𝟿 ¦ 𝙻𝙴𝚂 𝙰𝙻𝙲𝙾𝙾𝙻𝙸𝚀𝚄𝙴𝚂 𝙰𝙽𝙾𝙽𝚈𝙼𝙴𝚂²
𝙲𝙷𝙰𝙿𝙸𝚃𝚁𝙴 𝟿
ᴘᴀʀᴛɪᴇ ⒉
Guidés par la maîtresse de maison, les deux garçons se dirigèrent vers la pièce principale du rez-de-chaussée où se déroulait le gros de la fête. Le salon, la salle à manger et la cuisine n'étaient séparés d'aucune manière que ce soit, ce qui permettait la présence d'un unique grand espace. Les murs et portes constituant les principaux adversaires des individus alcoolisés, voilà qui était fort pratique pour la bande d'adolescents en quête de liqueur ambrée. On pouvait d'ailleurs différencier deux catégories d'invités : ceux qui se trouvaient déjà dans un autre monde et ceux qui n'en étaient pas bien loin.
Mikasa conduisit directement ses deux acolytes au bar de la cuisine, où elle leur dénicha de quoi se déshydrater, sans oublier de remplacer la bouteille qu'elle venait de vider. Alors que le brun s'apprêtait à lui lancer une petite remarque sur sa consommation d'alcool, Mikasa lui mit un doigt sur la bouche avant de sortir ce qui allait devenir une autre de ses phrases cultes de la soirée.
— Ne me fais pas ton choqué, Marco. Tu es belge après tout. La bière, c'est un peu ta vierge Marie.
Tandis que le concerné dû cligner plusieurs fois des yeux pour encaisser cette remarque inattendue, Jean se tordait littéralement de rire. Cette Mikasa bourrée était vraiment plus incroyable encore que la version sobre. Alors que celle-ci s'apprêtait à ouvrir sa bouteille fraîchement acquise, une main attrapa l'objet et l'éloigna loin de son ancienne propriétaire. La japonaise lança un juron et tenta d'atteindre sa précieuse boisson, en vain. Une moue boudeuse prit place sur son visage tandis qu'elle regardait Gaito en gonflant les joues.
— Désolé Mika, mais ça commence à faire beaucoup. Ce serait bête que tu deviennes un légume, avança-t-il. Je crois qu'on a mis Panic! At The Disco sur les enceintes du salon. Enfin quelqu'un qui a un peu de culture musicale !
— Bon, d'accord.
La japonaise dégonfla ses joues, s'avouant vaincue. Elle tourna négligemment la tête et regarda fixement Jean. Pressentant qu'une nouvelle remarque fabuleuse se profilait, il redoubla d'attention. Au dernier moment, elle se tourna pourtant vers Marco.
— Marco, lui demanda-t-elle avec un grand sérieux, puis-je t'emprunter ton destrier ?
Le garçon qui venait de prendre une gorgée de sa bière manqua de s'étouffer.
— Eh bien... Je... Je suppose que oui ?
L'air enchanté, la japonaise s'adressa à sa nouvelle acquisition.
— Jean, à quatre pattes.
— Ah bon ? s'étonna celui-ci.
— Oui, affirma Mikasa. Tu es un cheval. Je suis une princesse, je veux un cheval.
Et c'est ainsi que Marco et Ito se retrouvèrent ensemble accoudés au bar, observant Mikasa partir en direction du salon sur le dos de Jean, qui n'avançait certes pas à quatre pattes, mais la situation n'en était pas moins étonnante. Et tous deux semblaient passer le moment le plus incroyable de leur vie. Sans même se consulter, les deux garçons laissés derrière prirent simultanément une grosse gorgée de leur bouteille. La soirée ne faisait pourtant que commencer, mais elle s'annonçait plus que mémorable.
— Dis-moi, Ito...
Bien qu'il n'avait pas spécialement pour habitude de s'immiscer dans la vie d'autrui, Marco ne pouvait nier une certaine curiosité quant à ce sujet. Le moment se prêtant bien à quelques petites confessions, il n'hésita que peu à poser la question qui lui brûlait la langue.
— Tu l'aimes, n'est-ce pas ?
Les yeux rivés sur le spectacle qui se déroulait devant lui, il ne put directement voir la réaction de son ami. Néanmoins, les quelques secondes de silence qui suivirent lui indiquèrent qu'il avait vu juste. Il imagina un sourire discret naître sur le visage du jeune japonais.
— Je suis si transparent ?
— Probablement un peu, tout du moins pour qui sait bien regarder.
Ito souriait légèrement, le regard toujours fixé sur Mikasa avec une tendresse évidente. Depuis son cheval ambré, celle-ci même clamait à la ronde qu'elle était la princesse de ce château et que, par conséquent, tous ses invités étaient ses sujets.
— Pourquoi ne pas lui dire ? se risqua Marco.
— Je te retourne la question, répondit son ami en riant.
Le brun haussa un sourcil, faisant mine de ne pas comprendre. L'air malicieux, Gaito désigna Jean du menton, lui signifiant par la même occasion qu'il n'était pas le seul à avoir mené ses petites déductions.
