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L'être humain pouvait être décevant. Il l'était, c'était probablement un trait de caractère dans son existence. Et ça avait déçue Eve plus qu'elle ne le pensait. Des déceptions arrivaient, des erreurs également. Et elle aurait sincèrement espéré que le dossier de son frère soit une terrible erreur.

La brune n'avait jamais été friande des Brigades Spéciales mais là, dans ces conditions, sa haine s'était empirée. Terriblement empirée. L'espoir qu'elle avait gardé venait de s'effondrer dans cette nuit, réduisant son cœur en bouillit. Une bouillit sombre, piétinée par des milliers de poids. Dont le poids de la culpabilité. Certes, ce n'était pas le poids de la mort mais celui de l'oubli. Culpabiliser d'avoir oublier des choses importantes, trop importantes pour être laisser de côté. Et pourtant, sans aucune preuve à proprement parler, elle ne pouvait rien faire. Rien dire. Et surtout, ne pas réagir à ce meurtre. Cet assassinat, parce que c'était un assassinat. Parce que, la soldate en était désormais sûre, c'était les Brigades Spéciales qui avaient achevé son frère. Et elle, par la même occasion. Si cette affaire n'était pas remonté au tribunal des armées, c'était uniquement car elle avait été étouffée par des hauts placés. Que Daris Zackley soit son parrain ou non, ça ne changeait rien.

Trouver des preuves, épier des faits et gestes, consacrer sa vie à une découverte. C'était tout ce qu'elle faisait, elle, une victime de la vie. Et ça la brisait de penser comme ça mais ce n'était plus que l'esclave de la vérité. De la triste et dure réalité de ce monde nébuleux.

- Eve ? T'en tires une de ces gueules pour quelqu'un qui était contente d'enseigner. Fit Shardiz qui se tenait dans le coin de la porte, observant sa protégée.

- Hm, juste un dossier qui me froisse. Répliqua-t-elle en se passant les mains sur le visage puis bascula sa tête en arrière. Keith entra dans le bureau, se posant sur un des fauteuils afin d'écouter ce qui la tracassait.

- Lequel ? Celui que tu as demandé à Smith ? La brune plongea un instant ses perles grises dans le regard de son aîné.

- Comment tu sais ça ? Levi te l'a dit ?

- Levi ? Tu déconnes, ce mec est plus muet qu'une tombe. Non, il est bien trop discret pour venir me dire quelque chose sur toi. Et il n'a pas l'air du genre à fouiner si tu vois ce que je veux dire.

- C'est vrai, si y'a bien une chose que j'apprécie chez lui : c'est le fait de garder correctement les informations. Ce n'est pas le genre à répéter ce qu'il sait même sous une emprise puissante.

- Sous la torture, tu veux dire. Ricana Keith en prononçant le fond de pensées de la cadette. Elle haussa un instant les épaules en frissonnant. C'est Smith qui me l'a dit. Faut croire qu'il t'apprécie bien, à tel point qu'il commence à me confier ce que tu fais.

- Quelle balance ce Major... Il t'a dit ce que ça concernait ?

- Non, pas à ce point. Il m'a juste dit qu'il devait te confier un dossier que tu lui avais demandé. Tu sais, s'il m'en a parlé c'est que ça doit l'inquiéter un minimum.

- Erwin me voit comme un avantage, une soldate expérimentée, pas une amie. On aura beau dire ce qu'on veut, je suis utile dans son propre intérêt. Et même si je le considère comme une bonne personne, c'est un fait. Je ne suis qu'un pion sur son plateau d'échec, un pari.

- Eve. Tous les soldats qu'ils engagent et qui rejoignent le Bataillon sont des paris. Tu auras beau le nier autant que tu veux, vous êtes tous des pions à ses yeux. Vous avez tous un intérêt pour sa propre bataille, certains ont juste des intérêts plus forts que d'autres. Même si vous êtes des pions, vous êtes des pions qu'ils affectionnent particulièrement. Levi, Hange et toi. Il ne faut pas être né de la dernière pluie pour le remarquer. Vous êtes des pions qu'il entraînera dans sa chute, peut-être, mais aussi des pions qu'il soutiendra quand les autres pièces se retourneront contre lui. Tu vois ce que je veux dire, n'est-ce pas ?

