Chapitre 11 (partie1) : Shoto et Arashi
https://youtu.be/oN2Xs-MvxLw
Je m'effondrai à genoux, ahanant de fatigue, ruisselante transpiration. Autour de moi, la salle d'entraînement se mit à tourner.
- C'est tout ?
La voix, inflexible, tomba comme un couperet. J'essayai de solliciter mes muscles, mais ceux-ci ne répondaient plus. J'étais clouée à terre. Mes yeux remontèrent vers le visage de la haute figure qui se tenait devant moi. Bras croisés derrière son dos, campé sur ses deux pieds, mon père m'écrasait d'un regard impitoyable. Je ne pus soutenir longtemps la dureté qui se lisait dans ses prunelles mauves, et baissai la tête.Une perle de sueur coula le long de ma mâchoire.
- Regarde tes cibles.
J'obéis. Une vingtaine de mannequins de frappe, pesants aussi lourds qu'autant d'individus de gros gabarit, étaient disséminés dans la pièce. Sept étaient renversés à terre. A l'emplacement de la poitrine, le revêtement de cuir synthétique de trois d'entre eux avait fondu. Le contenu calciné fumait, libérant des effluves âcres. Les autres se dressaient en spectateurs aveugles, insensibles à mon martyr.
- Tu penses avoir fini ?
Je secouai négativement la tête. Je pris une profonde inspiration pour tenter de reprendre la maîtrise de mon souffle erratique. Mes ailes étalées comme une traîne dans mon dos se soulevèrent avec un froufrou de soie. Une brise de leva, fraîche contre ma peau moite, agita mes cheveux, fit danser la poussière. Mais les mannequins ne bronchèrent pas. Ne vacillèrent même pas sur leurs pieds. Le vent retomba.
Un soupir de déception se fit entendre au-dessus de moi.
- Tu n'en as pas terminé, Arashi. On n'arrêtera que lorsque tu les auras tous renversé.
Une vague de découragement monta en moi. Tous ? Je ne pouvais pas !
Je n'avais même pas l'énergie de protester. La douleur me tenaillait les muscles des bras. Ils n'étaient pas en état d'encaisser la conduction d'un autre éclair. Une boule de plomb me noua la gorge. Je serrai les dents à les briser, mais les larmes m'embuèrent malgré tout la vue.
- Est-ce que tu pleures ?
Le son de pas martiales sur le sol m'indiqua que mon père s'approchait. Je tressaillis, submergée de panique. Me relevai avec un mouvement instinctif de recul. Retombai à genoux quand ceux-ci ployèrent sous moi.
- Tu sais ce qui arrive, quand tu faiblis face à l'adversité ? Quand tu renonces à mi-chemin ?
Pour rien au monde, je n'aurais voulu croiser son regard. Pourtant je relevai la tête. Parce qu'une partie réflexe de moi voulait voir. Voir la menace arriver, même s'il n'y avait rien que je puisse faire pour m'en défendre.
Comme s'il savait exactement ce qu'il se jouait dans mon esprit, mon père tourna la paume de sorte que je vis nettement sa peau se fendre d'une longue ligne vermeille, depuis l'intérieur du coude jusqu'au creux de sa main. Un épais filet de sang s'épancha hors de la plaie. Cependant, au lieu de ruisseler au sol, il se solidifia, se condensa en une longue lame sombre, sans reflets.
- Tu meures, conclut-il.
Je ne perçus même pas son geste. Le plat de la lame s'abattit Chtak ! sur mon épaule. Je lâchai un cri de protestation et de douleur. Chtak ! Mon flanc.
- Tu n'as pas le loisir de te ménager, Arashi. Tu es une Katagiri. La seule chose dont tu as le droit de te préserver, c'est la mort.
Slash ! Seulement, cette fois, mon père laissa des arcs d'électricité statique courir le long de la lame. La décharge planta ses aiguillons dans ma chair jusqu'aux os.
