𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐗𝐗𝐕𝐈𝐈𝐈
— S A N S M A N I E R E S —
— JE VAIS OUVRIR !
Sieg est en train de se doucher et, vêtue de sa chemise blanche, je me lève du canapé pour répondre à la sonnette venant de retentir. Une fois à la porte, j’actionne la poignée et tombe nez-à-nez sur un visage qui me pousse à lever les yeux au ciel.
— Qu’est-ce que tu veux, Livai ?
— Je te signale que vous partez dans ma résidence secondaire en Argentine donc le mieux serait d’être plus sympa avec moi, me rétorque l’intéressé.
Levant les yeux au ciel, je recule de quelques pas pour le laisser entrer.
Cela fait une semaine à présent que cet abruti de Grisha Jäger et sa famille malsaine se sont pointés dans cet appartement pour nous effrayer. Et sa tentative de menace a effectivement eu pour effet de nous faire peur car, aussitôt après, mon petit-ami a décroché son téléphone et contacté Livai pour le convaincre de nous laisser habiter dans sa maison de vacances en Argentine.
Ce pays n’ayant pas d’accord d’extradition avec le nôtre.
— Vos valises sont prêtes ? demande-t-il.
— Tu le vois bien.
Je ne sais rien de ce que le noiraud connait de l’affaire. Peut-être pense-t-il que nous voulons refaire nos vies ? Ou peut-être Sieg s’est-il éternisé ?
— Salut, retentit d’ailleurs la voix de ce dernier depuis la porte.
Une serviette enroulée autour de la taille, il est quasiment dénudé. Des gouttes d’eau coulent le long de son torse, retraçant les formes de sa musculature. Franchissant le seuil, il m’approche pour poser un baiser contre mes lèvres avant de se tourner vers le noiraud.
Celui-ci remplit la bouilloire, visiblement déjà prêt à se faire du thé.
— Tu vas à la douche, ma belle ? demande Sieg. Notre vol est dans deux heures.
— Tout de suite, mon amour.
Filant, j’ignore volontairement la grimace du noiraud. Bien qu’il ait accepté de nous laisser sa villa dont il a hérité suite au décès de son oncle, il n’approuve pas pour autant notre façon de nous comporter l’un avec l’autre.
La première fois qu’il a tapé à notre porte, Sieg a ouvert, essoufflé et habillé d’un simple jogging. Quant à moi, juste derrière, je me suis habillée en toute hâte de son tee-shirt avant de débouler dans le salon au moment où mon petit-ami lui demandait de l’aide pour notre extradition. Je suis alors tombée sur un Livai, une tasse de thé à la main, qui a reposé celle-ci et refusé de la boire, étant — pour citer ses mots — « dégouté et horrifié ».
Lors de sa deuxième apparition, il a eu la prévenance de nous prévenir avant d’arriver. Mais, quand il nous a appris qu’il acceptait de nous prêter main forte et disposait d’une maison qu’il pouvait nous céder, ma joie a été telle que j’ai sauté au cou de Sieg, le serrant contre moi. Ce n’était qu’une étreinte mais le noiraud a froncé le nez de dégoût.
Alors, la troisième fois, quand il est venu avec quelques papiers à faire signer et les derniers préparatifs à boucler dans une mallette, je me suis préparée. Même si Livai est particulièrement agaçant et me tape sur le système, il est aussi plutôt gentil de nous prêter son bien. J’ai donc voulu faire un effort et ai conservé un mètre de distance entre moi et le blond tout au long de notre entrevue.
Seulement, quand Livai a voulu jeter son sachet de thé dans la poubelle, celle-ci s’est ouverte sur nos derniers déchets… Dont la dizaine de préservatifs usagés que nous avions jeté après une session particulièrement longue dans la cuisine.
Je n’oublierai jamais son visage lorsqu’il a compris qu’il était assis au comptoir où nous avions fait l’amour.
Tous ces rendez-vous m’ont permis de tirer une conclusion simple : tenter de le contenter ne sert à rien.
Alors j’envoie un bisou volant à mon copain tandis qu’il sourit.
— Tu es insupportable, cingle Livai avant de lever les yeux vers son ami. Et toi, tu l’encourage.
— J’ai toujours aimé son côté provocateur.
Fermant la porte menant au couloir, je fais un détour par la chambre pour ramasser les affaires pliées sur le lit et que j’avais préparé pour le voyage. Puis, je me réfugie dans la salle de bain large aux murs de carrelage blanc.