- Qu'on est tous fous pour avoir accepté d'être des pièces d'un jeu d'échec.

- Mais pas que. Vous êtes fous pour avoir accepté ce danger mais que dans le monde de l'armée, avoir des intérêts et les trouver dans certaines personnes sont des choses importantes. Néanmoins, ce n'est pas parce qu'on a des intérêts que nous ne pouvons pas être ami avec eux.

- Dans ce cas-là, c'est de l'hypocrisie.

- Non puisqu'il soutient ses pions les plus précieux. Et manifestement, tu en fais partie.

- Il m'épuise, je ne sais vraiment pas quoi penser de lui parfois.

- Aie confiance en lui, il ne m'a jamais déçu alors je doute qu'il commence à décevoir les gens. Keith et Eve sursautèrent en se tournant vers la porte pour remarquer le nouvel arrivant : Levi.

- Discret comme un chat, lui. Soupira Keith en portant une main à son cœur dût à la frayeur.

- Il vous a payé tous les deux pour que vous parlez comme ça de lui en son absence ? Fit-elle en ricanant.

- Il le devrait, une prime ne ferait pas de mal à mon salaire. Répliqua le noiraud en s'invitant dans le bureau à son tour.

- Fais comme chez toi, je ne te dirai rien...

- Si t'insistes, un thé noir ne serait pas de refus. Commanda le Caporal en croisant les jambes.

- T'as des jambes fonctionnelles, tu te lèves pour te servir comme tout le monde. Râla le plus âgé avec un rictus. Eve regarda la bataille des regards noirs entre les deux hommes avant de souffler de fatigue.

- Tu n'avais pas des choses à faire, Levi ? Que Keith soit là, je le comprend vu comment on est proche et puisqu'on est collègues. Mais toi... Ça me surprend que tu te ramènes sans qu'Hange ne te l'ai demandé. Fit-elle en haussant un sourcil sceptique face à sa venue. Honnêtement, ça la touchait un tant soit peu qu'il vienne la voir sans de raison particulière. Enfin, si c'était le cas.

- J'ai trouvé une de tes plantes, là. Et j'ai un service à te demander avec.

- Les intérêts. Pouffa Shardiz avant de se lever sans le regard intrigué de sa cadette.

- Tu vas où ?

- Faire mon taff : terroriser les petits pour qu'ils rentrent au bercail avant que ça ne soit trop tard pour eux. Oublies pas, t'as les visites médicales dans l'après-midi. Sur ces paroles, le sergent quitta le bureau non sans un signe de main. Levi souffla avant d'observer la plus jeune.

- Vous êtes proches. Comme un père avec sa fille, c'en est presque troublant.

- Disons que j'ai pas mal de figure paternel.

- Ah ? Depuis quand ?

- Longtemps. Depuis la mort de mon frère, j'imagine.

- Je croyais que tu t'entendais bien avec tes parents, ce n'est plus le cas ?

- Si. Enfin, c'est un peu compliqué. Quand j'étais plus jeune, j'imagine que ça allait très bien. Mais la mort d'un enfant change les parents. C'est un fait que personne ne peut contrer. Et lorsqu'on se retrouve seule du jour au lendemain, j'imagine que ça change aussi une personne. Je ne dis pas que je suis malchanceuse, j'ai de la chance d'avoir des parents qui ont été là pour moi. Peut-être pas dans tous les moments que j'aurai voulu mais ils étaient là même si ce n'était pas forcément au bon moment.

- Des figures parentales fantômes, surtout.