- Or la défaite, la capitulation, sont des morts en elles-même. C'est pourquoi elles sont inenvisageables.
Chtak !
Ce ne fut pas une plainte mais un grognement que j'émis, les yeux ruisselants de larmes, le corps parcourut de spasmes.
Stop ! Pas un de plus !
- Ton cœur bat encore, non ? Tu ne le sens pas pomper la vie dans tout ton être ? Alors riposte, Arashi.
Un effort prodigieux me remit sur pieds, secouée de pleurs et de tremblements.
Chtak !
Je m'affalai durement contre le sol, les muscles en feux, ma peau cuisante à l'emplacement des coups. Un hoquet m'étouffa, une contraction me tordit les boyaux, et je vomis à quatre patte sur les tapis d'entraînement.
Stop ! Stop ! Pas un de plus !
Le sifflement de la lame dans l'air.
Pas.
Un.
De plus.
La douleur devint pulsation qui devint tumulte qui devint déchaînement. Les fourmillements dans mes ailes se firent embrasements, qui crépitèrent depuis ma colonne jusqu'aux extrémités de mes rémiges. Elles s'ouvrirent de tout leur long.
Ça montait, enflait, grondait. Puis ça éclata.
Je me redressai à genoux, mue d'une vigueur nouvelle, traversée d'énergie pure. C'était au-delà de moi, de ma volonté. Le dos arqué, les bras en croix, la tête renversée en arrière, je laissai cette formidable puissance jaillir.
Je fus aveuglée de lumière. Sous le fracas sec et sourd qui roulait dans la pièce retentissaient un long cri, vibrant, aiguë. Le mien.
Lorsque l'effusion s'épuisa, que le silence fut restauré, tous mes muscles se relâchèrent avec la mollesse d'une poupée de chiffon. Drainée de forces, engourdie de la tête aux pieds, je promenai un regard hébété autour de moi.
Presque tous les néons avaient explosé. Les rares rescapés clignotaient en bourdonnant. Chaque battement révélait les traces calcinées qui couvraient les murs. Tous les mannequins avaient été frappés par la foudre. Des flammèches bleues tremblotaient dans les déchirures du cuir, dévorant le contenu.
Une main se posa sur mon épaule.
- Je suis fier de toi, Arashi, dit mon père en m'embrassant sur le front.
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Tous les deux jours, on m'octroyait une journée de récupération. J'étais libre d'errer où bon me semblait, tant que je revenais pour la nuit tombée.
Pour la première fois de ma vie, j'avais quitté l'enceinte de la demeure des Katagiri en considérant l'idée de ne plus y retourner. Je traînais les pieds, déambulant sans prendre garde à mon environnement, seulement préoccupée de faire avancer cette masse de chair et d'os qui était la mienne. Les couches nuageuses étaient si denses qu'elles obstruaient le jour, plongeant la vallée dans des ténèbres irréelles. Aussi loin que j'aille, je ne pouvais me défaire de ce trop plein qui m'engluait. Des sanglots me compressaient la poitrine, mais mon esprit s'était dissocié de mon corps, et mes yeux demeuraient secs.
Je voulais me fondre dans cette obscurité pesante, m'écrouler à terre pour qu'elle m'absorbe comme une goutte de pluie, me livrer au vent pour être dispersée dans ses altitudes hors d'atteinte. J'étais si chétive, si menue, ça ne devait pas être irréalisable.
Alors que pas un souffle ne faisait frémir les ramifications au-dessus de ma tête, là-haut les nuages roulaient, fuyaient, passaient en hâte, sans même avoir le temps de relâcher leur charge, houspillés par une force invisible. En tendant l'oreille, on pouvait percevoir son mugissement lointain.
Je croyais sentir un brouillard froid m'envelopper. Le monde était réduit à diverses nuances de gris, mais je n'étais plus certaine que ce fût uniquement la cause de l'averse menaçante.