Une large baignoire au robinet d’or s’étend juste à côté d’une cabine de douche. Je n’ai jamais osé l’utiliser… Mais pour la toute dernière fois sans doute, je me lave ici. Je n’ai plus qu’à en profiter.
Retirant mes vêtements, j’ouvre l’eau chaude qui s’écoule dans un bruit continu. Puis, promenant mon regard autour de moi, je sourie en repérant un coffret de bois ouvragé posé sur un chariot orné d’orchidées.
— Merci, salope, je ris doucement.
Jamais je n’oublierai le jour où Nicole a accueilli le livreur, un sourire étincelant aux lèvres, en jubilant à l’idée de déballer son colis. Il s’agissait de cette boite. Sous mes yeux, elle l’a disposé sur le chariot argenté avant de poser un bouquet de fleurs à côté et de le faire rouler jusqu’à la salle de bain en me lançant ceci :
« Ces affaires de bains coûtent une fortune, t’avise même pas d’y toucher. C’est pour ma première fois avec Sieg. »
Si les paroles m’avaient dégoûtée, elles m’avaient aussi réconfortées. Car ce jour-là, même si elle était apparue, le matin suivant ses retrouvailles avec Sieg, vêtue d’une de ses chemises, elle m’avait appris que rien ne s’était passé entre eux.
Ouvrant le coffre, je siffle face à la multitude de bouteilles de verres rangés dans d’innombrables compartiments s’emboîtant entre eux.
Le temps d’un instant, constatant le fait qu’une centaine de fioles doivent se trouver là, j’hésite à refermer le coffre, dépassée par tous ces ingrédients et ne sachant quoi en faire. Mais, au même moment, j’aperçois une feuille pliée dans l’interstice d’un des compartiments. L’y extirpant, je la parcoure du regard.
« Ah ma fidèle cliente, Nicole.
Tout d’abord, permets-moi de te féliciter pour tes retrouvailles avec Sieg Jäger. Je n’oublierai jamais la joie qui a traversé ta voix au moment où tu m’as appris qu’il t’avait contactée.
Alors ne te décourage pas ! Même si tu as finalement appris qu’il ne voulait pas t’épouser mais te présenter cette allumeuse pour que tu l’embauche, il t’a tout de même réinvité dans sa vie ! »
C’est moi qu’elle traite d’allumeuse, la pouffiasse ?
« Ici se trouvera tout ce dont tu as besoin. Compartiment A-15, premier étage, se trouve un puissant somnifère pour calmer cette harpie. »
Curieuse, j’extirpe la fiole correspondante avant d’observer son contenu. Les quelques pétales violacés et leur cœur prune recroquevillés sur elles-mêmes sont reconnaissables. Il s’agit de passiflore. Un somnifère.
« Si elle persiste à tenter de séduire ce qui te revient de droit, la compartiment E-6 du troisième étage sera efficace. Utilise la racine. »
Je déglutis en voyant ce dernier mot. Ce n’est quand même pas ce que je crois ?
M’emparant de la fiole correspondante, je tressaille en remarquant l’amas de fleurs violettes enfoncées dans le minuscule bocal. Des aconits. Trois grammes de sa racine provoquent la mort dans l’heure qui suit.
— Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? je marmonne.
La lettre n’est même pas finie.
« Si Sieg n’y met pas du sien, une cousine de notre A-15 se trouve en A-14 et les B-13 et D-4 du même étage t’aideront. »
Extirpant les fioles, je découvre de la passiflore bleue, du gingembre ainsi que du ginseng.
Des plantes aphrodisiaques.
« Il est amateur de bain alors, lorsque vous concrétiserez la chose, n’hésite pas à remplir la baignoire de ceci : au premier étage, A-7, B-2, B-3, B-4, au deuxième étage, A-8, C-5, G-8… »
J’abandonne la lecture, constatant qu’il s’agit du dernier paragraphe et que cette lettre n’est même pas signée. Une bulle obstrue mon œsophage. Cette femme n’est pas qu’un cœur brisé et jaloux qui me perçoit comme une menace.
Non.
Mon regard se pose à nouveau sur la fiole contenant les pétales violettes d’aconits. Si Sieg ne m’avait pas fait l’amour si bruyamment, si Nicole n’avait pas décidé de quitter l’appartement à cause de cela, si j’étais simplement venu revivre ici, si je n’avais même jamais quitté cette maison, si je ne l’avais pas frappée…
M’aurait-elle empoisonné pour arriver à ses fins ?