- Non, je ne pense pas que ce soit à ce point. Mais disons qu'à l'époque à laquelle on vit, avoir un fils est mieux qu'avoir une fille. Alors perdre le seul fils que nous avons peut emmener une haine envers notre fille. Un ressentiment et un jugement. "Pourquoi c'est mon fils qu'on a pris ? Ma fille aurait dû être à sa place.", c'est sûrement ce qu'on pense après ce genre d'évènements.

- Mais vous étiez tous les deux ses enfants, Eve. Ce genre de chose ne se font pas.

- Levi, tu es enfant unique, j'imagine ?

- Ouais mais je ne vois pas le rapport. Si j'ai des gosses, je ne vais pas les traiter différemment à cause de leur sexe. Surtout sous le prétexte que le sexe féminin est inférieur au sexe masculin. Eve lui fit un petit sourire avant de regarder le plafond pour empêcher des larmes de couler.

- Les différences existent dans les familles, entre les enfants. Tu sais, comme le petit dernier et l'enfant du milieu. Les traitements ne sont jamais les mêmes. Jamais.

- Si ton père t'a négligé, c'est son problème. Honnêtement, je ne pense pas qu'un enfant mérite d'être mis à l'écart juste à cause d'un évènement tragique. Lorsqu'il verra à quel point tu excelles, il le regrettera assurément.

- Peut-être, Levi. Peut-être. La soldate passa rapidement sa main devant ses yeux avant de lui sourire tendrement. Bon, racontes moi ce qui te ramène. Et donne moi cette plante, je suis curieuse maintenant. Levi lui tendit plusieurs fleurs de la même origine : tige verte, pétale fine et rouge tendant vers le rose. Elle le porta à son nez et sembla s'émerveiller.

- Alors ?

- C'est de la valériane ! Levi, t'es un ange ! Je cherchais cette plante depuis longtemps sur le marché mais personne n'en vendait. Elles sont super dures à obtenir, comment t'as fais ?! Je t'en supplie, donnes moi ce contact. La valériane est super utile dans le médical. S'extasia Eve en observant la plante sous toutes ses coutures.

- Secret. Mais y'a moyen tu fasses un petit truc avec pour les insomnies ?

- Bien-sûr ! Cette plante est faite pour ! Tu veux des gélules ou des infusions ? Ah, ce sont des insomnies récurrentes ou non ? Tu veux un effet immédiat ou pas ?

- Ce qui est le plus efficace tant que je peux m'endormir avec.

- Hm dans ce cas, je devrai plutôt opter pour des gélules au houblon et à la valériane. Si avec ça les insomnies ne sont pas réglées, c'est que tu es super résistant.

- Je me lèverai pas pendant la nuit ?

- J'en doute fortement. Je vais te mettre une petite dose si tu dois te lever tôt le matin. Mais si tu as des permissions et que tu veux dormir la matinée, je t'en ferai des plus fortes si ça te convient ?

- Ça me va, je peux les récupérer quand ?

- Si je bosse la nuit dessus, je dirai dans la matinée demain. Sinon, d'ici une semaine, c'est comme tu le veux.

- Tu n'as pas dormi cette nuit, t'es sûre que ça sera suffisant si tu le fais cette nuit ?

- J'aime bien être distraite et active. Mais je prends en compte que tu t'inquiètes pour moi. Répliqua Eve dans un rire.

- Tes rêves ne peuvent pas devenir réels, désolé.

- Rude.

- Eve, ne t'épuises pas trop ceci dit.

- Jamais, mon Caporal. Levi leva les yeux au ciel en entendant son grade et rappliqua.

- C'est un ordre, cadette. Eve fit le salut provoquant un ricanement de son homologue.

- Files, j'ai du pain sur la planche et des recrues à examiner.

- Je repasserai. Alors qu'il s'apprêtait à partir, il se retourna un instant vers elle. Aie confiance en Erwin, ce n'est pas une mauvaise personne. Peu importe ses intérêts.

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je suis pas sûre de pouvoir poster jeudi mais pas grave mdrr 🐰