— C'est plutôt compliqué, souffla-t-il finalement.
Le japonais lui adressa un regard entendu. Le temps n'était certes pas une ressource illimitée, mais heureusement pour eux, ils en avaient encore suffisamment pour ne pas brusquer le destin. Gaito termina sa boisson et s'apprêtait à partir quand Marco l'apostropha une dernière fois.
— Tu as le droit d'être heureux, Ito.
Le susnommé eut le petit sourire désolé de celui qui s'était malgré lui fait démasqué. L'instant suivant, il s'éloignait en direction du salon au moment même où Bertholdt entrait dans la partie cuisine.
— Mikasa est déchaînée, lança-t-il à Marco en le rejoignant. J'espère qu'elle ne va pas trop t'abîmer Jean.
Le brun ria, priant également pour que la jeune fille ne commette pas trop de folies. Il doutait fortement pouvoir l'arrêter le cas échéant, et ce n'étaient certainement pas tous leurs amis alcoolisés qui viendraient l'aider.
— On dirait que cette histoire s'est mieux terminée qu'elle n'avait commencé, commenta Bertholdt.
— C'est vrai. Je n'aurais jamais pensé dire cela un jour, avoua Marco, mais je suis plutôt content que ce qui est arrivé... soit arrivé, en quelque sorte. Mikasa est enfin tranquille et je n'ai plus à m'inquiéter pour eux. Quant à Jean...
— C'est probablement lui qui en en aura tiré le plus de leçons, termina son ami dans un sourire.
Marco marqua un silence. Le châtain avait changé depuis cet épisode, c'était évident pour lui, qui passait tout son temps à ses côtés. Mais cela changeait-il vraiment quelque chose à sa propre situation ? La passion qui lui dévorait les entrailles n'avait pas faibli pour autant, continuant même de croître de jour en jour. Devrait-il vivre sous son emprise pour toujours ? En était-il seulement capable ? Le dénouement de cette histoire le satisfaisant entièrement, et pourtant, il n'était pas certain que celui-ci ait entraîné de nouvelles perspectives pour lui. À ses côtés, Bertholdt pouvait aisément deviner ce qui s'agitait dans son esprit.
— N'en soit pas si sûr, lui dit-il comme en réponse à ses pensées. Jean n'a pas terminé de nous surprendre.
Le grand brun resta énigmatique, à la manière d'un sage qui en savait un peu plus que le reste du monde. Quand bien même Bertholdt n'avait rien d'un devin, Marco ne serait guère surpris si cette affirmation se révélait véridique. Ses oreilles avaient recueillies milles confidences et ses yeux savaient apprécier les détails qui échappait au commun des mortels. Rien ne se dérobait à sa connaissance, pas même les contemplations muettes ou les doigts qui recherchaient discrètement un tissu auquel s'agripper. Marco ne prêtait guère attention à ce genre de choses, ou plutôt, il préférait se persuader de leur insignifiance. L'espoir était à ses yeux trop fragile pour l'accueillir avec une telle désinvolture.
— Tu as un drôle de pouvoir sur lui, ajouta alors Bertholdt avec une certaine admiration. Et je pense que vous en êtes tous les deux conscients, aujourd'hui. Laissons le reste à demain.
Marco ne trouva rien à y redire, se contentant de rester pensif. L'avenir n'était peut-être pas aussi figé que ce qu'il avait supposé jusqu'alors, mais il se refusa toujours d'y accorder trop d'importance.
— Tu n'aurais pas vu Pieck ? demanda-t-il soudain à son ami, désirant à la fois connaître la réponse et changer de sujet.
— Probablement dans le jardin. Elle n'aime pas trop l'agitation en début de soirée.
Marco le remercia et entreprit de chercher Jean pour mener à bien leur petite mission ensemble. Il le trouva finalement sur le canapé, le visage recouvert d'un masque pour la peau. Juste à côté, Mikasa remarqua sa présence.
— Je prend soin de lui, tu vois ?
— En effet, pouffa-t-il. Je peux te l'emprunter un instant ?
La jeune fille sembla considérer sa demande avec un grand sérieux, posant le pour et le contre.
— D'accord, décida-t-elle. Mais seulement si tu me laisses te mettre de l'eyeliner.
Le garçon céda, trop effrayé par cette version de Mikasa pour pouvoir décemment lui tenir tête. Soulevant une rondelle de concombre qui recouvrait ses yeux, Jean observa la japonaise appliquer un trait noir au-dessus des yeux de son ami qui s'efforçait de ne pas froncer le nez. Une fois sa maquilleuse satisfaite, il put repartir en récupérant le châtain, non sans avoir promis de le lui ramener au plus tôt.
— Pieck est dehors, lui fit-il savoir.
Un peu perdu dans ses pensées, Jean acquiesça vaguement. Ils trouvèrent bien la jeune fille dehors, seulement un léger problème s'imposait : elle dormait. Habitué à réveiller les gros dormeurs en douceur, Marco l'appela jusqu'à ce qu'elle ouvre des yeux fatigués.
— Merde, grommela-t-elle, j'ai loupé la nouvelle année ?