Mon sang bouillonne dans mes veines et mes mains se crispent sur la lettre tapée à la machine à écrire. Ma mâchoire se contracte. Je ne suis même pas sous le choc, seulement profondément en colère contre cette harpie.
Elle prétend l’aimer mais était prête à abuser de lui. Elle promet être une bonne personne mais garde du poison létal m’étant destiné. Elle a explosé en sanglots telle une victime quand je l’ai frappée alors qu’elle serait sans doute devenue une violeuse et une tueuse, si on l’avait laissée sur cette voie.
Mes poings se ferment. Et si Sieg avait persisté à refuser, malgré les aphrodisiaques ? Qu’aurait-elle fait ? L’aurait-elle fait boire ? Est-ce à lui, qu’elle aurait administré le contenu du compartiment A-15 ?
Je bouillonne, furieuse. Mais, alors que ma colère m’embrase, une autre idée germe dans mon esprit. Et celle-ci m’apaise.
— Tu as préparé cette première fois avec tant d’attention, je souligne en relisant le dernier paragraphe. Ce serait un coup douloureux que ta pire ennemie profite de ces instructions ?
Coupant le robinet, j’attrape les différentes fioles. Bientôt, l’eau revêt une couleur irisée avant qu’un nuage rouge écarlate s’y mélange, créant une mare vermeille aux reflets d’or. J’y ajoute quelques fleurs séchées. Puis, des sels de bains donnent une odeur délicieuse au mélange et y dernière fiole créer une mousse disparate mais agréable en son sommet.
Chacune des fioles indiquées dans la lettre sont vides. Les rangeant soigneusement à leur place, je m’empare d’un stylo posé sur le lavabo — et dont Sieg se sert généralement pour faire des mots croisés pendant que je me lave, aimant discuter avec moi lors de cette partie de la matinée.
Retournant la lettre, j’inscris les mots : « merci pour les instructions, Nicole, il a beaucoup aimé <3 ».
Puis, la glissant dans le coffre que je referme, je repousse le chariot. Avant de partir, je confierai à Livai la tâche de le poster à l’intéressée.
Terminant le tout, j’allume quelques bougies et ferme les volets, profitant de l’ambiance tamisée. Puis, ouvrant la porte, je rejoins le salon en quelques pas. Livai s’y trouve, enfilant son manteau.
— Tu pars déjà ? je demande en fronçant les sourcils.
— J’ai oublié certains détails mais je reviens dans une demi-heure.
Acquiesçant, j’attends patiemment qu’il referme derrière lui avant de me tourner vers Sieg qui, sa serviette toujours enroulée autour de sa taille, se trouve devant le canapé. Il se tourne vers moi, me gratifiant d’un sourire attendri.
— Je vais m’habiller. Tu devrais te dépêcher de te laver avant qu’il ne revienne, lance-t-il.
— A vrai dire…, je lance en m’approchant de lui, j’avais d’autres projets pour la demi-heure à venir et je me demandais d’ailleurs comment j’allais virer Livai de l’appartement.
Il m’observe, ses pupilles s’élargissant tandis que j’empoigne sa serviette et l’a défait, dévoilant son pénis au repos. Doucement, il pose une main sur ma joue et presse ses lèvres contre les miennes. Je sourie dans ce baiser simple, savourant sa tendresse. Puis, quand nous nous séparons, je recule de quelques pas et m’en vais dans le couloir.
Sa voix résonne dans mon dos.
— Je rêve où tu viens de me déshabiller pour mieux me laisser en plan ?
Sans même me retourner, je défais la ceinture de mon peignoir de soie. Le tissu glisse le long de mes bras avant de s’écraser au sol sans que je ne cesse de marcher, dévoilant mon corps dénudé. Son regard sur moi est brûlant. Je le sens glisser jusqu’à mes fesses au moment où j’entre dans la salle de bain.
Quelques instants à peine après, dans le miroir, je le vois apparaitre derrière moi. Puis, son torse se presse à mon dos et son érection s’enfonce dans ma chair, déjà dure. Echangeant un regard avec moi grâce au miroir, il empoigne ensuite fermement ma mâchoire et me tourne vers lui.
Nos nez se frôlent, il louche sur mes lèvres.
— J’espère de tout cœur que Livai va avoir du retard.
2074 mots
hehe petit moment caliente
qui commence
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