l'un de l'autre.

Katsuki fléchit les genoux et ses paumes ouvertes s'incendièrent en lâchant des filets de fumée. Mes ailes jaillirent dans mon dos.

Une poignée de secondes s'écoulèrent, puis il détendit brusquement les jambes alors que je m'élevais simultanément d'un coup d'ailes.

- Tu crois vraiment que t'as l'avantage là-haut ? Me provoqua le blond en braquant sa main dans ma direction.

La déflagration ne m'atteignit que sous la forme d'une bouffée de chaleur cuisante, mais la perturbation causée dans l'atmosphère confinée de la salle déstabilisa mon vol.

- T'es juste une cible facile ! Triompha-t-il.

J'abandonnais le sur-place pour décrire de larges huit. Tout autours de moi rugissaient les explosions de Katsuki, enfumant le gymnase. Cependant je n'en étais toujours pas la cible. Il cherchait juste à me faire décrocher en créant des dépressions et des turbulences soudaines dans la couche d'air qui me supportait.

Je décidais d'en user. Quand je sentis une nouvelle poche de vide se former dans le flux, je m'y laissais chuter, pliant mes rémiges dans mon dos. Puis je les rouvris pour filer en rase-motte, droit vers le blond. Tout en comblant la distance, j'usai de la résistance de l'air que tranchaient les bords d'attaque des mes ailes, la convertissant en flux que je rassemblai et comprimai dans le creux de celles-ci.

Quand je ne fus plus qu'à quelques pas de lui, je ramenai mes genoux contre moi et inclinai mes ailes, brisant mon élan pour me réceptionner accroupie dans un couinement de semelles sur le patin du sol. Puis je relâchai l'air compressé sous mes plumes.

La salve de vent moucha toutes les explosions que Katsuki dirigeait contre moi et le percuta de front. Il eut le réflexe de se laisser tomber à plat ventre plutôt que d'être renversé par le choc. Je me ruai vers lui, récupérant les fluctuations créées dans la salle par mon attaque précédente pour les enrouler en une masse plus compact au bout de mes rémiges primaires droites, prête à l'assener en plein contre le dos de mon adversaire.

Alors que je me dressai au-dessus de lui, ce dernier roula sur le dos, bras levé, sa paume incandescentes à quelques centimètres de mon visage. Je bondis en arrière, mais fus malgré-tout prise dans le souffle de la déflagration. Mes oreilles se bouchèrent, je ne vis plus que fumée et flammes, n'eus plus conscience de rien d'autre, puis je me retrouvai étendue à terre, les ailes en croix.

En dépit de mes tympans sifflant, je perçus les pétarades de détonations successives. Katsuki s'élançait à son tour dans les airs. Je me remis sur pieds tandis qu'il achevait sa montée, et je repris mon envol alors même qu'il entamait une descente oblique, propulsé par son Alter. Nous fusâmes l'un vers l'autre, nos regards verrouillés, les lèvres crispées sur le même sourire : celui insufflé par l'euphorie de la lutte et la certitude que cette charge simultanée en était le point culminant.

Un instant avant que nous nous percutâmes, il ramena ses mains devant-lui, tandis que j'ouvrais en grand mes ailes.

La collision fut encore plus violente que la déflagration qui m'avait fauché un instant auparavant. Son explosion et la trombe de vent que j'avais formé pendant mon ascension se conjuguèrent au lieu de simplement s'annuler mutuellement, et l'onde de choc nous projeta tous deux à la renverse dans un mugissement.

Jetée à terre, je glissai sur plusieurs mètres, emportée par l'élan de ma chute, avant de m'immobiliser sur le flanc. Je repris lentement mon souffle, complètement sonnée, une aile douloureusement coincée sous moi. Par-dessus le bruissement que firent mes ailes en se dissolvant, je distinguai le son de rapides foulées.

L'instant suivant, une main me pinça la nuque, m'épinglant au sol, et j'entendis un crépitement au-dessus de moi.

- Bon anniversaire, grommelai-je, désabusée par cette énième victoire de sa part.

- Mon Alter surpasse le tien, conclut triomphalement Katsuki.

Contrairement à mes défaites précédentes, celle-ci me laissait un arrière goût d'amertume. J'eus brièvement envie de lui faire remarquer qu'il ne s'agissait que de la moitié de mon Alter. Puis je me souvins que cet handicap était entièrement de ma faute.

Il me relâcha, et je me retournai en exhalant un profond soupir avant de me relever péniblement. Mes chutes répétées et l'intensité avec laquelle j'avais usé de mon Alter m'avaient meurtri le corps entier. Je me traînai vers mon sac pour en tirer le paquet que j'avais transporté toute la journée, et tendis celui-ci au blond.

- Encore un tee-shirt ? Commenta-t-il en le recevant.

- Si ça te plaît pas tu pourras l'échanger.

Mitsuki m'avait toujours conseillé dans le choix des présents que je lui offrais. Des figurines quand nous étions petits, des tee-shirt ou des CD depuis ses onze ans. Il critiquait systématique, mais n'en avait jamais retourné aucun au magasin.

Je me détournai afin de ramasser mes affaires. Alors que j'allais me redresser, une paume s'abattit sur mon crâne et m'ébouriffa les cheveux. Je pivotai vers lui, légèrement surprise, mais il avait déjà passé la bandoulière de son sac sur son épaule et prit la direction de la sortie.




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Pfiouuuu ! Je voulais VRAIMENT poster ce chapitre aujourd'hui pour marquer l'occasion et... j'ai réussi ! En espérant ne pas l'avoir bâclé...

Beaucoup d'actions dans ce chapitre, ça faisait longtemps ! (Et j'espère que les scènes de combat son compréhensibles...)

1er confrontation Chechire/EraserHead, j'espère que tout est clair à ce niveau là !

Je me suis un peu arrachée les cheveux sur la façon d'aborder l'anniversaire de Katsuki. A ce stade là, il est pas super super social donc j'ai abandonné l'idée de la fête surprise avec d'autres membres de la classe (peut-être une prochaine fois ^^) mais c'était vraiment un moment que je voulais qu'Eiko et lui partagent, tout en restant crédibles...

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