Jusqu'à ce qu'une trouée crevât soudain l'édredon de plomb. Une raie diaphane se déversa par la déchirure, gaze éblouissante ruisselant de cette masse de graphite. J'aurais voulu tendre la main pour que cette lumière providentielle l'enveloppe telle une main maternelle.
D'autres rayons ne tardèrent pas à transpercer le flot minéral. Nez en l'air, j'observai les nuages se faire mettre en lambeau jusqu'à ce que le jour qui filtrait passât du blanc d'argent au jaune miel, jusqu'à ce que ma nuque me tiraillât et que des touches de bleues vinrent s'ajouter à la palette de l'éther.
Quand je baissai finalement la tête, je découvris une silhouette qui se tenait à contre-jour. Pas plus haute ni moins frêle que moi.
Je plissai les yeux pour la discerner. Mes jambes s'actionnèrent d'elles-même, et je m'avançai précautionneusement vers l'inconnu. Celui-ci fit de même après un temps de retard.
Nous arrivâmes face à face et nous jaugeâmes mutuellement avec la circonspection de deux moineaux farouches. Il n'y eut pas une parole échangée. D'un seul regard, nous décelâmes au fond des yeux de l'autre ce qu'un enfant ordinaire n'aurait pas remarqué.
Ce cri de détresse muet, cette incompréhension face à l'injustice de notre sort, cette candeur déjà estompée.
- Katagiri Arashi, me présentai-je.
- Todoroki Shoto.
Lui, et moi, deux enfants solitaires dans l'immensité verte du chaînon, pâles de fatigue, les traits tirés, les yeux ternes.
J'appris par la suite que les Todoroki possédaient une demeure nichée sur l'autre flanc de la montagne sur laquelle je résidais. Son père l'y emmenait occasionnellement afin de l'entraîner sans que les autres membres de la famille ne viennent interférer et le distraire.
Dès notre première rencontre, nous convinrent implicitement de nous retrouver tous les deux jours. Cela se fit naturellement. Quand vint ma journée de repos suivante, je filai de chez moi pour me rendre à l'endroit où je l'avais rencontré par hasard. Il s'y trouvait déjà. Et il fut au rendez-vous toutes les fois qui suivirent. Il y fut même quand je ne parvenais pas à m'échapper de jour et m'évadais en pleine nuit.
- - -
Mes doigts enflammés par la friction du métal glissèrent du barreau de l'échelle horizontale. Je me rétablis tant bien que mal sur mes pieds, chancelant sous le choc. J'essuyai mes paumes moites sur mon pantalon, puis, d'un battement d'aile, je me propulsai en l'air pour agripper la barre que je venais de lâcher. Sans un temps mort, sans écouter mes bras suppliciés par les tractions répétées, ni mes épaules sur le point de rompre. Parce que c'était ce qu'on attendait de moi.
- C'est bien, Arashi, commenta ma mère. N'oublie pas, tu peux faire une erreur, tant que tu la corriges au mieux pour ne pas en faire une faute.
Bras croisés sur sa poitrine, elle observait ma prestation, stricte et intransigeante. Mes mains se mouillaient déjà de sueur. J'allongeai le bras pour saisir le barreau suivant puis transférai mon poids en lançant l'autre main, le tout le plus vite possible.
- Les erreurs sont tolérées, car elles sont nos plus grands maîtres. Les fautes sont impardonnables car elles sont notre perte.
Je répétai la manœuvre, la mâchoire crispée. Encore un barreau. Puis un autre. Puis un...
Mes doigts faillirent de nouveau. Je tombais sur les fesses, m'endoloris le coccyx, me relevai, me propulsai derechef en hauteur, voulus refermer la main sur la barre métallique. La douleur m'interdit de m'accrocher. Je perdis prise. Chutai.
- Faute, Arashi.
