𝟸 ¦ 𝙳𝙾𝚄𝙲𝙴𝚁𝙴𝚄𝚂𝙴 𝙸𝙻𝙻𝚄𝚂𝙸𝙾𝙽¹
𝙲𝙷𝙰𝙿𝙸𝚃𝚁𝙴 𝟸
ᴘᴀʀᴛɪᴇ ⒈
« J'étais si près de toi que
j'ai froid près des autres. »
— Pᴀᴜʟ Éʟᴜᴀʀᴅ
Mɪ-Oᴄᴛᴏʙʀᴇ
Marco se réveilla difficilement. Sa chambre était plongée dans le noir, et pourtant son insuportable réveil venait bel et bien de sonner. Cherchant à tâtons le maudit objet afin de l'éteindre et de s'informer de l'heure, il grogna en remarquant qu'il était déjà temps de se lever. À cette période de l'année, le soleil se faisait bien long à se montrer. Le garçon soupira, tout en se massant les tempes. Tout au long de la nuit, il n'avait fait que rêver et se réveiller, avant de recommencer. S'il appréciait l'immagination débordante dont il était doté, il venait à la détester par moment.
Tout en se dirigeant vers la salle de bain, il attrapa des vêtements qui traînaient là sans réellement prêter attention à ce qu'il avait pris. Il réalisa après sa douche que la pile était constituée d'une chaussette probablement sale, d'un pantalon rouge et de trois tshirts dont il ignorait l'existence. Après avoir dégoté un caleçon dans un tiroir et un sweet noir sur sa chaise de bureau, il pût enfin s'habiller. Alors qu'il quittait la salle de bain, le miroir lui renvoya son reflet, et il remarqua en baillant qu'il avait l'air exténué — chose qui était vraie. Il se passa rageusement de l'eau froide sur le visage, avant de claquer ses mains sur ses joues.
— Allez Marco, ordonna-t-il à son pâle reflet, reprends-toi bon sang.
Dire qu'il vivait mal la situation était un euphémisme. Il n'en dormait pas la nuit, rêvant encore et encore du moment où Jean lui avait dit ces quelques mots. Chaque seconde passée depuis avait été marquée au fer rouge sur son cœur fragile. Il ne supportait pas les mots qui se répétaient dans son esprit, il ne supportait pas cette révélation qui hantait ses nuits.
Le matin même, Jean s'était rendu au lycée étonnamment tôt et avec un enthousiasme non dissimulé. Celui-ci avait fait un signe à Marco, levant les deux pouces en l'air, avant d'aller à la rencontre de sa désormais petite-amie. S'il n'arrivait pas tant à y croire depuis que son ami le lui avait annoncé, il fut frappé de plein fouet par cette réalité improbable. Depuis deux semaines, les deux jeunes gens s'affichaient ensemble. Tout le monde avait été surpris de cette proximité soudainement acceptée par Mikasa. Les déclarations vaines mais nombreuses de Jean n'étaient un secret pour personne, elles constituaient même un drôle de spectacle que certains se plaisaient à observer. Mais la vue des deux adolescents et de leurs doigts entremêlés constituait désormais un tout nouveau sujet de rumeurs. Jean et Mikasa sortaient ensemble, pouvait-on entendre murmurer à leur passage.
Marco savait qu'il n'avait aucun droit de propriété quelconque sur son ami. Il en était terriblement amoureux, mais avait bien trop peur de le lui avouer. Il avait toujours su que Jean aurait des amours autre que celui dont il rêvait, il n'était pas fou. L'attirance que celui-ci éprouvait pour Mikasa était certes douloureuse, mais savoir qu'il n'était pas réciproque était presque un soulagement pour le garçon : ainsi, l'objet de son désir restait seul. Marco n'était pas sans ignorer que le voir en la compagnie d'un autre lui ferait énormément de peine, l'obsession de son ami pour la jeune japonaise lui profitait donc, dans un sens. Mais jamais, au grand jamais, il n'aurait pu penser que cette dernière accepterait un jour ses avances.
Mikasa avait toujours rejeté Jean, alors pourquoi aurait-elle changé d'avis si subitement ? Marco avait beau se démener, retourner cette question dans tous les sens, il ne comprenait décidément pas. C'était tout simplement impossible et insensé, il n'y avait aucune logique dans cette relation. Toutes ces contradictions lui donnaient mal à la tête, mais cette douleur n'était rien face à celle qu'il ressentait au niveau de son coeur. C'était comme si quelque chose était tombé dans son être. Quelque chose d'important, qui s'était brutalement brisé dans un sanglot déchirant.
Le soir, il rentrait seul. Ne prenant pas la peine de saluer ses géniteurs, il montait directement dans sa chambre et claquait systématiquement la porte sans même s'en rendre compte. Il se laissait tomber sur le lit, et restait parfois sans bouger, à contempler son plafond blanc. Il loupait certains repas, oubliant simplement de les prendre ou n'ayant pas faim la plupart du temps. Ses yeux étaient fixés sur un point inaccessible, mais son esprit tournait en rond, comme un lion en cage, cherchant désespérément la clé qui le libérerait. Il avait toujours eu besoin de trouver une justification à toute chose, mais maintenant plus que jamais, il avait besoin d'une réponse.