— Pas du tout, la rassura le brun. Annie nous a rapporté que tu t'intéressait au tarot, alors on se demandait si tu pouvait nous éclairer sur cette carte.
Il sortit son collier qui se cachait sous sa chemise sombre et lui tendit pour qu'elle puisse y jeter un coup d'œil.
— Oh, l'Étoile. Très bon choix.
Pieck bailla, se redressa en tailleurs et entreprit finalement de leur donner l'explication qu'ils attendaient.
— Déjà, il vous faut comprendre que le tarot s'entend généralement comme une forme de divination qui consiste à tirer les cartes. Celles-ci peuvent être interprétées en fonction de la nature ou de l'ordre du tirage. Dans ce cas présent, il n'y a pas du tout eu de tirage, donc les significations peuvent s'avérer contradictoires. Ceci dit, on parle d'un bijou, alors je pense qu'on peut s'en tenir à une interprétation simple à l'endroit.
Les deux garçons se lancèrent un regard, soulagé de voir que la jeune fille était capable de leur donner une interprétation claire. Leurs recherches sur Internet avait pu leur donner un avant goût de cette pratique décidément plus complexe qu'elle n'y paraît.
— L'Étoile est une carte très positive, les rassura Pieck. Elle incarne l'inspiration, la joie, l'espoir et la tranquillité. Dans le tarot de Marseille, l'Étoile arrive derrière la Tour, aussi appelée la Maison de Dieu. Je vous passe les détails, mais celle-ci est beaucoup moins chouette : chaos et destruction au rendez-vous. L'Étoile apparaît comme une lueur dans le ciel qui nous encourage à ne jamais perdre espoir. Dans un tirage, elle indique le retour de l'optimisme et de la stabilité après une période trouble. C'est le moment de croire en de nouvelles possibilités.
Marco écouta religieusement. A priori, tout ceci paraissait très bon signe. Il ne savait toujours pas d'où provenait ce bijou, mais au moins, il ne portait pas à son coup un synonyme d'horreur ou de désespoir.
— Si cela ne t'embête pas, l'interrogea Pieck, je peux te demander en quelles circonstances tu as reçu ce pendentif ?
— C'est un peu compliqué. Je l'ai récupéré par hasard, indiqua-t-il. Mais je pense qu'il a été offert en cadeau, il y a longtemps.
La jeune fille réfléchit un instant.
— Dans un tirage amoureux, l'Étoile représente une union heureuse et harmonique. C'est le signe d'un nouveau départ après une période difficile. Elle invite à s'accepter soi-même et à communiquer avec franchise et bienveillance pour aller de l'avant. Si c'était un cadeau, je pense qu'on peut aussi en tirer ces conclusions.
Marco avait bien évidement pensé à cette possibilité qui s'avérait la plus probable, mais quelque chose l'empêchait d'affirmer avec certitude que cette interprétation devait être retenue. Il avait trouvé l'écrin dans sa chambre, où peu de personnes pouvait pénétrer. Naturellement, au vu de l'usure du bijou, il avait songé en premier lieu à ses parents et plus particulièrement à son père. Seulement, si c'était bien lui, pourquoi le lui aurait-il déposé sans une seule explication ? Il n'avait jamais vu sa mère porter un collier de ce genre autour du coup et supposait même que ce n'était certainement pas un objet qu'elle apprécierait. Dans ce cas, d'où provenait-il vraiment ? Voilà un mystère qui perdurait malgré ses tentatives de le résoudre.
— Je n'aime pas trop vous dire ça, ajouta alors Pieck, mais il ne faut pas non plus négliger que beaucoup achètent des objets sans pour autant toujours connaître leur symbolique ou même s'en soucier. Après tout, les cartes de tarot sont jolies, alors je ne peux pas vraiment en vouloir à la société de consommation.
Après l'avoir remercié, les deux garçons prirent finalement congé de la jeune fille qui retourna se coucher à la belle étoile.
— Tu en penses quoi ? demanda Jean alors qu'il rentraient à l'intérieur.
— Que j'ai besoin d'un verre, souffla Marco en réponse.
Son ami adhéra rapidement à cette idée. Un voile obscur reposait encore sur l'énigme du pendentif et Marco se demanda comment il allait bien pouvoir le lever. Une discussion avec son paternel devenait de plus en plus inévitable, mais il n'avait guère envie de songer à cela en ce nouvel an. Remettant sa réflexion à plus tard, il entraîna Jean à sa suite dans le salon avec la ferme intention de s'amuser. Le reste pourrait bien attendre l'année prochaine.
𝟸𝟷𝟿𝟾 ᴍᴏᴛs
ᴀ̀ sᴜɪᴠʀᴇ...
𝘶𝘯 𝘱𝘦𝘶 𝘥'𝘩𝘶𝘮𝘰𝘶𝘳, 𝘥'𝘢𝘮𝘰𝘶𝘳,
𝘥𝘦 𝘵𝘢𝘳𝘰𝘵 𝘦𝘵 𝘥𝘦 𝘮𝘺𝘴𝘵𝘦̀𝘳𝘦.
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