La salve de vent me heurta comme un mur, me projeta tel un jouet et m'écrasa plus loin dans les graviers, la mâchoire la première.
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Des cristaux de glace virevoltaient autour de nous, tournoyant dans le soleil. Sans un mot, les yeux accrochés aux miens, Shoto apposa précautionneusement sa paume glacée contre ma mâchoire, là où sourdait la douleur d'un hématome. Un soupir de soulagement m'échappa lorsque, après un pic fulgurant, la souffrance reflua, inhibée par l'engourdissement.
Mes paupières se fermèrent d'elles-même, et je savourais de tout mon être ce contact inédit. Ce fut comme une bouffée d'air frais, un jaillissement de lumière dans une pièce restée trop longtemps close sur les ténèbres. Je découvrais le sens du mot «apaisement».
Je soupirai en rouvrant lentement les yeux.
- Moi aussi, je déteste mes Alters, avoua gravement Shoto. Mais sans eux, je ne pourrais pas être celui que je veux.
- Celui... que tu veux ?
- Oui. Un héro. Pas comme mon père. Comme All Might !
- Qui ?
- All Might, le numéro un des héros. Celui que mon père veux que je dépasses.
- Je ne sais pas qui c'est.
- Il est fort, c'est le plus fort de tous. Et il sauve tout le monde. Il n'échoue jamais.
J'ouvris des yeux incrédules. De telles personnes pouvaient-elles vraiment exister ? Quelqu'un de si fort qu'il n'échouerait jamais... Qu'il ne commettrait jamais de faute...
- Personne ne peut être aussi fort, lâchai-je.
- Je le serai. Je serai même plus fort. Et je n'aurai même pas besoin de l'Alter de mon père pour ça.
- L'Alter de ton père... C'est quoi ?
Il hésita, puis leva sa main, sa petite main d'enfant aux doigts courts, paume tournée vers le ciel comme pour recueillir le rayon de lune qui la revêtait d'une blancheur laiteuse. En son creux s'alluma alors une flamme. Frêle et bleue, qui oscillait sous la brise nocturne. Lentement, j'approchai ma propre main, toute aussi menue.
A mon injonction, le souffle de vent afflua pour nourrir la bluette, qui s'éleva, dora, puis s'orangea, enfant dans un ronflement de feu.
- Shoto, nos Alters s'accordent.
C'était un brasier qui dansaient maintenant entre nos deux paumes, qui virevoltait pour jeter ses langues de flammes au ciel. Il m'éblouissait, cuisait ma peau. J'avais l'impression de le sentir me communiquer sa vitalité, qu'elle imprégnait ma chair pour se frayer un chemin jusqu'au fond de mon cœur.
- Ils se renforcent, souffla-t-il sur le même ton.
Je levai les yeux, portant mon regard au-delà du flamboiement. Derrière les vagues de chaleur et les gerbes d'escarbilles, son visage floué se fendait d'un léger sourire. Dans le mince carcan de ses yeux, ses prunelles rutilaient, l'une braise, l'autre étoile. Le feu cuivrait une partie de sa chevelure, et conférait à l'autre l'érubescence de la neige au crépuscule.
- A nous deux, bientôt nous pourrons tous les vaincre.
Et par «tous», je compris qu'il parlait de ma famille, de son père, de tous ceux qui nous opprimaient. C'était une décision. Celle de s'affranchir ensembles de nos chaînes de sang. De s'arracher mutuellement au joug de nos aînés.
- - -
Les choses ne se déroulèrent pas ainsi.
Après cette nuit, Shoto manqua à tous nos rendez-vous. Je compris rapidement que son père l'avait ramené à Tokyo, mais je continuai de me rendre à notre lieu de réunion pendant des mois, dans l'espoir de le retrouver un jour. Son absence était comme un trou incolmatable, dont j'avais conscience à chaque instant.
