𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐕𝐈𝐈
— S O U S L E S C A R T E S —
郷に入っては郷に従
LA PLAINE EST VASTE et doucement illuminée en cette aube naissante. L’herbe verte et chatoyante se voit colorée du ciel rosé de cette belle matinée. Autour de nous, elle s’étend à perte de vue. Ce point de l’île représente l’endroit-clé pour des entrainements.
D’après Olympe, Shanks a précisément choisi d’aborder ici pour cette raison. Elle serait allée le voir en lui expliquant la nécessité que je m’entraine avant de reprendre la mer, histoire de pouvoir prêter main forte à son équipage mais aussi tenir tête au Serpent et il a alors fait le choix de s’orienter ici.
En toute honnêteté, je ne lui pardonne pas son comportement particulièrement rustre d’hier. Sa façon de me saisir, me jeter par-dessus son épaule tel un sac avant de me lâcher au sol était non seulement déconvenue mais aussi très peu respectueuse.
Enfin, si je dois être tout à fait sincère avec moi-même, ce qui me pèse vraiment sur le cœur est le passage où il a insinué qu’il ne pourrait jamais me désirer comme les autres femmes.
Sans doute existe-t-il plus belle que moi, je n’en disconviens pas et m’en fiche honnêtement. Mais de là à ne même pas me remarquer…
…Je trouve cela vexant.
— C’est pas en restant dans la lune que vous vous améliorerez, Imperecea.
La voix d’Edward me tire de mes pensées. Les bras croisés à hauteur de sa poitrine, ses cheveux blonds amassés en leur habituel chignon emmêlé, il me fixe depuis l’arbre sur lequel il est perché.
La plaine, quoi que vaste, n’est pas régulière. Il ne s’agit pas d’un grand terrain sans obstacle. Par endroit, des buissons, arbres sont visibles. Mais ils sont tous trop éloignés les uns des autres pour pouvoir former réellement une forêt.
Olympe, par exemple, est située au pied du chêne le plus proche de celui-ci sous lequel je suis et où le blond est assis. Mais elle est tout de même si éloignée que je ne parviens pas à voir les détails de son visage.
Plusieurs dizaines de mètres nous séparent.
— Oui ! Pardon ! je lance tout de suite en me reconcentrant. Qu’est-ce que je dois faire ?
Le blond soupire. De toute évidence, il m’a déjà expliqué la consigne sans que je n’écoute un traire mot de ses paroles.
— On va commencer la téléportation sur une petite distance. Je veux que vous rejoigniez Olympe.
— Et comment je fais ça ? je réponds en jaugeant l’écart entre moi et la jeune femme. Juste en disant la formule magique ?
— La « formule » est un catalyseur.
Je lève la tête pour observer le blond. Accroupi en équilibre sur une branche, il affute la lame de sa dague avec attention sans me jeter le moindre regard. Il n’en a pas besoin, l’exercice n’a pas encore commencé.
— Lorsqu’on se téléporte, on traverse forcément le Silence. Tout à l’heure, quand Olympe s’est déplacée d’ici à l’arbre, elle a pas réellement bougé son corps d’ici à l’arbre. En fait, elle est sortie de ce monde en entrant dans le Silence puis ai ressorti du Silence pile à l’endroit où elle est maintenant.
Mes sourcils se froncent.
— Donc…, je tente. En d’autres termes, à chaque téléportation, on sort de là où on est pour aller dans le Silence ?
— Exactement.
Je pose à nouveau les yeux sur Olympe qui s’est à présent assise et a sorti un livre. Elle a sans doute deviné que cet exercice me prendrait un peu de temps.
— Le Silence est chargé d’énergies. La formule « silence, je ne parle pas » est donc un catalyseur, ça nous évite d’être emporté par un tas d’énergie.
— Et donc ?
— Et donc ce n’est pas le fait de prononcer cette phrase qui nous fait nous téléporter. On peut très bien le faire sans parler ni bouger les mains, contrairement à ce qu’il se raconte sur Grand Line. C’est juste que le geste et la formule nous permettent d’êtres guidés, poursuit Edward. Les mondes sont vastes, mieux vaut être très précis quand on se déplace entre eux.
— Mais alors comment je fais ?
