✧9✧ Coma et cauchemars
𝟏𝟔 𝖘𝖊𝖕𝖙𝖊𝖒𝖇𝖗𝖊 𝟏𝟗𝟕𝟑
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La nuit enveloppait doucement le château de ses bras étoilés alors que Calista quittait l'infirmerie. Sa chemise de nuit d'une blancheur immaculée couvrant délicatement son corps effilé la faisait apparaître telle une fantôme à la lueur blafarde de la Lune. De la pleine Lune. Mrs. Pomfresh avait quitté l'infirmerie tôt dans la soirée et l'adolescente en avait profité pour quitter son lit.
Elle se savait pas vraiment réveillée, comme suspendue quelque part entre la conscience et l'inconscience. Ses jambes marchaient sans qu'elle n'en eut réellement donné l'ordre. Ses yeux fatigués voyaient flous alors qu'elle parcourrait les dédales de Poudlard, si bien qu'elle ignorait où elle allait. Alors même que son instinct en en était certain.
Lorsqu'elle franchit la porte de la salle des trophées elle semblait avoir regagné tout ses esprits. Elle fit le tour de la pièce, dévisageant les récompenses multiples avec un regard nouveau. Pourquoi diable ses pas l'avaient guidés ici ?
Soudain, des pleurs résonnèrent dans la pièce. Elle sursauta, fit volte face, et découvrit dans son dos un miroir qui, elle le jurerait, n'était pas présent lorsqu'elle était entrée. Un miroir, ou peut-être pas. Elle ne voyait pas son reflet à l'intérieur. Ce dernier ressemblait plus à un prolongement de la réalité, un passage vers une salle secrète. On pouvait s'attendre à tout dans une école comme Poudlard. Calista posa sa main sur le verre, hypnotisé par l'aura que l'étrange objet générait, elle ne se formalisa pas de la morsure du froid sur sa paume. Elle contempla longuement l'image du petit garçon recroquevillé sur lui-même qui sanglotait sur le sol.
— Pourquoi pleures-tu ? souffla-t-elle pour elle même.
Comme si l'enfant l'avait entendu il étira ses membres et planta son regard dans le sien. Il n'avait plus l'air si petit ainsi. Un première voir deuxième année, aurait-elle parié. Lorsque ce dernier révéla son visage à ses yeux, Calista fut soufflé par sa perfection.
C'est lui qu'on aurait dû appeler Calista, songea la jeune fille avec amusement.
Ses yeux noirs, sans nuances, se plantèrent dans les siens. Son regard était dur et soudain sa mâchoire s'étira comme s'il lui hurlait dessus. Calista n'entendit rien, pourtant la force du cris lui parvint et elle sentit son cœur se déchirer.
Ce cris sembla définitivement éveiller Calista. Son regard paniqué alla de sa main glacée à l'image du garçon. Garçon qui avait d'ores et déjà disparu. Elle recula brusquement et son dos rencontra une étagère couverte de récompenses qui s'écroula bruyamment sur le sol. L'enchantement de la balade nocturne avait disparu pour laisser place à la peur d'être découverte. Des trophées percutèrent ses jambes et ses côtes. Des bleus en plus, elle n'avait vraiment pas besoin de cela. Elle réprima la douleur et essuya les larmes qui perlaient.
— Élève hors des dortoirs ! Élève dans les couloirs !
Le cris nasillard de Peeves perçait à travers les murs. Calista poussa un gémissement apeuré et pris ses jambes à son cou. Mais l'esprit frappeur l'avait trouvée, et il ne la laisserait pas s'échapper.
— Vilains, fripons, petit patapon, qui donc ose chiper la place de Peeves ?
Gredins, polissons, petit patapon, qui donc ose mettre la pagaille à Poudlard ?
Calista accéléra, dévala les escaliers quatre à quatre, agrippa aux murs pour ne pas tomber, elle sentait son cœur pulser et ses membre fatiguer. Finalement, elle atteignit la porte de l'infirmerie. Elle s'y appuya de tout son poids pour l'ouvrir mais lorsqu'elle le fit, elle tomba nez à nez avec quelque chose qu'elle n'aurait jamais voulu voir.
— Re- Remus ? Couina-t-elle.
— Miss Black ! Gronda la voix de Mrs. Pomfresh. Que faites vous levée ! je vous croyais dans votre lit !
L'infirmière eut beau s'époumoner sur tous les manquements au règlement que Calista venait de commettre, cette dernière n'en écoutait pas un seul mot.