Il avait été ma raison de tenir et d'endurer, et voilà que j'étais de nouveau livrée à moi-même. Lorsque je me tenais seule sous les frondaisons, à patienter des heures tout en sachant pertinemment qu'il ne se montrerait pas, je songeais à ses yeux rougis par les larmes, à l'amertume de sa voix, à l'ombre de son regard. Je me sentais aussi désolée de ne pas être là pour lui que j'étais accablée qu'il ne soit pas là pour moi.
Puis, un soir, sa silhouette se découpa au sommet de la butte par laquelle il arrivait chaque fois, à contre-jour du ciel, exactement comme au premier jour de notre rencontre.
Ivre de joie, je m'élançai vers lui, oublieuse de tous mes maux, toute affliction devenant dérisoire à côté du bonheur de le retrouver. Shoto, la première étoile du crépuscule.
Je m'arrêtai net dans mon élan lorsque sa figure m'apparut clairement. Sous ses mèches auburn, son œil était couvert d'un bandage. L'autre évitait mon regard, obstinément fixé à terre.
J'avais beau brûler de savoir ce qu'il lui était arrivé, je sus instinctivement que je ne pouvais pas le lui demander. Alors je m'approchai, aussi doucement qu'auprès d'un animal blessé. Il entendit mes pas sur l'humus. Son œil valide se ferma sur des pleurs réprimés. Sa bouche se pinça au-dessus de son menton chiffonné. Avec une extrême délicatesse, je posai ma main sur son épaule tremblante.
Il laissa échapper un bref gémissement, et soudain, sur une impulsion éperdue, nous nous étreignîmes de toutes nos forces, agrippés l'un à l'autre, autant pour chercher du réconfort qu'en prodiguer. Je plongeai mon nez dans la jonction entre son cou et son épaule, les yeux fermés, inspirant son odeur de bois d'érable et de thé. Ses larmes chaudes mouillaient ma joue et ma clavicule, mais les miennes coulaient tout aussi abondamment. Sans réaliser comment, nous nous retrouvâmes à genoux sur la litière du sol, toujours cramponnés à l'autre.
Cette crise de larmes dura un temps que je n'aurais pu définir. Puis le flot se tarit enfin, nous laissant épuisés, alanguis, purgés comme l'éther après l'orage, emplis d'un calme étranger.
La réalité nous rattrapa sans merci.
Le bruit de lourds piétinements se rapprochant nous parvint de loin. Pétrifiés d'effrois, comme sur le point d'être pris en faute, nous vîmes surgir un homme corpulent, en survêtement de sport qui ne rendait que plus imposant son large buste et sa musculature de taureau. En guise de pilosité faciale lui poussaient des flammes inextinguibles, mais leur flamboiement n'était rien en comparaison de celui, fulminant et féroce, qui animait son regard. Un regard dardé sur moi, comme celui d'un lion sur la hyène qui guignait son lionceau.
Je me raidis toute entière, les entrailles nouées d'une peur à laquelle je n'avais encore jamais goûté. Tous les préceptes de combat inculqués par mes parents me traversèrent l'esprit en une fraction de seconde. Une part de moi-même me hurlait de prendre l'initiative et de libérer toute la puissance de mon Alter afin d'avoir une chance de fuir, tandis que l'autre me conjurait d'estimer d'abord le réel degré de menace. Aucune ne l'emporta. Je m'étais muée en pierre, incapable de seulement penser ou respirer.
Alors que, après avoir marqué un arrêt en nous découvrant, Endeavor exécuta finalement un autre pas dans notre direction, ma mère surgit de nul part. Vêtue de son long hakama noir aux plis impeccables, qui la couvrait de la taille au cheville sous son keikogi de même couleur, ses cheveux du même gris argenté que les miens, coupés courts, attachés en chignon parfait ; elle était majestueuse.