Si le fait de croiser ses doigts à hauteur de sa bouche tout en murmurant une formule magique n’est pas la clé pour se téléporter, alors qu’elle est-elle ? Je sens que cette affaire ne va pas être des plus aisées.
— Aucune idée.
Mes yeux s’écarquillent. Ai-je bien entendu ? Edward est un Voyageur, un être capable de se téléporter, dernièrement je l’ai même vu apparaitre magiquement sur un bateau en mouvement ce qui signifie qu’il est capable de grande précision et, en plus, il est membre du Cercle Impérial à savoir un groupe réunissant les plus forts Voyageurs et monsieur ne sait pas comment il fait ?
Non seulement ceci est fort de café mais je n’oublie pas la façon qu’il a eu de me tirer de mon lit aux aurores pour m’entrainer, d’autant plus qu’il m’a alors certifié qu’il était nécessaire qu’il soit très tôt pour que ses leçons fructifient.
— Je peux savoir de quelles leçons tu parlais, tout à l’heure ? je grogne en levant les yeux vers lui.
— Je peux vous apprendre à ne pas vous perdre mais sûrement pas à vous téléporter. Vous deviez vous lever tôt car il faut le temps que vous appreniez à vous téléporter avant qu’on attaque les vraies leçons.
— Ah parce que se téléporter c’est pas le seul truc à savoir !? je m’exclame en écarquillant les yeux.
— Pas du tout, répond-t-il d’un ton morne sans me regarder. En fait c’est même censé être inné, c’est pour ça que j’ai pas de cours à vous donner.
Mon cœur rate quelques pulsations. Comment ça…inné ? Moi, soi-disant cheffe des Voyageurs, Imperecea, censée les guider et les protéger, je ne suis pas foutu de maitriser une forme de déplacement censée couler dans nos veines ?
Un doute profond s’empare soudain de moi ainsi qu’un sentiment de vide. Il doit y avoir une erreur. Je ne peux pas être leur Impératrice si je suis mille fois moins douée que n’importe quelle personne issue de notre peuple.
C’est purement impossible.
— Nous avons toute la journée devant nous, Imperecea, lance Edward. Prenez votre temps.
Mes yeux se portent sur le chêne, devant moi. Il semble si près mais si loin en même temps. Une dizaine de secondes me suffirait sans doute à le rejoindre si je courais. Mais là est le problème. Je ne dois pas bouger. Même pas d’un poil.
Tout cela me semble honnêtement impossible.
Mais il faut que je me reprenne. Je n’y arriverai pas si je n’essaye même pas. Soit, aucun mode d’emploi ne m’est laissé. Cependant, cela ne doit pas être bien compliqué si des millions ou milliards d’individus sont capables de faire la même chose de façon naturelle, sans même y réfléchir.
Mes yeux se posent donc sur ce chêne. Depuis ma position, il semble petit. Son tronc brun est particulièrement sombre sous cette aube naissante. Les feuilles nombreuses aussi tirent sur le vert foncé, frémissant sous la délicate brise de cette fraiche matinée. Là est mon objectif, en cet arbre majestueux sous lequel lit Olympe.
Là, non loin d’ici. Je peux le faire. Je sais que je peux le faire. Car eux-mêmes l’ont fait. Car j’ai parcouru une distance bien plus grande avant d’arriver ici. D’une bibliothèque ancienne à Grand Line, plusieurs années lumières nous séparent. Même plus, un océan de néant infini s’étend. Le Silence.
Oui. J’ai déjà franchi le Silence une fois. Je peux le refaire.
— Silence.
Une grande inspiration me prend. Je ramène mes doigts à hauteur de ma bouche, les croisant.
Le chêne est dans mon esprit. Je ne pense plus à rien. Seul lui existe. Je veux y aller. Je dois y aller. Il est mon objectif.
Je vais l’atteindre.
— Je ne parle pas.
Un léger vent soulève mes vêtements et un sourire étire mon visage. En toute hâte, j’ouvre les yeux, prête à voir Olympe, juste devant mes jambes.
Alors ma déception est grande quand je la revois, en effet, mais aussi loin de moi que tout à l’heure et toujours le nez dans son bouquin. Le chêne aussi n’a pas bougé. Ou plutôt, je n’ai pas bougé.