Habituellement, les deux amis se retrouvaient toujours le week-end. Pour faire toutes sortes de choses, parfois même rien en particulier. Le simple fait d'être ensemble était suffisant, c'était devenu à la longue une parfaite normalité de leur quotidien. Ils ne passaient jamais plus de quelques heures éloignés, et ne s'étaient pour autant jamais lassé l'un de l'autre. Ils étaient ainsi, depuis des années. Mais le samedi qui avait suivit le début de sa relation, Jean était sorti avec Mikasa. Le brun s'en était douté, c'était un comportement parfaitement logique, néanmoins il avait tout de même ressenti un pincement au coeur. Le dimanche, il était venu chez Marco, et n'avait fait que parler de cette fameuse journée. À partir de ce moment-là, il réalisa de plus en plus de choses.
Il découvrait qu'il était encore loin de se douter de l'importance qu'avait Jean dans sa vie. Le week-end qui avait suivi, il avait décliné poliment les invitations de son ami, prétextant des devoirs à finir, des livres à acheter, et un tas d'autres choses qu'il n'avait de toute manière pas prévu de faire. La lâcheté dont il avait fait preuve le dégoutait au plus haut point, mais il n'aurait pas pu supporter de rester avec le garçon qu'il aimait, tout en l'entendant parler d'une autre. Rien que le fait de ne pas le voir pendant deux jours arrivait à lui mettre le moral à néant. C'était avec un rire jaune qu'il se traitait de pathétique garçon amoureux devant son miroir.
Ses deux géniteurs ne s'inquiétèrent pas tellement de l'état de leur fils. Ils n'étaient pas du genre à poser des questions indiscrètes, c'était l'une de leur qualité comme leur pire défaut. Ceux-ci lui firent même part de leur prochain voyage qu'ils étaient déjà en train de planifier, et qui se déroulerait dans quelques semaines. Ils ne prêtèrent pas attention à l'inintérêt du plus jeune, qui sortit de table, son assiette à peine entamée. Aucun d'eux ne fit de remarque, et c'était tant mieux, car il n'avait pas le courage de se prendre la tête avec ces personnes-là en particulier. Au moins, avec de tels parents, il n'avait pas à se justifier de ses actes, étant donné qu'ils s'en fichaient éperdument.
C'est pourquoi Marco fut extrêmement surprit lorsque son paternel entra dans sa chambre, un soir, avec une drôle d'expression sur le visage. Il demanda la permission de s'assoir, et son fils acquiesça, curieux malgré lui de comprendre les raisons de sa présence ici. La situation devint rapidement très gênante, et fort étrange, marquée par un silence de plomb. Le garçon nota que Gabriel était quelque peu mal à l'aise : il jouait inconsciemment avec ses doigts qu'il observait avec une drôle de fascination soudaine. Au bout de plusieurs secondes qui parûrent semblables à une éternité, l'adulte prit enfin la parole.
— Tu vas bien ?
Marco crut s'étouffer avec l'air qu'il respirait tant la question était hors de contexte. C'était une phrase que certains entendaient probablement de façon quotidienne, surtout venant de leurs parents, mais ses parents à lui étaient loin de se préoccuper de ce genre de détails. Il se demanda ce qui pouvait bien pousser son père à venir discuter avec lui, et plus étrange encore, à lui demander comment se portait-il. Le garçon fut tellement occupé à analyser ce qui se déroulait sous ses yeux qu'il n'était pas sûr d'avoir répondu à la question posée. Il se contenta juste de rester là, les bras ballants, ses sourcils froncés trahissant son incompréhension. Lorsque son paternel releva la tête et croisa le regard de son garçon, il eut un étrange sourire. Lentement, il approcha son bras et le posa sur l'épaule de son vis-à-vis, la tapotant maladroitement. Il se leva enfin du lit, et quitta la pièce sans un mot.
Et même si cela n'avait aucun sens pour lui, Marco avait l'impression d'avoir eu en face de lui un homme profondément triste.
𝟷𝟺𝟸𝟷 ᴍᴏᴛs
ᴀ̀ sᴜɪᴠʀᴇ...
𝘥𝘰𝘶𝘤𝘦𝘳𝘦𝘶𝘹, 𝘥𝘰𝘶𝘤𝘦𝘳𝘦𝘶𝘴𝘦 𝘢𝘥𝘫.
𝘥'𝘶𝘯𝘦 𝘥𝘰𝘶𝘤𝘦𝘶𝘳 𝘧𝘢𝘥𝘦 𝘦𝘵 𝘥𝘦́𝘴𝘢𝘨𝘳𝘦́𝘢𝘣𝘭𝘦.
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