Tout ce sang. Toute cette souffrance. Et les yeux fatigués de Remus Lupin plantés dans les siens.
Ses cheveux châtains retombaient, trempés, sur ses yeux en amendes brûlants de milles émotions. Surprise, panique, tristesse, douleur. Sa chemise entrouverte laissait apercevoir d'immenses plaies, bien trop profondes pour être bénignes. Il avait du sang partout. Des centaines de questions traversèrent l'esprit de Calista, fusant comme des éclairs. Mais la seule chose qu'elle put dire fut :
— Que diable t'est-il arrivé ?
— Cela ne vous regarde pas Miss ! Explosa Mrs. Pomfresh, ses poings plantés sur ses hanches. Retournez vous coucher et mêlez vous de vos affaires.
— Je lui fais confiance. Souffla Remus. Et puis c'est une fille intelligente, elle en a déjà trop vu. "
Calista eut envie de pleurer. Remus n'avait pas détaché une seconde son regard du sien et elle était certaine de ne jamais l'avoir vu aussi solennel.
L'infirmière soupira et posa un main douce sur l'épaule du gryffondor.
— Très bien, je vais chercher ta pommade.
Sur ces mots elle se retira dans son bureau, sa robe blanche flottant dans son sillage.
Calista s'approcha du lit où était assis Remus et se laissa tomber à ses côtés.
— Tu l'as à la bonne, celle-là. Rit-elle.
Un silence pesant succéda ses mots.
— Calista... Ce que je vais te dire, je ne l'ai encore jamais dis à personne.
— Même pas les maraudeurs ?
Remus grimaça.
— Ils l'ont, pour ainsi dire, deviné. Je n'ai pas eu à le dire.
— Rem, coupa Calista. Tu peux me faire confiance, tu l'as dit toi même. Quelque soit ton secret je te jure de ne pas le révéler.
Remus eut un sourire.
— Je suis un loup-garou.
Son souffle était fait de plomb et ses mots en étaient les amas.
— Et moi je vois des garçons qui chialent dans des miroirs, répliqua la jeune fille du tac au tac.
— Ce n'est pas drôle, Calista ! s'énerva Remus.
— Je suis on ne peut plus sérieuse.
— Tout le monde est capable de voir McLaggen dans le miroir, Calista.
— McLaggen ? McLaggen est dans un miroir ?
— Bien sûr, tu ne t'en souviens pas ?
Calista fouilla dans sa mémoire et sentit la confusion l'envahir.
— Non.
— C'était à la soirée de vendredi.
Elle réfléchit quelques instants. Elle perçus des images, comme des flash d'une mémoire qui ne lui appartiendrait pas. Elle ferma les yeux et ses sourcils se froncèrent de douleur.
— Oh.. Ça me reviens... Dans les toilettes des filles... Oui, je me souviens ! Mais je ne parlais pas de McLaggen, Rem, ce que j'ai vu, c'était différent. Enfin, je crois.
— Ne parlons pas de cela ici, tu veux. Demain ?
– Demain. Calista inspira profondément et repris : Tu es un loup-garou. Ça pour une nouvelle, c'est une nouvelle.
— Tu me hais ?
— J'ai l'air de partir en courant ?
Ils échangèrent un sourire et Calista se mit à bailler.
— Va te coucher, tu as l'air d'un cadavre.
— Sympa.
Elle se leva en lui adressant un sourire mi-figue mi-raisin.
— Hé, Calista ! Appela Lupin.
— Oui ?
— Merci.
— Y a pas de quoi, moony. Maintenant je comprends.
Calista se blotti dans son lit froid et s'endormit et se laissa glisser dans un sommeil sans rêves alors que Pomfresh revenait. Toutes les bizarreries de sa vie, tous ses ennuis seraient encore là demain.
*
— Calista, par Merlin, qui t'as fait croire que tu avais le droit de dormir jusqu'à une heure aussi indécente ! Calista, réveille-toi !
— Mère ? Sursauta la jeune fille en repoussant brusquement les draps de l'infirmerie, ses yeux bleus grands ouverts.
Walburga, la nuque raide, se tenait droite et élégante au bord de son lit. Visiblement agacée, elle haussa un sourcil devant l'air stupide qu'arborait sa fille.
— Par Merlin, qui veux tu que ce soit d'autre ? Dépêche toi de te lever. Ces procédures m'embêtent bien mais ton père n'est pas là pour régler la situation. Il faut que les aurors te voient.