Un faible rire retentit au-dessus de moi. Edward.
— Soyez pas déçue. Soit, tout le monde réussi du premier coup mais généralement notre premier coup intervient bien plus tôt. Vous devez apprendre ce qui est un réflexe chez nous tous. C’est pas facile.
— Effectivement, je gronde, mes yeux toujours rivés au loin.
Ce maudit chêne… Comment n’ai-je pas pu y arriver !? Je veux dire, je me suis concentrée, ai dirigé la moindre de mes pensées sur lui, n’ai laissé que cet arbre dans mon esprit… Que puis-je changer ? Qu’ai-je mal fait ?
Cependant, Edward dit vrai. Ce n’était qu’une première fois, réussir aurait été un fabuleux coup de chance. Tout de même, je suis assez vexée.
Mais qu’importe, j’ai toute la journée pour m’entrainer. Et je suis convaincu qu’avant midi, je serais déjà capable de me rendre à l’auberge où nous logeons sans lever le petit doigt.
Tout n’est qu’une question de patience.
ꕥ
Bordel de merde, je vais finir par casser quelque chose.
Douze heures. Cela fait douze putains d’heures que je suis coincée ici. Lorsque je suis arrivée sur cette plaine, je l’ai d’abord trouvée douce et attrayante, calmante. Maintenant, ce paysage me sort par les yeux.
Je l’ai vu sous toutes ses coutures. Sous le soleil naissant du matin, celui tapant de midi et, finalement, en plein dans son coucher, tandis que les lueurs orangées dominent ce lieu. Je n’en peux plus. Vraiment. Il me sort par les yeux.
Edward et Olympe sont rentrés, souhaitant manger. Ils m’ont proposé de les suivre mais j’ai refusé, frustrée.
Je ne suis même pas parvenu à bouger d’un maudit pas depuis ce matin. Le geste et la formule, je les ai tant répétés que mes bras me font mal ainsi que ma mâchoire. Tout cela. Sans succès.
Je suis toujours à la même place.
— Un problème, trésor ?
Mes muscles se raidissent et mes yeux s’écarquillent. Pitié dites-moi que ce n’est pas vrai. De toutes les interventions, celle-ci est définitivement celle dont j’ai le moins besoin et le moins envie. Se démerder seule et foirer est déjà humiliant, avec un public l’est d’autant plus mais si en plus ce public s’avère être lui, je ne vais pas m’en sortir.
Shanks le Roux.
Je ne l’ai pas revu depuis notre conversation sèche d’hier. Cependant, en déposant mes assiettes vides au rez-de-chaussée, j’ai eu l’occasion de l’entendre. Il semblait prendre un très bon temps en compagnie d’une serveuse. Ses rires et les gémissements de celle-ci m’ont suffi à le comprendre.
Autant dire qu’entre son irrespect, sa méchanceté à l’égard de Theodor et les cris si embarrassants qui me sont parvenus, je n’ai absolument aucune envie de le recroiser.
Mais bon, cela est sans compter sur sa fâcheuse tendance à contrecarrer mes plans.
— Tu comptes m’ignorer, Trésor ?
— J’ai envie d’être seule, laisse-moi, je réponds sèchement sans le regarder.
Un rire me parvient. Je lève les yeux au ciel. Quand il peut se moquer de moi, il ne rate jamais une occasion.
— Et moi je n’ai pas envie de laisser mon trésor toute seule.
— Pourquoi ? T’as tellement envie de me faire chier ? je lâche en me retournant.
Mon cœur rate un battement. Il est beaucoup plus près de moi que ce à quoi je m’attendais. A vrai dire, il est juste derrière moi.
Mes yeux tombent immédiatement sur sa chemise ouverte laissant voir ses pectoraux développés. Puis, timidement, je les relève jusqu’à son visage. Celui-ci est bien moins fermé qu’hier, lorsqu’il a rencontré Theodor.
Un léger rictus étire même ses lèvres.
— Surveilles ton vocabulaire, trésor, lâche-t-il d’un ton moqueur. Je pourrais te punir.