La main de Shoto et la mienne se trouvèrent et se lièrent fermement tandis que les adultes s'estimaient d'un regard. Ma mère lui adressa un sourire poli, d'une frigidité qui frôlait la discourtoisie. Todoroki se borna à étrécir les yeux sous ses sourcils de feu.
- Il semblerait que nos enfants se soient rencontrés avant nous, voisin,
- Il semblerait.
Tout en échangeant ces paroles qui en disaient moins que leurs regards, ils s'avançaient lentement, prohibant tout geste brusque, chacun voulant rejoindre le premier sa progéniture sans provoquer l'agressivité de l'autre. L'hostilité qu'ils se vouaient était palpable. Et même si je n'en comprenais pas vraiment la raison, la présence de Shoto et moi était l'unique chose qui les empêchait de lancer l'offensive.
- Je me demandais pourquoi mon fils était dissipé dans ses leçons. Tout s'explique à présent.
La voix de stentor du héro me fit frémir. Mais tant que la main de Shoto serrait la mienne, la peur gardait ses distances.
- Et je me demandais ce qui pouvait bien attirer ma fille par ici. Je comprends mieux, maintenant.
J'exerçai à mon tour une pression sur la main tiède de Shoto. Car c'était bien une menace que ma mère prononçait à son encontre.
- En ce cas veuillez être plus rigoureuse dans la surveillance de votre gamine.
- Elle ne vous dérangera plus.
Ils étaient tous deux parvenus à nos côtés et se faisaient face. Leurs regards se percutaient avec une violence que le reste de leur personne réprimait. Une pierre tomba au fond de mon estomac.
«Elle ne vous dérangera plus ?»
Cela ne pouvait signifier qu'une seule chose.
Shoto !
Elle ne me laissera jamais revoir Shoto !
Il dut en tirer la même conclusion, car sa poigne forcit en même temps que la mienne. Nous crispions nos doigts mêlés à en faire blanchir nos jointures, à en couper la circulation du sang dans nos veines.
Ma mère entoura mes épaules de son bras, sa main me saisissant comme une serre. Une pointe de panique me troua les viscères. Endeavor empoigna le bras de son fils.
Non. Non ! Ils ne pouvaient pas.
- Arashi, rentrons.
- Shoto, viens avec moi.
Il n'y avait pas de résistance qui tînt. Nous fûmes inéluctablement écartés l'un de l'autre, tirés sans transigeance par nos parents.
Ça ne pouvait pas être la dernière fois !
Nos regards se croisèrent enfin. Derrière ses mèches blanches, son œil unique était écarquillé de la même émotion que les miens.
Ils ne pouvaient pas me le prendre ! Pas lui !
L'épouvante me fit activer malencontreusement mon Alter. Dans mon empressement de communiquer à Shoto tout ce que je ne pourrai jamais plus, je lui transmis une décharge d'électricité statique à l'instant où nous doigts se détachaient. A peine le petit serpent bleu eut-il été absorbé par sa peau, que le côté auburn de sa chevelure se hérissa comme sous une vague de chaleur.
Médusée, je vis des langues de flammes couler de son œil gauche, dévorer en ronflant le bandage, le réduire en cendres volantes. Il tendit la main vers moi, toute enrobée de touffes de feu. Son œil bleu grand ouvert. Une rage froide contractant sa face.
- Arashi !
D'une saccade, j'essayai de me délivrer de l'emprise de ma mère. Elle ne me ramena que plus sèchement contre elle.
- Arashi ! Tu peux être ce que tu veux !
- - -
Alors.... oui, ce chapitre est entièrement un flash-back, mais au moins maintenant, vous savez (presque) tout !
J'espère que je n'ai pas été niaise ou clichée, toutes ces scènes me tenaient à cœur et on leur importance dans l'histoire et je ne voyais pas comment les écrire autrement.
Je laisse encore un peu de temps avant de poster la FAQ, puisque j'ai publié le chapitre précédent il n'y a pas longtemps...
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