En langage Black "régler la situation" désignait généralement un généreux pot de vin au ministère.
— Comment ça, "voir les aurors" ? Je n'ai rien fait, je vous le jure, Mère !
— Tu serais bien la première, grommela Walburga avant de lui raconter les déboires de ses frères.
Calista pâlit au fur et à mesure du récit de sa mère. Tout ça n'avait aucun sens. Ses mains se crispèrent sur sa robe d'hôpital.
— Conneries ! S'écria-t-elle.
— CALISTA ! S'indigna sa mère.
— Ils n'ont rien fait ! Je le sais ! Ce ne sont que des imbéciles finis !
Walburga pinça ses lèvres, visiblement il faudrait corriger le comportement de sa fille et vite. Cette dernière était bien trop émotive pour représenter la famille Black. Seulement, pour l'instant ce qui importait n'était que le fait que parmi ses enfants, elle semblait être la seule à ne pas avoir perdu la tête.
*
Face aux aurors, Calista se sentit perdre pied. Leurs questions étaient bien trop incisives, le papier peint dans leur dos bien trop orange et leurs yeux semblaient repousser les siens comme des aimants. Phalanges blanchissant sur ses genoux, elle parvenait à contrôler le tremblement de ses jambes mais les mots lui manquaient, le souffle et la salive aussi. La pièce entière semblait s'être mise à tourner alors qu'on lui demandait combien de verres avait-elle but, comment avait-elle découvert le reflet de McLaggen, et même la tenue qu'elle portait ce soir-là. En somme, n'importe quoi et rien qui ne puisse prouver l'innocence de frères. Ces aurors-là cherchaient définitivement une raison de faire tomber ses frères.
— Ils n'ont rien fait ! S'exclama-t-elle brusquement.
— Calmez vous mademoiselle, gronda un aurore d'une cinquantaine d'années.
— Ils ont quitté la soirée après moi, McLaggen l'a quitté avant moi. Ils n'ont pas pu s'en prendre à lui. Et puis je pense que vous surestimez mes frères, comment deux sorciers de respectivement treize et quatorze ans auraient pu provoquer une chose pareille.
— Vous venez d'une vieille famille de sang purs, railla une femme dont il manquait un œil. On sait tous que l'éducation aux maléfices et aux sortilèges violents va beaucoup plus vite là-bas.
— Nous ne sommes pas nos parents. Répliqua Calista.
— Bon, cela suffira pour cette fois, Miss Black , vous pouvez y aller. Soupira le vieil homme en indiquant la porte du menton.
Calista ne se fit pas prier, après un dernier coup d'œil au calepin que la femme remplissait frénétiquement, elle se précipita à l'extérieur. Elle eut comme la sensation que la pince qui gardait prisonnière sa cage thoracique venait finalement de la relâcher. Elle serra les poings, juste pour s'assurer que tout cela n'était pas un cauchemars.
— Ça a été ? Demanda une voix inquiète.
Calista sursauta, Lily se trouvait en face d'elle, appuyée contre le mur. Cette fille avait tout d'un ange, pas étonnant que James ait un faible pour elle. Ses cheveux roux, ses yeux verts, ses joues pleines et ses courbes épaisses, Calista n'aurait pas été étonnée qu'elle soit une représentante du Dieu Soleil lui-même. Cela-dit, cela aurait fait beaucoup d'annonces traumatisantes en quelques jours.
— Calista ? Tout va bien ?
La jeune serpentard s'arracha à sa contemplation.
— Oui. Enfin ! Non ! C'est compliqué...
Lily se mit à rire.
— Tu l'as dit. Je vais être intérrogée. James est passé ce matin. C'est le bazar, tu sais.. Même si on sait tous qu'ils sont innocents, cette histoires donne le cafard et beaucoup de doutes...
— Je suppose, soupira Calista. Bon courage pour ton interrogatoire. Attends toi à ce qu'il te demande ta taille de bonnet et la profondeur de ton décolleté de vendredi, apparemment ça joue dans l'affaire...
Lily lui adressa un hochement de tête avant d'entrer dans la salle de classe désaffectée empruntée par les aurors. Calista s'autorisa un soupir de lassitude. Personne ne l'attendait et Walburga devait sans doutes être déjà rentrée chez elle. Si elle devait faire un topo de ces derniers jours : elle était dans le crottin jusqu'au cou et avait sérieusement besoin d'un cachet contre cette affreuse migraine qui grignotait le peu d'esprit sain qu'il lui restait.
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