— Bah vas-y, punis-mo…
Ma phrase meurt dans ma gorge à la seconde où je réalise son double-sens. Aussitôt, mes yeux s’écarquillent tandis que, devant moi, Shanks semble encore plus amusé. Quelle enflure. A peine dix secondes qu’il est là et il a déjà trouvé le moyen de me mettre la honte.
Agacée et embarrassée, je lui montre brutalement le dos, regardant à nouveau ce chêne de malheur.
Il éclate de rire.
— Mais enfin, trésor, tu vas pas te fâcher pour si peu ?
— Ecoute, j’ai passé une mauvaise journée, j’ai pas en plus besoin que tu viennes me les briser, je tonne, ma langue claquant mon palais.
— Tu dis ça parce que tu ne sais toujours pas te téléporter ?
Je me raidis, sentant la honte me cuire d’autant plus. Bon sang Olympe et Edward ne savent pas se taire ?
— Les nouvelles vont vite, on dirait, je siffle d’un ton mauvais.
— Je m’inquiétais et je voulais savoir où tu étais.
— Toi ? T’inquiéter ? je raille.
Mes bras sont croisés sur ma poitrine et je continue de fixer le chêne. Pourtant, je sens bien son torse contre mes omoplates. A vrai dire, ils ne se touchent même pas, ne font que se frôler et cela créé une tension entre nous qu’il ressent autant que moi, j’en suis sûre.
Ma gorge est sèche. La chaleur a augmenté, depuis son arrivée.
— Evidemment, reprend-t-il. Nous sommes sur une île inconnue et tu es une femme, il pourrait t’arriver tellement de ch…
— Une femme ? Vraiment ? C’est pas ce que tu disais hier ! je m’exclame en évitant toujours soigneusement son regard. Comment tu disais déjà ? « Elle, c’est trésor, c’est pas une femme ! »
— Ça t’a vexée ? semble-t-il s’étonner.
— Non ! je crache avec hargne, exaspérée.
De l’air, vite. Il me faut poser le plus d’espace possible entre moi et cet abruti.
Décroisant mes bras, je ne perds pas une seule seconde. D’un pas sûr, je m’éloigne. La tête haute et le dos droit, je prête attention à me montrer aussi ferme que possible.
Mais je n’ai le temps d’avancer. Soudain, un bras solide s’enroule entour de ma taille avant de me ramener en arrière. En une seconde de temps, je me retrouve plaquée à un torse chaud et large, finement développé. Mes yeux s’écarquillent. Shanks. Je me suis collée à Shanks le Roux.
Son aura m’embaume autant que son parfum musqué. Mais celui-ci n’est rien en comparaison de la dense torpeur qui m’envahit quand je réalise que son visage se trouve dans le creux de mon épaule, sa bouche presque collée à mon cou.
Son souffle se presse sur ma chair.
— Trésor, je ne voulais pas te vexer, souffle-t-il.
Instinctivement, mes cuisses se resserrent et je me maudis d’avoir ce geste. Mais la proximité entre nous est trop grande. Mes omoplates épousent ses pectoraux, son bras musclé entoure mon corps, sa barbe caresse ma gorge.
Il susurre à mon oreille, me faisant frémir. J’en oublie nos différends.
— Tu es une Impératrice, une Voyageuse, littéralement un trésor et je refuse donc de te considérer de la sorte. Car même si ton valet est stupide, il n’a pas tort, tu es quasiment une divinité aux yeux de ton peuple et me permettre de faire des avances à ta personne serait déplacé.
Je frissonne, incapable de me contrôler. Mes paupières sont à moitié closes, ma tête légèrement renversée en arrière tandis que mon corps s’appuie entièrement contre le sien. Je ne suis plus capable de me porter, enivrée par son parfum, son aura et la sensation de son souffle sur mon cou.
— Je n’entendais pas par là que tu es moins désirables physiquement que les autres femmes, susurre-t-il dans une voix si douce qu’elle ressemble presque à un murmure.
Ma respiration se fait difficile. Et je manque de la perdre entièrement quand, soudain, sans crier gare, ses lèvres se pressent délicatement à ma gorge dans un baiser profondément doux, emprunt de désir mais aussi de retenu.
— A vrai dire, tu es même la plus désirable de toutes.
郷に入っては郷に従
2672 mots
désolée de publier si
tard
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